S. f. (Jurisprudence) est l'instruction judiciaire d'un procès, soit civil ou criminel.

On comprend conséquemment sous ce terme tous les actes qui se font, soit par le ministère d'un huissier, ou par celui d'un procureur, tant pour introduire la demande, que pour établir le pouvoir du procureur, les qualités des parties pour la communication respective des titres, pièces, et procédures ; enfin, pour l'établissement des moyens, et pour parvenir à un jugement, soit définitif, ou du-moins préparatoire, ou interlocutoire.

Ainsi les exploits de demande ou ajournement, les cédules de présentation, les actes d'occuper, les exceptions, défenses, repliques, sommations de procureur à procureur, et autres actes semblables, sont des procédures.

Les jugements par défaut, ne sont même quelquefois considérés que comme de simples procédures, lorsqu'ils sont susceptibles de l'opposition, à cause qu'ils peuvent être détruits par cette voie.

La matière du procès, et les moyens qui établissent le droit des parties, sont ce que l'on appelle le fond ; au lieu que la procédure s'appelle la forme, et comme il est essentiel de bien instruire un procès, parce que la négligence d'une partie, ou de ceux qui instrumentent pour elle, et les vices qui se glissent dans la procédure, peuvent opérer la déchéance de l'action ; c'est ce qui fait dire que la forme emporte le fond.

La procédure a été introduite pour l'instruction respective des parties litigantes, et aussi pour instruire régulièrement les juges de ce qui fait l'objet du procès.

Il n'y a pourtant pas eu toujours autant de procédures en usage, qu'il y en a présentement.

Chez les anciens la forme de l'administration de la justice était beaucoup plus simple ; mais si la procédure ou instruction était moins dispendieuse et l'expédition de la justice plus prompte, elle n'en était pas toujours plus parfaite ; le bon droit était souvent étouffé, parce qu'il n'y avait point de règles certaines pour le faire connaître, et que l'expédition dépendait du caprice des juges.

C'est pour remédier à ces inconvéniens, que les procédures ont été inventées.

En effet, il n'y a aucun acte dans l'ordre de la procédure, qui n'ait son objet particulier, et qui ne puisse être nécessaire, soit pour donner à une partie le temps de se défendre, soit pour faire renvoyer l'affaire devant les juges qui en doivent connaître, soit pour procurer aux parties les éclaircissements dont elles ont besoin, soit pour instruire la religion des juges ; et si l'on voit souvent des procédures inutiles et abusives, c'est un vice qui ne vient pas de la forme que l'on a établie, mais plutôt de l'impéritie ou de la mauvaise foi de quelques parties ou praticiens qui abusent de la forme, pour empêcher le cours de la justice.

On ne peut douter qu'il y avait des formes judiciaires établies chez les Grecs, puisque l'on en trouve chez les Romains dans la loi des douze tables, dont les dispositions furent empruntées des Grecs.

Ces formes étaient des plus singulières, par exemple, la première que l'on observait avant de commencer les procédures civiles, était que les parties comparaissaient devant le préteur ; là, dans la posture de deux personnes qui se battent, elles croisaient deux baguettes qu'elles tenaient entre les mains : c'était-là le signal des procédures qui devaient suivre. Ce qui a fait penser à Hotman, que les premiers Romains vuidaient leurs procès à la pointe de l'épée.

Indépendamment de ce qui était porté par la loi des douze tables pour la manière d'intenter les procédures civiles ou criminelles, on introduisit beaucoup d'autres formules, appelées legis actiones, qui étaient la même chose que ce que la procédure et le style sont parmi nous. On était obligé d'observer les termes de ces formules avec tant de rigueur, que l'omission d'un seul de ces termes essentiels, faisait perdre la cause à celui qui l'avait omis.

Ces anciennes formules furent la plupart abrogées par Théodose le jeune ; cependant plusieurs auteurs se sont empressés d'en rassembler les fragments ; le recueil le plus complet est celui que le président Brisson en a donné sous le titre de formulis et solennibus populi romani verbis. Ces formules regardent non-seulement les actes et la procédure, mais aussi la religion et l'art militaire.

A mesure que les anciennes formules tombèrent en non-usage, on en introduisit de nouvelles plus simples et plus claires ; il y avait des appariteurs qui faisaient les actes que font aujourd'hui les sergens et huissiers, des procureurs ad lites, que l'on appelait cognitores juris, et des avocats. Ainsi l'on ne peut douter qu'il y eut toujours chez les Romains des formes judiciaires pour procéder en justice.

La procédure usitée chez les Romains dut probablement être pratiquée dans les Gaules, lorsqu'ils en eurent fait la conquête, Ve que tous les officiers publics étaient romains, et que les Gaulois s'accoutumèrent d'eux-mêmes à suivre les mœurs des vainqueurs.

Lorsque les Francs eurent à leur tour conquis les Gaules sur les Romains, il se fit un mélange de la pratique romaine avec celle des Francs. C'est ainsi qu'au lieu des preuves juridiques, on introduisit en France l'épreuve du duel, coutume barbare qui venait du Nord.

Dans ces premiers temps de la monarchie, la justice se rendait militairement ; il y avait pourtant quelques formes pour l'instruction, mais elles étaient fort simples, et en même temps fort grossières. Il y avait des avocats et des sergens, mais on ne se servait point du ministère des procureurs ad lites ; il était même défendu de plaider par procureur ; les parties étaient obligées de comparaitre en personne.

Ce ne fut que du temps de saint Louis, que l'on commença à permettre aux parties de plaider par procureur en certains cas, en obtenant à cet effet des lettres du prince.

Ces permissions devinrent peu-à-peu plus fréquentes, jusqu'à-ce qu'enfin il fut permis à chacun de plaider par procureur, et que l'on établit des procureurs en titre.

Depuis qu'il y eut des procureurs ad lites, les procédures furent beaucoup multipliées, parce que l'instruction se fit plus régulièrement.

La plus ancienne ordonnance que nous ayons, où l'on trouve quelques règles prescrites pour l'ordre de la procédure, ce sont les établissements faits par saint Louis en 1270.

Les principales ordonnances qui ont été faites depuis sur le même objet, sont celles de 1493, de 1535, de 1536, 1539, 1560, 1563, 1566, 1579, 1629, et les ordonnances de 1667, 1669, 1670, 1673, et celle des évocations et du faux, l'une et l'autre de 1737.

Les traités de procédure ne sont point à négliger, puisque la procédure fait aujourd'hui un point capital dans l'administration de la justice. On trouve dans les anciens praticiens divers usages curieux, et l'on y voit l'origine et les progrès de ceux que l'on observe présentement. On peut voir sur cette matière le style du parlement, Imbert, Papon, Ayrault, Masuer, Gastier, Lange, Gauret, Ferrières, etc.

Nous n'entreprendrons pas de tracer ici les règles propres à chaque espèce de procédure ; on en trouvera les notions principales sous chaque terme auquel elles appartiennent, tels que AJOURNEMENT, ASSIGNATION, ARRET, DEFENSES, DUPLIQUES, ENQUETES, EXCEPTION, EXPLOIT, PROCES-VERBAL, OPPOSITION, REQUETE, REPLIQUE, SIGNIFICATION, SENTENCE, SOMMATION. (A)

PROCEDURE CIVILE, est celle qui tend à fin civile, c'est-à-dire, qui ne tend qu'à faire régler quelque objet civil, comme le payement d'un billet, le partage d'une succession, à la différence de la procédure criminelle, qui a pour objet la réparation de quelque délit.

On peut néanmoins pour raison d'un délit, prendre seulement la voie civile, au lieu de la voie criminelle.

Toute procédure civîle commence par un explait d'assignation ou par une requête, à fin de permission d'assigner ou de saisir, ou de faire quelque autre chose.

La procédure civîle renferme divers actes, tels que les exploits de demande, de saisie, et autres, les requêtes, les exceptions, défenses, moyens de nullité, répliques, sommations, les inventaires de production, les avertissements, contredits de production ; les productions nouvelles, contredits, salvations, actes d'appel, griefs, causes et moyens d'appel, réponses, et autres écritures, tant du ministère d'avocat, que de celui des procureurs ; les significations des jugements, les actes d'opposition, d'appel et de reprise, les interventions, demandes en garantie, etc.

Les règles de la procédure civîle sont répandues dans plusieurs anciennes ordonnances, et ont été résumées et réformées par l'ordonnance de 1667.

PROCEDURE CIVILISEE, est celle qui étant d'abord dirigée au criminel, a été depuis convertie en procès civil ; ce qui arrive lorsque les informations ont été converties en enquêtes, et les parties reçues en procès ordinaires ; mais la procédure n'est pas civilisée, lorsque les parties sont seulement renvoyées à l'audience.

PROCEDURE CRIMINELLE, est celle qui a pour objet la réparation de quelque délit ; elle commence par une dénonciation ou par une plainte. Lorsque l'objet parait mériter une procédure criminelle, le juge permet d'informer, et sur le Ve des charges, il decrete l'accusé, soit de prise de corps, soit d'ajournement personnel, ou d'assigné pour être ouï ; ou bien il renvoye à l'audience, selon que le cas le requiert ; quelquefois après l'interrogatoire de l'accusé, le juge ordonne que le procès se poursuivra par récolement et confrontation ; sur quoi il intervient un jugement définitif, qui absout ou qui condamne l'accusé. Après la condamnation, le criminel obtient quelquefois des lettres de grâce ; en ce cas, il faut les faire entériner : tel est en petit le tableau d'une procédure criminelle.

Les règles de cette procédure sont fixées par l'ordonnance de 1670 ; on en trouvera ici les principales notions aux mots PLAINTE, DENONCIATION, AJOURNEMENT PERSONNEL, DECRET, INFORMATION, RECOLEMENT, CONFRONTATION, etc.

PROCEDURE EN ETAT, c'est lorsqu'une partie a satisfait de sa part à ce qu'elle était obligée de faire ; par exemple, à l'égard du défendeur lorsqu'il a fourni des défenses. C'est la même chose que quand on dit que le procès est en état ; ceci signifiant que le procès est instruit de la part d'une partie, ou même de la part des deux parties, et qu'il est en état de recevoir sa décision.

PROCEDURE EXTRAORDINAIRE, est celle qui se fait en matière criminelle lorsque le procès est réglé à l'extraordinaire, c'est-à-dire, lorsque le juge a ordonné que les témoins seront récollés et confrontés.

PROCEDURE FRUSTRATOIRE, est celle qui est inutîle et sans aucun autre objet que de multiplier les frais.

PROCEDURE NULLE, est celle qui est vicieuse dans sa forme, et qui ne peut produire aucun effet ; cependant une procédure n'est pas nulle de plein droit ; il faut qu'elle ait été déclarée telle.

PROCEDURE PERIE, est celle qui est tombée en péremption par une discontinuation de poursuites pendant trois ans. Voyez PEREMPTION.

PROCEDURE RECRIMINATOIRE, en matière criminelle, que le premier accusé fait contre l'accusateur lorsqu'il rend plainte contre lui ; en ce cas, on commence par juger lequel des deux plaignans demeurera accusé ou accusateur ; ordinairement c'est le premier plaignant. Cela peut néanmoins arriver autrement par quelques circonstances, comme quand on voit que la première plainte n'a été rendue que pour prévenir celui qui avait véritablement sujet de rendre plainte. Voyez PLAINTE et RECRIMINATION. (A)