(Jurisprudence) signifie quelquefois réserve, comme quand quelqu'un donne tous ses biens à l'exception d'une maison ou autre effet qu'il se réserve. Celui qui dit tout purement et simplement n'excepte rien. (A)

Exception, est aussi quelquefois une dérogeance à la règle en faveur de quelques personnes dans certains cas : on dit communément qu'il n'y a point de règle sans exception, parce qu'il n'y a point de règle, si étroite soit elle, dont quelqu'un ne puisse être exempté dans des circonstances particulières ; c'est aussi une maxime en Droit, que exceptio firmat regulam, c'est-à-dire qu'en exemptant de la règle celui qui est dans le cas de l'exception, c'est tacitement prescrire l'observation de la règle pour ceux qui ne sont pas dans un cas semblable. (A)

Exception, signifie aussi moyen et défense : on comprend sous ce terme toutes sortes de défenses. Il y a des exceptions proprement dites, telles que les exceptions dilatoires et déclinatoires qui ne touchent point le fond, et d'autres exceptions péremptoires qui sont la même chose que les défenses au fond. (A)

EXCEPTION D'ARGENT NON COMPTE, non numeratae pecuniae, est la défense de celui qui a reconnu avoir reçu une somme, quoiqu'il ne l'ait pas réellement reçue.

Suivant l'ancien droit romain, cette exception pouvait être proposée pendant cinq ans ; par le droit nouveau ce délai est reduit à deux ans, à l'égard des reconnaissances pour prêt, vente, ou autre cause semblable ; mais la loi ne donne que trente jours au débiteur, pour se plaindre du défaut de numération des espèces dont il a donné quittance.

Comme dans le cas d'une reconnaissance surprise sans numération d'espèces, il pourrait arriver que le créancier laissât passer les deux ans de peur qu'on ne lui opposât le défaut de numération, la loi permet au débiteur de proposer cette exception par forme de plainte, de la retention injuste faite par le créancier d'une obligation sans cause.

Cette exception était autrefois reçue dans toute la France, suivant le témoignage de Rebuffe.

Présentement elle n'est reçue dans aucun parlement du royaume contre les actes authentiques, lorsqu'ils portent qu'il y a eu numération d'espèces en présence des notaires, le débiteur n'a dans ce cas que la voie d'inscription de faux.

A l'égard des actes qui ne font point mention de la numération en présence des notaires, l'usage n'est pas uniforme dans tous les parlements.

L'exception est encore reçue en ce cas dans tous les parlements de droit écrit, mais elle s'y pratique diversement.

Au parlement de Toulouse elle est reçue pendant dix ans : mais si elle est proposée dans les deux ans, c'est au créancier à prouver le payement, au lieu que si elle n'est proposée qu'après les deux ans ; c'est au débiteur à prouver qu'il n'a rien reçu.

Au parlement de Grenoble, c'est toujours au débiteur à prouver le défaut de numération.

Dans celui de Bordeaux elle est reçue pendant 30 ans, mais il faut que la preuve soit par écrit ; et l'exception n'est pas admise contre les contrats qui portent numération réelle.

La coutume de Bretagne, art. 280, accorde une action pendant deux ans à celui qui a reconnu avoir reçu, lorsque la numération n'a pas été faite.

On tient pour maxime, en général, que l'exception d'argent non compté n'est pas reçue au parlement de Paris, même dans les pays de droit écrit de son ressort, ce qui reçoit néanmoins quelque explication.

Il y a d'abord quelques coutumes dans le ressort de ce parlement, qui admettent formellement l'exception dont il s'agit, même contre une obligation ou reconnaissance authentique, mais c'est au débiteur à prouver le défaut de numération ; telles sont les coutumes d'Auvergne, ch. XVIIIe art. 4. et 5 la Marche, art. 99.

Dans les autres lieux du ressort de ce même parlement, où il n'y a point de loi qui admette l'exception, elle ne laisse pas d'être aussi admise, mais avec plusieurs restrictions ; savoir, que c'est toujours au débiteur à prouver le défaut de numération, quand même il serait encore dans les deux années ; il faut aussi qu'il obtienne des lettres de rescision contre sa reconnaissance dans les dix ans à compter du jour de l'acte ; et suivant l'ordonnance de Moulins et celle de 1667, il ne peut être admis à prouver par témoins, le défaut de numération d'espèces, contre une reconnaissance par écrit, encore qu'il fût question d'une somme moindre de 100 livres, à moins qu'il n'y ait déjà un commencement de preuve par écrit ; et si c'est un acte authentique qui fasse mention de la numération d'espèces à la vue des notaires, il n'y a en ce cas, comme on l'a déjà dit, que la voie d'inscription de faux. (A)

EXCEPTION CIVILE, suivant le droit romain, était celle qui dérivait du droit civil, c'est-à-dire de la loi, telles que les exceptions de la falcidie, de la trébellianique, de discussion et de division, à la différence des exceptions prétoriennes qui n'étaient fondées que sur les édits du préteur, telles que les exceptions de dol, quod vi, quod metus causâ vel jurisjurandi. (A)

EXCEPTION DECLINATOIRE, est celle par laquelle le défendeur, avant de proposer ses moyens au fond, décline la juridiction du juge devant lequel il est assigné, et demande son renvoi devant son juge naturel, ou devant le juge de son privilège, ou autre juge qui doit connaître de l'affaire par préférence à tous autres.

Les exceptions déclinatoires doivent être proposées avant contestation en cause ; autrement on est reputé avoir procédé volontairement devant le juge, et on n'est plus recevable à décliner. Voyez DECLINATOIRE et RETENTION. (A)

EXCEPTION DE LA CHOSE JUGEE, exceptio rei judicatae, c'est la défense que l'on tire de quelque jugement. Voyez CHOSE JUGEE. (A)

EXCEPTION DILATOIRE, est celle qui ne touche pas le fond ; mais tend seulement à obtenir quelque délai. Par exemple, celui qui est assigné comme héritier, peut demander un délai pour délibérer s'il n'a pas encore pris qualité.

De même celui auquel on demande le payement d'une dette avant l'échéance, peut opposer que l'action est prématurée.

Ces sortes d'exceptions sont purement dilatoires, c'est-à-dire qu'elles ne détruisent pas la demande ; mais il y en a qui peuvent devenir péremptoires, telle que l'exception par laquelle la caution demande la discussion préalable du principal obligé ; car si par l'évenement le principal obligé se trouve solvable, la caution demeure déchargée.

Celui qui a plusieurs exceptions dilatoires les doit proposer toutes par un même acte, excepté néanmoins la veuve et les héritiers d'un défunt, qui ne sont tenus de proposer leurs autres exceptions qu'après que le délai pour délibérer est expiré. Voyez l'ordonnance de 1667, tit. Ve art. 6. et titre VIe et IXe (A)

EXCEPTION DE DISCUSSION ET DE DIVISION, sont celles par lesquelles un obligé reclame le bénéfice de discussion ou celui de division. Voyez DISCUSSION et DIVISION. (A)

EXCEPTION DE DOL exceptio doli mali, est la défense de celui qui oppose qu'on l'a trompé. Cette exception est perpétuelle, suivant le droit romain, quoique l'action de dol soit sujette à prescription. (A)

EXCEPTION de dote cautâ non numeratâ, est une espèce particulière d'exception d'argent non nombré, qui est propre pour la dot lorsque le mari en a donné quittance comme s'il l'avait reçue, quoiqu'il n'y ait pas eu de numération réelle de deniers.

La novelle 100 donne dix ans au mari pour proposer cette exception. Voyez DOT. (A)

EXCEPTION NEGATOIRE, est la défense qui consiste seulement dans la dénégation de quelque point de fait ou de droit. Voyez DENEGATION. (A)

EXCEPTION PEREMPTOIRE, est celle qui détruit l'action ; on l'appelle aussi défense ou moyen au fond ; tel est le payement de la dette qui est demandée, tels sont aussi les moyens résultants d'une transaction, d'une rénonciation ou d'une prescription, par vertu de laquelle le défendeur doit être déchargé de la demande.

Les exceptions péremptoires peuvent être proposées en tout état de cause. (A)

EXCEPTION PERPETUELLE ; on appelle quelquefois ainsi l'exception péremptoire, parce qu'elle tend à libérer pour toujours le débiteur ; à la différence de l'exception dilatoire, qui ne fait qu'éloigner pour un temps le jugement de la demande.

On peut aussi entendre par exception perpétuelle, celle qui peut être proposée en tout temps, comme sont la plupart des exceptions, lesquelles sont perpétuelles de leur nature, suivant la maxime temporalia ad agendum perpetua sunt ad excipiendum. Les exceptions perpétuelles prises en ce sens, sont opposées à celles qui ne peuvent être opposées après un certain temps, telles que sont toutes les exceptions dilatoires, l'exception d'argent non compté, et celle de la dot non payée. (A)

EXCEPTION PERSONNELLE, est celle qui est accordée à quelqu'un en vertu d'un titre ou de quelque considération qui lui sont personnels ; par exemple, si on a accordé une remise personnelle à un de plusieurs obligés solidairement, cette grâce dont il peut seul exciper ne s'étend point aux autres co-obligés, lesquels peuvent être poursuivis chacun solidairement. Voyez ci-après EXCEPTION REELLE. (A)

EXCEPTION PRETORIENNE. Voyez ci-devant EXCEPTION CIVILE. (A)

EXCEPTION REELLE, est celle qui se tire ex visceribus rei, et qui est inhérente à la chose, telle que l'exception de dol, l'exception de la chose jugée, et plusieurs autres semblables : ces sortes d'exceptions peuvent être opposées par tous ceux qui ont intérêt à la chose, soit co-obligés ou cautions ; ainsi lorsqu'un des coobligés a transigé avec le créancier, les autres coobligés peuvent exciper contre lui de la transaction, quoiqu'ils n'y aient pas été parties. (A)

EXCEPTION TEMPORAIRE, ou comme quelques-uns l'appellent improprement, exception temporelle, est celle dont l'effet ne dure qu'un temps, telles que les exceptions dilatoires, ou qui ne peut être proposée que pendant un certain temps, comme l'exception d'argent non compté.

Sur les exceptions en général, voyez au digeste, au code et aux institut. les titres de exceptionibus ; l'ordonnance de 1667, tit. IXe Dumolin, style du parlement, chapit. XIIIe Le Bret, de l'ancien ordre des jugements, ch. lxxxij. Henris, tom. II. liv. IV. quest. 68. (A)