S. m. (Grammaire, Economie rustique) la peau de la brebis chargée de sa laine, et plus souvent la laine séparée de la peau.

TOISON D'OR, (Mythologie) les enfants savent la fable de la conquête de la taison d'or, qui donna lieu au voyage des Argonautes, mais les gens de lettres en cherchent encore l'explication.

Diodore de Sicîle croyait que c'était la peau d'un mouton que Phryxus avait immolé, et qu'on gardait très-soigneusement à cause qu'un oracle avait prédit que le roi serait tué par celui qui l'enleverait.

Strabon et Justin pensaient que la fable de cette taison était fondée sur ce qu'il y avait dans la Colchide des torrents qui roulaient sur un sable d'or qu'on ramassait avec des peaux de mouton, ce qui se pratique encore aujourd'hui vers le fort Louis, où la poudre d'or se recueille avec de semblables taisons, lesquelles quand elles en sont bien remplies, peuvent être regardées comme des taisons d'or.

Varron et Pline prétendent que cette fable tire son origine des belles laines de ce pays, et que le voyage qu'avaient fait quelques marchands grecs pour en aller acheter, avait donné lieu à la fiction.

Ajoutez que comme les Colcques faisaient un grand commerce de peaux de marte et d'autres pelleteries précieuses ; ce fut peut-être là le motif du voyage des Argonautes.

Paléphate a imaginé, on ne sait sur quel fondement, que sous l'emblème de la taison d'or, on avait voulu parler d'une belle statue d'or que la mère de Pélops avait fait faire, et que Phryxus avait emportée avec lui dans la Colchide.

Enfin Suidas le lexicographe a songé que cette taison était un livre en parchemin qui contenait le secret de faire de l'or, objet de la cupidité non-seulement des Grecs, mais de toute la terre ; et cette opinion que Tollius a voulu faire revivre, est embrassée par les alchymistes.

Mais Bochart qui connaissait le génie des langues de l'Orient, a cru trouver dans celle des Phéniciens le dénouement de la plupart de ces fictions ; et comme il nous semble que personne n'a mieux réussi que lui dans l'explication de cette fable, ce sont des idées conjecturales que l'on Ve proposer.

Médée que Jason avait promis d'épouser et d'emmener dans la Grèce, sollicitée encore par Calciope sa sœur, veuve de Phryxus, qui voyait ses enfants en proie à l'avarice d'un roi cruel, aida son amant à voler les trésors de son père, soit en lui donnant une fausse clé ou de quelqu'autre manière, et s'embarqua avec lui. Cette histoire était écrite en phénicien, que les poètes qui sont venus longtemps après, n'entendaient que très-imparfaitement ; et les mots équivoques de cette langue donnèrent lieu aux fables qu'on en a racontées. En effet, dans cette langue le mot syrien gaza signifie également un trésor ou une taison ; sam qui veut dire une muraille, désigne aussi un taureau ; et on exprime dans cette langue de l'airain, du fer et un dragon par le mot nachas ; ainsi au lieu de dire que Jason avait enlevé un trésor que le roi de la Colchide tenait dans un lieu bien fermé, et qu'il faisait garder soigneusement, on a dit que pour enlever une taison d'or, il avait fallu dompter des taureaux, tuer un dragon, etc.

L'amour de Médée pour Jason, ce grand ressort qu'Aelien croit avoir été inventé par Euripide dans sa tragédie de Médée faite à la prière des Corinthiens n'a rien d'extraordinaire ; et cette princesse qui abandonna son père et sa patrie pour suivre Jason, montre assez par sa conduite qu'elle en était amoureuse, sans qu'il soit besoin de faire intervenir Junon et Minerve dans cette intrigue qui fut l'ouvrage de Calciope. Cette femme pour venger la mort de son mari, et sauver ses enfants qu'Aètès avait résolu de faire mourir à leur retour de la guerre où il les avait envoyés, favorisa de tout son pouvoir la passion que sa sœur avait conçue pour Jason. On peut ajouter que les quatre jeunes princes que Jason avait ramenés, et qui se voyaient exposés à la fureur de leur grand-pere, si les Grecs étaient vaincus, les secoururent de tout leur pouvoir.

Le même Bochart explique assez heureusement la circonstance de ces hommes armés qui sortirent de terre et s'entretuèrent. Il devait y avoir, selon lui, dans cette histoire une phrase composée à-peu-près des mots qui signifient : Jason assembla une armée de soldats armés de picques d'airain prêts à combattre, qu'on expliqua ainsi à l'aide des mots équivoques : il vit naître des dents de serpent une armée de soldats armés cinq à cinq, qui était la manière ancienne, surtout chez les Egyptiens, de ranger et de faire marcher les troupes.

Il est permis de conjecturer que Jason, outre ses compagnons, avait pris dans le pays quelques troupes auxiliaires, qu'on publia être sorties de terre, parce qu'elles étaient sujettes du roi de Colchide, et elles périrent toutes dans le combat qui fut donné, apparemment entre les Grecs et les Colcques ; car tout ce mystère poétique peut s'entendre d'un combat qui rendit les Grecs victorieux et maîtres de la personne et des trésors d'Aètès. Cette explication semble préférable à celle de Diodore de Sicile, qui dit que le gardien de la taison d'or se nommait Draco, et que les troupes qui le servaient, étaient venues de la Chersonese taurique, ce qui avait donné lieu aux fables qu'on avait débitées. (D.J.)

TOISON, ordre de la, (Histoire des ordres) ordre que confère le roi d'Espagne comme duc de Bourgogne. Ce fut en 1430 que Philippe le bon, duc de Bourgogne, après avoir épousé à Bruges en troisiemes noces Elisabeth de Portugal, institua l'ordre de la taison en l'honneur d'une de ses maîtresses. Il eut quinze bâtards qui eurent tous du mérite. L'amour des femmes, dit M. de Voltaire, ne doit passer pour un vice que quand il détourne les hommes de remplir leurs devoirs, et qu'il conduit à des actions blâmables. Anvers, Bruges et autres villes appartenantes à Philippe le bon, faisaient un grand commerce, et répandaient l'abondance dans ses états. La France dut à ce prince sa paix et sa grandeur.

Louis XI. qui ne lui ressembla point, eut d'abord intention de se rendre chef de l'ordre de la taison, et de le conférer à la mort de Charles le téméraire, comme étant aux droits de la maison de Bourgogne ; mais ensuite il le dédaigna, dit Brantôme, et ne crut pas qu'il lui convint de se rendre chef de l'ordre de son vassal. Cet ordre a cependant continué de se soutenir jusqu'à ce jour, et se serait soutenu bien davantage, si le nombre des chevaliers était borné comme au commencement à trente et un. Quoiqu'il en sait, il a fourni la matière de trois volumes in-fol. publiés en 1756 par Julien de Pinedo y Salazar. (D.J.)