S. f. en Droit, se dit en général de tout acte par lequel quelqu'un, propriétaire d'un effet ou d'un droit, le transporte à un autre. Dans l'usage ordinaire il signifie la même chose que transport. Voyez TRANSPORT.

Pour les autres manières de transporter à quelqu'un la propriété d'un bien, d'un effet, ou d'un droit, voyez VENTE, ECHANGE, DONATION, LEGS, SUBROGATION, etc.

CESSION, dans un sens plus particulier, est un abandonnement qu'on fait de tous ses biens en justice à ses créanciers pour éviter la contrainte par corps.

Le débiteur ne peut être admis au bénéfice de cession, qu'en vertu de lettres du Prince, entérinées en justice contradictoirement avec les créanciers ; et pour l'obtenir, il faut qu'il ne lui reste aucune ressource pour payer, et qu'on ne puisse pas lui reprocher de friponnerie ou de fraude.

La cession emporte note d'infamie, et obligeait à porter un bonnet verd en tout temps, faute de quoi, le débiteur pris sans son bonnet, pouvait être constitué prisonnier. Ce bonnet était un emblème qui signifiait que celui qui avait fait cession de biens était devenu pauvre par sa folie : cet usage ne s'observe plus. Voyez BONNET.

Il faut seulement afin que la cession soit notoire, si c'est un marchand qui est cessionnaire, qu'elle soit publiée à la juridiction consulaire ou à l'hôtel de ville, s'il n'y a pas de juges-consuls dans le lieu de son domicile, et insérée dans un tableau public. Quelques coutumes même veulent qu'elle soit publiée dans la paraisse du cessionnaire.

A Lucque, c'est un bonnet jaune qu'on porte après avoir fait cession, au lieu d'un verd.

Les jurisconsultes italiens nous ont conservé une manière de faire cession, instituée par César, qui consistait à se frapper trois fois le dernière à cul nud en présence du juge sur une pierre qu'on appelait lapis vituperii ; parce qu'après cette cérémonie, le cessionnaire était intestable et incapable de rendre témoignage.

Autrefois on faisait quitter en justice la ceinture et les clés à ceux qui faisaient cession ; les anciens ayant coutume de porter à leur ceinture les principaux instruments avec lesquels ils gagnaient leur vie : comme un homme de plume, son écritoire ; un marchand, son escarcelle, etc. Voyez BANQUEROUTIER et CEINTURE.

Voici encore une manière dont se faisait la cession chez les Romains et les anciens Gaulois : celui qui faisait cession, ramassait dans sa main gauche de la poussière des quatre coins de sa maison ; après quoi, se plantant sur le seuil de la porte, dont il tenait le poteau de la main droite, il jetait la poussière qu'il avait ramassée par-dessus ses épaules ; puis se dépouillant nud en chemise, et ayant quitté sa ceinture et ses houseaux, il sautait avec un bâton par-dessus une haie, donnant à entendre par-là à tous les assistants, qu'il n'avait plus rien au monde, et que quand il sautait, tout son bien était en l'air. Voilà comment se faisait la cession en matière criminelle : mais en matière civile, celui qui faisait cession, mettait seulement une houssine d'aune, ou bien un fétu, ou une paille rompue sur le seuil de sa porte, pour marque qu'il abandonnait ses biens. Cette cession s'appelait chrenecruda per durpillum et festucam, cession par le seuil et par le fétu. Voyez INVESTITURE.

Il y a plusieurs dettes pour lesquelles on ne peut pas être reçu à faire cession de biens ; telles sont celles qui ont pour cause un dépôt de deniers, soit publics ou particuliers, et généralement toutes celles qui sont accompagnées de dol et de perfidie de la part du débiteur. On exclud aussi du bénéfice de cession celui qui est condamné en une amende, ou des dommages et intérêts pour crime de délit ; les marchands qui achetent en gros pour vendre en détail ; les étrangers, les maîtres pour les salaires de leurs serviteurs, les proxenetes, les stellionataires, les débiteurs de fermages ou de deniers royaux, et plusieurs autres ; en sorte que le bénéfice de cession est devenu presque inutîle depuis l'ordonnance qui a déchargé des contraintes par corps.

La cession de biens ne libère pas le débiteur ; de sorte que s'il acquiert de nouveaux biens, ses créanciers les peuvent faire saisir pour être payés ; seulement ils sont obligés de lui laisser de quoi vivre. (H)

CESSION, (en Droit canon) est la vacance d'un bénéfice provenant d'une sorte de résignation tacite, et qui se présume lorsque le bénéficier fait quelque action ou entreprend quelque charge incompatible avec le bénéfice dont il était pourvu, et cela sans dispense.

La vacance d'un bénéfice par l'élévation du bénéficier à l'épiscopat, au lieu de s'appeler cession, s'appelle création : ainsi dans ce cas, on dit que tel bénéfice est vacant par création. Voyez CREATION. (H)

CESSION, terme de Libraire : Quand un Libraire ou tout autre particulier a obtenu le privilège du Roi pour l'impression d'un ouvrage, il peut transporter ses droits en tout ou en partie sur ce privilège, et ce transport s'appelle cession. Une cession pour avoir la même authenticité qu'un privilège, doit suivre les mêmes lais, et être enregistrée à la chambre royale et syndicale des Libraires.

Le droit que l'on acquiert par une telle cession est absolument le même que celui donné par le privilège, et par lui-même être transporté et soudivisé à l'infini.

Il est de loi ou d'usage que les cessions soient imprimées dans les livres à la suite du privilège.