S. m. (Histoire naturelle, Drogues) en latin thus masculum, olibanum off. , Théophr. et Diosc. , Hippoc. substance résineuse, d'un jaune-pâle ou transparent, en larmes semblables à celles du mastic, mais plus grosses. Voici ce qu'en dit M. Geoffroy, qui en a parlé avec le plus de briéveté et de vérité.

L'encens est sec et dur, d'un goût un peu amer, modérément acre et résineux, non desagréable, et d'une odeur pénétrante. Lorsqu'on le jette sur le feu, il devient aussi-tôt ardent, et répand une flamme vive qui a peine à s'éteindre : il ne coule pas comme le mastic. Si on le met sous les dents, il se brise aussitôt en petits morceaux ; mais il ne se réunit point comme le mastic, et on ne peut pas le rouler comme lui dans la bouche, parce qu'il s'attache aux dents.

Les gouttes d'encens sont transparentes, oblongues et arrondies ; quelquefois elles sont seules, quelquefois il y en a deux ensemble, et elles ressemblent à des testicules ou à des mammelles, selon qu'elles sont plus ou moins grosses : c'est de-là que viennent les noms ridicules d'encens mâle et d'encens femelle. Quelquefois il y a quatre ou cinq gouttes d'encens de la grosseur d'un pois ou d'une aveline, qui sont par hazard attachées à l'écorce de l'arbre d'où elles ont découlé. On estime l'encens qui est blanchâtre, transparent, pur, brillant, sec.

L'encens a été connu non-seulement des Grecs et des Arabes, mais aussi de presque toutes les nations, et dans tous les temps. Son usage a été très-célébré et très-fréquent dans les sacrifices ; car autrefois on les faisait avec de l'encens, et on s'en servait, comme l'on s'en sert encore à-présent, pour exciter une odeur agréable dans les temples. Cette coutume a presque passé parmi toutes les nations, dans toutes les religions, et dans tous les lieux.

Les auteurs ne conviennent pas du pays natal de l'encens. Quelques-uns prétendent qu'il n'y a que l'Arabie qui le produit ; et encore que ce n'est pas ce pays-là tout entier, mais seulement la partie que l'on appelle Saba. D'autres veulent que l'Ethiopie, dont quelques peuples s'appellent Sabéens, porte aussi cette racine odoriférante.

Nous sommes encore moins certains de l'arbre qui fournit l'encens. Pline en parle fort obscurément, et suppose que c'est le térébinthe. Théophraste assure qu'il est haut de cinq coudées, branchu, et que ses feuilles ressemblent à celles du poirier. D'autres cependant, dit-il, soutiennent qu'il est semblable au lentisque ; et d'autres, qu'il a l'écorce et les feuilles du laurier. Diodore de Sicîle lui donne la figure de l'acacia d'Egypte, et les feuilles de saule. Garzias assure que l'arbre de l'encens n'est pas fort haut, et que ses feuilles sont semblables à celles du lentisque. Thevet au contraire soutient qu'il ressemble aux pins qui fournissent de la résine.

Ce que quelques-uns appellent parfum ou encens des Juifs (parce qu'ils s'en servaient souvent dans leurs temples), est une masse séche, un peu résineuse, rougeâtre en écorce, qui a l'odeur pénétrante du storax liquide. Cette masse est faite des écorces de l'arbre appelé rosa-mallas, que l'on fait bouillir, et que l'on exprime après que l'on en a tiré le storax liquide : elle n'est bonne qu'à bruler.

La manne d'encens n'est autre chose que les miettes ou les petites parties qui se sont formées de la collision des grumeaux d'encens, par le mouvement de la voiture ou autrement.

La suie d'encens est cette manne d'encens, brulée de la manière qu'on brule l'arcançon pour faire du noir de fumée.

L'écorce d'encens est l'écorce de l'arbre thurifère. Elle a presque les mêmes qualités et la même odeur que l'encens, aussi fait-on entrer cette écorce dans la composition des parfums enflammables ; mais on n'en apporte plus guère, et l'on substitue à sa place l'encens des Juifs.

Le galipot s'appelle gros encens ou encens commun, à la différence de l'oliban, qu'on nomme encens fin.

L'encens marbré est une des espèces de barras. Voyez BARRAS.

L'encens des Indes, qu'on appelle vulgairement encens de Mocha, quoiqu'il ne vienne point de cette ville d'Arabie, arrive en Europe par les vaisseaux des compagnies des Indes ; on l'apporte en masse, quelquefois en petites larmes, mais toujours fort chargé d'ordure. Il est rougeâtre, et d'un goût un peu amer. Quelques épiciers-droguistes le vendent pour vrai oliban : c'est de leur part une erreur ou une tromperie.

L'encens de Thuringe est, comme on le dit dans le dictionnaire de Trévoux, la résine que fournissent les pins de la Thuringe, et surtout du territoire de Saxe, qui abonde en forêts de ces sortes d'arbres. Les fourmis sauvages en retirent de petits grumeaux qu'elles enfouissent dans la terre quelquefois jusqu'à quatre pieds de profondeur. Là cette poix, par la chaleur souterraine, reçoit un nouveau degré de coction, et se réduit en masse : on la tire ensuite de terre par gros morceaux, et c'est ce qu'on appelle encens de Thuringe, qu'on vend hardiment pour de l'encens. Voyez l'Orictographie de M. Schut. Article de M(D.J.)

ENCENS, (Pharmacie et Matière médicale) Cette résine entre dans beaucoup de compositions pharmaceutiques officinales. Les Grecs, et les Arabes surtout, l'employaient fréquemment ; ils regardaient l'encens pris intérieurement, comme bon contre différentes maladies de la tête, de la poitrine, le flux de ventre, et les fleurs blanches : ils le recommandaient pour la toux, le crachement de sang, la diarrhée, et la dyssenterie.

Quercetanus (Duchêne), in arte med. pract. vante beaucoup contre la pleurésie, une pomme creusée dans laquelle on a mis une dragme d'encens en poudre, et que l'on fait cuire au feu : il la fait prendre au malade, et lui donne trois onces d'eau de chardon beni : ensuite il le fait bien couvrir pour le faire suer. Rivière assure qu'il a Ve plusieurs personnes guéries par ce remède.

Quelques auteurs recommandent l'encens dans les fumigations de la tête, pour les catarrhes, le vertige, le corryza, et celles de l'anus pour la chute de cette partie.

Les anciens brulaient l'encens, et en recevaient la suie ou le noir de fumée, qu'ils estimaient beaucoup dans les inflammations des yeux.

Mathiole recommande pour la chassie et la rougeur des yeux, de l'eau-rose dans laquelle on a éteint en différentes fois trente grains d'encens allumés à une bougie. On passe cette eau à-travers un linge blanc, et on frotte le coin des yeux avec une plume.

Quelques personnes se servent d'un grain d'encens qu'ils appliquent sur une dent douloureuse, dans l'intention de la faire pourrir.

Nous employons aujourd'hui fort rarement l'encens, et on ne s'en sert guère dans les boutiques que pour les préparations officinales où il est demandé. Il entre dans les eaux antinéphrétiques et thériacales, dans le mithridate, dans les trochisques de karabé, dans les pilules de cynoglosse et de styrax, dans les baumes de Fioraventi et du Commandeur, et dans un grand nombre d'emplâtres. (b)