S. f. salvia, (Histoire naturelle, Botanique) genre de plante à fleur monopétale et labiée ; la lèvre supérieure est convexe dans quelques espèces, et dans d'autres elle ressemble à une faucille. La lèvre inférieure est divisée en trois parties, relevée en bosse et non pas concave, comme dans l'ormin et la toute-bonne. Le pistil sort du calice, il est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, et entouré de quatre embryons qui deviennent dans la suite autant de semences arrondies et renfermées dans une capsule qui a servi de calice à la fleur. Ajoutez aux caractères de ce genre que les étamines ressemblent en quelque sorte à un hyoïde. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE.

SAUGE, (Botanique) selon Linnaeus, la fleur de ce genre de plante est d'une seule feuille formée en tuyau large, aplati par-dessus, et découpé par le haut en deux lèvres ; la lèvre supérieure est concave, recourbée, déchiquetée dans les bords ; la lèvre inférieure se partage en trois ; les étamines sont deux filets déliés, dont l'un est caché sous la lèvre supérieure de la fleur, et l'autre se termine par un corps obtus qui est probablement le nectarium ; le pistil a un germe fendu en quatre et un stîle très-long ; il n'y a proprement aucun fruit dans ce genre de plante, et le calice de la fleur contient dans le fond quatre semences rondelettes.

Tournefort compte dix-huit espèces de sauges ; nous décrirons ici la sauge ordinaire et la sauge pommifère de Candie.

La sauge ordinaire, salvia major, I. R. H. 180. a la racine dure, vivace, ligneuse, fibreuse. Elle pousse des tiges rameuses, d'un verd blanchâtre, ordinairement carrées, revêtues de feuilles opposées, larges, obtuses, ridées, blanchâtres, ou purpurines, ou de différentes couleurs, épaisses, cotonneuses, crenelées sur les bords, spongieuses, attachées à des queues un peu longues, d'une odeur forte, pénétrante, agréable, d'un goût aromatique, amer, avec une âcreté qui échauffe la bouche.

Les fleurs naissent comme un épi aux sommets des rameaux, verticillées, formées en gueule ou en tuyau découpé par le haut en deux lèvres, avec deux étamines, dont la bifurcation représente assez l'os hyoïde ; ces fleurs sont peu odorantes, de couleur bleue, tirant sur le purpurin, rarement blanches, soutenues sur un calice ample, formé en cornet, découpé en cinq parties ; et d'une odeur extraordinaire de térébenthine. Lorsque les fleurs sont passées, il leur succéde quatre semences arrondies, noirâtres, renfermées dans une capsule qui vient du calice.

Cette plante se cultive dans les jardins où elle fleurit communément en Juin et Juillet ; ses sommités sont humectées d'une humeur glutineuse et aromatique ; toutes les espèces de sauge aiment les terres argilleuses, et sont beaucoup employées dans les cuisines.

On tire aussi des fleurs de sauge dans les boutiques une huîle distillée, qui, mêlée avec l'esprit-de-vin, est bonne pour frotter des parties, où la circulation du sang est trop faible. On emploie utilement toute la plante dans les fomentations aromatiques.

Une des plus belles espèces de sauge est celle de l'île de Candie, salvia cretica, frutescens, pomifera, foliis longioribus incanis et crispis, I. R. H.

C'est un arbrisseau fort touffu, haut d'environ deux ou trois pieds ; le tronc en est tortu, dur, cassant, épais de deux pouces, roussâtre, couvert d'une écorce grise, gersée, divisée en rameaux, dont les jets sont carrés, opposés deux à deux, blanchâtres, cotonneux, garnis de feuilles, opposées aussi par paires, longues de plus de deux pouces sur un pouce de largeur, chagrinées, blanchâtres, frisées, veinées, roides, dures, pointillées par-dessous, soutenues par un pédicule long de sept ou huit lignes, cotonneux et sillonné.

Les fleurs naissent en manière d'épi long d'un pied, rangées par étages, assez serrées ; chaque fleur est longue d'un pouce ou de quinze lignes : c'est un tuyau blanchâtre, gros de quatre ou cinq lignes, évasé en deux lèvres, dont la supérieure est creusée en cueilleron velu, bleuâtre, plus ou moins foncé, long de huit ou de dix lignes ; l'inférieure est un peu plus longue, découpée en trois parties, dont les deux latérales bordent l'ouverture de la gorge qui est entre les deux lèvres ; la partie moyenne s'arrondit et se rabat en manière de collet, échancrée, bleu-lavé, frisée, marbrée, panachée de blanc vers le milieu.

Les étamines sont blanchâtres, divisées à - peu-près comme l'os hyoïde ; le pistil qui se courbe et se fourche est garni de quatre embryons dans sa partie inférieure, lesquels deviennent autant de graines ovales, noirâtres, longues d'une ligne. Le calice est un tuyau long de demi-pouce, verd-pâle, mêlé de purpurin, découpé irrégulièrement en cinq pointes, évasé en manière de cloche. Cette espèce de sauge a une odeur qui participe de la sauge ordinaire et de la lavande.

Les jets de cette plante piqués par des insectes s'élèvent en tumeurs de neuf à dix lignes de diamètre, dures, charnues, gris-cendrées, cotonneuses, d'un goût agréable. Leur chair est dure, comme de la gelée ; on les appelle pommes de sauge. On en porte des paniers dans les marchés. Cependant, quoique cette espèce de sauge vienne fort bien dans les jardins des curieux, on n'y voit jamais de ces sortes de pommes, parce qu'apparemment il n'y a point d'insectes dans nos climats qui se soucient de les piquer. Il se peut faire que la seve du pays contribue à la bonté de ces sortes de productions.

Nous n'avons que de très-mauvaises noix-de-galle sur nos chênes, et sur nos plantes pas le moindre tubercule qui soit bon à manger. Ceux qui se forment sur l'églantier et sur le chardon hémorrhoïdal ne servent qu'en médecine, encore leurs vertus paraissent bien suspectes. (D.J.)

SAUGE, (Matière médicale) grande sauge, sauge franche ou ordinaire, et petite sauge, sauge de Catalogne ou de Provence.

On prétend que cette plante a été nommée salvia, du mot latin salvare, comme si elle était éminemment salutaire. Aussi est-ce une de celles à laquelle les Pharmacologistes ont prodigué les éloges les plus outrés. Il est dit, dans l'école de Salerne, que si l'usage de la sauge ne rend pas l'homme immortel, c'est qu'il n'y a point de remède contre la mort.

Cur moriatur homo cui salvia crescit in horto ?

Contra vim mortis non est medicamen in hortis.

On dit que les Chinois font tant de cas de la sauge, qu'ils ne peuvent comprendre comment les Européens sont si curieux de leur thé, tandis qu'ils possédent chez eux une plante qui lui est aussi supérieure que la sauge.

Les feuilles et les fleurs, ou plutôt les calices de la sauge, et surtout de la petite sauge possédent en un degré distingué toutes les propriétés des substances végétales amères, aromatiques, balsamiques.

M. Cartheuser dit que la sauge qu'il trouve avec raison fort analogue au romarin, voyez ROMARIN, contient plus abondamment que cette dernière plante des principes spiritueux-camphré, mais beaucoup moins d'huîle essentielle. Cet auteur n'a retiré qu'un demi-gros, ou tout-au-plus deux scrupules d'huîle essentielle d'une livre de feuilles de sauge. Je crois que les calices des fleurs en donneraient davantage. Cette huîle nouvellement retirée par la distillation est d'un très-beau verd ; mais elle perd bientôt cette couleur, et devient brune ou jaunâtre. Au reste, ce principe distinct de l'huîle essentielle, que M. Cartheuser appelle spiritueux-camphré, est un être pour le moins indéfini.

Les fleurs et les feuilles de petite sauge se prennent principalement en infusion théïforme. Cette infusion a un goût légèrement amer, aromatique, qui n'est point désagréable, et elle est très-chargée de l'odeur propre de la plante.

Selon une ancienne opinion qui a passé des livres de quelques naturalistes dans ceux des médecins, et ensuite chez le peuple, les crapauds et les serpens qui sont regardés comme des animaux très-venimeux, et qui cependant ne sont qu'horribles ; ces animaux, dis-je, aiment beaucoup à habiter sous la sauge, et ils l'infectent de leur souffle et de leur salive. On prétend, d'après ce préjugé, qu'il faut laver la sauge avant que de l'employer à des usages médicinaux. Les observations pour et contre cette prétention, et l'usage qui en résulte étant mûrement pesés, il parait à-peu-près démontré que le danger est purement imaginaire.

L'infusion de sauge est mise au rang des remèdes les plus éprouvés contre les faiblesses d'estomac, les douleurs et les digestions languissantes qui en sont la suite ; l'expérience et la considération chymique de sa nature lui paraissent également favorables ; mais il s'en faut bien que ces moyens de connaissance soient également avantageux aux autres propriétés qu'on lui attribue en foule, comme d'être très-bonne contre l'apoplexie, l'épilepsie, la paralysie, les vapeurs hystériques, la suppression des règles, la bouffissure, les fleurs blanches, les fièvres intermittentes, l'asthme, les affections vermineuses, etc. en général une infusion théïforme quelconque parait un remède trop léger contre toutes ces maladies ; et l'infusion théïforme de sauge en particulier n'étant chargée que d'un peu de principe odorant, et d'une très-petite quantité de matière extractive qui n'est douée que d'une faible vertu, selon la remarque de M. Cartheuser ; une pareille infusion, dis-je, ne peut fournir qu'une boisson à-peu-près indifférente, fort innocente, du-moins pour la plupart des sujets ; car il faut avouer qu'il y en a de si sensibles, que le tonique le plus léger les affecte singulièrement, voyez TONIQUE ; et que la sauge est un des remèdes de cette classe qui anime le plus sensiblement ces constitutions éminemment mobiles. Si l'on peut se promettre des effets sensibles dans tous ces cas de l'usage de la sauge, il faudrait les chercher ou dans les feuilles et dans les calices séchés, réduits en poudre et pris dans du vin ou autre liqueur appropriée, ou dans une forte infusion de ces mêmes substances dans le vin ou dans une dose considérable de suc de sauge : mais en ce cas, c'est la grande sauge cultivée qu'il faut prendre ; car la petite sauge sauvage qui croit en Provence ou en Languedoc, est assurément fort peu succulente. Ce dernier remède, mêlé avec le miel, est recommandé par Aètius contre le crachement de sang. L'eau distillée de sauge est encore un remède bien plus puissant que son infusion théïforme : et enfin l'oleo-saccharum préparé avec son huîle doit être regardé comme un remède très-actif, mais non pas comme possédant évidemment d'autres vertus que celles qui sont communes aux huiles essentielles. Voyez HUILE ESSENTIELLE. Tous ces remèdes vraiment efficaces sont presque absolument inusités ; il n'y a que la légère infusion qui soit d'un usage très-commun.

Les feuilles et les fleurs de sauge sont aussi employées pour l'usage extérieur ; elles entrent dans les fomentations, les lotions, les embrocations, etc. toniques, fortifiantes, antiputrides, et principalement dans cette composition magistrale si connue sous le nom de vin aromatique. Voyez VIN AROMATIQUE.

La sauge a aussi quelques usages diététiques. Il est très-commun, par exemple, en Languedoc de piquer avec de petits bouquets de sauge le porc-frais qu'on veut faire cuire à la broche, et il parait que la sauge qui retient, malgré la longue cuite que demande cette viande, une grande partie de son parfum, et toute son amertume, corrige très-efficacement la fadeur et la qualité laxative du cochon.

Les feuilles, les sommités fleuries ou les fleurs de sauge entrent dans l'orviétan, la poudre contre la rage, l'emplâtre de bétoine, l'eau thériacale, l'élixir de vitriol, le syrop de stoechas, etc. son huîle essentielle dans le baume nervin. On prépare avec la sauge une huîle par infusion et coction qui doit être rangée avec celles de ces huiles qui empruntent une vertu réelle de la substance dont on prétend les imprégner. Celle-ci est vraiment résolutive, propre à dissiper les douleurs, les contractions des membres, etc. (b)