S. m. hordeum, (Histoire naturelle, Botanique) genre de plante dont les fleurs n'ont point de pétales ; elles naissent par bouquets disposés en épi. Chaque fleur est composée de plusieurs étamines qui sortent du calice. Le pistil devient dans la suite une semence oblongue, farineuse, pointue par les deux bouts, renflée dans le milieu et très-adhérente, comme l'a remarqué Spigelius, à la base qui a servi de calice à la fleur. Chaque bouquet est attaché à un axe denté, et forme un épi. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)

Ce genre de plante a l'épi fort ; il a le calice, l'enveloppe, la cosse, la peau, et la fleur semblables à ceux du froment et du riz, avec cette différence, que son enveloppe est rude. Son grain est ventru, pointu par les deux bouts, et fortement uni à son enveloppe.

Dans le système de Linnaeus, c'est un genre de plante très-distinct, dont voici les caractères : le calice est composé de six feuilles, et contient trois fleurs. Les feuilles du calice sont droites, pointues, placées au nombre de deux sous chaque fleur. Il n'y a point de bâle dans ce genre de plante. La fleur est à deux lèvres ; l'inférieure est plus longue que le calice, et se termine par une longue barbe ; la supérieure est plus courte et aplatie. Les étamines sont trois filets chevelus, plus courts que la fleur ; les bossettes des étamines sont oblongues ; le germe du pistil est ovale et un peu turbiné ; les styles sont au nombre de deux, très-déliés, et panchés en arrière ; le stîle du pistil est aussi chevelu ; la fleur enveloppe fortement la graine, et tombe avec elle. La graine est oblongue, ventrue, pointue aux deux extrémités, et marquée d'une raie longitudinale.

Les Botanistes comptent cinq ou six espèces d'orge, dont les plus connues sont l'orge d'automne ou d'hiver, et l'orge printanier.

L'orge d'hiver, hordeum polysticon hybernum de C. B. P. 22, a ses racines fibreuses et menues. Sa tige ou son tuyau est moins haut que celui du froment ou du seigle. Il s'élève quelquefois cependant dans un bon terroir à deux coudées ; il est garni de cinq, six nœuds, et quelquefois davantage. A chacun de ces nœuds naissent des feuilles semblables à celles du chien-dent, longues, étroites, et enveloppant un peu le tuyau ; les inférieures sont plus étroites que celles du froment, et les supérieures plus rudes, et couvertes le plus souvent d'une fine poussière d'un verd de mer, dans l'endroit qui embrasse sa tige.

Ses épis sont composés de plusieurs paquets de fleurs attachées de deux côtés sur les dents d'un axe commun. Chaque paquet est formé par trois fleurs, dont chacune est garnie à sa base extérieure de deux longs filets barbus, fermes, rudes et piquans. Ces fleurs sont composées de trois étamines, qui s'élèvent d'un calice à deux bases, dont l'extérieur se termine en un long filet. L'embryon du fruit est caché dans le fond du calice, et se change en une graine longue de deux ou trois lignes, pâle ou jaunâtre, farineuse, pointue des deux côtés, renflée à son milieu, fort attachée aux bases qui servaient de calice à la fleur. On seme cet orge en automne, et on le moissonne l'année suivante.

L'orge printanier, nommé par Tournefort hordeum polysticum vernum, I. R. H. 513, a ses épis plus courts, mais plus gros que celui du précédent ; il ne diffère que par le temps auquel on le seme, c'est au printemps.

Les tuyaux d'orge étant mûrs, sont plus mols et moins fragiles que ceux du froment ; c'est pourquoi ils sont plus succulents, et fournissent aux bœufs et aux vaches une meilleure nourriture. Les épis d'orge sont panchés le plus souvent vers la terre, à cause de leur longueur et de leur pesanteur. Ils contiennent quelquefois vingt grains sur chaque côté ; un même grain pousse plusieurs tuyaux. (D.J.)

ORGE, (Mat. méd. Diete méd.) l'orge fait un composé farineux, lequel étant délayé ou bouilli dans l'eau, se change en un mucilage si visqueux, qu'à peine le feu peut-il le détruire ; car environ la troisième partie d'orge se convertit en charbon, et les cendres, quoique bien calcinées, rendent l'eau mucilagineuse et visqueuse. Cette substance farineuse et mucilagineuse a des principes actifs, lesquels étant agités par le moyen de l'eau, fermentent ; et les parties mucilagineuses se divisent, s'atténuent, et font un composé vineux, comme on l'éprouve dans la biére ; ensuite elles s'aigrissent, et deviennent enfin vapides ou fades, comme presque tous les autres sucs des plantes. On tire de la biére un esprit ardent, qui n'est pas fort différent de l'esprit-de-vin.

L'orge n'a pas les mêmes vertus que le froment, car le froment échauffe, mais de quelque manière que l'on prépare l'orge, il n'échauffe jamais, il rafraichit et déterge ; &, selon qu'il est différemment préparé, il humecte et desseche. Etant bouilli en tisane, il humecte ; et étant rôti, il desseche. Il diffère encore du froment, en ce qu'il produit un suc tenu ou moins grossier et détersif, au-lieu que celui du froment est grossier, visqueux, et d'une nature un peu obstructive.

Plusieurs nations faisaient autrefois du pain avec la farine d'orge, et on en fait encore à présent ; mais c'est dans la disette de froment, et pour nourrir les pauvres. Nous n'estimons pas beaucoup l'orge, non plus que les anciens Romains, pour faire du pain ; mais il est fort recherché pour faire de la biére, et les peuples du nord en font un grand usage ; il leur est aussi nécessaire pour faire de la boisson, que le froment pour faire du pain. L'orge nourrit moins que le froment ; il se digère plus difficilement, parce qu'il est moins gluant, et qu'il ne peut pas s'attacher au corps, de même que le froment.

On estime l'orge qui est blanc, pur, plein, compacte, et pesant autant qu'il se peut : on rejette celui qui est petit, ridé, léger, spongieux. Il ne faut pas en faire d'usage d'abord après la moisson, et aussi-tôt qu'il est moulu ; mais il faut le conserver dans un lieu sec pendant quelque temps, à cause de son humeur visqueuse et superflue qui veut être évaporée ou atténuée. Quand il est sec, et qu'il commence à se rider, alors il est temps d'en faire usage, et il est salutaire. Son écorce extérieure, ou le son est plus sec que la pulpe ou la farine : il nourrit peu ou point du tout ; il déterge, et il est un peu purgatif à cause du suc de sa bâle, comme Hippocrate en avertit.

On prépare l'orge de différentes manières, soit pour servir d'aliment, soit pour la Médecine.

1°. On fait du pain avec la farine d'orge, qui est plus friable et inférieur au pain de froment ; il sert de nourriture aux pauvres ; il ne convient qu'à ceux d'entr'eux qui s'exercent à de rudes travaux, et dont l'estomac est robuste : c'est pourquoi, selon Pline, les gladiateurs athéniens, qui avaient coutume de s'en nourrir, étaient surnommés hordearii ; terme qui signifie des gens qui vivent de pain d'orge. Il est meilleur, et a plus de saveur, quand on le mêle avec moitié de froment ou de seigle.

2°. Les anciens faisaient usage d'une sorte de pain d'orge, que les Grecs et les Latins appelaient maza. C'était de la farine d'orge rôti, mêlée et pêtrie avec quelque liqueur, comme de l'eau, de l'huile, du lait, du vin cuit, du miel, etc. Voyez MAZA.

3°. Les anciens Grecs faisaient une bouillie avec l'orge, appelaient cette bouillie , et les Latins la nommaient pôlenta. Voyez POLENTA.

4°. Les anciens faisaient encore avec l'orge de la tisane, nommée par les Grecs ou , et par les Latins ptisana. Voyez TISANE.

Mais de toutes les différentes manières de préparer l'orge, il nous en reste seulement trois, qui sont encore un peu usitées : la première s'appelle dans les boutiques de l'eau d'orge, ou décoction d'orge ; la seconde, qui n'est pas bien différente de la tisane des anciens, est nommée orge mondé ; la troisième est de la crême d'orge, ou de l'orge passé. Voyez ORGE, décoction d '(Diète), ORGE MONDE, et ORGE PASSE.

On met la farine d'orge au nombre des quatre farines résolutives, qui sont la farine d'orge, celle de fèves, celle de l'orobe, et celle de seigle. On leur substitue quelquefois la farine de froment, de lin, de fénu-grec, et de lentille. Cette farine appliquée en cataplasme est émolliente, résolutive, maturative et anodine ; c'est pourquoi on l'emploie seule en cataplasme, ou avec les autres farines résolutives. (D.J.)

ORGE, décoction d '(Diète) la décoction d'orge, ou, comme on dit communément, l'eau d'orge, est simple ou composée. La simple se fait ou avec de l'orge entier, qui est plus détersif à cause de son écorce, et plus utîle dans les obstructions ; ou bien on fait cette décoction avec de l'orge mondé, ou dont on a ôté la peau ; et alors elle est un peu plus rafraichissante et incrassante. On fait bouillir cet orge avec de l'eau commune très-pure, plus ou moins longtemps, tantôt jusqu'à ce que les grains s'amollissent et se gonflent seulement, tantôt jusqu'à ce qu'ils soient crevés, c'est-à-dire, jusqu'à ce que la pellicule de ces grains se crève par la grande raréfaction de la substance farineuse. On emploie utilement ces décoctions dans les fièvres ardentes, et autres maladies, pour délayer les humeurs épaisses et visqueuses, et pour adoucir et tempérer l'acrimonie des humeurs.

La décoction d'orge composée se fait avec les racines de réglisse, de chien-dent, de chicorée, ou autres racines apéritives, avec celles de scorsonere, de patience, de bardane, etc. avec les raisins, les jujubes, les figues, les dattes, les semences, et autres, selon les différentes indications. Ainsi Ettmuller vante dans la pleurésie une boisson faite avec la décoction d'orge, dans laquelle on infuse des fleurs de coquelicot ou de paquerette : dans la rougeole, on fait bouillir de l'orge avec de la corne-de-cerf, et avec la racine de scorsonere dans les fièvres pétéchiales. (D.J.)

ORGE GRUE, (Diète) on l'appelle autrement orge mondé. Il se fait avec le plus bel orge dont on ôte la peau sous la meule. On le macère dans de l'eau, on le lave, et on le frotte dans les mains pour enlever toute la peau qui est restée, après qu'il a été écrasé sous la meule. Ensuite on le met dans un vaisseau de terre ; on y verse de nouvelle eau, et on le fait bouillir pendant cinq, six ou sept heures, jusqu'à ce qu'il se change en crême ; et de peur d'interrompre l'ébullition, on verse de l'eau tiéde, quand il est nécessaire, et on le fait cuire à un feu doux ; c'est ce qu'on appelle orge grué, parce que la graine y reste. Pour le rendre meilleur, quelques-uns y ajoutent dans le commencement du beurre frais, et un peu de sel sur la fin. Le peuple le mange préparé de cette façon. D'autres pour le rendre plus agréable, y mêlent des amandes ; pour rafraichir, des graines de melon, de courge ; et pour la douceur, du sucre. On fait un grand usage de cette préparation : c'est une excellente nourriture qui produit un bon suc dans la santé et dans la maladie. (D.J.)

ORGE MONDE, (Diete médicinale) c'est de l'orge qui a été écrasé sous la meule, et dépouillé de sa première peau. On en fait des décoctions, des tisanes, des crêmes, sous le nom d'orge grué et d'orge passé. Voyez ORGE GRUE et ORGE PASSE.

On fait avec l'orge mondé le sucre d'orge et le sucre tors, que les Arabes appellent alphenicum. Le sucre d'orge est une composition jaunâtre, transparente, faite avec le sucre cuit dans une décoction légère d'orge, jusqu'à ce qu'il ait assez de consistance pour en faire des bâtons. Le sucre tors se fait avec de l'eau d'orge et du sucre dans une certaine proportion, et cuits de telle sorte qu'il en résulte une masse solide, qu'on peut manier sans qu'elle s'attache aux doigts frottés d'huîle d'amandes, et la réduire en fils très-fins ou grossiers, longs ou courts, et le plus souvent tortillés, mais toujours blancs. Ces deux préparations sont assez bonnes pour la toux, l'enrouement, la sécheresse de la trachée-artère, et dans les maladies légères du poumon et de la poitrine. (D.J.)

ORGE PASSE, (Diète) c'était la crême d'orge des anciens, qui se fait parmi nous de la manière suivante. On prend de l'orge mondé, on le macère, on le frotte dans les mains, on le fait cuire pendant sept ou huit heures, on le pîle dans un mortier avec des amandes douces pelées, et on le passe. Les uns le font plus liquide, d'autres plus épais. Alors on y ajoute du sucre, on le sert dans un plat d'argent ; et on le donne à ceux qui se portent bien, aux malades, et à ceux qui sont exténués : on y mêle des quatre semences froides pour faciliter le sommeil. Quand on le fait cuire derechef, après l'avoir passé, il devient plus épais et plus nourrissant. On ne se contente pas d'en faire prendre une fois le jour à l'heure du sommeil, mais deux, trois fais, et davantage, en manière de julep. Quelquefois on ajoute du lait sur la fin de l'ébullition. Si le malade a besoin d'une nourriture plus abondante, rafraichissante et humectante, on fait bouillir de l'orge avec un poulet, ou avec du veau ; ou bien après avoir laissé bouillir longtemps l'orge dans de l'eau, on y ajoute du bouillon de viande, on le passe, et on le prend avec la crême d'orge. (D.J.)

ORGE PERLE, (Agriculture) c'est de l'orge dépouillé de sa première enveloppe. Cet orge ne diffère de l'orge mondé, qu'en ce qu'il a passé deux ou trois fois par le moulin, pour y être broyé et rendu plus petit. On choisit l'orge perlé le plus blanc, et celui au côté duquel on voit de la fleur attachée. On fait quelquefois l'orge perlé avec le millet ; et d'autres fois avec le froment : de quelque manière qu'on le fasse il est très-nourrissant.

Cet orge ainsi préparé n'est peut-être pas fort différent de ce que les anciens appelaient crimnus : car , selon Galien, est la partie la plus grossière de la farine, laquelle se trouve la plus grosse, quand on a brisé l'orge qui a échappé à la meule, et que l'on passe au travers d'un crible dont les trous sont grands. Les Allemands en font des bouillies, tantôt avec de l'eau, tantôt avec du lait, et quelquefois avec du bouillon de viande.

ORGE, grain d ', (Tisserander. Imprim.) on appelle futaine à grains d'orge, une sorte de futaine ouvragée, sur laquelle le tisserand a relevé des façons assez semblables au grain de l'orge. Les Ciseleurs appellent grain d'orge, de petits ciselets dont la pointe est ronde et fort aigue. Les Imprimeurs donnent aussi le nom de grain d'orge, aux caractères en lozange, qui leur servent à imprimer les notes du plain chant qui doivent être breves.

ORGE, (Géographie ancienne) fontaine des Gaules dans la province Narbonnaise. Pline, l. XVIII. ch. xxij. dit qu'il croissait dans son eau une herbe dont les bœufs étaient si friands, qu'ils y plongeaient la tête pour en attraper. Cette fontaine a presque conservé son nom, car on la nomme aujourd'hui sorque. Voyez SORQUE. (D.J.)