S. m. (Histoire naturelle) arbre connu des anciens et des modernes. Nos botanistes l'appellent caroba siliqua dulcis, ; les Arabes kernab ; et les Egyptiens carub ou carnub, au rapport de Prosper Alpin, qui en a donné une figure très-peu correcte.

C'est un arbre de moyenne grandeur, branchu, et garni de feuilles arrondies, nerveuses, d'un pouce ou deux de diamètre ; épaisses, lisses, verd foncé, portées sur des queues assez courtes, et rangées sur une côte à droite et à gauche : ses fleurs sont de petites grappes rouges chargées d'étamines jaunâtres ; ses fruits, que nous nommons aujourd'hui carouges, et autrefois caroubes, sont des siliques ou gousses aplaties, longues depuis un demi pied jusqu'à quatorze pouces, sur un pouce et demi de large ; elles sont brunes en-dessous, courbées quelquefois, composées de deux cosses séparées par des membranes en plusieurs loges qui contiennent des semences plates, approchantes de celles de la casse.

Ces cosses sont remplies dans leur substance d'un suc épais, noirâtre, mielleux, douçâtre, qui ne s'éloigne pas beaucoup de celui de la moelle de casse. C'est apparemment la figure courbée de cette gousse qui lui a fait donner en grec et en latin les noms de keratia, keratonia, qui signifient de petites cornes.

Le caroubier était autrefois fort commun en Grèce, en Egypte, dans la Palestine, et dans les montagnes de Judée.

Les Egyptiens, à ce que rapporte Prosper Alpin, chap. IIIe tirent des siliques une espèce de miel fort doux, qui tient lieu de sucre aux Arabes. Ils s'en servent pour confire les myrobolans, les tamarins, et plusieurs autres fruits ; ils l'emploient fréquemment au lieu de miel dans les clystères, et le donnent aux malades à dessein de leur rendre le ventre libre ; car il produit autant d'effet que la pulpe de la casse. Ils en usent encore extérieurement et intérieurement pour les inflammations des reins, contre la toux et l'asthme. Tous ceux qui prétendent que ce fruit resserre sont dans l'erreur ; il est certain qu'il relâche et qu'il purge, comme la pulpe de casse, quand il est mûr : c'est ce que Bauhin confirme par des expériences qu'il en a faites quand il était à Venise.

Ce fruit est fort commun en Italie, en Provence, en Barbarie : on le laisse mûrir et sécher au soleil ; les pauvres s'en nourrissent, et on en engraisse le bétail. Autrefois on en tirait une espèce de vin ou de liqueur fermentée, d'un grand usage dans la Syrie et dans l'Egypte, et le marc se donnait aux porcs.

L'enfant prodigue, dit S. Luc, ch. XVIe 5. accablé de misere, et pressé par la faim, aurait désiré se rassasier des gousses (il faudrait traduire des carouges) dont les pourceaux se nourrissaient. C'est le sentiment des plus habiles interpretes de l'Ecriture, de Bochart, Grotius, Hammond, le Clerc et autres. En effet le mot grec qu'emploie S. Luc, signifie des carouges, ou, ce qui revient au même, le fruit du caroubier. Aussi MM. de Beausobre et Lenfant ont traduit avec raison le terme qu'emploie S. Luc par celui de carouges : mais quand ils ajoutent dans leur note sur ce passage de l'évangéliste, que ce fruit vient dans des écosses, ils ne se sont pas exprimés avec assez d'exactitude ; ils devaient dire que le caroubier porte pour fruit des siliques, des gousses, qui contiennent dans leur substance, dans leur follicule une espèce de pulpe douce, mielleuse, etc. Article communiqué par M(D.J.)