Il n'y a point dans cette polyglotte d'autre version latine sur l'hébreu, que cette dernière ; mais on en a joint une littérale au grec des septante. Le texte grec du nouveau Testament y est imprimé sans accens, pour représenter plus exactement l'original des Apôtres, ou au moins les plus anciens exemplaires grecs où les accens ne sont point marqués. Voyez ACCENT.

On a ajouté à la fin un apparat des Grammairiens, des dictionnaires, et des indices ou tables. François Ximenès de Cisneros, cardinal et archevêque de Tolede, qui est le principal auteur de ce grand ouvrage, marque dans une lettre écrite au pape Léon X. qu'il était à propos de donner l'Ecriture-sainte dans les originaux, parce qu'il n'y a aucune traduction, quelque parfaite qu'elle sait, qui les représente parfaitement.

La seconde polyglotte est celle de Philippe II. imprimée par Plantin à Anvers en 1572, par les soins d'Arias Montanus.

On y a ajouté outre ce qui était déjà dans la Bible de Complute, les paraphrases chaldaïques sur le reste de l'Ecriture, outre le Pentateuque, avec l'interprétation latine de ces paraphrases. Il y a aussi dans cette polyglotte une version latine fort littérale du texte hébreu, pour l'utilité de ceux qui veulent apprendre la langue hébraïque.

Et à l'égard du nouveau Testament, outre le grec et le latin de la bible d'Alcala, on a mis dans cette édition l'ancienne version syriaque, en caractères syriaques, et en caractères hébreux, avec des points voyelles pour en faciliter la lecture à ceux qui étaient accoutumés à lire l'hébreu. On a aussi joint à cette version syriaque une interprétation latine composée par Guy le Fèvre, qui était chargé de l'édition syriaque du nouveau Testament.

Enfin l'on trouve dans la Polyglotte d'Anvers un plus grand nombre de grammairiens et de dictionnaires, que dans celle de Complute, et l'on y a ajouté plusieurs petits traités qui ont été jugés nécessaires pour éclaircir les matières les plus difficiles du texte.

La troisième polyglotte est celle de M. le Jay, imprimée à Paris en 1645. Elle a cet avantage sur la bible royale de Philippe II. que les versions syriaque et arabe de l'ancien Testament y sont avec des interprétations latines. Elle contient de plus sur le Pentateuque le texte hébreu samaritain, et la version samaritaine en caractères samaritains.

A l'égard du nouveau Testament, on a mis dans cette nouvelle polyglotte tout ce qui est dans celle d'Anvers ; et outre cela, on y a ajouté une traduction arabe avec une interprétation latine. Mais il y manque un apparat, et les grammaires et les dictionnaires qui sont dans les deux autres polyglottes, ce qui rend ce grand ouvrage imparfait.

La quatrième polyglotte est celle d'Angleterre imprimée à Londres en 1657, que quelques-uns nomment la bible de Walton, parce que Walton, depuis évêque de Winchester, prit soin de la faire imprimer.

Elle n'est pas à la vérité si magnifique, tant pour la grandeur du papier, que pour la beauté des caractères, que celle de M. le Jay, mais elle est plus ample et plus commode.

On y a mis la vulgate, selon l'édition revue et corrigée par Clement VIII. ce qu'on n'a pas fait dans celle de Paris, où la vulgate est telle qu'elle était dans la bible d'Anvers avant la correction. Voyez VULGATE.

Elle contient de plus une version latine interlinéaire du texte hébreu ; au lieu que dans l'édition de Paris il n'y a point d'autre version latine sur l'hébreu que notre vulgate. Le grec des septante qui est dans la polyglotte d'Angleterre n'est pas celui de la bible de Complute, qu'on a gardé dans les éditions d'Anvers et de Paris, mais le texte grec de l'édition de Rome, auquel on a joint les diverses leçons d'un autre exemplaire grec fort ancien, appelé alexandrin, parce qu'il est venu d'Alexandrie. Voyez SEPTANTE.

La version latine du grec des septante est celle que Flaminius Nobilius a fait imprimer à Rome par l'autorité du pape Sixte V. Il y a de plus dans la polyglotte d'Angleterre quelques parties de la Bible en éthiopien et en persan, ce qui ne se trouve point dans celle de Paris. Enfin cette édition a cet avantage sur la bible de M. le Jay, qu'elle contient des discours préliminaires, qu'on nomme prolegomenes, sur le texte des originaux et sur les versions, avec un volume de diverses leçons de toutes ces différentes éditions.

On peut aussi mettre au nombre des polyglottes deux Pentateuques, que les Juifs de Constantinople ont fait imprimer en quatre langues, mais en caractères hébreux.

On voit dans l'un de ces Pentateuques imprimé en 1551, le texte hébreu en gros caractères, qui a d'un côté la paraphrase chaldaïque d'Onkelos en caractères médiocres, et de l'autre côté une paraphrase en persan, composée par un Juif nommé Jacob avec le surnom de sa ville.

Outre ces trois colonnes, la paraphrase arabe de Saadias est imprimée au haut des pages en petits caractères ; on y a de plus ajouté au bas des pages le commentaire de Rasch.

L'autre Pentateuque polyglotte a été imprimé à Constantinople en 1547, sur trois colonnes, comme le premier. Le texte hebreu de la loi est au milieu ; à un des côtés est une traduction en grec vulgaire, et à l'autre une version en langue espagnole. Ces deux versions sont en caractères hébreux, avec les points voyelles qui fixent la prononciation. On a mis au haut des pages la paraphrase chaldaïque d'Onkelos, et au bas des mêmes pages le commentaire de Rasch.

On ajoutera pour septième polyglotte le Pseautier qu'Augustin Justinien, religieux dominicain et évêque de Nebio, a fait imprimer en quatre langues à Gènes en 1516. Ce pseautier contient l'hébreu, l'arabe, le grec et le chaldéen, avec les interprétations latines et des gloses. Voyez PSEAUTIER.

Il y a plusieurs autres éditions de la Bible, soit entière, soit par parties, qu'on pourrait appeler polyglottes. La bible de Gutter, imprimée à Hambourg, en hébreu, en chaldéen, en grec, en latin, en allemand, en saxon, en français, en italien, en esclavon, en danois, doit être placée au rang des Bibles polyglottes.

Telles sont encore les Hexaples et les Octaples d'Origène. Voyez HEXAPLE et OCTAPLES.

On a encore les Bibles polyglottes de Vatable en hébreu, grec et latin, et de Volder en hébreu, grec, latin et allemand. Celle de Polken, imprimée en 1546, en hébreu, en grec, en chaldéen, ou plutôt en éthiopien et en latin. Celle de Jean Draconits de Carlostad en Franconie, qui en 1565 donna les Pseaumes, les Proverbess de Salomon, les prophetes Michée et Joel en cinq langues ; en hébreu, en chaldéen, en grec, en latin et en allemand. Le père le Long de l'oratoire a traité avec soin des Polyglottes dans un vol. in-12 qu'il a publié sur ce sujet.

POLYGLOTTE de Ximenès, (Littérature) c'est ainsi qu'on appelle l'édition de la Bible procurée par les soins et aux dépens de François Ximenès, archevêque de Tolede, et premier ministre d'Espagne sous Isabelle et le roi Ferdinand. L'histoire de sa vie est intéressante parce qu'elle est sans cesse liée avec celle du royaume. Cet homme célèbre naquit à Torrelaguna en 1437, et mourut en 1517 dans un bourg voisin de sa patrie nommé Bos-Eguillas, après avoir gouverné l'Espagne pendant vingt-deux ans. Voyez TORRELAGUNA, (Géographie moderne)

Dans l'épitre adressée au pape Léon X. Ximenès marque les raisons qui l'avaient déterminé à cette entreprise ; c'est qu'il était à propos de donner l'Ecriture-sainte dans les originaux, parce qu'il n'y a aucune traduction de la Bible qui puisse représenter parfaitement ces mêmes originaux. Il ajoute qu'en outre il a cru devoir se conformer à l'autorité de S. Jérôme, de S. Augustin, et des autres Peres, qui ont pensé qu'il fallait avoir recours au texte hébreu pour les livres du vieux Testament, et au texte grec pour le nouveau.

Afin d'exécuter son dessein il prit les mesures les plus sages ; voici ce que son historien Gomez, que M. Flechier a suivi, nous en apprend. Il fit venir les plus habiles gens de ce temps-là ; Démétrius de Crète, grec de nation, Antoine de Nebrissa, Lopés de Stunica, Fernand Pincian, professeurs des langues grecque et latine ; Alfonse, médecin d'Alcala, Paul Coronel et Alfonse Zamora, savants dans les lettres hébraïques, qui avaient autrefois professé parmi les Juifs, et qui avaient depuis embrassé le Christianisme. Il leur exposa son projet, leur promit de fournir à toutes les dépenses, et leur assigna de bonnes pensions à chacun. Il les exhorta surtout à la diligence, de peur que lui ne vint à leur manquer, ou qu'eux ne lui manquassent. Il les excita si bien par ses discours et par ses bienfaits, que depuis ce jour-là, jusqu'à ce que l'ouvrage fut achevé, quinze ans après, ils ne cessèrent de travailler. Il fit chercher, de tous côtés des manuscrits de l'ancien Testament, sur lesquels on put corriger les fautes des dernières éditions, restituer les passages corrompus, et éclaircir ceux qui seraient obscurs ou douteux.

Le pape Léon X. lui communiqua tous les manuscrits de la bibliothèque du Vatican. Il tira de divers pays sept exemplaires manuscrits, qui lui coutèrent quatre mille écus d'or, sans compter les grecs qu'on lui envoya de Rome, et les latins en lettres gothiques, qu'il fit venir des pays étrangers, et des principales bibliothèques d'Espagne, tous anciens de sept ou de huit cent ans ; en un mot, les pensions des savants, les gages des copistes, le prix des livres, les frais des voyages et de l'impression, lui coutèrent plus de cinquante mille écus d'or.

Cette bible contient le texte hébreu, la paraphrase chaldaïque pour le Pentateuque seulement, la version grecque des septante, et la vulgate latine ; on a joint au grec des septante une version littérale faite en partie par d'habiles gens d'Alcala, formés sous Démétrius et Pincian, et en partie par Démétrius lui-même et par Lopés de Stunica. Pour le nouveau Testament, le texte grec bien correct, sans aucun accens, et la vulgate. Il voulut qu'on ajoutât un volume d'explications des termes hébreux, et des façons de parler hébraïques.

Le nouveau Testament parut en 1514, le vocabulaire en 1515, et l'ancien Testament en 1517, peu de temps avant la mort de Ximenès. Voici le titre de l'ouvrage tel que nous le fournit le père le Long : BIBLIA SACRA, vetus Testamentum multiplici linguâ, nunc primò impressum. Et imprimis Pentateuchus hebraïco atque chaldaïco idiomate.

Adjuncta unicuique suâ latinâ interpretatione, IV. vol. in-fol. ad quorum calcem leguntur haec verba :

Explicat quarta et ultima pars totius veteris Testamenti hebraïco, graecoque et latino idiomate nunc primùm impresso, in hâc praeclarissimâ Complutensi universitate.

De mandato et sumptibus reverendissimi in Christo patris Domini, Domini Francisci Ximenii de Cisneros, tituli sanctae Balbinae, sacrosanctae romanae Ecclésiastesiae presbyteri cardinalis, et Hispaniarum primatis, et regnorum Castelli archicancellarii, archiepiscopi Toletani. Industriâ et solertiâ honorabilis viri Arnoldi-Gulielmi de Brocario, artis Impressoriae magistri. Anno Domini millesimo quingentesimo decimo septimo, mensis Julii die decimo. NOVUM TESTAMENTUM graecè et latinè noviter impressum.

In fine voluminis reperiuntur haec verba : Ad laudem et gloriam Dei et Domini Jesu-Christi sacrosanctum opus novi Testamenti et libri vitae, graecis latinisque characteribus noviter impressum, atque studiosissimè emendatum, felici fine absolutum est in hâc praeclarissimâ Complutensi universitate. De mandato et sumptibus, etc. Anno Domini millesimo quingentesimo decimo quarto, mensis Januarii die decimo.

Telle est l'histoire de la polyglotte de Ximenès, qui a été depuis effacée par d'autres polyglottes beaucoup plus belles, celles de Paris et de Londres. (D.J.)