Au mois de Mars les mâles font leur cri et courent après les femelles ; dès que l'un des mâles en peut joindre une, il se jette sur son dos en l'assaillant par derrière, et la saisit à l'endroit de la poitrine, de sorte que les jambes de devant des mâles, passent de chaque côté derrière celles de la femelle, et se rejoignent sur le devant de sa poitrine. Le mâle se fixe dans cette situation, en entre-mêlant les doigts de l'un des pieds de devant avec ceux de l'autre, pour avoir un point d'appui qui l'empêche de glisser ; il serre si étroitement la femelle, qu'il n'est presque pas possible de l'en séparer sans lui casser les bras : aussi quelque mouvement que la femelle puisse faire, quelque part qu'elle aille, le mâle reste inébranlable dans la même situation, avec une constance surprenante ; car cet embrassement dure jusqu'à quarante jours consécutifs, selon que la saison est plus ou moins chaude.

Les œufs de la femelle se détachent de l'ovaire qui est placé sur la matrice, se répandent dans l'abdomen, et entrent ensuite dans les trompes de la matrice. Chaque trompe est pelotonnée ; mais lorsqu'elle est étendue, elle a jusqu'à deux pieds de longueur ; les œufs parcourent cet espace et arrivent dans la matrice : lorsqu'ils y sont tous rassemblés, la femelle les pousse au-dehors par l'anus, car la matrice y aboutit, alors le mâle l'aide en la serrant plus fortement entre ses bras, et il répand sur les œufs tandis qu'ils sortent, une liqueur prolifique qui coule de l'anus. Le mâle a des testicules placés près des reins, des vésicules séminales, et des canaux déférents qui aboutissent au rectum. Les œufs que rend une grenouille sont au nombre d'environ onze mille, ils tombent tous à-la-fais au fond de l'eau, s'ils ne sont retenus par des herbes ou d'autres corps qu'ils rencontrent. Dès que la ponte est faite, le mâle quitte la femelle.

Comme les grenouilles n'ont aucune des parties de la génération placées à l'extérieur, il est assez difficîle de distinguer leur sexe ; cependant on peut reconnaître le mâle par deux caractères ; l'un consiste en deux vésicules qui sont situées derrière les yeux, une de chaque côté, et qui se dilatent ou se contractent lorsque l'air y entre ou en sort ; l'autre caractère se trouve sur le pouce des pieds de devant, qui est fort épais, quelquefois très-noir et hérissé de plusieurs papilles assez semblables à celles qui sont sur la langue des bœufs : ces papilles se trouvent dirigées contre la poitrine de la femelle, dans le temps que le mâle la tient étroitement embrassée.

Chaque œuf de grenouille est composé d'un petit globule noir qui est posé au centre et entouré d'un mucilage blanchâtre et visqueux ; le globule noir est le foetus dans ses enveloppes, et la liqueur épaisse qui l'environne fait sa nourriture. Lorsque le paquet d'œufs est tombé au fond de l'eau, chaque œuf se renfle, et quelques jours après ils s'élèvent tous et nagent dans l'eau. Le quatrième jour après la ponte, l'œuf a déjà pris assez d'accroissement pour que l'on puisse voir très-distinctement le foetus avec ses enveloppes au milieu et la matière mucilagineuse qui les environne ; au sixième jour, le foetus sort de ses enveloppes et du mucilage qui est autour, alors il nage et il parait à découvert sous la forme de tétard. Le mucilage s'est en partie dissous chaque jour jusqu'à ce temps, de sorte qu'il se trouve, pour ainsi dire, raréfié dans un plus grand volume, et qu'il ressemble dans cet état à un nuage ; le tétard y rentre de temps-en-temps pour y prendre de la nourriture et pour s'y reposer, lorsqu'il s'est fatigué en nageant, car ce nuage le soutient sans qu'il fasse aucun effort.

Le tétard au sortir de ces enveloppes, semble n'être composé que d'une tête et d'une queue, mais la partie ronde que l'on prend pour la tête, contient aussi la poitrine et le ventre : dans la suite, les jambes de derrière commencent à paraitre au-dehors ; mais celles de devant sont cachées sous la peau qui recouvre tout le corps, même les jambes de derrière : enfin il se dépouille de cette peau ; alors ses quatre jambes sont à découvert, il prend la forme de grenouille, et il ne lui reste de celle de tétard que la queue qui se desseche peu-à-peu et s'oblitère en entier : lorsqu'elle a disparu et que la transformation du tétard en grenouille est parachevée, la grenouille n'est pas encore en état de se reproduire, ce n'est qu'après deux ou trois ans qu'elle est propre à la génération, au contraire des insectes, qui s'accouplent dès qu'ils ont subi leur dernière métamorphose. Swammerdam, biblia naturae, p. 789 et sequent. (I)

GRENOUILLE, (Diète et Matière médicale) les grenouilles sont très-rarement employées en Médecine, dit Juncker, conspectus Therapeiae gener. quoique plusieurs aient recommandé de les appliquer vivantes sur la tête contre le délire qui accompagne les fièvres malignes, ou sur la langue pour prévenir les angines. Le foie de grenouille est recommandé depuis longtemps, dit le même auteur, pour calmer les mouvements épileptiques ; et il avance que l'expérience est favorable à ce remède, pourvu, dit-il, qu'on l'emploie assez récent, et après avoir fait précéder les remèdes généraux. La grenouille séchée, tenue dans la main, arrête quelquefois l'hémorrhagie des narines dans les sujets très-sensibles : c'est encore Juncker qui rapporte cette vertu.

Cet auteur n'a pas seulement soupçonné qu'il y eut un pays au monde où l'on donnât des bouillons de grenouille à titre de remède dans la plupart des maladies chroniques, et surtout dans les maladies de poitrine. Voyez l'article ÉCREVISSE, et l'article NOURRISSANT.

On retire par la distillation du frai de grenouille, une eau qui a été très-vantée comme cosmétique, comme excellente contre la brulure, les érésypeles, la goutte, la douleur de tête, etc. employée extérieurement ; Sydenham la fait entrer dans les gargarismes contre les angines.

Les grenouilles entrent dans un emplâtre très-composé et fort usité, auquel elles donnent leur nom, mais qui est plus connu encore sous le nom d'emplâtre de Vigo. Voyez VIGO (emplâtre de).

On fait avec les cuisses de grenouille différents ragouts que les personnes les plus délicates peuvent manger sans inconvénient, malgré l'épithète de chair glaireuse qu'on leur a donnée, mais aussi dont les sujets qui sont accusés d'avoir les humeurs acres ne doivent pas se promettre plus de bien que des bouillons de grenouille auxquels nous ne croyons guère, comme nous l'avons déjà insinué. (b)

GRENOUILLE, (Imprimerie) c'est en général une espèce de vase de fer rond ou carré, plus ou moins grand, au fond duquel est enchâssé un grain d'acier sur lequel tourne le pivot ou extrémité d'un arbre, d'une vis, etc. La grenouille de la presse d'Imprimerie a sept à huit pouces de diamètre sur environ un pouce et demi de haut : en-dessous est une sorte de pied ou d'allongement carré de dix à douze lignes de long sur environ trois pouces de diamètre, qui s'emboite dans le milieu du sommet de la platine, si elle est de cuivre, ou dans le milieu du sommet de la crapaudine, quand la platine est de fer. Voyez CRAPAUDINE.