Pour concevoir son origine et sa formation, supposez un fil fléxible exactement couché sur une courbe, comme A B C G (Pl. de Géom. figure 20.), et supposez le fil fixé en G, et par tout ailleurs en liberté comme en A. Si vous faites mouvoir l'extrémité A, du fil de A vers F, en le développant, et ayant soin que la partie développée H D touche toujours en son extrémité D la courbe A H G ; quand le fil sera devenu tout à fait droit, et qu'il ne sera plus qu'une tangente F G au point G de la courbe, il est évident que l'extrémité A dans son mouvement de A en F aura décrit une ligne courbe A D E F.

La première courbe A B C G est appelée la développée, chacune de ses tangentes B D, C E, etc. comprises entr'elle et la courbe A D E F, est appelée rayon de la développée ou rayon osculateur de la courbe A D E F dans les points respectifs D, E, etc. et les cercles dont les osculateurs B D, C E, sont rayons, sont appelés cercles osculateurs de la courbe A D E F en D, E, etc. et enfin la nouvelle courbe résultante du développement de la première courbe commencé en A, est appelée la courbe développante ou courbe décrite par développement.

Le rayon de la développée est donc la partie du fil comprise entre le point de la développée qu'il touche, et le point correspondant où il se termine à l'autre courbe. Le nom de rayon est celui qui lui convient le mieux, parce qu'on considère cette partie du fil à chaque pas qu'il fait, comme si elle décrivait un arc de cercle infiniment petit, qui fait une partie de la nouvelle courbe ; en sorte que cette courbe est composée d'un nombre infini de pareils arcs, tous décrits de centres différents et de rayons aussi différents.

La raison pour laquelle le cercle qui serait décrit des centres C, B, etc. et des rayons C E, H D, est appelé cercle osculateur ou baisant, c'est qu'il touche et coupe la courbe en même temps, c'est-à-dire qu'il la touche en-dedans et en-dehors. Voyez OSCULATEUR, DEVELOPPANTE, URBUREBURE.

Donc, 1°. la développée B C F, (fig. 21.) est le lieu de tous les centres des cercles qui baisent la courbe développante A M (Voyez LIEU.). 2°. Puisque l'élément de l'arc M m, dans la courbe décrite par développement, est un arc d'un cercle décrit par le rayon C M, le rayon de la développée C M est perpendiculaire à la courbe A M. 3°. Puisque le rayon de la développée M C est toujours une tangente de la développée B C F, les courbes développantes peuvent être décrites par plusieurs points, les tangentes de la développée à ses différents points étant prolongées jusqu'à ce qu'elles soient devenues égales à leurs arcs correspondants.

Toute courbe peut être conçue comme formée par le développement d'une autre ; et on peut proposer de trouver la courbe du développement de laquelle une autre est formée. Ce problême se réduit à trouver le rayon de la développée dans tous les points de la développante ; car la longueur du rayon étant une fois trouvée, l'extrémité de ce rayon sera un point de la développée. Ainsi on aura tant de points qu'on voudra de la développée, qui en effet n'est autre chose que la suite des côtés infiniment petits que forment par leur concours les rayons de développée infiniment proches. Voyez les art. COURBE et TANGENTE.

Trouver les rayons des développées, est un probleme de grande importance dans la haute Géométrie, et quelquefois mis en usage dans la pratique, comme M. Huygens l'a fait en l'appliquant au pendule ; sur quoi voyez CYCLOÏDE.

Pour trouver le rayon de la développée dans les différentes espèces de courbes, voyez Wolf, elem. matth. tom. I. p. 524. les infin. petits de M. le marquis de l'Hôpital, et l'analyse démontrée.

Puisque le rayon de la développée est égal à un arc de la développée, ou est plus grand de quelque quantité donnée, tous les arcs des développées peuvent être rectifiés géométriquement, pourvu que les rayons puissent être exprimés par des équations géométriques. La théorie des rayons des développées a été approfondie par M. Leibnitz, qui le premier a fait connaître l'usage des développées pour mesurer les courbes.

M. Varignon a appliqué la théorie des rayons des développées à celle des forces centrales ; de sorte qu'ayant le rayon de la développée d'une courbe, on peut trouver la valeur de la force centrale d'un corps, qui étant mu sous cette courbe, se trouve au même point où le rayon se termine ; ou réciproquement la force centrale étant donnée, on peut déterminer le rayon de la développée. Voyez l'hist. de l'académie royale des Sciences, ann. 1706. Voyez aussi CENTRAL et COURBE.

Le même M. Varignon a donné dans les mém. de l'acad. de 1712 et de 1713. une théorie générale des développées et de leurs propriétés. Cette théorie est un des ouvrages des plus étendus que l'on ait sur la matière dont il s'agit.

DEVELOPPEE IMPARFAITE. M. de Reaumur appelle ainsi une nouvelle sorte de développée. Les Mathematiciens n'avaient consideré comme rayons de développée, que les perpendiculaires qu'on élève sur une courbe du côté concave de cette courbe : si d'autres lignes non perpendiculaires étaient tirées des mêmes points, pourvu qu'elles fussent tirées sous le même angle, l'effet serait le même, c'est-à-dire les lignes obliques se couperaient toutes en-dedans de la courbe, et par leurs intersections formeraient les côtés infiniment petits d'une nouvelle courbe, dont elles seraient autant de tangentes.

Cette courbe serait une espèce de développée, et aurait ses rayons ; mais ce ne serait qu'une développée imparfaite, puisque les rayons ne sont pas perpendiculaires à la première courbe. Histoire de l'académie, etc. an. 1709.

Pour s'instruire à fond de la théorie des développées, il est bon de lire un mémoire de M. de Maupertuis, imprimé parmi ceux de l'ac. de l'année 1728, et qui a pour titre, sur toutes les développées qu'une courbe peut avoir à l'infini. M. de Maupertuis considère dans ce mémoire, non-seulement les développées ordinaires, mais les développées de ces mêmes développées, et ainsi de suite. (O)