Xénophon rapporte, dans l'histoire de la fameuse retraite des dix mille, que les soldats ayant Ve le Pont-Euxin, après avoir essuyé beaucoup de fatigues et de dangers, élevèrent une grande pîle de pierres, pour marquer leur joie, et laisser des vestiges de leurs voyages.

Cependant ces pierres n'avaient rien qui montrât qu'elles signifiaient quelque chose, que leur position et leur situation. Elles remettaient bien devant les yeux quelque événement, mais on avait besoin de la mémoire pour se rappeler cet événement.

Dans la suite, on fit sensément parler ces pierres mêmes, premièrement en leur donnant des figures qui représentaient des dieux, des hommes, des batailles, et en faisant des bas-reliefs, où ces choses étaient dépeintes ; secondement, en gravant dessus des caractères ou des lettres qui contenaient des inscriptions de noms.

Cette coutume de graver sur les pierres se pratiqua de toute ancienneté chez les Phéniciens et les Egyptiens, d'où les Grecs en empruntèrent l'usage pour perpétuer la mémoire des événements de leur nation. Ainsi dans la citadelle d'Athènes, il y avait, au rapport de Thucydide, liv. VI. des colonnes où était marquée l'injustice des tyrants qui avaient usurpé l'autorité souveraine. Hérodote, liv. VII. nous apprend que, par le decret des Amphictions, on érigea un amas de pierres avec une épitaphe en l'honneur de ceux qui furent tués aux Thermopyles.

On fit plus avec le temps ; on écrivit sur des colonnes et des tables les lois religieuses et les ordonnances civiles. Chez les Juifs, le Décalogue et le Deutéronome furent inscrits sur des pierres enduites de chaux. Théopompe prétend que les Corybantes inventèrent l'art de dresser des colonnes pour y écrire les lais. Sans examiner s'il a tort ou raison, cette coutume prit faveur chez tous les peuples de la Grèce, excepté les Lacédémoniens, chez lesquels Lycurgue n'avait pas voulu permettre que l'on écrivit ses lois, afin que l'on fût contraint de les savoir par cœur.

Enfin, l'on grava sur le marbre, le bronze, le cuivre et le bois l'histoire du pays, le culte des dieux, les principes des sciences, les traités de paix, les guerres, les alliances, les époques, les conquêtes, en un mot tous les faits mémorables ou instructifs. Porphyre nous parle des inscriptions que les Crétais possédaient, et dans lesquelles se lisait la cérémonie des sacrifices des Corybantes. Evhémerus, au rapport de Lactance, avait tiré son histoire de Jupiter et des autres dieux, des inscriptions qui se trouvaient dans les temples, et principalement dans celui de Jupiter Triphylien. Pline raconte que les astronomes de Babylone écrivaient leurs observations sur des briques, et se servaient de matières dures et solides pour conserver les opérations des arts. Aremnestus, fils de Pythagore, selon le témoignage de Porphyre, dédia au temple de Junon, une lame d'airain, sur laquelle il avait gravé les principes des sciences qu'il avait cultivées. Ce monument, dit Malchus, avait deux coudées de diamètre, et contenait sept sciences écrites. Pythagore, selon l'opinion de plusieurs savants, apprit la Philosophie des inscriptions gravées en Egypte sur des colonnes de marbre. Il est dit, dans le dialogue de Platon, intitulé Hipparque, que le fils de Pisistrate fit graver sur des colonnes de pierres des préceptes utiles aux laboureurs.

Numa, second roi de Rome, écrivit les cérémonies de sa religion sur des tables de chêne. Quand Tarquin révoqua les lois de Tullius, il fit ôter du forum toutes les tables sut lesquelles elles avaient été écrites. On gravait sur de pareilles tables, et quelquefois sur des colonnes, les traités et les alliances. Romulus montra l'exemple ; il avait fait graver sur une colonne le traité d'alliance qu'il contracta avec ceux de Véïes ; Tullus, celui qu'il fit avec les Sabins ; et Tarquin, celui qu'il eut le bonheur de négocier avec les Latins.

Sous les empereurs, on formait les monuments publics de lames de plomb gravées, dont on composait des volumes en les roulant. L'acte de pacification, conclu entre les Romains et les Juifs, fut écrit sur des lames de cuivre, afin, dit Pline, que ce peuple eut chez lui de quoi le faire souvenir de la paix qu'il venait d'obtenir. Tite-Live rapporte qu'Annibal dédia un autel sur lequel il fit graver, en langue punique et grecque, la description de ses heureux exploits.

Thucidide ne parle que de colonnes de Grèce qui se trouvaient dans les plaines d'Olinthe, dans l'Isthme, dans l'Attique, dans Athènes, dans la Laconie, dans Ampélie, et par-tout ailleurs, sur lesquelles colonnes les traités de paix et d'alliance étaient gravés. Les Messéniens, dans les contestations qu'ils eurent avec les Lacédémoniens touchant le temple de Diane Laménitide, produisirent l'ancien partage du Péloponnèse, stipulé entre les descendants d'Hercule, et prouvèrent par des monuments encore gravés sur les pierres et sur l'airain, que le champ dans lequel le temple avait été bâti, était échu à leur roi. Que dis-je, toute l'histoire, toutes les révolutions de sa Grèce, étaient gravées sur des pierres ou des colonnes ; témoin les marbres d'Arondel, où sont marquées les plus anciennes et les plus importantes époques des Grecs ; monument incomparable, et dont rien n'égale le prix.

En un mot, le nombre des inscriptions de la Grèce et de Rome sur des colonnes, sur des pierres, sur des marbres, sur des médailles, sur des monnaies, sur des tables de bois et d'airain, est presque infini ; et l'on ne peut douter que ce ne soient les plus certains et les plus fidèles monuments de leur histoire. Aussi, parmi toutes les inscriptions qui sont parvenues jusqu'à nous, ce sont celles de ces deux peuples qui nous intéressent davantage, et qui sont les plus dignes de nos regards. Les Grecs, cherchant eux-mêmes toutes sortes de moyens pour mettre leurs inscriptions à l'abri des injures du temps, en écrivirent quelquefois les caractères sur la surface inférieure d'un marbre, et se servirent d'autres blocs de marbre qu'ils avançaient par-dessus pour le couvrir et le conserver.

Mais outre que les inscriptions de ces deux peuples sont autant de monuments qui répandent la plus grande lumière sur leur histoire, la noblesse des pensées, la pureté du style, la briéveté, la simplicité, la clarté qui y régnent, concourent encore à nous les rendre précieuses, car c'est dans ce gout-là que les inscriptions doivent être faites. La pompe et la multitude des paroles y seraient employées ridiculement. Il est absurde de faire une déclamation sur une statue et autour d'une médaille, lorsqu'il s'agit d'actions, qui étant grandes en elles-mêmes, et dignes de passer à la postérité, n'ont pas besoin d'être exagérées.

Quand Alexandre, après la bataille du Granique, eut consacré une partie des dépouilles de sa victoire au temple de Minerve à Athènes, on y mit en grec pour toute inscription : Alexander Philippi filius, et Graeci, praeter Lacedemonios, de barbaris Asiaticis.

Au bas du tableau de Polygnote, qui représentait la ville de Troie, il y avait seulement deux vers de Simonide qui disaient : " Polygnote de Thase, fils d'Aglaophon, a fait ce tableau, qui représente la prise de Troie ". Voilà quelles étaient les inscriptions des Grecs. On n'y cherchait ni allusions, ni jeux de mots, ni brillans d'aucune espèce. Le poète ne s'amuse pas ici à vanter l'ouvrage de Polygnote ; cet ouvrage se recommandait assez par lui-même. Il se contente de nous apprendre le nom du peintre, le nom de la ville d'où il était, et celui de son père, pour faire honneur à ce père d'avoir eu un tel fils, et à la ville d'avoir eu un tel citoyen.

Les Romains élevèrent une statue de bronze à Cornélie, sur laquelle était cette inscription : " Cornélie, mère des Gracques ". On ne pouvait pas faire ni plus noblement, ni en moins de termes, l'éloge de Cornélie et l'éloge des Gracques.

Cette briéveté d'inscriptions se portait également sur les médailles, où l'on ne mettait que la date de l'action figurée, l'archonte, le consulat sous lequel elle avait été frappée, ou en deux mots le sujet de la médaille.

D'ailleurs, les langues grecque et latine ont une énergie qu'il est difficîle d'attraper dans nos langues vivantes, du moins dans la langue française, quoiqu'en dise M. Charpentier. La langue latine semble faite pour les inscriptions, à cause de ses ablatifs absolus, au lieu que la langue française traine et languit par ses gérondifs incommodes, et par ses verbes auxiliaires auxquels elle est indispensablement assujettie, et qui sont toujours les mêmes. Ajoutez, qu'ayant besoin pour plaire, d'être soutenue, elle n'admet point la simplicité majestueuse du grec et du latin.

Leurs épitaphes, espèces d'inscriptions, se ressentaient de cette noble simplicité de pensées et d'expressions dont on vient de faire l'éloge. Après quelque grande bataille, l'usage d'Athènes était de graver une épitaphe générale pour tous ceux qui y avaient péri. On connait celle qu'Euripide mit sur la tombe des Athéniens tués en Sicîle : " Ici gissent ces braves soldats qui ont battu huit fois les Syracusains, autant de fois que les dieux ont été neutres ".

Nos inscriptions funéraires ne sont chargées, au contraire, que d'un vain étalage de mots qui peignent l'orgueil ou la basse flatterie. On voit, on montre à Vienne l'inscription suivante du tombeau de l'empereur Frédéric III. " Ci-git Frédéric III. empereur pieux, auguste, souverain de la Chrétienté, roi de Hongrie, de Dalmatie, de Croatie, archiduc d'Autriche ", etc. cependant ce prince, dit M. de Voltaire, n'était rien moins que tout cela ; il n'eut jamais de la Hongrie que la couronne semée de quelques pierreries, qu'il garda toujours dans son cabinet sans les renvoyer, ni à son pupille Ladislas qui en était roi, ni à ceux que les Hongrois élurent ensuite, et qui combattirent contre les Turcs. Il possédait à peine la moitié de la province d'Autriche, ses cousins avaient le reste ; et quant au titre de souverain de la Chrétienté, il est aisé de juger s'il le méritait.

Les moines n'ont pas été moins ridicules dans leurs inscriptions gravées à l'honneur de leurs fondateurs, ou de leurs églises. Jean-Baptiste Thiers, né à Chartres en 1641, mort en 1703, et connu par quantité de brochures, en fit une sanglante contre cette inscription du couvent des cordeliers de Rheims : " à Dieu, et à S. Français, tous les deux crucifiés ".

Outre que les inscriptions grecques et romaines sont exemptes de pareilles extravagances, elles ne tendent qu'à nous instruire de faits dont les moindres particularités piquent notre curiosité. De-là vient que depuis la renaissance des Lettres, les savants n'ont cessé de les rassembler de toutes parts. Le recueil qu'ils en ont donné contient déjà quelques centaines de volumes de prix, et fait une des principales branches de la profonde érudition.

En effet, de tout temps les inscriptions ont été précieuses aux peuples éclairés. Lors du renouvellement des sciences dans la Grèce, Acasilaus, natif d'Argos, publia avant la guerre des Perses, un grand ouvrage, pour expliquer les inscriptions qu'on avait trouvées sur de vieilles tables d'airain en creusant la terre. Nos antiquaires imitent cet illustre grec, et tâchent de deviner le sens des inscriptions qu'ils découvrent, et dont la vérité n'est pas suspecte. Je m'exprime ainsi, parce que toutes les inscriptions qu'on lit dans plusieurs ouvrages, ne sont, ni du même titre, ni de la même valeur.

Cependant, puisque bien des gens les regardent encore comme des monuments historiques, dont l'autorité doit aller de pair avec celle des médailles qu'on possede, il est important de discuter jusqu'où ce sentiment peut être vrai.

Un de nos antiquaires, M. le baron de la Bastie, qui est entré dans cet examen, a prouvé judicieusement, qu'on doit mettre une très-grande différence entre les inscriptions qui existent et celles qu'on ne saurait retrouver ; entre les inscriptions que les auteurs éclairés ont copiées fidèlement eux-mêmes sur l'original en marbre et en bronze, et celles qui ont été extraites de plusieurs collections manuscrites, qui n'indiquent ni le lieu ni le temps où on les a trouvées ; et enfin, qui ne sont venues à nous que de copie en copie, sans qu'il y en ait qu'on puisse dire avoir été prises sur l'original.

On sait que vers la fin du XV. siècle, et au commencement du XVIe il y eut des savants qui, pour s'amuser aux dépens des curieux d'antiquités, se divertirent à composer des inscriptions en style lapidaire, et en firent courir des copies, comme s'ils les avaient tirées des monuments antiques, qu'on découvrait alors encore plus fréquemment qu'aujourd'hui.

Un peu de critique aurait bientôt dévoilé la tromperie ; car nous voyons par un des dialogues d'Antonio Augustino, et par une épigramme de Sannazar, que tous les savants n'en furent pas la dupe ; mais ils ne furent pas non plus tous en garde contre cette espèce de fraude, et un grand nombre de ces fausses inscriptions ont eu malheureusement place dans les différents recueils qu'on a publiés depuis.

Mazocchi et Smetius ont cité plusieurs de ces inscriptions fictives sans se douter de leur fausseté. Fulvio Ursini, quoique fort habîle d'ailleurs, en a souvent fourni à Gruter, qui étaient entièrement fausses, et qu'il lui donnait pour avoir été trouvées à Rome même. Antonio Augustino, que je citais tout-à-l'heure, savant et habîle critique, en est convenu de bonne foi, et a eu l'honnêteté d'en avertir le public. Cependant le P. André Schot, jésuite d'Anvers, avait ramassé sans choix et sans discernement toutes celles qu'on lui avait communiquées d'Espagne, et il est presque le seul garant que Gruter ait cité pour les inscriptions de ce pays-là, qui sont dans son ouvrage.

Outre les inscriptions absolument fausses et faites à plaisir, il s'en trouve un grand nombre dans les recueils qui ont été défigurées par l'ignorance, ou par la précipitation de ceux qui les ont copiées : de secondes copies, comme il arrive tous les jours, ont multiplié les fautes des premières, et de troisiemes copies en ont comblé la mesure.

Ces réflexions ne doivent cependant pas nous porter à rejeter légèrement et sans de bonnes raisons l'autorité des inscriptions en général, mais seulement à ne la recevoir cette autorité, qu'après mûr examen, lorsqu'il est question de constater un fait d'histoire sur lequel les sentiments sont partagés. Les règles d'une critique exacte et judicieuse doivent toujours nous servir de flambeau dans les discussions littéraires.

Pour ce qui regarde l'art de lire les inscriptions, il ne peut s'apprendre que par l'étude et par l'usage, car elles ont leurs caractères particuliers. Par exemple, nous trouvons souvent dans les inscriptions romaines, les caractères CI et employés pour exprimer mil ; c'est un I entre deux CC droits ou renversés, et c'est quelquefois un X entre deux CC, dont l'un est droit et l'autre renversé de cette manière CX. La première figure, quand elle est fermée par le haut, ressemble exactement à une ancienne M, qui était faite ainsi CI ; et la dernière figure, quand elle est entièrement fermée, présente un 8 incliné ; mais si ces sortes de caractères se lisent aisément, il s'en rencontre d'autres très-difficiles à déchiffrer, indépendamment des abréviations, qui sont susceptibles de divers sens, et par conséquent de tous les écarts où les conjectures peuvent jeter nos faibles lumières. (D.J.)

INSCRIPTION, (Numismatique) Les antiquaires nomment inscriptions les lettres ou les paroles qui tiennent lieu de revers, et qui chargent le champ de la médaille au lieu de figures. Ils appellent légende les paroles qui sont autour de la médaille, et qui servent à expliquer les figures gravées dans le champ.

On trouve quantité de médailles grecques, latines et impériales, qui n'ont pour revers que ces lettres, S. C. Senatus Consulto, ou , renfermées dans une couronne. Il y en a d'autres dont les inscriptions sont des espèces d'époques, comme dans M. Aurele. Primi Decennales Cos. III. Dans Aug. Imp. Caes. Aug. ludi saeculares. Dans le bas-Empire, Votis V. XXX. &c.

Quelquefois de grands événements y sont marqués, comme Victoria Germanica Imp. VI. Cos. III. Dans Marc Aurele, Signis Parthicis receptis. S. P. Q. R. dans Auguste ; Victoria Parthica Maxima dans Septime Sévère.

D'autres expriment des titres d'honneur accordés au prince, comme S. P. Q. R. Optimo Principi dans Trajan et dans Antonin Pie. Adsertori publicae libertatis dans Vespasien. D'autres inscriptions sont des marques de la reconnaissance du Sénat et du peuple, comme dans Vespasien, Libertate P. R. restitutâ ex S. C. Dans Galba, S. P. Q. R. Ob cives servatos. Dans Auguste, Salus generis humani, &c.

Quelques-unes de ces inscriptions ne regardent que des bienfaits particuliers accordés en certains temps ou à certains lieux, avec des vœux adressés aux Dieux pour le rétablissement ou pour la conservation de la santé des princes. Telles sont sous Auguste les médailles suivantes, gravées par l'adulation : Jovi optimo Maximo, S. P. Q. R. Vota suscepta pro salute Imperat. Caesaris Aug. quod Per eum Resp. in ampliore atque tranquilliore statu est. Jovi vota suscepta, pro salute Caes. Aug. S. P. Q. R. Imperatori Caesari, quod vitae munitae sint, ex eâ pecuniâ, quam is ad aerarium detulit.

Parmi ces médailles postérieures du temps où les empereurs de Constantinople quittèrent la langue latine pour reprendre la grecque dans leurs inscriptions, il s'en trouve qui pourraient embarrasser un nouveau curieux ; telle est le IC XC NIKAIH OC XPITOC NIKA, Jesus Christus vincit ; et le . Domine, Adesto Alexio. . On trouve dans les médailles d'Héraclius, Deus adjuva Romanis ; et c'est ce qu'ils ont voulu exprimer en grec par le , et que l'on aurait peine à deviner lorsque ce mot est écrit par les seules lettres initiales ; car le moyen de savoir que C. LEON PAMVL

sur la médaille de Constantin Copronyme, signifie Constantinus Leoni perpetuo Augusto, Multos annos, si M. Ducange ne l'avait heureusement deviné. Les plus savants ont été arrêtés par le , Domine Adesto servo tuo, faute de connaître les inscriptions dont nous parlons.

Ces sortes d'inscriptions peuvent s'appeler des acclamations ou des bénédictions, qui consistent à souhaiter à l'empereur la vie, la santé, la victoire. Telle est celle qu'on voit dans Constantin, Plura natalitia feliciter. Celle de Constants, Felicia Decennatalitia. Celle de Théophile, . Celle de Baduela, BADUELA FLEUREAS ZEMPER. Cela nous fait souvenir d'une belle médaille d'Antonin Pie, qui peut avoir place parmi ces acclamations, Senatus populusque Romanus, Annum Novum Faustum, Felicem, Optimo Principi Pio. C'est ainsi que l'on doit expliquer ces lettres initiales, S. P. Q. R. A. N. S. F. Optimo Principi Pio.

Je ne dois point oublier ici celle de Constantin, qui a donné sujet à tant de fausses conjectures ; elle porte du côté de la tête Imp. C. Constantinus P. F. August. du côté du revers, Constantino. P. August. BAPNAT. Car pour n'avoir pas reconnu que l'A était une R à demi effacée, on a voulu que ce fût la mémoire du baptême de Constantin, au lieu qu'il faut lire Bono Rei Publicae Nato. Le P. Hardouin a senti plus heureusement que d'autres cette vérité.

Je crois qu'on s'aperçoit assez du goût différent des anciens et des modernes pour les inscriptions. Les anciens n'ont point imaginé que les médailles fussent propres à porter des inscriptions, à moins que ces inscriptions ne fussent extrêmement courtes et expressives. Ils ont réservé les plus longues pour les édifices publics, pour les colonnes, pour les arcs de triomphe, pour les tombeaux ; mais les modernes en général, chargent les revers de toutes leurs médailles de longues inscriptions, qui n'ont plus rien, ni de la majesté, ni de la brieveté romaine. Je n'en veux pour preuve que celles de l'académie des Belles-Lettres faites en l'honneur et à la gloire de Louis XIV.

Quelquefois même dans les inscriptions des médailles antiques, on ne trouve que le simple nom des magistrats, comme dans Jules, L. Aemilius, Q. F. Buca IIII. Vie A. A. A. S. F. dans Agrippa. M. Agrippa Cos. designatus. (D.J.)

INSCRIPTION, (Peinture) Les peintres de Grèce ne se faisaient point de peine de donner par une courte inscription la connaissance du sujet de leurs tableaux. Dans celui de Polygnote, qui représentait la prise de Troie, et qui contenait plus de cent figures, chaque figure principale était marquée par l'inscription du nom du personnage. On ne doit pas croire que ces inscriptions défigurassent leurs ouvrages et en diminuassent le mérite, puisqu'ils faisaient l'admiration d'un peuple dont le goût pour la Peinture et les beaux-arts valait au moins le nôtre. En même temps que ces inscriptions fournissaient l'intelligence du tableau, elles mettaient les connaisseurs à portée de juger si le peintre avait bien exécuté son sujet ; au lieu que parmi nous, un beau tableau est souvent une énigme que nous cherchons à deviner, et qui fait une diversion au plaisir qu'il devrait nous procurer.

Ce n'est que par une vanité mal entendue qu'un usage si commode a cessé, et bien des gens d'esprit désireraient qu'on le fit renaître ; mais personne n'en a mieux exposé l'utilité que M. l'Abbé du Bos : laissons-le parler lui-même, pour ne rien ôter aux grâces de son style.

" Je me suis étonné plusieurs fais, dit-il, que les Peintres, qui ont un si grand intérêt à nous faire reconnaître les personnages dont ils veulent se servir pour nous toucher, et qui doivent rencontrer tant de difficultés à les faire reconnaître à l'aide seule du pinceau, n'accompagnassent pas toujours leurs tableaux d'histoire d'une courte inscription. Les trois quarts des spectateurs, qui sont d'ailleurs très-capables de rendre justice à l'ouvrage, ne sont point assez lettrés pour deviner le sujet du tableau. Il est quelquefois pour eux une belle personne qui plait, mais qui parle une langue qu'ils n'entendent point ; on s'ennuie bientôt de la regarder, parce que la durée des plaisirs, où l'esprit ne prend point de part, est ordinairement bien courte.

Le sens des peintres gothiques, tout grossier qu'il était, leur a fait voir la nécessité des inscriptions pour l'intelligence du sujet des tableaux. Il est vrai qu'ils ont fait un usage aussi barbare de cette connaissance que de leurs principes. Ils faisaient sortir de la bouche de leurs figures, par une précaution bizarre, des rouleaux, sur lesquels ils écrivaient ce qu'ils prétendaient faire dire à ces figures indolentes : c'était-là véritablement faire parler ces figures. Les rouleaux dont il s'agit se sont anéantis avec le goût gothique ; mais quelquefois les plus grands maîtres ont jugé deux ou trois mots nécessaires à l'intelligence du sujet de leurs ouvrages ; et même ils n'ont pas fait scrupule de les écrire dans un endroit du plan de leurs tableaux, où ils ne gâtaient rien. Raphaël et le Carrache en ont usé de cette manière. Coypel a placé de même des bouts de vers de Virgile dans la galerie du palais-royal, pour aider à l'intelligence de ses sujets, qu'il avait tirés de l'Enéïde. Les peintres dont on grave les ouvrages ont tous senti l'utilité de ces inscriptions, et on en met toujours au bas des estampes qui se font d'après leurs tableaux ".

Il serait donc pareillement à souhaiter que dans ces mêmes tableaux, et surtout dans tous ceux dont le sujet n'est pas parfaitement connu, on rétablit l'usage des inscriptions dont les Grecs nous ont donné l'exemple : peut-être qu'un peintre médiocre le tenterait vainement ; mais un grand peintre donnerait le ton, aurait des sectateurs, et la mode en reviendrait sans-doute. L'exemple a plus de puissance sur les hommes que tous les préceptes réunis ensemble. (D.J.)

INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES, (Académie royale des) Le feu roi Louis XIV, à qui la France est redevable de tant d'établissements utiles aux lettres, étant persuadé que c'en serait un fort avantageux à la nation, qu'une Académie qui travaillerait aux inscriptions, aux devises et aux médailles, et qui répandrait sur ses monuments le bon goût et la noble simplicité qui en font le véritable prix, ne tarda pas à y donner les mains après qu'il en eut eu la pensée. Il forma d'abord cette compagnie d'un petit nombre d'hommes, choisis dans l'académie Française, qui commencèrent à s'assembler en 1663 dans la bibliothèque de M. Colbert, par qui ils recevaient les ordres de sa majesté. En hiver ils s'assemblaient le plus ordinairement le mercredi, et en été M. Colbert les menait souvent à Sceaux, pour donner plus d'agréments à leurs conférences, et en jouir lui-même avec plus de tranquillité. Un des premiers travaux de cette académie naissante fut le sujet des desseins des tapisseries du roi, tels qu'on les voit dans le recueil d'estampes et descriptions qui en a été publié. M. Perrault fut ensuite chargé en particulier de la description du Carrousel, qui fut imprimée avec les figures, après qu'elle eut été examinée et approuvée par la compagnie. On commença aussi à faire des devises pour les jetons du trésor royal, des parties casuelles, des bâtiments et de la marine ; et tous les ans on en donnait de nouvelles. Enfin, on entreprit de faire par médailles une histoire suivie des principaux événements du règne du roi ; et cet ouvrage n'eut pas tant tardé à paraitre si M. Colbert n'eut pas interrompu si souvent le travail de la compagnie, en la chargeant continuellement d'inventer ou d'examiner les différents desseins de Peinture et de Sculpture dont on voulait embellir Versailles ; de faite graver le plan et les principales vues des maisons royales, et d'y joindre des inscriptions. M. Quinault occupa aussi une partie du temps de l'Académie, quand il eut été chargé par le roi de travailler aux tragédies en musique, de même que M. Felibien le père, quand il eut fait son dictionnaire des arts et ses entretiens sur la Peinture ; car la compagnie fut rendue juge de ces différents ouvrages et de plusieurs autres, et aucun ne parut qu'après avoir subi son examen et reçu son approbation. Les premiers académiciens n'étaient qu'au nombre de quatre, tous de l'académie Française ; savoir, Mrs Chapelain, de Bourzéïs, Charpentier et Cassagnes. M. Perrault, contrôleur des bâtiments, fut admis dans les assemblées sans être d'abord du corps, mais dans la suite il prit la place de M. l'abbé Cassagnes ; et Mrs de Bourzéïs et Chapelain étant morts, le premier en 1672, et le second en 1674, ils furent remplacés par l'abbé Tallemant le jeune, et M. Quinault, tous deux de l'académie Française. Au commencement de 1682 M. Perrault ayant quitté la commission des bâtiments, et se voyant moins écouté de M. Colbert, quittant les assemblées où il avait tenu la plume depuis qu'il y avait été introduit, il fut remplacé par l'abbé Gallois. On sentit que son absence était une perte pour la compagnie, qui languit dès-lors pendant dix-huit mois, et jusqu'à la mort de M. Colbert. M. de Louvois, qui succéda à ce ministre dans la charge de surintendant des bâtiments, ne donna pas de moindres marques de son affection pour l'académie ; et après en avoir assemblé plusieurs fois les membres chez lui à Paris et à Meudon, il fixa enfin leurs assemblées au louvre, dans le lieu où se tiennent celles de l'académie Française, et voulut qu'elles se tinssent le lundi et le samedi depuis cinq heures du soir jusqu'à sept. M. de la Chapelle, devenu contrôleur des bâtiments, eut ordre de s'y trouver pour écrire les délibérations, et devint ainsi le cinquième académicien, et peu après on ajouta Mrs Racine et Despréaux pour sixième et septième, enfin pour huitième, M. Rainssant, directeur du cabinet des antiques de sa majesté.

Sous ce nouveau ministère l'académie reprit son histoire du roi par les médailles, et commença à faire des devises pour les jetons de l'extraordinaire des guerres ; et ayant perdu M. Quinault au mois d'Octobre 1688, et M. Rainssant au mois de Juin 1689, ces deux places demeurèrent vacantes jusqu'en 1691, qu'on nomma pour les remplir Mrs de Tourreil et Renaudot. M. Felibien le père occupait depuis quelque temps celle de M. l'abbé Gallois, qui s'en vit exclus par l'inadvertance de Mrs Charpentier et Quinault, qui, interrogés par M. de Louvois sur les noms de leurs confrères, lui nommèrent pour quatrième M. Felibien, qui était présent, plutôt que M. Gallois, dont ils ne se souvinrent point. M. de Villacerf ayant été fait surintendant des bâtiments après M. le marquis de Louvois, n'eut pas le soin des académies, et sa majesté en chargea M. de Ponchartrain, alors contrôleur général et secrétaire d'état, et depuis chancelier de France. Ce fut sous lui que l'académie, que l'on n'avait presque connue jusques là que sous le titre de petite académie, le devint davantage sous celui d'académie royale des Inscriptions et médailles ; et afin que M. le comte de Ponchartrain son fils put se trouver souvent à ces assemblées, il les fixa au mardi et au samedi. L'inspection de cette compagnie fut donnée à M. l'abbé Bignon son neveu, dont le génie et les talents étaient déjà universellement reconnus. On revit avec soin toutes les médailles dont on avait arrêté les desseins du temps de M. de Louvois. On en réforma plusieurs ; on en ajouta un grand nombre ; on les réduisit toutes à une même grandeur. M. Coypel, depuis premier peintre du roi, fut chargé d'exécuter les différents desseins de médailles que l'académie avait imaginés ; et l'histoire du roi par les médailles commença enfin à être présentée à sa majesté quelque temps après que M. de Ponchartrain eut été élevé à la dignité de chancelier, dont il fut revêtu au mois de Septembre 1699. M. l'abbé Bignon, craignant que cet ouvrage étant fini, l'académie, dont la situation n'était point encore fixe, ne se relâchât, ou ne vint même à se dissiper, pensa à en assurer l'état, le fit proposer à sa majesté ; et le roi ayant gouté cette proposition, il fut fait, par ordre du roi, un règlement, qui fut envoyé peu après à la compagnie. Ce règlement porte entr'autres, " que l'Académie sera sous la protection du roi, comme celle des Sciences ; qu'elle sera composée de quarante académiciens, dix honoraires, dont l'un sera président, et deux pourront être étrangers, et dix élèves ; que l'un des pensionnaires sera secrétaire, et un trésorier ; que les assemblées se tiendront au louvre les mardis et vendredis de chaque semaine, depuis trois heures après-midi jusqu'à cinq, etc. " Ce règlement, que l'on peut lire en entier dans le premier volume des mémoires de l'académie des Belles-Lettres, fut fait à Versailles le 16 Juillet 1701, changea la face de l'académie, et ajouta aux occupations de ses membres l'étude de tout ce qui concernait la littérature ancienne et moderne.

Le règlement commença à être exécuté le 19 du même mois, que l'académie tint sa première assemblée particulière dans la forme prescrite. Cet établissement fut confirmé en 1713 par des lettres-patentes données à Marly au mois de Février, et qui furent enregistrées au parlement et à la chambre des comptes. L'académie prit pour sceau les armes de France avec une médaille d'or au milieu, où est gravée la tête de sa majesté. Le jeton de la même compagnie représente une muse, tenant à la main une couronne de laurier, et ayant derrière elle des cippes et des obélisques, et pour âme, ce mot d'Horace : Vetat mori. En 1716 feu M. le duc d'Orléans, alors régent du royaume, que l'on sait avoir toujours eu du goût et des talents pour les arts et pour les sciences, fit observer que le titre d'académie des Inscriptions et médailles n'exprimait qu'une partie de l'objet de cette compagnie, et il fut rendu un arrêt du conseil d'état du roi le 4 Janvier 1716, par lequel ce titre fut changé en celui d'académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres ; et par usage on nomme plus communément cette compagnie, académie des Belles-Lettres, titre plus simple, et qui exprime tout ce que le premier renferme. Par le même arrêt le roi supprima la classe des élèves, dont le nom seul rebutait les personnes d'un certain mérite, et sa majesté ordonna que la classe des associés seraient augmentée de dix sujets, qui lui seraient présentés par l'Académie dans la forme ordinaire. Enfin le 23 Mars suivant il y eut un autre arrêt rendu au conseil d'état, qui ordonna que le titre de vetéran ne pourrait être désormais accordé qu'à ceux des académiciens actuellement en place, qui, après avoir travaillé utilement dans l'Académie pendant dix années au moins, se trouveraient hors d'état et dans une espèce d'impossibilité d'y continuer leurs travaux. On a déjà vingt-sept gros volumes in-4°. de l'histoire et des mémoires de cette académie, et la suite s'imprime à l'imprimerie royale, d'où ce qui a paru est sorti depuis 1733. M. le président Durey de Noinville a fondé un prix annuel, qui doit être distribué à celui qui, au jugement de l'Académie, aura mieux réussi dans le sujet qu'elle proposera. La première distribution de ce prix s'est faite dans la séance publique d'après pâques de l'année 1734. Moréry.

INSCRIPTION, (Jurisprudence) est lorsqu'on écrit son nom ou quelqu'autre chose sur un registre destiné à cet usage.

Dans les universités les étudiants s'inscrivent en certains temps sur les registres de la faculté où ils étudient, et le certificat qu'on leur donne de ces inscriptions pour pouvoir prendre des degrés, est confondu dans l'usage avec les inscriptions même, et s'appelle aussi inscriptions.

Les dénonciateurs sont obligés d'inscrire leurs noms sur le registre du procureur du roi. Voyez DENONCIATEUR.

Inscription de faux ou en faux, est une voie judiciaire que l'on prend pour détruire par la voie du faux incident une pièce que l'on soutient être fausse. Cette procédure est nommée inscription de faux, parce que celui qui attaque une pièce soit par la voie du faux incident, est obligé de passer un acte au greffe, soit en personne ou par procureur fondé de procuration spéciale, contenant qu'il s'inscrit en faux contre la pièce. Avant de former cette inscription de faux, il faut consigner une amende qui est de 100 livres dans les cours et aux requêtes de l'hôtel et du palais ; de 60 livres dans les sieges ressortissants nuement aux cours, et de 20 livres dans les autres sieges.

La procédure que l'on doit tenir pour former une inscription de faux, est expliquée dans l'ordonnance du mois de Juillet 1737, concernant le faux principal et le faux incident.

Quand on prend la voie du faux principal, il n'y a point d'amende à consigner, ni d'inscription de faux à former au greffe. Voyez FAUX. (A)