Le peuple Juif était distribué en douze tribus, l’empire d’Allemagne est distribué en dix cercles, un royaume est distribué en provinces ou gouvernements. Voyez TRIBU, CERCLES, PROVINCES, &c.

Le digeste est distribué en cinquante livres. Une armée en bataille est distribuée en première, seconde, troisième ligne, corps de réserve, ou en centre, aîle droite et aîle gauche ; dans une marche elle est distribuée en avant-garde, corps d’armée et arriere-garde, ou en colonnes, dont les unes sont formées des troupes, les autres de l’artillerie, des bagages, des caissons ; dans un siège et dans un camp elle est distribuée par quartiers. A la fin de la campagne on distribue les troupes en quartier d’hiver ou de rafraichissement. Voyez Armée, Bataille, Marche &c.

La distribution de la nourriture dans toutes les parties du corps est une des plus admirables merveilles de la nature. Voyez Digestion et Nourriture. Voilà les différentes acceptions du mot distribuer, ou du moins plusieurs de ces acceptions. Chambers. (G)

Distribution, figure de Rhétorique, par laquelle on fait avec ordre la division et l’énumération des qualités d’un sujet : telle est cette peinture que David fait des mécans. « Leur gosier est comme un sépulcre ouvert ; ils se sont servi de leurs langues pour tromper avec adresse ; ils ont sur leurs lèvres un venin d’aspic ; leur bouche est remplie de malédiction et d’amertume, leurs pieds sont vites et legers pour répandre le sang ». Voyez ENUMÉRATION et DESCRIPTION. (G)

DISTRIBUTION, (Jurisprudence) signifie plusieurs choses différentes.

DISTRIBUTION DE CONSEILLERS, est la répartition qui est faite des conseillers dans les différentes chambres ou services d’une même compagnie. Au parlement tous les conseillers nouvellement reçus, sont d’abord comme en dépôt à la première des enquêtes ; ensuite on les distribue dans une des cinq chambres des enquêtes, en leur distribuant un procès à rapporter dans cette chambre. (A)

DISTRIBUTIONS MANUELLES OU QUOTIDIENNES, sont les menues distributions qui se font journellement et en détail à chacun des chanoines qui ont assisté aux offices : Chopin les appelle diaria vel diurna annona.

Le relâchement s’étant introduit parmi les chanoines, après qu’ils eurent quitté la vie commune, on fut obligé de mettre une partie de leurs revenus en distributions manuelles et journalières, afin de les rendre plus assidus à l’office divin. Ce fut ce motif qui engagea Yves de Chartres à établir de telles distributions pour ses chanoines, comme il l’écrit au pape Paschal, epist. 219.

Par le concîle de Trente, sess. XXI. ch. IIIe il est permis aux évêques, comme délégués du saint siège, d’assigner aux églises, tant cathédrales que collégiales qui n’ont point de distributions ordinaires, la troisième portion des fruits et revenus, pour l’appliquer aux diverses distributions.

Les statuts qui changeraient la qualité des distributions manuelles, et qui les accorderaient aux chanoines pour de rares et légères assistances, seraient déclarés abusifs ; elles ne sont dû.s qu’à ceux qui ont réellement été présents aux offices.

On ne répute présents que ceux qui ont assisté du moins aux trois grandes heures canoniales, qui sont matines, la messe et vêpres. Les statuts qui réputent présents pour toute la journée ceux qui assistent à l’une des trois grandes heures, sont déclarés abusifs ; et pour être réputé présent aux grandes heures, il faut y avoir assisté depuis le commencement jusqu’à la fin : le chanoine-pointeur marque les absens.

Ceux qui entrent au chœur après le venite exultemus à matines, le kyrie eleïson à la messe, et le premier pseaume des vêpres ; ceux qui sont malades, ou ceux qui sont dispensés de résider à cause de quelqu’autre emploi considérable, ne gagnent que les gros fruits, et non pas les distributions manuelles et quotidiennes.

Mais ceux qui sont absens pour les affaires du chapitre, étant réputés présents à tous égards, ne perdent point les distributions manuelles.

Il y a aussi quelques églises dans lesquelles on donne une portion de ces distributions aux jeunes chanoines pendant le temps de leurs études ; telle est l’église collegiale de S. Georges de Vendôme : ce qui n’a lieu qu’en vertu de statuts et privilèges particuliers omologués au parlement.

Les distributions manuelles ne sont point saisissables, et ne sont pas comprises dans la restitution des fruits du bénéfice ; mais on les compte dans le revenu du bénéfice, lorsqu’il s’agit d’opposer la repletion à un gradué. Voyez la pragmat. sanct. tit. IIe decreta eccles. gall. liv. VI. tit. IIe Bibliot. can. tome I. p. 516. et tome II. p. 368. et les définit. can. p. 217. Selva, part. IIIe tract. quæst. XIIe n. 8. Rebusse sur le concord. titre de collat. au mot distribut. Chopin, de sacr. polit. lib. III. tit. IIIe n. 21. journ. des aud. tome II. arrêt du 20 Décembre 1660. (A)

DISTRIBUTION DES INSTANCES ET PROCÈS, est le partage que le président fait dans chaque chambre entre les conseillers, des instances et procès appointés : il y a un registre sur lequel on inscrit cette distribution. (A)

Distribution du prix des biens saisis, est la répartition que l’on en fait entre les créanciers saisissants et opposans.

Dans les pays de droit écrit on entend quelquefois par le terme de distribution des biens, la saisie réelle même : ailleurs ce terme signifie l’ordre du prix ; c’est pourquoi on conjoint quelquefois ces termes, ordre et distribution du prix.

La distribution du prix des immeubles se fait par ordre d’hypothèque. V. HYPOTHEQUE et ORDRE.

Celle du prix des meubles se fait d’abord par préférence à certaines personnes privilégiées, savoir pour les frais funéraires, ensuite les propriétaires pour tous les loyers échus et à échoir ; et en cas qu’il n’y ait point de bail, pour trois termes et le courant ; les médecins, chirurgiens et apoticaires qui ont servi pendant la dernière maladie ; les gages des domestiques pour une année échue au jour du décès, si tant est dû ; les frais de scellé et d’inventaire : le tout par préférence aux autres créanciers, et par contribution au sou la livre, au cas que le prix ne soit pas suffisant pour les payer ; et après ces créanciers privilégiés, tous les autres créanciers chirographaires ou hypothéquaires sont payés par contribution, sans aucun privilège. Acte de notoriété du 4 Aout 1692 ; recueil des actes de notoriété, page 86. (A)

DISTRIBUTIONS QUOTIDIENNES, voyez ci-dev. DISTRIBUTIONS MANUELLES. (A)

DISTRIBUTION, en Anatomie, se dit des vaisseaux et des nerfs : la distribution de l’aorte, la distribution de la cinquième paire, etc. (L)

DISTRIBUTION, dans le Commerce, répartition d’une chose entre plusieurs, suivant les raisons, droits et actions que chacun peut y avoir.

La distribution des profits d’une compagnie de commerce dont les fonds consistent en actions, se fait aux actionnaires à proportion de la quantité d’actions qu’ils y ont ; autrement elle se fait suivant la part que chaque intéressé y a, comme pour une moitié, un quart, un dixième, et c. Dictionnaire de Comm. et de Trév. (G)

DISTRIBUTION, (Architecture) sous ce nom on entend la répartition de tout le terrain sur lequel on érige un édifice, de quelqu’usage qu’il puisse être ; car il ne suffit pas que le principal corps de bâtiment soit distribué avantageusement et commodément, il faut aussi que ceux qui en dépendent soient non seulement exposés relativement à leurs usages, mais qu’ils soient aussi situés convenablement suivant leur destination, et le rapport que chacun d’eux a avec le bâtiment et les différentes personnes qui l’habitent, tels que sont les bâtiments des cuisines, des offices, des écuries, des remises, aussi-bien que leurs basses-cours ; et dans une maison de campagne, celles des bestiaux, des grains, &c.

Que dans les palais des rois la distribution soit faite de manière que les avenues, les avant-cours, les cours, les colonnades et portiques réunis avec les ailes de bâtiments destinées pour les princes, les ministres, concourent à former avec le palais un tout qui étonne, et qui annonce en même temps le génie de l’architecte, et la magnificence du monarque qui l’a fait élever.

Que les édifices sacrés soient grands et spacieux, selon le nombre de paraissiens qu’ils doivent contenir, accompagnés de bas côtés, et distribués de chapelles publiques et particulières, de sacristies, de charniers, etc. au contraire que ceux destinés pour des abbayes ou communautés d’hommes ou de femmes, soient moins considérables pour ce qui regarde le sanctuaire, mais pourvus de bâtiments adjacens, relatifs au nombre de personnes qui doivent y habiter.

Que les bâtiments publics, tels que les hôtels-de-ville, les juridictions, les bourses et autres, soient distribués de sorte que les citoyens puissent y être à couvert, conférer et attendre commodément les heures où ils doivent recevoir leurs audiences, leur argent, &c.

Que les bâtiments pour les commerçans aient leurs magasins proche de leur comptoir, et soient exposés suivant la nature des marchandises qu’ils doivent contenir ; de même les bâtiments particuliers destinés aux artisans, doivent être distribués d’une manière convenable à leur état : on doit préférer à la magnificence, la situation de leurs boutiques, leurs ateliers, chantiers, &c.

Après ces considérations générales, il en est autant de particulières que la diversité des terrains, qui est infinie ; et quoi que l’on puisse dire, en faisant l’éloge des Architectes français, que la distribution en France est poussée au plus haut degré de perfection, il n’en est pas moins vrai qu’il est difficîle de donner des préceptes précis sur cette partie de l’architecture : aussi presque tous nos auteurs modernes qui ont traité de cet art, et qui en ont voulu parler, nous ont plutôt donné la description de leurs bâtiments, que des règles qui puissent nous instruire. Ajoutons à cela que malgré le nombre de beaux bâtiments qui embellissent Paris et ses environs, il est moins aisé d’acquérir l’art de distribuer les bâtiments, que de les décorer, l’intérieur de ces édifices étant presque toujours impénétrable, ce qui n’arrive pas dans les dehors. D’ailleurs cette partie de l’art de bâtir est sujette, aussi-bien que la décoration, à la vicissitude et au dérèglement de l’imagination ; de-là vient que nos jeunes architectes, accoutumés à imiter indistinctement le beau ainsi que le médiocre dans leur art, ne composent qu’un tout assez mal entendu, et croient qu’à la faveur de quelques formes ingénieuses, les commodités, les dégagements, les enfilades et la symétrie peuvent être sacrifiés : d’autres se croyant pourvus d’imagination, se roidissent contre les règles de convenance, l’esprit, disent-ils, n’agissant jamais mieux ni plus heureusement, que lorsqu’il est affranchi de toute servitudes. Ce raisonnement, qui n’est que trop commun chez la plupart de ces prétendus grands génies, nous fait sentir la différence de ceux qui se rendent raison de ce qu’ils entreprennent, à ceux qui dans leurs travaux se croient au contraire guidés par un génie fécond et hardi ; car pour un ou deux génies extraordinaires qu’un siècle voit à peine naître, qui par leurs dispositions naturelles se forment un goût réglé sans les secours de la théorie et des préceptes, on en voit mille qui par leur présomption hazardant dans leurs distributions des formes vicieuses, autorisent les moins habiles encore à les imiter. Tout esprit raisonnable doit sentir cependant que ces génies rares et singuliers, si peu communs, ne réussissent que parce qu’ils affectent, sans trop y prendre garde, une disposition et un rapport harmonique entre les parties et le tout, qui a seul droit d’être appelé beauté, et sans lequel ils n’auraient pas réussi ; et que si ces mêmes génies eussent été aidés par la doctrine et les préceptes de leur art, ils auraient encore surpassé leurs productions.

Pour parvenir donc à distribuer avec convenance, il est des lois générales dont on ne peut s’écarter, et qui seules peuvent conduire à la théorie de la distribution des bâtiments à l’usage de la demeure des maîtres. A l’égard de ceux destinés pour les domestiques, tels que sont les cuisines, offices, remises, etc. nous en parlerons en son lieu. Ces lois générales concernent l’arrangement, la forme et l’usage des pièces de nécessité, de commodité et de bienséance.

Celles de nécessité semblent avoir un fondement certain et réel dans la nature, parce qu’il est essentiel qu’un édifice élevé pour la conservation des hommes, soit pourvu des pièces nécessaires non seulement à l’état du maître qui le fait ériger, mais aussi avec le nombre de ses domestiques et celui des étrangers qui composent sa société ou sa famille. De ce principe nait la diversité des bâtiments, quoiqu’élevés pour la même fin, et les différents étages que l’on pratique les uns sur les autres, quand la convenance de l’état ou des intérêts de famille oblige à bâtir dans un lieu serré, soit par rapport à son commerce, soit à la faveur de la proximité de la demeure des grands avec lesquels on est en relation. C’est dans cette occasion où le savoir de l’architecte a toujours de nouveaux motifs de se manifester, en cherchant à donner de l’harmonie à ces choses de nécessité, et en rapport direct avec celles qui sont du ressort de la construction et de la décoration, ces trois parties devant toujours marcher ensemble.

Ce qui regarde la commodité est aussi important, ayant pour objet l’exposition générale du bâtiment, sa situation et sa disposition, et surtout ses dégagements ; de manière que les pièces de société, de parade, celles qui sont destinées au repos, à l’étude, soient suffisamment dégagées, en sorte que les domestiques puissent faire leur service sans troubler leurs maîtres. C’est par cet arrangement que l’on trouve les commodités de la vie, qui naturellement nous porte à chérir ce qui nous est propre, et éviter tout ce qui peut nous nuire.

A l’égard de l’objet de bienséance, il parait plus difficîle à réduire en principes, y ayant plus de difficulté à s’apercevoir si ce qui nous plait dans cette partie du bâtiment, procede de quelque chose de réel qui tire son origine de la nature plutôt que de la prévention ou de l’habitude ; pour s’en éclaircir il faudrait approfondir si les productions des arts peuvent faire naître en nous des principes qui par la suite nous paraissent relatifs à la nature, ou bien si toutes les choses qui nous plaisent dans les ouvrages faits par l’art, ne partent que de la fécondité de notre imagination, ou par un usage reçu depuis longtemps parmi nous ; car nous regardons souvent en France comme principes de bienséance dans la distribution, ce que d’autres peuples envisagent sous d’autres formes, eu égard aux différents usages que la différence du climat fait varier, et auxquels on est obligé de se soumettre pour se conformer aux différentes mœurs et usages. Sans contredit c’est cet objet de bienséance qui fait toute la difficulté et tout le mérite de l’Architecture ; c’est lui qui assujettit non-seulement la convenance de la décoration intérieure des pièces, mais qui soumet cette même décoration à celle qui est extérieure : c’est elle encore qui exige de la symétrie dans les écoinçons, dans la situation des cheminées, dans la proportion des pièces, tant par rapport à leur hauteur qu’à leurs diamètres, à celles des croisées ; le tout relatif à la construction : considérations qui doivent être toutes réunies ensemble, et qui à beaucoup près ne sont pas si importantes dans ce qui regarde les pièces de nécessité et de commodité.

Après ces lois générales, pour parvenir à connaître celles qui concernent chaque pièce en particulier, voyez la définition, l’usage et la propriété de chaque pièce qui compose les plans exprimés dans les Planches. (P)

DISTRIBUTION DES EAUX, (Hydraulique) La distribution des eaux se fait différemment dans une ville et dans un jardin.

Dans une ville les tuyaux de plomb résistent plus que tous les autres au fardeau des voitures qui passent dans les rues.

La dépense considérable des machines des bâtiments où sont les châteaux d’eau, des conduites dans les rues, et les entretiens continuels des fontaines, ont obligé de vendre l’eau à Paris sur le pied de 200 liv. par ligne circulaire. Cette somme multipliée par 144 lignes, contenu du pouce, le fait valoir 28800 liv. On distribue l’eau au particulier qui l’achète, appelé concessionnaire, au pied de la fontaine, à condition de faire la dépense de la conduire chez soi, et de faire rétablir le pavé.

A Londres on oblige chaque maison d’acheter de l’eau ; elle passe dans de gros tuyaux de bois des deux côtés des rues et le long des maisons, on n’a qu’à tirer une branche de plomb d’un diamètre proportionné à l’eau qui doit être fournie, et la recevoir dans son réservoir : il est vrai que c’est de l’eau salée de la Tamise, et qu’on ne la donne que deux fois la semaine.

Voici la manière de partager à six particuliers une fontaine ou une source fournissant deux pouces d’eau.

L’eau courante tombant dans une première cuvette dont une cloison arrête le flot, coule par deux ouvertures d’un pouce chacune dans la cuvette de distribution, où il y a pareillement une cloison de calme : on y pratique en-dedans, le long du bord extérieur, six bassinets, pour distribuer à chaque particulier la quantité d’eau qu’il doit avoir : par exemple, un pouce au premier, un demi-pouce au second, un quart au troisième, vingt-cinq lignes au quatrième, neuf lignes au cinquième, et deux lignes au dernier. L’eau tombera de la cuvette dans les bassinets, par des jauges percées en rond tout-autour avec une ligne horizontale pour en régler le niveau. La jauge d’un pouce aura douze lignes de diamètre ; celle d’un demi-pouce, huit lignes et demie ; du quart de pouce, six lignes : la quatrième jauge qui donne vingt-cinq lignes d’eau, aura cinq lignes de diamètre ; celle de neuf lignes aura trois lignes ; et la dernière, qui ne doit fournir que deux lignes, aura une ligne et demie : ce qui compose en tout la dépense des deux pouces qu’apporte la source. L’eau descendra des bassinets par six conduites ou tuyaux séparés, pour se rendre à sa destination.

Quand il y a un plus grand nombre de concessionnaires, on est obligé d’en mettre plusieurs dans les mêmes bassinets, et c’est alors que les grosses jauges altèrent beaucoup les petites : à ceux qui auront quatre lignes, six lignes, neuf lignes, douze lignes, on leur distribuera la quantité d’eau qui leur est dû., par le moyen de la quille Voyez l’article Jauge.

S’il s’agit de distribuer l’eau dans un jardin, en la supposant amenée dans le réservoir au haut du parc d’où il la faut conduire dans les différentes parties d’un jardin, on doit d’abord examiner, 1° la quantité d’eau que l’on a, 2° la situation du lieu, 3° le nombre de fontaines que l’on se propose d’exécuter.

La jauge fait connaître la quantité d’eau qui se rend dans le réservoir, par exemple, d’un pouce allant jour et nuit, donnant en vingt-quatre heures 70 muids, et par heure près de 3 muids : l’expérience ayant fait connaître que l’eau courante d’un pouce de diamètre, donnait treize pintes et demie par minute, pourvu qu’elle soit entretenue une ligne au-dessus de l’orifice de la jauge.

La seconde chose à examiner, est la situation du lieu. Quoiqu’en des jardins on en distingue de trois espèces différentes, les jardins de niveau, ceux en pente douce, et les jardins en terrasses ; cependant par rapport aux fontaines, il n’en faut compter que deux, ceux en pente douce ou en terrasses étant les mêmes.

Dans un jardin de niveau, on ne peut pas faire jouer avec 70 muids d’eau par jour quantité de bassins, parce qu’il les faut tous tirer du même réservoir, ce qui le mettrait bientôt à sec. Retranchez-vous donc à fournir un bassin ou deux ; proportionnez-y la dépense des deux jets, que je suppose de six lignes d’ajutage chacun, venant d’un réservoir de 60 pieds de haut. Pour me servir du calcul fait dans la première formule (au mot Dépense), ces deux jets dépenseront chacun par heure 27½ muids, et 660 en vingt-quatre heures, ce qui fait pour les deux 1320 muids d’eau par jour. Cela fait voir l’impossibilité de faire deux jets, puisqu’un seul pendant trois heures dépenserait 82 muids et demi, et viderait le réservoir, à moins qu’il ne fût très-grand : il faut donc une juste proportion entre la dépense du jet et le contenu du réservoir.

Si dans ce jardin de niveau vous aviez des sources plus abondantes, comme de huit à dix pouces, tombant continuellement dans le réservoir, vous pourriez alors projeter de faire plusieurs bassins, et de tirer du réservoir deux conduites dont le diamètre fût proportionné à la sortie des ajutages.

Ayant dix pouces, vous aurez par jour 720 muids, ce qui peut fournir deux jets de six lignes d’ajutage, qui, suivant le calcul ci-dessus, venant d’un réservoir de 60 pieds de haut, dépenseraient 330 muids chacun en douze heures de temps, ce qui fera 660 muids pour les deux, en les arrêtant la nuit, et il y aura 60 muids d’eau de reste : l’on pourrait même ne faire qu’un jet en face du bâtiment, lequel ayant huit lignes de sortie, dépenserait en un jour 1176 muids ; mais en l’arrêtant la nuit, et le laissant aller douze heures de jour, il ne dépenserait que 588 muids, et il resterait encore 132 muids dans le réservoir.

C’est ainsi que quand on sait calculer et régler son eau, on peut faire jouer un jet toute la journée. L’habîle fontainier se peut encore ménager des pentes que la nature lui refuse, en baissant le terrain de quelques pouces d’un bassin à un autre, ce qui est suffisant pour donner de l’eau à gueule-bée à une orangerie ou à un potager.

On a moins d’embarras à distribuer l’eau dans les jardins en terrasses : en supposant toujours un réservoir de 60 pieds de haut, dont la source d’un pouce fournira 70 muids d’eau par jour, on n’aura sur la première terrasse qu’un seul jet à tirer d’un réservoir, et ce jet fournira le deuxième, le deuxième le troisième, et le troisième le quatrième ; ainsi le même jet de six lignes d’ajutage, en jouant trois heures par jour, dépensera 82 muids et demi, et consommera toute l’eau du réservoir, s’il n’a pas une grande capacité.

Si vous avez des cascades et des buffets à fournir, la distribution devient plus difficîle : ces pièces vont ordinairement de la décharge des bassins supérieurs, et ne se tirent point du principal réservoir. Si ces décharges ne sont pas suffisantes, on prend de l’eau dans quelqu’autre bassin ; de manière qu’une nappe, pour être bien nourrie, doit avoir deux pouces d’eau par chaque pied courant, et quand la première nappe est fournie, elle peut en faire aller vingt de suite. S’il y a des bouillons et des chandeliers qui accompagnent les cascades, pourvu qu’on fournisse les deux premiers de chaque coté par des conduites particulières d’un pouce et demi chacune, le premier de chaque côté fournira le troisième, le second le quatrième, et ainsi des autres. Il n’est pas nécessaire dans les cascades, de s’assujettir à la proportion des conduites par rapport à la sortie des ajutages, on ne cherche qu’à leur donner de la grosseur. (K)

DISTRIBUTION, (Jardinage) la distribution d’un jardin est la même chose que sa disposition ; l’une et l’autre doivent suivre la situation du terrain ; tout dépend de profiter des avantages du lieu et de corriger avec art les défauts qui s’y rencontrent. Les jardins les plus beaux sont les plus variés, ainsi chaque distribution demande un génie nouveau ; cette distribution doit être bien raisonnée, elle tire sa beauté de l’accord et de la proportion de toutes les parties entr’elles. Quand on n’a à disposer qu’un potager, qu’un fruitier, le génie trouve peu à s’exercer ; il n’en est pas de même quand il s’agit d’inventer et de disposer un jardin de plaisance ou de propreté.

Comme il y a trois sortes de jardins, ceux de niveau parfait en pente douce et en terrasses, c’est suivant les différentes situations qu’on doit en distribuer les parties : en effet ce qui conviendrait à un jardin de niveau parfait, réussirait mal dans un qui serait dressé sur la pente naturelle, ou coupé de plusieurs terrasses.

Nous avons quatre maximes fondamentales pour disposer un beau jardin : l’art doit céder à la nature, c’est la première maxime ; la seconde est de ne pas trop offusquer un jardin ; la troisième, de ne le point trop découvrir ; enfin la quatrième est de faire paraitre un jardin plus grand qu’il ne l’est effectivement.

Observez surtout de ne point mettre vide contre vide, c’est-à-dire un boulingrin contre un bassin, ni tous les bosquets ensemble, ce qui serait plein contre plein ; opposez adroitement le plein au vide, et le plat au relief.

Comme cette matière passerait les bornes prescrites aux lexicographes, on renvoye le lecteur au livre de la théorie et pratique du jardinage où elle est traitée amplement, et soutenue d’exemples et de très-belles planches qui ne laissent rien à désirer. (K)

DISTRIBUTION, (Imprimerie.) ce mot, dans la pratique de l’Imprimerie, s’entend d’une quantité de pages ou de formes destinées, après avoir passé sous la presse, à être remises dans les casses lettre à lettre, et dans leur cassetin, pour reproduire de nouvelles pages et de nouvelles formes.

DISTRIBUTION, se dit en Peinture, des objets et des lumières distribués dans un tableau. Il faut remarquer que lorsqu’on dit une belle distribution, on comprend celle des objets et celle des lumières ; au lieu que si l’on n’entend parler que d’une, il faut la spécifier. Voyez Coloris, Clair-obscur, etc. De Piles, et dictionn. de Peint. (R)