Les quantités commensurables sont l'une à l'autre comme l'unité est à un nombre entier rationnel, ou comme un nombre entier rationnel est à un autre entier rationnel. En effet, puisque les quantités commensurables ont une partie commune qui les mesure exactement, elles contiennent donc exactement cette partie : l'une, un certain nombre de fois ; l'autre, un autre nombre de fois : donc elles sont entr'elles comme ces deux nombres. Il en est autrement dans les incommensurables. Voyez INCOMMENSURABLE, NOMBRE, TIONNELNNEL.

Les nombres commensurables sont ceux qui ont quelque autre nombre qui les mesure, ou qui les divise sans aucun reste. Voyez NOMBRE.

Ainsi 6 et 8 sont l'un par rapport à l'autre, des nombres commensurables, parce que 2 les divise.

Commensurable en puissance. On dit que des lignes droites sont commensurables en puissance, quand leurs carrés sont mesurés exactement par un même espace ou une même surface ; ou, ce qui revient au même, quand les carrés de ces lignes ont entr'eux un rapport de nombre à nombre. Voyez LIGNE et PUISSANCE.

Les nombres sourds commensurables, sont ceux qui, étant réduits à leurs plus petits termes, sont entr'eux comme une quantité rationelle est à une autre quantité rationelle. Voyez SOURD. Ainsi 3 et 2 sont des nombres sourds commensurables, parce qu'ils sont entr'eux comme 3 à 2.

Les nombres commensurables sont proprement les seuls et vrais nombres. En effet tout nombre enferme l'idée d'un rapport, voyez NOMBRE ; et tout rapport réel entre deux quantités suppose une partie aliquote qui leur soit commune ; c'est ce qui sera plus détaillé à l'art. INCOMMENSURABLE. n'est point un nombre proprement dit, c'est une quantité qui n'existe point, et qu'il est impossible de trouver. Les fractions même ne sont des nombres commensurables, que parce que ces fractions représentent proprement des nombres entiers. En effet qu'est-ce que cette fraction 3/4 ? c'est trois fois le quart d'un tout, et ce quart est ici pris pour l'unité : il est vrai que ce quart lui-même est partie d'une autre unité dans laquelle il est contenu quatre fais. Mais cela n'empêche pas ce quart d'être regardé comme une seconde unité dans la fraction 3/4 ; cela est si vrai, qu'on en trouve la preuve dans la définition même des fractions ; le dénominateur, dit-on, compte le nombre des parties dans lesquelles le tout est divisé, et le numérateur compte combien on prend de ces parties ; ou ce qui est la même chose, combien de fois on en prend une. Cette partie est donc ici une véritable unité. Après cela, on ne doit pas être surpris que pour comparer entr'elles les fractions, on change leur rapport en celui de nombres entiers commensurables. Par exemple, pour avoir le rapport de 3/4 à 2/3, on trouve par les règles ordinaires que ce rapport est celui de 9 à 8 : cela est évident. Qu'est-ce que 3/4 ? c'est la même chose que 9/12, ou 9 fois le douzième de l'unité. Qu'est-ce que 2/3 ? c'est la même chose que 8/12 ou 8 fois le douzième de l'unité : donc les deux fractions comparées à la même unité (savoir 1/12), la contiennent 9 et 8 fois ; donc elles sont entr'elles comme 9 à 8 ; c'est-à-dire que la partie aliquote commune qui mesure, par exemple, les 3/4 et les 2/3 d'un pied, est la douzième partie du pied, et que cette douzième partie est contenue 9 fois dans la première et 8 dans la seconde.

De-là on peut conclure que non-seulement les nombres commensurables sont proprement les seuls et vrais membres, mais que les nombres entiers sont proprement les seuls vrais nombres commensurables, puisque tous les nombres sont proprement des nombres entiers. Voyez NOMBRE, FRACTION, etc. (O)