Un autre passage du même auteur (vie d'Othon), détermine encore plus précisément la forme de la cotte d'armes des Romains. Cet écrivain, après avoir dit qu'un centurion nommé Cornelius, étant venu à Rome demander le consulat pour son général, et voyant que les sollicitations étaient infructueuses, leva sa cotte d'armes, et montrant la garde de son épée, " voilà de quoi vous porter à m'accorder ma " demande : rejecto sagulo, ostendents gladii capulum, non dubitasse in curiâ dicère, hic faciet si vos non feceritis. On voit par ces paroles, que la cotte d'armes couvrait les armes de cet officier, et qu'il fut obligé de la relever pour montrer son épée, ce qui ne peut pas convenir à la cuirasse. Ces sortes d'armes, comme les écharpes de nos Cantabres dans la dernière guerre, servaient à distinguer les soldats de chaque parti ; celles des empereurs et des généraux d'armée se nommaient paludamentum, et celles des bas-officiers et des soldats, sagum. Les hauts officiers en avaient de fort longues et de fort riches ; mais le général était le seul qui eut le privilège d'en porter une de pourpre : il la prenait en sortant de la ville, et il la quittait avant que d'y rentrer.

A l'égard des sayons ou cottes d'armes des Germains, ils ne leur venaient que jusqu'aux hanches. Cluvier nous a conservé la forme de cette cotte d'armes, qui était une espèce de manteau qui descendait jusqu'aux hanches, et qui était attaché par-devant avec une agraffe ou une petite cheville.

Nos François néanmoins, quoiqu'originaires de la Germanie, avaient coutume de porter ces manteaux plus longs. Le moine de S. Gal dit que c'était un manteau qui descendait par-devant et par-derrière jusqu'à terre, et qui par les côtés touchait à peine les genoux. Dans la suite la cotte d'armes des Gaulois, qui était beaucoup plus courte, devint à la mode, comme plus propre pour la guerre, au rapport du même auteur. Quelques siècles après, Charlemagne rétablit l'ancien usage. Il parait que sous Louis le Débonnaire on était revenu à la cotte d'armes des Gaulois ; mais dans les guerres continuelles que ses successeurs eurent à soutenir, la mode rechangea ; et comme alors la plupart des militaires étaient continuellement à cheval, non-seulement la cotte d'armes couvrait tous leurs habits ; mais leur magnificence se renferma dans cet habillement militaire, qu'ils faisaient ordinairement de drap d'or et d'argent, et de riches fourrures d'hermines, de martres zibelines, de gris, de vair, et autres pannes, qu'on peignait même de différentes couleurs. Marc Velser (lib. IV. Rer. Aug.) prétend que les hérauts d'armes ont emprunté de ces cottes d'armes les métaux, les couleurs, et les pannes qui entrent dans la composition des armoiries.

Quoi qu'il en sait, les hérauts d'armes portent seuls aujourd'hui ce vêtement, que Nicod dit être appelé autrement tunique ; sur quoi il rapporte ces mots de Guaguin au couronnement du roi d'armes. Mont-joie portera la tunique ou cotte d'armes du roi... Au reste les cottes d'armes et les bannières n'étaient permises qu'aux chevaliers et aux anciens nobles. Voyez dans le recueil de l'acad. des Belles-Lettres, tom. IX. le morceau de M. l'abbé de Vertot sur cette matière. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT.