Les trois blanchisseries de Senlis sont situées sur la rivière de Nonnette, entre Senlis et Chantilly, vis-à-vis Courteuil. Les eaux de cette rivière, qui sont bordées de prés, sont au dire des gens du pays, les plus propres que l'on connaisse pour servir à blanchir les toiles.

La première préparation que l'on donne aux toiles, lorsqu'elles sont arrivées à la blanchisserie, consiste à en ôter le parou, qui est l'apprêt que le Tisserand leur donne. Voyez PAROU et l'article TISSERAND ; ce qui se fait en les laissant tremper dans l'eau pure : on les y laisse en Flandre pendant 8 à 10 jours, même dans les chaleurs. Au bout de ce temps, on les repame, on les étend, et on les seche. Ici, on les fait fouler dans le moulin : ce moulin est en tout semblable à celui des foulons. Voyez FOULON, MOULIN A FOULON ; il n'en diffère qu'en ce que les maillets n'ont point de dents, mais sont arrondis par la partie qui tombe sur les toiles : au reste la mécanique de ces moulins est exactement la même que celle des foulons en laine. Ceux qui ne se servent point de moulin, dégorgent les toiles, à force de les arroser, après les avoir laissé tremper pendant huit ou dix jours, comme nous avons dit.

Cette opération achevée, on repame les toiles. Repamer, c'est battre les toiles dans une eau courante, en les y jetant de dessus un petit pont qui traverse la rivière, et qui n'est élevé que d'un pied ou deux au-dessus de la surface de l'eau ; ce pont s'appelle repamoir, conjointement avec la partie du lit de la rivière ; dans laquelle les toiles trempent et sont battues. On étend ensuite les toiles pour les faire sécher, et on coule la première lessive.

Le lieu où on coule les lessives s'appelle particulièrement buerie ou blanchisserie, parce que ce n'est que par des lessives réitérées que l'on parvient à rendre les toiles blanches. Ce lieu, dis-je, est une salle plus ou moins grande selon le nombre des cuviers et des bacs que l'on y veut placer ; c'est dans le même lieu que l'on prépare et que l'on coule les lessives. L'eau y est conduite par des rigoles placées à une hauteur convenable au-dessus des chaudières ; cette eau est élevée par des pompes ou une roue à pots, ou par tout autre moyen que l'hydraulique enseigne.

Préparation de la lessive. Après avoir pulvérisé par le moyen d'une meule tournante, mue par un cheval ou par l'équipage du moulin, les cendres de cassoude et les avoir tamisées dans un tamis de cuivre, dont les trous n'excédent point la grosseur d'un grain de chenevi ; on les met tremper dans les bacs D, E, F, qui sont des coffres de charpente, revêtus intérieurement de planches bien étanchées. On laisse écouler, quand on le juge à propos, l'eau chargée des sels desdites cendres, dans les autres bacs G, H, I, qui sont au-dessous, dont on ne voit qu'une petite partie. Ces derniers bacs sont de briques ou tuileaux maçonnés avec du ciment, comme les bassins des jardins faits avec les mêmes matières.

Les trois bacs D, E, F, contiennent trois différentes sortes de cendres, dans le premier, on met tremper les cendres cassoudes ; dans le second, les cendres vecdasses, et dans le troisième, les cendres communes de bois neuf : ces trois sortes de cendres employées séparément ou mêlées ensemble dans différentes proportions, forment les différentes sortes de lessives qui sont en usage dans ces manufactures. Lorsque l'on veut faire une lessive, on prend dans un des bacs G, H, I, autant d'eau chargée des sels de la cendre du bac qui est au-dessus, qu'il en est besoin, ou de plusieurs bacs, s'il est nécessaire, pour faire une lessive composée : on met ces eaux qu'on doit avoir laissé reposer jusqu'à ce qu'elles soient claires et limpides, dans un autre bac de ciment C, où on les tient en réserve pour s'en servir au besoin.

Les cendres par cette première lotion à l'eau froide n'ont pu être épuisées totalement de leurs sels : pour en tirer le reste, on les met dans le bac B, qui est aussi de ciment. Ce bac s'appelle bac à brasser. Il reçoit l'eau chaude de la chaudière de fer A, qui est assise sur un fourneau de brique semblable à celui des Teinturiers. Cette eau chaude acheve de détremper les sels que l'eau froide n'avait pu dissoudre. Cette opération est encore accélérée par le travail des ouvriers, qui remuent continuellement les cendres dans l'eau avec des pelles de bois ; c'est ce qui a fait donner à ce bac le nom de bac à brasser. La lessive qu'on retire par ce moyen est jetée après qu'elle a été éclaircie dans le bac C, d'où on la tire pour la jeter dans des rigoles qui la conduisent dans les chaudières P, Q, R, S, établies chacune sur un fourneau, dont les ouvertures Y, Y, Y, Y, répondent sous une hotte de cheminée ; en sorte que la fumée du bois qui entretient le feu sous les chaudières, puisse trouver par-là une issue. Ces chaudières qui sont de fonte ou fer fondu, ont trois pieds de diamètre.

Les cuviers K, L, M, N, sont placés vis-à-vis des chaudières : ils sont de brique maçonnée avec chaux et ciment ; leur diamètre est d'environ six pieds, et leur profondeur à-peu-près la même. Chaque cuvier est garni dans son fond d'un plancher ou grillage de planches de chêne, élevé d'environ un pied au-dessus du fond des cuviers, qui est de maçonnerie comme tout le reste. Chaque cuvier à de plus deux tuyaux que l'on ferme avec des tampons ou des robinets. Un de ces deux tuyaux X qui sont placés au-dessous du plancher de planches, le plus près qu'il est possible du fond du cuvier, sert à couler la lessive du cuvier dans la chaudière ; l'autre placé à l'opposite du premier derrière le cuvier, et qu'on ne voit pas, sert à lâcher dans une rigole ou égoût caché aussi par les cuviers, au derrière desquels il est placé, la lessive contenue dans les cuviers après qu'on en a tiré tout le service qu'on peut en espérer, elle sort par cette rigole, pour s'aller perdre dans la rivière ou dans la campagne.

Pour couler la lessive, on puise avec un seau dans les chaudières P, Q, R, S, et on jette dans les cuviers K, L, M, N, O, remplis des toiles proposées à blanchir. Les cuviers de Flandre contiennent chacun quarante aunes de trois quarts, et on y met cent livres de cassoude. L'eau après avoir traversé les toiles retourne dans la chaudière, d'où on la reprend pour la jeter de nouveau sur les toiles ; ainsi alternativement pendant plusieurs heures.

La première lessive est composée de moitié de cendres de casseau, et de cendres du pays. Les toiles sortant de cette lessive doivent être étendues sur le pré et arrosées.

Pour étendre les toiles sur le pré, on se sert de plusieurs chevilles de bois qu'on fait passer dans des anneaux de ficelle qui sont cousus tout au-tour de la toile, et qu'on enfonce dans la terre, en sorte que la toîle soit bien tendue.

La disposition des prés favorise l'opération d'arroser : ils sont coupés comme on voit Pl. I. en a, b, c, d, e, f, g, h, i, k, l, m, n, o, p, q, de dix taises en dix taises par des canaux dans lesquels on a détourné le lit de la rivière. On prend l'eau dans ces canaux avec des écopes de forme singulière, représentées fig. 1. pl. II. de Blanchisserie. (V. ECOPE), et on la jette sur les toiles étendues, en sorte qu'elles se trouvent par-tout également mouillées : on réitère cette opération jusqu'à ce que les toiles soient entièrement dégorgées de cette première lessive.

Lorsque les toiles sont seches, on peut les retirer du pré, et les mettre à une seconde lessive.

La seconde lessive sera augmentée d'un tiers de cassoude. Les toiles seront ainsi coulées la troisième, quatrième et cinquième lessive, avec cette augmentation de cassoude, observant à chaque lessive ce qui a été prescrit ci-dessus.

Il faut observer que si après la première lessive on ne pouvait pas retirer les toiles seches de dessus le pré à cause des pluies, en ce cas, après avoir repamé les toiles, on pourrait les mettre à la lessive à la sortie du repamoir.

La sixième et septième lessive sera coulée avec la même quantité de cassoude que les précédentes, et avec les mêmes attentions ; c'est-à-dire, que les toiles doivent être seches.

La huitième et neuvième lessive sera faite avec les toiles qu'on aura repamées sortant du pré ; elles seront mises dans les cuviers étant mouillées.

On doit observer pour les lessives suivantes, dont le nombre est indéterminé, qu'il faut les encuveter seches une lessive, et les repamer, et les encuveter mouillées à la lessive suivante, ainsi alternativement.

On doit aussi observer pour les lessives où les toiles ont été encuvetées seches, qu'il faut que la lessive soit seulement à demi-chaude ; au lieu que quand les toiles sont écrues ou mouillées, elle peut être bouillante.

A l'égard de la quantité de cendres cassoudes, pour cent vingt pièces de Toîle de Flandre de trente-six aunes de longueur et de trois quarts de large, on met cent livres de cendres ; quant aux deux ou trois premières lessives, seulement quatre-vingt-livres.

Lorsque les toiles sont à demi blanches, on met un tiers de cendres vecdasses ; et lorsqu'elles sont tout à fait blanches, et prêtes à entrer au lait, les lessives sont seulement composées de cendres blanches ou de bois commun ; cette dernière donne un fond beaucoup plus clair, et un blanc plus parfait.

Lorsque les toiles sont blanches, il faut les retirer du pré, les repamer pour les mettre au lait, après qu'elles sont égouttées.

La laiterie est une salle plus ou moins grande, dans laquelle sont plusieurs grandes cuves de bois enterrées de toute leur hauteur dans le sol de la salle. La grandeur de ces cuves est à-peu-près égale à celle des cuviers. On jette les toiles encore moites dans ces cuves, et par-dessus une quantité suffisante de lait écrêmé, pour qu'elles soient entièrement plongées : on les laisse en cet état pendant vingt-quatre heures ; on les retire du lait pour les porter au repamoir, où elles sont repamées. Lorsque les toiles sont repamées, elles vont toutes mouillées à la frotterie ou frottoir. Le frottoir est une autre salle où des femmes sont occupées à savonner les lisières des toiles, qui n'ont pu être autant blanchies que le milieu de l'étoffe par les opérations précédentes.

Cette salle contient plusieurs baquets A, B, C, Pl. I. au bas, de trois pieds de large, et d'environ quatre pouces d'épaisseur, et de quinze ou dix-huit de profondeur : le bord supérieur de ces baquets, qu'on appelle plateaux, est incliné en-dedans, en sorte que l'eau puisse retomber : ils sont portés sur deux pièces de bois D D, E E, soutenues par des pieds scellés dans le plancher, qu'on appelle chantiers.

Chacun de ces plateaux contient un autre vase de bois X X X, dont le diamètre est à-peu-près le tiers de celui du plateau, qu'on appelle tinette ; cette tinette contient de l'eau chaude qui sert à détremper le savon noir contenu dans les écuelles de bois F F, posées sur les piliers G G, qui sont placés entre chaque plateau X.

Les autres ustenciles que cet atelier contient, sont un fourneau garni de sa chaudière, pour faire chauffer l'eau nécessaire aux tinettes ; quelques tables pour poser les toiles et les visiter, c'est-à-dire, examiner si les lisières ont été assez savonnées ; et une machine qu'on appelle chaise, représentée fig. première, Pl. I.

Ces chaises ne sont autre chose qu'une caisse à jour composée de quatre montants ou piliers, de quelques bâtons qui les unissent, et d'un fond de planches ; le tout a assez de ressemblance avec un tabouret commun renversé. Cet instrument sert à égoutter les toiles au sortir des mains des frotteuses.

Pour savonner les lisières, les toiles étant ployées en deux suivant leur longueur, et en plusieurs doubles, en sorte que toutes les lisières soient rassemblées dans l'étendue d'un pied et demi ou environ, la frotteuse prend un peu de savon dans l'écuelle F, l'applique sur l'endroit qui ne parait pas assez blanc ; elle frotte ensuite deux parties de lisière l'une contre l'autre jusqu'à ce que la tache soit effacée, observant de mouiller de temps en temps avec l'eau chaude contenue dans la tinette du plateau sur le bord duquel elle travaille. Deux ouvrières peuvent travailler en même temps sur le même plateau sans s'incommoder ; l'une est d'un côté des chantiers, et l'autre du côté opposé.

Après que les toiles ont été suffisamment frottées, elles vont à la lessive douce, de-là sur le pré pour être arrosées : au sortir du pré, il faut les repamer et les remettre au lait, d'où elles sortent pour être portées pour la seconde fois au frottoir, d'où elles passent à la lessive légère.

Cette lessive légère est composée d'un quart seulement de cassoude, si on a de la vecdasse, on peut couler les toiles avec la même quantité de cette dernière matière sans cassoude.

Lorsque les toiles sortent du frottoir pour la seconde fais, elles sont portées humides à la lessive : il faut en mettre seulement deux lits dans le cuvier, avoir la lessive chaude, et en jeter dessus environ la quantité qu'une chaudière en peut contenir ; cela fait, il faut en mettre deux autres lits, et les arroser avec la même lessive, et continuer de la sorte jusqu'à ce que toutes les toiles qui doivent passer par cette lessive soient entrées dans le cuvier ; alors on les arrosera avec la même lessive bouillante, que l'on aura augmentée d'eau pour que la chaudière soit pleine.

Après avoir laissé couler la lessive trois fais, on sortira les toiles ainsi chaudes, on les étendra sur le pré, où on les fera arroser deux ou trois fais.

Après le troisième arrosage, il faut retirer les toiles du pré, les porter mouillées au repamoir, et étant égouttées, on les remettra au lait ; continuant ainsi la même suite d'opérations jusqu'à ce qu'elles aient acquis tout le degré de blancheur dont elles sont capables, ou celui que l'on veut leur donner.

Cette suite d'opérations n'est pas si bien démontrée la meilleure, qu'on ne puisse s'en écarter dans bien des occasions : mais c'est la plus ordinaire. Il y a des qualités de toiles qui résistent à tous les efforts que l'on fait pour les blanchir parfaitement ; il faut se contenter alors d'un demi-blanc, ou davantage si on le peut atteindre : il y en a d'autres qui résistent à toutes ces opérations, et dont on vient facilement à bout en variant le procédé de quelques-unes, soit pour la dose ou pour l'ordre ; c'est où parait l'intelligence du manufacturier : c'est pourquoi il observe soigneusement si la blancheur de ses toiles fait du progrès en passant par les opérations que nous venons de décrire ; si elle s'arrête en chemin, il varie un peu le procédé, et par ce moyen il détruit ou diminue l'obstacle qui s'opposait au progrès de la blancheur de sa toile. Il ne faut quelquefois pour cela que deux lessives bouillantes de suite, au lieu que nous avons prescrit ci-devant de les donner alternativement bouillantes sur les toiles mouillées, et tiedes sur celles qui sont mises seches dans les cuviers ; ainsi de toutes les variétés dont ces opérations sont susceptibles.

Lorsque les toiles sont blanches, il faut les porter au repamoir ; mouillées du repamoir, il faut leur donner un premier bleu, et les faire secher sur les pieux.

Le bleu dont on se sert dans les manufactures est le bleu d'Inde appelé indigo, ou le bleu de Prusse qui a un plus bel oeil. On plonge les pièces de toîle dans un baquet rempli d'eau chargée plus ou moins de cette couleur ; on l'y retourne pour qu'elle s'en charge également ; ensuite on retire par un bout la pièce de toile, et on la roule en l'exprimant sur un bâton placé au-dessus du baquet à trois ou quatre pieds de hauteur, en sorte que la pièce de toîle a la figure d'un écheveau de fil ouvert, et suspendu par le bouton placé au-dessus du baquet. Après qu'elle est égouttée, on la tord pour exprimer la quantité d'eau superflue. Cette opération est très délicate ; car si on tord trop, toute la teinture bleue sort, et les toiles restent à peu près comme elles étaient avant que d'avoir été plongées dans le baquet : si au contraire on ne tord pas assez, on a à craindre que les toiles ne soient plus chargées de couleur dans un endroit que dans un autre.

L'opération de donner le bleu aux toiles, est suivie de celle de les étendre sur les pieux pour les faire sécher. Les pieux sont placés dans la campagne ou le pré ; ce sont des bâtons enfoncés fermement dans la terre, et qui en sortent d'environ quatre pieds : ils sont rangés sur des lignes droites comme les arbres d'un jardin. Sur les têtes de ces pieux, qui doivent se trouver en ligne droite, on étend une toîle grossière, ou une toîle qui n'a pas encore été blanchie, en sorte que le milieu de la largeur de la toîle porte sur la tête des pieux, et qu'elle pende de chaque côté. On affermit et on tire cette toîle pour qu'elle soit bien tendue ; et sur celle-ci on étend de même celle qui a été mise au bleu pour la faire sécher : elle doit être bien tendue, pour empêcher qu'elle ne s'étrécisse et se raccourcisse en séchant.

Lorsqu'elles seront seches on leur donnera l'apprêt qui suit : prenez de l'amydon, faites-le bouillir dans de l'eau, retirez-le de dessus le feu quand il sera cuit, et le passez par un linge.

Vous mettrez dans un autre pot ou vase un tiers d'amydon crud, que vous détremperez dans de l'eau sans le faire bouillir, et le passerez à-travers un linge. Cela fait, vous mettrez dans un troisième vase deux tiers d'amydon bouilli, avec un tiers d'amydon crud ; vous y ajouterez votre bleu ; ayant bien mêlé le tout, vous y plongerez vos toiles, et après les avoir bien trempées dans cette composition, vous les retirerez pour les faire sécher.

Après que les toiles sont seches, on les porte à la ploierie ou magasin, d'où elles ne sortent que pour retourner chez ceux à qui elles appartiennent, ou à qui elles sont destinées.

Mais comme les toiles après avoir passé par toutes les opérations dont on vient de parler, ont un grand nombre de faux plis, on leur donne dans la ploierie diverses préparations qui les effacent.

La première de ces préparations consiste à les faire passer dans le rouloir, qui est une espèce de calendre ou de presse en taille-douce. Le rouloir représenté fig. 2. Pl. III. est composé de deux jumelles, des montants C A, F B, fendus de D en A, d'une longue mortaise, de quatre montants K H, I G, F E, L M ; toutes ces pièces sont assemblées dans une plate-forme ou châssis I K L ; chacun des quatre montants est assemblé avec les jumelles par des traverses G D, H D, M E ; et les jumelles le sont l'une avec l'autre par le sommier A B : entre les deux jumelles au-dessous du sommier, on place sept rouleaux de bois de six à sept pouces de diamètre, et d'environ quatre pieds de longueur. Ces rouleaux dont les tourillons entrent dans les mortaises des jumelles, portent les uns sur les autres, en sorte que le mouvement d'un de ces rouleaux se communique à tous les autres, qui tournent alternativement en sens contraire.

Le rouleau marqué 6 dans le profil, porte un carré qui reçoit une manivelle, au moyen de laquelle on le fait tourner, et on communique le mouvement à tous les autres.

Sur les deux montants de devant est encore un autre rouleau, que l'on fait tourner avec une manivelle M. voyez aussi 9 le profil. A la partie opposée, c'est-à-dire derrière, est un autre rouleau 8 ; mais qui est fixé et percé de plusieurs trous pour recevoir des chevilles a, entre lesquelles la pièce de toîle est conduite. Enfin, au-dessous des rouleaux est une table de bois qui occupe tout le vide du châssis I K L, dont l'usage est d'empêcher la toîle de toucher le plancher. La toîle est posée sur cette table, comme on le voit dans la figure, et le trait noir représente le profil de la toile, qui est ployée en zig-zag. On prend le bout supérieur de cette toile, on le passe sous le rouleau 8, on le ramène entre les deux chevilles aa sur le rouleau 1 ; on fait tourner ensuite la manivelle du rouleau 6 du sens convenable, pour que le chef de la toîle passe entre les rouleaux 1 et 2 ; continuant de tourner, on le fait passer entre les rouleaux 2 et 3, et successivement entre tous les autres, jusqu'à ce qu'il sorte entre les rouleaux 6 et 7 du coté de G. Lorsqu'il en est sorti une longueur convenable 7, 9, on reçoit le chef sur le rouleau 9, où on l'assujettit par le moyen d'une envergeure ou petite baguette, qui se cache et se fixe ensuite dans une cavité de l'ensuple ; ce qui fait qu'en tournant la manivelle du rouleau 9, on amène toute la toîle sur lui sans craindre qu'elle se déroule ; cette opération redresse les fils de la trame et de la chaîne, que les opérations par lesquelles la toîle avait passé pour être blanchie, avaient beaucoup dérangés ; de plus elle efface les principaux plis.

Cette opération achevée ; on ôte le rouleau 9 de dessus ses supports I G, L M, et on le porte sur un autre A B, fig. 4. Planc. II. qu'on appelle par cette raison porte-rouleau. C'est une espèce de banc à quatre pieds, aux deux extrémités duquel sont deux montants, sur lesquels on pose les tourillons du rouleau. Cette machine se place au bout d'une table, auprès de laquelle les ployeuses sont assises. Elles ploient la toîle en botte, ainsi qu'il est d'usage. Lorsque les toiles sont ployées, on les met en presse avec des ais entre-deux comme les livres que l'on relie. Les presses dont on se sert pour cet effet, sont en tout semblables à celles des manufactures de papier, auxquelles nous renvoyons à cet égard.

Les toiles dû.ment pressées, pour leur faire perdre les plis qu'elles ont, sont enveloppées de papier ; c'est ce qu'on appelle mettre en papier, et aussi la dernière préparation qu'on leur donne dans les manufactures.

Il y a des toiles que l'on fait passer au mailloir, Planc. II. fig. 5. c'est-à-dire, que l'on les bat sur une pierre de marbre avec des maillets de bois, pour en aplatir les fils et leur donner une plus belle apparence : mais c'est une charlatanerie ; car au premier blanchissage, les fils qui avaient été aplatis reprennent leur rondeur ordinaire, et on est tout étonné de voir de la toîle qu'on a achetée pour de la toîle fine, devenir grossière ; d'ailleurs cette opération use plus les toiles que ne feraient deux ans de service.

Il y en a d'autres que l'on fait passer à la calendre ; cette méthode n'altère point tant les toiles : mais à l'égard de l'apparence de finesse et de perfection qu'elle leur donne, elle est comme l'autre sujette à l'inconvénient, que le premier blanchissage la fait évanouir.