Il y a la folle avoine, qu'on appelle aussi averon ; elle est stérîle et sans grain. Elle infecte un champ, et se repeuple, à moins qu'on ne l'arrache et qu'on n'en coupe les tiges avant sa maturité.

Les Canadiens ont une sorte d'avoine qu'ils recueillent en Juin ; elle est beaucoup plus grosse et plus délicate que la nôtre, et on la compare au riz pour la bonté.

Il y a des avoines rouges ; il y en a de blanches, et de noires. On croit que la rouge aime les terres légères et chaudes ; qu'elle résiste moins aux accidents du temps ; qu'elle s'épie plutôt que la noire, et qu'elle est moins nourrissante et plus chaude. La blanche passe pour avoir moins de substance que l'une et l'autre.

Vers la mi-Février, lorsque les grands froids seront passés, semez l'avoine, à moins que la terre ne soit trop humide. Semez-la plutôt dans les terres fortes que dans les terres légères et maigres, si vous craignez qu'elle ne verse. Prenez pour un arpent huit ou neuf boisseaux de semailles. Il faut que les terres où vous la répandrez, aient en un premier labour après la récolte des blés, et avant l'hiver. Le temps de sa semaille s'étendra jusqu'à la fin d'Avril : vous donnerez le second labour immédiatement avant que de semer : vous choisirez pour semer un temps un peu humide.

Si votre terre est forte, vous n'employerez point la charrue, pour recouvrir. Vous recouvrirez le grain semé dans les terres legeres, soit avec la charrue, soit avec la herse. Cela s'appelle semer dessous.

Quand vos avoines seront levées, vous les roulerez ; rouler, c'est abattre, adoucir, ou douçoyer, ou ploutrer, ou casser les mottes, et refouler le plant, avec un gros rouleau de bois, qu'un cheval traine sur toute la pièce d'avoine.

Vous n'oublierez pas de sarcler et d'échardonner ; il est aussi bon que vous sachiez que l'avoine dégénere dans les terres froides, et que par conséquent il faut les rechauffer avec des fumiers ; que l'avoine que vous battrez pour en faire de la semence, n'ait point été échauffée.

Vous ne dépouillerez vos avoines qu'après les blés, sur la fin d'Aout ; quand vous les verrez jaunes ou blanches, elles seront mûres. Il vaut mieux les scier que les faucher. Laissez-les javeller, ou reposer quelque temps sur le champ. Quand la rosée ou la pluie commencera à les noircir, écochelez ; écocheler, c'est ramasser l'avoine en tas avec des fourches, et en former des gerbes. Comme elle n'est pas sujette à germer, on peut la laisser un peu à la pluie, et même l'arroser s'il ne pleut pas.

Un bon arpent d'avoine rapportera cent gerbes ; un mauvais trente au moins ; et les cent gerbes donneront trois septiers-mine. Pour conserver vos avoines sur le grenier, mettez-y des feuilles de laurier. Plus vous les garderez, plus elles décheoiront. Elles veulent être souvent maniées. Ne donnez point d'avoine aux chevaux, sans l'avoir criblée et époussetée.

Les avoines se vendent ordinairement en Carême ; c'est le temps où les grandes maisons et les brasseurs font leurs provisions. Dans les endroits où l'on rade la mesure, celle d'avoine se rade du côté rond, et les autres grains par la rive carrée ; c'est la figure des grains qui fait cette différence. Il y a des endroits où elle se livre à la mesure ferue ; c'est-à-dire, qu'on frappe la mesure, soit avec la radoire, quand on ne la donne que rase, soit avec la pelle, quand on la fournit comble. Il y a des provinces où son boisseau est beaucoup plus grand que celui du blé, et où elle est assujettie à la verte moute. Voyez VERTE MOUTE, BOISSEAU, MESURE. Son prix dépend de toutes les causes qui font hausser et baisser les autres grains.

L'avoine sert principalement à nourrir les chevaux : on en fait du pain dans les temps de disette. Le gruau n'est autre chose que de l'avoine mondée. Voyez GRUAU. Les Moscovites en tirent par la distillation, une liqueur dont ils usent en guise de vin, et qui n'enivre guère moins.

Il y a dans le Maine une avoine qui se seme avant l'hiver, et se récolte avant les seigles.

L'avoine analysée donne une liqueur limpide, qui a l'odeur et la saveur d'avoine cuite, et qui est un peu acide et obscurément salée ; une liqueur roussâtre, empyreumatique, acide, austère, acre, piquante, avec indice de sel alkali ; une liqueur brune, alkaline, urineuse, et imprégnée de sel volatil urineux ; enfin de l'huîle épaisse comme un sirop. La masse noire restée dans la cornue et calcinée pendant douze heures au feu de réverbere, a donné des cendres dont on a tiré par lixiviation du sel alkali. Ainsi l'avoine est composée d'un sel ammoniacal enveloppé dans de l'huîle ; ce qui forme un mixte mucilagineux.

Les bouillons d'avoine sont salutaires ; ils adoucissent les humeurs ; ils divisent, ils poussent par les urines, et ils excitent quelquefois la transpiration. Ils sont utiles dans les catarrhes, les enrouements, la toux, l'ulcération et la secheresse de gorge, les aphtes, la pleurésie, la péripneumonie, les érésipeles, et les fiévres aiguës. L'avoine torréfiée dans une poêle avec quelques pincées de sel, mise chaude sur le ventre dans un linge fin, soulage la colique ; surtout si on y ajoute le genièvre et le cumin ; et sa farine en cataplasme desseche et digère médiocrement.