On donne le nom de toit ou de sou à l'endroit où l'on enferme les cochons. Il faut avoir deux toits, l'un pour les mâles, et l'autre pour les femelles et leurs petits ; sans quoi les verrats pourront blesser les truies quand elles seront pleines, et même dévorer les petits. L'aire du toit doit être bien pavée, les murs bien solidement construits, à moèllon et mortier, et revêtus en-dedans de douves de futailles. Comme ils font beaucoup de petits, le profit de ce bétail est considérable. Le porc châtré s'appelle cochon : celui qui ne l'est pas, verrat. Le verrat doit être choisi carré et vigoureux : il peut suffire à dix truies ; et il n'est bon que depuis un an jusqu'à quatre ou cinq. La truie sera longue, et elle produira depuis un an jusqu'à six ou sept : elle porte quatre mois, et cochonne dans le cinquième ; ainsi elle peut cochonner deux fois par an. Elle recherche l'approche du mâle quoique pleine.

Il faut donner aux cochons une petite litière, et nettoyer soigneusement leurs étables. Ces animaux aiment les bois, les glands, la faine, la châtaigne, et les fruits sauvages qu'on y trouve en automne, les terres fangeuses, les vers, les racines dont elles sont remplies, etc.

On les fait paitre depuis le mois de Mars jusqu'en Octobre, deux fois par jour ; le matin après la rosée jusqu'à dix heures ; le soir depuis deux heures jusqu'au soleil couchant ; en Octobre une fais, en hiver une fais, pourvu qu'il n'y ait ni neige, ni pluie, ni vent, etc.

Il ne faut pas laisser souffrir la soif aux cochons. On soue, c'est-à-dire on lâche la femelle au mâle, en Février, Mars et Avril ; on prend pour cela le temps de manière que les petits n'aient pas à souffrir les rigueurs de l'hiver.

On nourrit amplement la truie quand elle a cochonné ; on lui donne un mélange de son, d'eau tiede, et d'herbes fraiches : on ne lui laissera que sept à huit petits ; on vendra les autres à trois semaines. On gardera les mâles de préférence aux femelles ; on ne laissera qu'une femelle sur quatre à cinq mâles : on sevrera ceux-ci à deux mois ; on les laissera aller aux champs trois semaines après qu'ils seront venus ; on les nourrira d'eau blanchie avec le son soir et matin, jusqu'à ce qu'ils aient deux mois ; on les châtrera au printemps ou en automne, à six ou à quatre mois.

Quand les cochons seront forts, et qu'on se proposera de les engraisser, on leur donnera de l'orge pendant cinq ou six semaines, avec de l'eau mêlée de son ; on les menera dans les forêts à la glandée, ou on leur donnera dans la maison le gland qu'on aura ramassé. Il faudra donc ramasser le gland dans la saison ; on le conservera en le faisant sécher au four. On joindra à cette nourriture les buvées d'eau chaude, avec les navets, les carottes, les choux, et tous les rebuts des herbes potageres.

Quand le cochon est engraissé, ce qui ne demande guère que deux mois au plus, on le tue ; on le grille à un feu de paille ; on le racle, on enlève toutes les parties du dedans, et on sale le reste. Le saloir est une espèce de cuve oblongue et basse, avec un couvercle : on lave cette cuve avec de l'eau chaude, où l'on a mis bouillir du thym, de la lavande, du laurier, etc. puis on l'enfume avec des noix muscades ; on couvre le fond de sel : on prend un morceau de cochon, on le trempe dans l'eau, on l'essuie, on le pose sur la couche de sel ; on fait un second lit de sel et un second lit de cochon, et ainsi de suite, stratum super stratum ; on finit par un lit de sel. Il faut environ une livre de sel pour chaque vingt livres de viande ; on y ajoute un peu de girofle concassé ; on ferme le saloir. On laisse le cochon dans cet état environ un mois ; alors on peut l'ouvrir et manger du porc salé : pour cela on le trempe dans l'eau bouillante, on l'expose à l'air, et on l'emploie comme on veut.

Il y a d'autres manières de saler le porc, mais elles reviennent toutes à celles-ci. Le cochon est particulièrement sujet à la ladrerie : on s'aperçoit de cette maladie à des ulcères qu'on lui remarque à la langue et au palais, à des grains dont sa chair est parsemée, etc. Voyez BOUCHER. Il n'est pas exempt pour cela des autres maladies des bestiaux.

La chair fraiche du cochon, sa chair salée ou fumée mangée en petite quantité, aident la digestion ; en grande quantité, elle se digère difficilement. Le bouillon de porc-frais peut arrêter le vomissement : le vieux lard fondu déterge et consolide les plaies : la panne est émolliente, anodyne, et résolutive : on attribue au fiel la propriété de déterger les ulcères des oreilles, et de faire croitre les cheveux ; à la fiente, celle de résoudre, de guérir la gale, d'arrêter le saignement de nez, prise en poudre, et de soulager dans l'esquinancie appliquée en cataplasme : la graisse lavée et préparée entre dans quelques emplâtres, et dans un grand nombre d'onguents ; c'est la base des pommades.

La viande de cochon a été proscrite chez quelques peuples, par exemple en Arabie, où il n'y a point de bois, point de nourriture pour cet animal, et où la salure des eaux et des aliments rend le peuple très-sujet aux maladies de la peau : la loi qui le défend dans ces contrées, est donc purement locale, et ne peut être bonne pour d'autres pays où le cochon est une nourriture presque universelle, et en quelque façon nécessaire.

Sanctorius a observé que la chair de cochon se transpire peu, et que la diminution de cette excrétion Ve à un tiers dans ceux qui s'en nourrissent ; d'ailleurs on sait que le défaut de transpiration occasionne ou aigrit les maladies de la peau : cette nourriture doit donc être défendue dans les pays où l'on est exposé à ces maladies, comme la Palestine, l'Arabie, l'Egypte, la Lybie, etc. Voyez l'esprit des lais.

Le cochon était immolé par les anciens aux Lares, à Priape, aux Sylvains, à Bacchus, à Cérès, à Hercule, etc. On sacrifiait à Lacédémone un cochon de chaque ventrée.

COCHON DE GUINEE, porcus guincensis, Maregr. animal quadrupede qui est de couleur rousse, et qui ressemble à nos cochons pour la figure ; mais sa tête n'est pas si élevée : ses oreilles sont longues et pointues ; sa queue descend fort bas, et n'est point couverte de poil non plus que le dos. Il y a sur tout le reste du corps un poil court, roux et brillant ; mais il est plus long près de l'origine de la queue et autour du cou. Rai, synop. anim. quadr. Voyez QUADRUPEDE. (I)

COCHON D'INDE, cuniculus sive porcellus indicus, Gesn. mus seu cuniculus americanus, et guincensis porcelli pilis et voce. Au Bresil on donne à cet animal le nom de cavia cobaya. Maregr. C'est un quadrupede plus petit que le lapin ; son corps est plus court et plus gros : ses oreilles sont courtes, minces, transparentes, évasées, arrondies, presqu'entièrement dégarnies de poil, et peu différentes de celles des rats : le museau et la barbe ressemblent à ces mêmes parties dans le lièvre : la lèvre supérieure est fendue comme celle du lapin. Le cochon d'Inde n'a point de queue ; ses dents sont semblables à celles des rats, et son poil peut être comparé à celui du cochon. Il crie comme les petits cochons, c'est pourquoi on l'a appelé cochon de Guinée. Sa couleur varie ; on en voit de blancs, de roux et de noirs, et la plupart sont en partie blancs, et en partie roux et noirs. Il y a quatre doigts aux pieds de devant, et trois à ceux de dernière ; le doigt du milieu est le plus long. Ces animaux frottent leur tête avec les pattes de devant, et s'asseyent sur celles de derrière comme les lapins ; mais ils ne creusent pas en terre. Les femelles portent jusqu'à huit petits à la fais. Les cochons d'Inde vivent de foin et de toutes sortes de plantes : ils sont bons à manger, mais non pas excellents. Rai, synop. anim. quadr.

Cet animal est naturalisé dans ce pays-ci, et mis au nombre de nos animaux domestiques. On l'élève aisément ; il ne craint que le grand froid. Voyez QUADRUPEDE. (I)

COCHON CHINOIS. Cet animal est parvenu en Europe ; on le connait en France. On dit qu'il est plus petit que notre cochon, qu'il a le dos concave et pour ainsi dire ensellé, etc. On l'engraisse, et il passe pour très-bon à manger.

COCHON-MARON ; c'est le nom que l'on donne dans les îles de l'Amérique aux cochons que l'on y a portés des autres parties du monde, et qui y sont devenus sauvages. On en distingue de trois espèces.

Ceux de la première sont courts ; ils ont la tête grosse, le museau peu allongé, et les défenses fort longues : les jambes de devant sont plus courtes que celles de derrière presque d'un tiers, ce qui les fait souvent culbuter lorsqu'ils courent en descendant. Ils deviennent féroces et très-dangereux quand ils sont blessés par les chasseurs. On prétend qu'ils ont été apportés par les Espagnols dans le temps de la découverte de l'Amérique, et qu'ils ont été tirés de Cadix, où on en voit encore qui leur ressemblent beaucoup.

Les cochons-marons de la seconde espèce ne diffèrent en aucune façon de nos cochons domestiques, et il parait qu'ils se sont échappés des parcs où on les nourrissait après avoir été transportés aux iles.

Enfin ceux de la troisième espèce sont appelés cochons de Siam, parce qu'ils ont été apportés aux îles par des vaisseaux français qui revenaient de Siam et de la Chine. (I)