Ces noms nouveaux devinrent des noms de familles, ou des surnoms, et les noms anciens continuèrent d'être des noms personnels ; les premiers s'appelaient cognomina, et gentilitia nomina ; et les derniers s'appelaient praenomina. Voyez PRENOM.

Quand les François et les Anglais commencèrent à faire usage des premiers, on les appelait surnoms, non pas que ce fussent les noms du père, mais parce que, selon Cambden, on les ajoutait aux noms personnels, ou plutôt parce que, selon Ducange, ce nom de famille se mettait au commencement au-dessus du nom personnel, de cette manière :

De Bourbon

Louis.

Au lieu de surnoms, les Hébreux, pour conserver la mémoire de leurs tributs, ont coutume de prendre le nom de leur père, en y ajoutant le mot de Ben, fils : comme Melchi ben Addi, Addi ben Cosam, etc. de même les Grecs disaient, Icare, fils de Dédale ; Dédale, fils d'Eussalme, etc. les anciens Saxons disaient Conrald, fils de Cléowald ; Cléowald, fils de Cut ; les anciens Normands disaient, Jean, fitz Robert ; Robert, fitz Ralph, etc. Ce qui subsiste encore en Irlande, et en Moscovie, où les czars ont joint leurs noms à ceux de leurs pères : ainsi le czar Pierre se nommait Pierre Alexiowitz, c'est-à-dire, Pierre, fils d'Alexis.

Scaliger ajoute que les Arabes prenant le nom ou le surnom de leurs pères, sans se servir de leur nom personnel, comme aven Pace ; aven Zoar ; c'est-à-dire, fils de Pace, fils de Zoar, etc. Si Pace avait un fils, et qu'à sa circoncision on l'eut appelé Haly, ce fils aurait pris le nom d'aven Pace, sans faire mention d'Haly ; mais le fils de ce dernier, se serait appelé aven Haly, quelqu'autre nom qu'il eut reçu à la circoncision, etc.

Les Romains, par succession de temps, multiplièrent leurs surnoms ; et outre le nom général de leur famille, ou nomen gentilitium, ils en adoptaient un autre particulier, pour distinguer la branche de la famille, ce qu'ils appelaient cognomen ; et quelquefois un troisième, par rapport à quelque action ou distinction personnelle, comme étaient le nom d'Africanus, pris par Scipion, et celui de Torquatus, pris par Manlius.

Ces trois différentes sortes de surnoms avaient aussi leurs noms différents : savoir nomen, cognomen, et agnomen ; mais les deux derniers n'étaient point héréditaires, parce que dans le fond, ce n'étaient que des espèces de sobriquets, surtout quand ces noms ne marquaient ni une bonne, ni une mauvaise qualité. Spanheim a traité avec beaucoup d'exactitude, ce qui regarde les noms et les surnoms des Romains, de praest. et usu numism. diss. 10. Voyez AGNOMEN.

Les Romains ont été imités en cela par les autres nations, qui outre l'ordre numéral de succession, qui était suffisant pour distinguer les princes, leur ont de plus donné divers surnoms pour les distinguer, tirés de quelque vertu ou action éclatante, ou même de quelque qualité corporelle : ainsi parmi nos rais, dans ceux-là seuls qui ont porté le nom de Philippe, nous trouvons Philippe auguste ou le conquérant ; Philippe le hardi, Philippe le bel, Philippe le long ; et dans ceux du nom de Louis, Louis d'outremer, Louis le débonnaire, Louis le gros, Louis le jeune, Louis le père du peuple, Louis le juste, Louis le grand, etc. Dans l'histoire d'Angleterre nous trouvons qu'Edgar fut surnommé le paisible, et Helred, le paresseux ; Edmond, côte de fer ; Harold, patte de lièvre ; Guillaume, le bâtard ; Henri, beauclerc ; Jean, sans terre ; &c.

Mais les fils de ces princes n'adoptèrent point ces noms ; Cambden et autres trouvent étrange que Plantagenet ait été le surnom de la famille royale d'Angleterre, jusqu'au roi Henri VII ; et celui de Tydur ou Tudor, le nom des rois d'Angleterre depuis Henri VII. jusqu'à Jacques I ; celui de Stuard, le nom des rois depuis Jacques I. jusqu'à George I. Celui de Valais, le surnom de la dernière race des rois de France ; celui de Bourbon, le surnom de la famille regnante ; celui d'Oldembourg, le surnom des rois de Danemarck ; et celui d'Habsbourg, le nom de famille des empereurs de la maison d'Autriche. Voyez PLANTAGENET.

Duchesne observe que les surnoms étaient inconnus en France avant l'année 987, lorsque les seigneurs commencèrent à prendre les noms de leurs domaines. Cambden rapporte que l'on commença à les prendre en Angleterre, un peu avant la conquête qui se fit sous le roi Edouard le confesseur ; mais il ajoute que cette coutume ne fut pas établie parfaitement parmi le commun du peuple, avant le règne d'Edouard II. car jusqu'alors on ne prenait que le nom de son père ; si par exemple, le père s'appelait Richard, le fils prenait le nom de Richard son, c'est-à-dire fils de Richard ; mais depuis ce temps-là, l'usage des surnoms fut établi, à ce que disent quelques auteurs, par un acte de parlement.

Les plus anciens surnoms sont ceux que l'on trouve dans le grand cadastre ou terrier d'Angleterre, et dont la plupart sont des noms de places, devant lesquelles on met la particule de, comme Godefridus de Mannevilla, Walterus de Vernon, Robert de Oyly, &c.

D'autres prenaient le nom de leurs pères, comme Guilielmus filius Osberni ; d'autres le nom de leurs charges, comme Eudo Dapifer, Gulielmus Camerarius, Gislebertus Cocus, etc. mais les simples particuliers ne prenaient que leurs noms de baptême, sans y ajouter aucun surnom.

En Suède, personne ne prit de surnom avant l'année 1514, et le commun du peuple n'en prend point encore aujourd'hui, non plus que les Irlandais, Polonais, Bohémiens, etc.

Ceux du pays de Galles n'en prennent que depuis peu, encore ne sont-ils formés que par la suppression de l'a dans le mot ap, dont ils ajoutent le p au nom de leur père, comme au-lieu de dire Evan ap Rice, ils disent aujourd'hui Evan Price, &c.

Dutillet soutient qu'originairement tous les surnoms furent donnés par forme de sobriquets, et il ajoute que tous ces surnoms sont significatifs et intelligibles pour ceux qui entendent les anciennes dialectes des différents pays.

La plupart des surnoms anglais, et ceux des plus grandes familles, sont des noms de terres de Normandie, où ceux qui passèrent en Angleterre avec Guillaume le conquerant, et qui portèrent les premiers ces noms, avaient leurs domaines, tels sont les noms Mortimer ou Mortemart, Warren ou Varennes, Albigny ou Aubigny, Piercy, d'Evreux, Tankerville, Neuil, Montfort, etc. Il ajoute qu'il n'y a pas un village en Normandie, qui n'ait donné le nom à quelque famille d'Angleterre ; les autres surnoms dérivent des places d'Angleterre, comme Aston, Sutton, Wotton, &c.

Parmi les anciens Saxons, les particuliers prenaient le nom de baptême de leur père ou de leur mère en y ajoutant le mot fitz ; plusieurs prenaient le surnom de leur métier, comme Jean Maréchal, Paul Charpentier, Jacques Tailleur, François Tisserand, etc. d'autres celui de leur office, comme Portier, Cuisinier, Sommelier, Berger, Charretier, etc. d'autres, de leur complexion, comme Fairfax, c'est-à-dire, beaux-cheveux, blond ou jaune ; d'autres, le nom d'oiseaux, comme Roitelet, Pinson, etc. d'autres, les noms d'animaux, comme Mouton, Lièvre, Cerf, etc. d'autres, les noms des vents ; d'autres, les noms des saints, etc.

En France les noms de famille sont héréditaires, tant pour les roturiers que pour les nobles, ceux-ci seulement ajoutent un nombre au nom de baptême qu'ils peuvent avoir commun avec leurs ancêtres, ainsi l'on dit dans les généalogies, Jean de Rochechouart, deuxième du nom ; Charles de Rohan Guemené, troisième du nom ; mais cette dénomination numérale n'appartient qu'aux ainés des maisons.