Cela posé, M. de Justi passe au procédé, et il dit que pour remédier au premier inconvénient, qui est celui du verd-de-gris auquel le cuivre est sujet, il faut enlever à ce métal l'acide qu'il contient, et qui est, selon lui, la cause principale de cette espèce de rouille. Pour cet effet, il faut purifier le cuivre ; on y parviendra en prenant un quarteron de potasse bien seche, un quarteron de fiel-de-verre, et trois onces de verre blanc ; on pulvérisera ces matières, on les mêlera ensemble, et on partagera ce mélange en deux parts égales. Alors on mettra une livre et deux onces de cuivre dans un creuset que l'on placera dans un fourneau à vent, on donnera un feu assez violent, Ve que le cuivre n'entre que difficilement en fusion. Lorsque ce métal sera fondu, on y joindra peu-à-peu et à différentes reprises la moitié du mélange dont on vient de parler ; on couvrira le creuset, on poussera le feu pendant environ un quart-d'heure ; au bout de ce temps, on videra le cuivre fondu dans une lingotière frottée de suif, ou bien on laissera refroidir le creuset, on le cassera ensuite pour en ôter le cuivre, que l'on séparera des sels qui formeront une espèce de scorie à sa surface. On réïtérera la même opération avec l'autre moitié du mélange que l'on avait mise à part. M. de Justi a trouvé que cette purification rendait le cuivre beaucoup plus doux, plus ductîle et plus brillant. Il assure que ce métal est dégagé par-là d'une portion de son acide qui, selon lui, produit le verd-de-gris, et il a reconnu par plusieurs expériences que cet acide s'était combiné avec les sels alkalis, qu'il avait employés pour la purification. Dans cette opération, le cuivre ne perd que deux onces de son poids, ainsi il reste encore une livre de cuivre purifié. On fera fondre cette livre de cuivre au fourneau à vent ou à l'aide des soufflets : aussi-tôt qu'il est entré parfaitement en fusion, on lui joindra treize onces de zinc ; on ajoutera en même temps une demi-once de poix-résine ou de suif, afin d'empêcher que le zinc ne se consume avant d'avoir eu le temps de se combiner avec le cuivre ; après quoi, on remue tout le mélange avec une baguette de fer. Comme ces matières ne tardent point à se consumer, et comme pourtant il est important que le zinc ait le temps de s'incorporer avec le cuivre, on tiendra prêt le mélange suivant, composé de trois onces de flux noir bien sec, fait avec trois parties de tartre crud et une partie de nitre ; on mêle ces deux substances, et on les fait détonner en y jetant un charbon allumé. A trois onces de ce flux noir, on joindra une once de sel ammoniac, une once de potasse, une once de fiel de verre, une demi-once de vitriol verd, deux onces de verre blanc pulvérisé, et une once de limaille de fer qui ait été lavée, et ensuite parfaitement séchée. Chacune de ces substances doit être réduite en une poudre très-fine, après quoi on les mêle soigneusement. Quand ce mélange a été ainsi préparé, on le chauffe, de peur qu'il n'attire l'humidité de l'air, et on en met une cuillerée à-la-fais dans le creuset ; on le recouvre de son couvercle, et l'on donne le feu le plus violent, afin que le tout fonde pendant cinq ou six minutes ; alors on retire le creuset du feu, on le laisse refroidir, et en le cassant on obtient du tombac.

M. de Justi assure que la limaille de fer contribue beaucoup à la bonté de cet alliage ; selon lui, il le rend plus compacte, d'un grain plus fin et plus aisé à travailler. Lorsqu'on veut en faire des ouvrages, on est obligé de faire fondre le tombac de nouveau ; mais aussi-tôt que cet alliage se fond, il faut y joindre de la poix ou du suif pour empêcher le zinc de se dissiper ; on donnera alors un feu violent, et l'on videra promptement le creuset dans des moules que l'on tiendra tout prêts pour lui donner la forme qu'on désire. Cet alliage sera d'une couleur qui approchera beaucoup de celle de l'or, il aura toutes les qualités que l'on a décrites ci-dessus, et aura un certain degré de ductilité, c'est-à-dire il ne sera point sujet à se casser.

On peut faire différentes espèces de tombac, suivant les différentes proportions, dans lesquelles on joindra du zinc avec le cuivre. En mettant parties égales de zinc et de cuivre, l'alliage aura une véritable couleur d'or, mais il sera très-cassant. Si l'on y met moins de treize onces de zinc sur une livre de cuivre, ce qui est la dose prescrite dans l'opération qui a été décrite, la couleur du tombac ne sera point si belle à proportion que l'on aura diminué la quantité du zinc. Mais comme bien des ouvriers, pour faire différents ouvrages en tombac, ont besoin qu'il soit ductîle et doux, plutôt que d'une belle couleur, voici la composition que M. de Justi leur propose dans ce cas.

On prendra dix onces de cuivre bien pur, et six onces de laiton ou de cuivre jauni par la calamine, on les fera fondre ensemble. Aussi-tôt qu'ils seront entrés en fusion, on leur joindra cinq onces de zinc. On continuera le reste du procédé de la manière qui a été indiquée pour la première opération, c'est-à-dire on y joindra des sels, du verre pulvérisé, etc. avec la seule différence, qu'au-lieu d'une once de limaille de fer, on n'en mettra qu'une demi-once. On aura de cette façon un tombac d'une couleur plus pâle que le précédent, mais il aura l'avantage de pouvoir s'étendre sous le marteau.

A chaque fois que l'on fait fondre le tombac, il perd quelque chose de son éclat et de sa qualité ; cela vient de ce que le feu dissipe une portion du zinc qui entre dans sa composition. C'est-là ce qui cause la diminution que cet alliage souffre dans son poids, qui est à chaque fois d'une ou deux onces par livre de tombac ; ainsi il est à propos de r'ajouter à chaque livre de cet alliage deux onces de zinc et un gros de limaille de fer, chaque fois qu'on fait fondre ; il sera aussi très-bon d'y joindre en même temps de la poix ou du suif. (-)

TOMBAC BLANC, (Métallurgie) c'est le nom qu'on donne quelquefois à une composition métallique blanche, et qui par sa couleur a quelque ressemblance avec l'argent, c'est du cuivre blanchi par l'arsenic.

On trouve plusieurs manières de faire cette composition. Voici celle que donne Stahl dans son Introduction à la Chimie. Faites fondre quatre onces de cuivre, auquel vous joindrez ensuite une demi-once d'arsenic fixé par le nitre, et qui sera empâté dans de la terre grasse humectée par de l'eau de chaux, dont on aura formé une ou deux boules. Laissez le tout en fusion environ pendant un quart d'heure. Prenez bien garde qu'il ne tombe point de charbons dans le creuset. Au bout de ce temps, videz le creuset, et examinez la couleur que cette composition tracera sur une pierre de touche ; et voyez si elle souffre le marteau. Si elle n'avait point de ductilité convenable, il faudrait la remettre en fusion pendant quelque temps avec du verre pilé, ou avec un peu de nitre. Si on joint à cette composition la moitié ou le tiers d'argent, sa couleur blanche ne s'altérera point.

Autre manière. Prenez une demi-livre de lames de cuivre. Plus, prenez de sel ammoniac, de nitre et de tartre de chacun une demi-once, de mercure sublimé deux gros. Stratifiez ces substances dans un creuset, et faites fondre le mélange à un feu très-fort. Réitérez la même opération à plusieurs reprises, à la fin le cuivre deviendra blanc comme de l'argent.

Autre. Prenez d'arsenic blanc une demi-livre ; de nitre et de sel ammoniac, de chacun quatre onces ; de borax et de fiel de verre, de chacun deux onces. Réduisez le tout en poudre. On prendra une once de ce mélange, que l'on joindra avec quatre onces de cuivre, avec lequel on le fera fondre ce qui le rendra blanc.

Autre. Prenez d'arsenic blanc, de mercure sublimé et d'argent, de chacun une once. On fera dissoudre chacune de ces substances séparément dans de l'eau-forte ; après quoi, on mêlera ensemble toutes ces dissolutions ; on enlevera par la distillation le superflu de la dissolution, jusqu'à ce que ce qui reste devienne trouble ; alors on y mettra de l'huîle de tartre par défaillance jusqu'à saturation, il se fera un précipité que l'on séchera. On prendra une once de ce précipité, que l'on fera fondre avec une livre de cuivre qui en deviendra d'un très-beau blanc.

Autre. Mettez dans un creuset une once d'arsenic blanc, deux onces de sel marin, deux onces de nitre, une once de potasse, on mêlera bien toutes ces substances ; après quoi, on mettra le creuset dans le feu sous une cheminée qui attire bien ; on l'y laissera jusqu'à ce qu'il n'en parte plus de vapeurs qui sont très-dangereuses. On prendra une once de cette matière qui sera restée dans le creuset, que l'on joindra avec quatre onces de lames de cuivre coupées par petits morceaux, et que l'on aura fait fondre dans un autre creuset ; on remuera bien le tout, et l'on y ajoutera deux onces de cuivre jaune réduit en lames très-minces ; on remuera de nouveau, et lorsque tout sera parfaitement entré en fusion, on mettra dans le creuset deux onces d'argent fin. Lorsque tout sera fondu, on remuera encore avec une verge de fer bien échauffée, et l'on videra le creuset dans une lingotière. L'on aura par ce moyen une composition métallique très-malléable, et qui ressemblera beaucoup à de l'argent.

Autre. Faites fondre dans un creuset deux onces d'argent ; lorsqu'il sera parfaitement fondu, joignez-y quatre onces de cuivre jaune qui a été rougi et éteint deux ou trois fois dans de fort vinaigre. Faites fondre le tout de nouveau, alors joignez-y de sel marin décrépité, de borax, de nitre et d'arsenic blanc, de chacun une demi-once. Faites fondre de nouveau le tout pendant une heure, et alors vous viderez votre creuset. (-)