On nomme en anglais la patelle the limpet ; en français elle a divers noms, suivant les lieux ; on l'appelle oeil de bouc dans quelques-uns de nos ports ; arapede en Provence, berdin ou bertin en Normandie, jamble en Poitou et dans le pays d'Aunis, bernicle en d'autres endroits : on pourrait fort bien lui conserver en français son nom latin de lepas, tiré du grec.

Cette coquille, comme je l'ai dit, est toujours adhérente au rocher ou à quelque autre corps dur. Cette adhérence lui sert de seconde valve pour la préserver des injures du temps ; ce qui fait qu'Aldrovandus et Rondelet ont mis mal-à-propos la patelle parmi les bivalves, mais ils n'ont été en cela suivis par aucun auteur.

M. Dargenville établit sept classes de patelles ; 1°. celles dont le sommet est pointu ; 2°. celles dont le sommet est aplati ; 3°. celles dont le sommet est chambré en dedans ; 4°. celles dont le sommet est fait en crosse ; 5°. celles dont le sommet est percé ; 6°. celles qui sont faites en étoiles à sept pointes qui partent du sommet, et qui saillent dans l'extrémité du contour ; 7°. celles dont le sommet est recourbé avec des stries profondes et noueuses appelées concholepades.

Dans la classe des patelles à sommet pointu, on nomme les espèces suivantes ; 1°. la patelle à sommet pyramidal et en pointe ; 2°. à sommet pyramidal cannelé ; 3°. à sommet de couleur cendrée ; 4°. à sommet poli, mais c'est une beauté qu'on lui donne en la polissant ; 5°. la patelle qui a dix côtés élevés.

Dans la classe des patelles à sommet aplati, on distingue les suivantes ; 1°. la patelle cannelée et marbrée ; 2°. la patelle imitant le bout d'un mamelon ; 3°. la patelle déchirée dans le contour de ses stries ; 4°. la patelle rayée de stries chevelues ; 5°. la patelle raiée et à pointes blanches ; 6°. la patelle nommée le bouclier d'écaille de tortue ; 7°. le bouclier de tortue à taches rouges ; 8°. la patelle rayée de rouge et de blanc ; 9°. la patelle à oeil de bouc ; 10°. la patelle de rubis ; mais on ne voit bien cette couleur que quand la coquille est travaillée et opposée à une forte lumière.

Dans la classe des patelles dont le sommet est chambré en dedans, on estime les espèces suivantes ; 1°. celle qui est de forme longue avec un bec ; 2°. la ronde à stries et à volutes : elle est très-rare ; 3°. le bonnet chinois ; 4°. la patelle dont le sommet est allongé régulièrement avec une languette intérieure qui sort du milieu ; on nomme cette patelle le cabochon ; 6°. la patelle à demi-cloison ; 7°. celle dont la pointe est faite en bonnet de dragon.

Dans la classe des patelles dont le sommet est fait en crosse, on compte, 1°. la patelle au sommet en crosse allongée ; 2°. celle à mamelons rougeâtres ; 3°. celle qui est cendrée en-dehors, couleur de rose en-dedans.

Dans la classe des patelles dont le sommet est percé, on met les suivantes ; 1°. la patelle faite en treillis ; 2°. celle qui est à grandes stries ; 3°. celle dont les stries sont menues comme des cheveux ; 4°. celle qui est de forme oblongue, avec deux trous réunis qui forment un ovale allongé : en la polissant on lui donne un rouge admirable, et en n'ôtant que la première écaille, elle est seulement de couleur cendrée.

La sixième classe n'offre guère que l'espèce que nous avons désignée.

Les sept classes présentent d'autres concholépas à stries moins profondes. Le concholépas est une patelle des plus singulières, car on la prendrait pour une moitié de bivalve, et il n'y a que le manque de charnière qui puisse convaincre qu'il dépend de la famille des patelles.

Dans la septième classe de patelles dont on vient de parcourir les espèces, la patelle ronde à stries et à volutes, est une des plus rares, comme nous l'avons remarqué ; elle n'est cependant qu'une variété de celles qui sont chambrées.

La patelle nommée le bouclier d'écaille de tortue, est encore une des rares par sa grandeur, la nacre de son intérieur, et la beauté de ses taches rouges.

Fabius Columna ne distingue que quatre espèces de lépas : le lépas ordinaire, parce qu'il est très-commun à Naples ; sa figure est ovale et sa couleur cendrée. Le grand lépas exotique qui vient d'Espagne, dont la coquille dure, épaisse, et à stries relevées, forme des angles et des dentelles autour de sa base. La troisième espèce s'appelle lepas sylvestre ; c'est un petit coquillage d'une ovale inégale, de couleur cendrée, avec quelques filets et des zones sur sa robe ; il est troué dans le haut, et c'est par où sortent ses excréments. Columna appelle la quatrième espèce patella regalis, la patelle royale ; elle est nacrée en-dedans, et percée de plusieurs trous, avec une écaille raboteuse. On voit assez par ce détail, que l'énumération des espèces de patelles faite par Columna, n'a point l'exactitude qu'on devait attendre d'un naturaliste aussi consommé qu'il l'était ; mais parlons du coquillage.

Les voyageurs connaissent la patelle ; il y en a peu qui ne se soient fait un plaisir de la détacher du rocher pour juger de son goût ; plusieurs peuples voisins de la mer en font leur nourriture ordinaire. On la trouve par-tout attachée au rocher, et l'animal occupe le fond de sa coquille, où il tient fortement par plusieurs liens. Si on le renverse, on remarque qu'une partie de son corps n'est pas revêtue de coquille : il sort de sa partie supérieure un petit corps allongé fait en poire, avec une ouverture en forme de bouche, garnie de lèvres, de mâchoires, et de dents, dont il est armé vers la partie la plus pointue. Les deux cornes avec deux points noirs qui sont ses yeux placés sur leur côté intérieur, lui servent à tâter et à reconnaître le terrain ; c'est par ce canal qu'il suce ses aliments ordinaires, qui sont du limon, de petits vermisseaux, et de l'algue marine. Les excréments sortent au-dessus de la tête, par l'anus, à côté des parties de la génération, à peu de distance de ces deux cornes. Une grosse partie charnue qui est au milieu lui sert à se mouvoir : on lui connait un mouvement lent et progressif, nécessaire pour respirer, et aller chercher sa nourriture sur les rochers qu'il a coutume de parcourir. On le voit en effet se détacher, en élevant sa coquille de deux ou trois lignes, et ramper sur une espèce de mamelon ou de base charnue, foncée en couleur : son mantelet est garni de trois rangs de filets aplatis qui forment une frange tout-au-tour.

Le corps de la patelle tient à sa circonférence par un cartilage très-simple. On le détache du rocher avec un instrument tranchant et pointu, qui coupe surement le nerf qui l'y attachait. Il se détache cependant de lui-même pour aller chercher sa nourriture. Ce testacé peut, sans sortir de sa place, élever sa coquille d'une ligne et demie, et la rabaisser de même. La partie sur laquelle il marche est plus solide que les autres ; cette base parait remplie d'une infinité de petits grains, comme si elle était chagrinée ; ce ne sont cependant que de petites cellules remplies d'eau et de glu, dont l'animal se sert alternativement à se coller sur une pierre, et à s'en détacher en délayant cette colle. Voyez la Conchyliologie de M. Dargenville, et les Mémoires de l'académie des Sciences. (D.J.)

PATELLE ou PATELLANE, s. f. (Mythologie) nom propre d'une déesse des anciens Romains ; on dit qu'elle veillait aux blés, lorsqu'ils commençaient à monter en épis ; c'est celle qui le faisait sortir heureusement, mais Arnobe emploie ces deux divinités différentes, l'une qui préside aux choses ouvertes, l'autre aux choses à ouvrir.