A l'égard des poissons, c'est leur queue qui contribue le plus à les faire nager, et non pas leurs nageoires, comme on se l'imagine assez généralement ; c'est pour cette raison que la nature leur a donné plus de force et plus de muscles dans cette partie que dans toutes les autres, tandis que nous remarquons le contraire dans tous les autres animaux, dont les parties motrices sont toujours les plus fortes, comme les cuisses dans l'homme, pour le faire marcher ; les muscles pectoraux dans les oiseaux pour les faire voler, etc. Voyez MARCHE, VOL, etc.

La manière dont les poissons s'avancent dans l'eau est parfaitement bien expliquée dans Borelli, de motu animal. part. I. cap. xxiij. ils ne se servent de leurs nageoires que pour tenir leurs corps en balance et en équilibre, et pour empêcher qu'il ne vacille en nageant. Voyez NAGEOIRE et QUEUE.

M. Thevenot a publié un livre curieux intitulé, l'art de nager, démontré par figures. Et avant lui Everard Digby, anglais, et Nicolas Winman, allemand, avaient deja donné les règles de cet art. Thevenot n'a fait, pour ainsi dire, que copier ces deux auteurs ; mais s'il se fût donné la peine de lire le traité de Borelli, avec la moitié de l'application qu'il a lu les deux autres, il n'aurait pas soutenu, comme il l'a fait, que l'homme nagerait naturellement, comme les autres animaux, s'il n'en était empêché par la peur qui augmente le danger.

Nous avons plusieurs expériences qui détruisent ce sentiment : en effet, que l'on jette dans l'eau quelque bête qui vient de naître, elle nagera ; que l'on y jette un enfant qui ne puisse point encore être susceptible de peur, il ne nagera point ; et il ira droit au fond. La raison en est que la structure et la configuration de la machine du corps humain sont très-différentes de celles des bêtes brutes, et surtout, ce qui est fort extraordinaire, par rapport à la situation du centre de sa gravité. Dans l'homme c'est la tête qui est d'une pesanteur excessive, eu égard à la pesanteur du reste de son corps, ce qui vient de ce que sa tête est garnie d'une quantité considérable de cervelle, et que toute sa masse est composée d'os, et de parties charnues, sans qu'il y ait des cavités remplies de la seule substance de l'air : de sorte que la tête de l'homme s'enfonçant par sa propre gravité dans l'eau, celle-ci ne tarde gueres à remplir le nez et les oreilles, et que le fort ou le pesant emportant le faible ou le leger, l'homme se noie, et périt en peu de temps.

Mais dans les bêtes brutes, comme leur tête ne renferme que très-peu de cervelle, et que d'ailleurs il s'y trouve beaucoup de sinus, ou cavités pleines d'air, sa pesanteur n'est pas proportionnée au reste de leurs corps, de sorte qu'elles n'ont aucune peine à soutenir le nez au-dessus de l'eau, et que suivant les principes de la statique pouvant ainsi respirer librement, elles ne courent aucun risque de se noyer.

En effet, l'art de nager, qui ne s'acquiert que par l'expérience et par l'exercice, consiste principalement dans l'adresse de tenir la tête hors de l'eau, de sorte que le nez et la bouche étant en liberté l'homme respire à son aise, le mouvement et l'extension de ses pieds et de ses mains lui suffisent pour le soutenir vers la surface de l'eau, et il s'en sert comme de rames pour conduire son corps. Il suffit même qu'il fasse le plus petit mouvement, car le corps de l'homme est à-peu-près de la même pesanteur qu'un égal volume d'eau, d'où il s'ensuit par les principes de l'hydrostatique que le corps de l'homme est déjà presque de lui-même en équilibre avec l'eau, et qu'il ne faut que peu de forces pour le soutenir.

M. Bazin, correspondant de l'académie royale des Sciences de Paris, a fait imprimer il y a quelques années à Strasbourg un petit ouvrage dans lequel il examine pourquoi les bêtes nagent naturellement, et pourquoi au contraire l'homme est obligé d'en chercher les moyens. Il en donne des raisons prises dans la différente structure du corps de l'homme et de celui des animaux, mais ces raisons sont différentes de celles que nous avons apportées ci-dessus. Selon lui les bêtes nagent naturellement parce que le mouvement naturel qu'elles font pour sortir de l'eau quand elles y sont jetées, est un mouvement propre par lui-même à les y soutenir : en effet, un animal à quatre pieds qui nage est dans la même situation, et fait les mêmes mouvements que quand il marche sur la terre ferme. Il n'en est pas de même de l'homme ; l'effort qu'il ferait pour marcher dans l'eau, en conservant la même situation que quand il marche naturellement, ne servirait qu'à le faire enfoncer, ainsi l'art de nager ne lui peut être naturel.

NAGER, l'action de nager, (Médecine) il y a peu de maladies chroniques dans lesquelles la nage soit bienfaisante, aussi l'ordonne-t-on rarement ; on prend cet exercice seulement en été ; il maigrit les personnes pléthoriques, facilite la transpiration, échauffe, attenue, et rend ceux qui y sont accoutumés moins sensibles aux injures de l'air, la nage ou le bain dans la mer est salutaire à ceux qui sont attaqués d'hydropisie, de gales, de maladies inflammatoires, d'exanthemes, d'élephanthiasis, de fluxion sur les jambes, ou sur quelqu'autre partie du corps.

La nage, soit dans l'eau douce, soit dans l'eau salée, qui est trop fraiche, porte à la tête ; et si on y demeure trop longtemps, sa fraicheur attaque les nerfs.

La nage dans l'eau naturellement chaude peut être aussi préjudiciable, cependant bien des gens s'y exposent sans en être endommagés.

La nage se faisait anciennement en se précautionnant et se préparant contre tous les accidents, soit par les onctions, soit par les frictions, et en se précipitant de quelque lieu élevé. Oribase, liv. VI. ch. xxij.

La nage a les mêmes avantages et les mêmes inconveniens que le bain, ainsi on peut la considérer comme un exercice ; car on s'y donne de grands mouvements qui sont fort salutaires. Voyez GYMNASE et GYMNASTIQUE. Quant à son avantage comme bain, voyez BAIN. C'est la meilleure façon de se laver et nettoyer le corps quand on peut la supporter.

NAGER A SEC, (Maréchalerie) opération que les Maréchaux ont inventée pour les chevaux qui ont eu un effort d'épaule ; elle consiste à attacher la jambe saine en faisant joindre le pied au coude, au moyen d'une longe qu'ils passent par-dessous le garrot, et dans cet état ils contraignent le cheval à marcher à trois jambes, et par conséquent à faire de nouveaux efforts sur la jambe malade, sous prétexte que par ce moyen il s'échauffe l'épaule, et qu'ainsi les remèdes pénètrent plus avant les pores étant plus ouverts ; mais il est aisé de voir que cet expédient ne fait qu'irriter la partie, augmenter la douleur, et rendre par conséquent le mal plus considérable qu'il n'était.