Outre le pillage des villes, qui arrive très-rarement, il y en a un autre qui produit le relâchement de la discipline, c'est la dévastation que fait le soldat dans le pays où le théâtre de la guerre est établi : ce pillage accoutume le soldat à secouer le joug de l'obéissance et de la discipline ; l'envie de conserver son butin peut amortir sa valeur, et l'engager même à se retirer : d'ailleurs, en ruinant le pays on le met hors d'état de payer les contributions, et on expose l'armée à la disette ou à la famine. On se prive ainsi par cette licence, non-seulement des ressources que le pays fournit pour s'y soutenir, mais l'on se fait encore autant d'ennemis qu'il contient d'habitants : le pillage de tout ce qu'ils possèdent les mettant au désespoir, les engage à profiter de tous les moyens de nuire à ceux qui les oppriment aussi cruellement.

Le pays où l'on fait la guerre, quelquefois l'exactitude de la discipline qu'on fait observer aux troupes, se ressent toujours beaucoup des calamités qui en sont inséparables : c'est pourquoi l'équité devrait engager à ne faire que le mal qui devient absolument inévitable, à ne point ruiner les choses dont la perte n'affoiblit point l'ennemi, et qui ne servent qu'à indisposer les peuples : telles sont les églises, les maisons, châteaux, etc. les animaux et les instruments qui servent à la culture des terres, devraient être conservés avec soin. Diodore de Sicîle nous apprend que parmi les Indiens, les laboureurs étaient regardés comme sacrés ; qu'ils travaillaient paisiblement et sans avoir rien à craindre à la vue même des armées, et qu'on ne savait ce que c'était que bruler ou couper les arbres en campagne.

La fermeté est très-nécessaire dans un général pour réprimer l'ardeur du pillage parmi les troupes ; les exemples de sévérité sont souvent à propos pour cet effet ; mais il faut les faire de bonne heure, afin que le trop grand nombre de coupables n'oblige point à leur pardonner.

Lorsque des troupes sont une fois accoutumées au pillage, au défaut de l'ennemi elles pillent leur propre pays, et même leurs magasins ; c'est ce qu'on a Ve dans plusieurs occasions, entr'autres dans la guerre de Hollande de 1672 ; mais M. de Louvois fit retenir sur le payement de toute l'armée, ce qui était nécessaire pour dédommager les entrepreneurs, et il ordonna d'en user de même toutes les fois que pareille chose arriverait. (Q)

PILLAGE, (Marine) le pillage est la dépouille des coffres et des hardes de l'ennemi pris, et l'argent qu'il a sur lui jusqu'à trente livres : le reste qui est le gros de la prise s'appelle butin.

Le capitaine ou les capitaines qui auront abordé un vaisseau ennemi, et qui l'auront pris, retiendront par préférence tous les vivres et les menues armes, et les matelots auront le pillage : mais pour le corps de la prise, le prix en sera distribué selon les divers règlements qui sont faits pour diverses occasions.