Ceux même des chapitres qui exécutent la musique, ne veulent point qu'on leur donne ce nom ; ils prétendent qu'il ne convient qu'à ceux qui sont pour le pleinchant, et ils se qualifient musiciens de l'église dans laquelle ils servent ; ainsi on dit les musiciens de Notre-Dame, de la sainte Chapelle, &c.

Pendant le séjour de l'empereur Charlemagne à Rome en l'an 789, les chantres de sa chapelle qui le suivaient ayant entendu les chantres romains, trouvèrent leur façon de chanter risible, parce qu'elle différait de la leur, et ils s'en moquèrent tout haut sans ménagement : ils chantèrent à leur tour ; et les chantres romains, aussi adroits qu'eux pour le moins à saisir et à peindre le ridicule, leur rendirent avec usure toutes les plaisanteries qu'ils en avaient reçues.

L'empereur qui voyait les objets en citoyen du monde, et qui était fort loin de croire que tout ce qui était bon sur la terre fût à sa cour, les engagea les uns et les autres à une espèce de combat de chant, dont il voulut être le juge ; et il prononça en faveur des romains. Le P. Daniel, hist. de Fr. tome I. p. 472.

On voit par-là combien les François datent de loin en fait de préventions et d'erreurs sur certains chapitres : mais un roi tel que Charlemagne n'était pas fait pour adopter de pareilles puérilités ; il semble que cette espèce de feu divin qui anime les grands hommes, épure aussi leur sentiment, et le rend plus fin, plus délicat, plus sur que celui des autres hommes. Personne dans le royaume ne l'avait plus exquis que Louis XIV. le temps a confirmé presque tous les jugements qu'il a portés en matière de gout.

On dit chantre, en Poésie, pour dire poète : ainsi on désigne Orphée sous la qualification de chantre de la Thrace, etc. On ne s'en sert que rarement dans le style figuré, et jamais dans le simple. (B)

CHANTRE, s. m. (Jurisprudence) en tant que ce terme signifie un office ou bénéfice, est ordinairement une des premières dignités d'un chapitre. Le chantre a été ainsi nommé par excellence, parce qu'il est le maître du chœur.

Dans les actes latins il est nommé cantor, praecentor, choraules. Le neuvième canon du concîle de Cologne, tenu en 1620, leur donne le titre de chor-évêques, comme étant proprement les évêques ou intendants du chœur. Voyez tome XI. des conciles, pag. 789. Le concîle tenu en la même ville en 1536, canon IIIe leur donne le même titre : cantores qui et chorepiscopi, tome XIV. des conciles, p. 510. Dans la plupart des cathédrales et collégiales, le chantre en dignité est surnommé grand-chantre, pour le distinguer des simples chantres ou choristes à gages.

Le concîle de Mexique tenu en 1585, ch. Ve règle les fonctions du chantre, et dit qu'il doit faire mettre toutes les semaines dans le chœur un tableau où l'ordre du service divin soit marqué.

Le chantre porte la chape et le bâton cantoral dans les fêtes solennelles, et donne le ton aux autres en commençant les pseaumes et les antiennes ; tel est l'usage de plusieurs églises ; et Chopin dit que c'est un droit commun, de sacr. polit. lib. I. tit. IIIe n. 10.

Il porte dans ses armes un bâton de chœur, pour marque de sa dignité. Dans quelques chapitres où il est le premier dignitaire, on l'appelle en latin primicerius ; et dans quelques autres on lui donne en français le titre de précenteur, du latin praecentor.

C'était lui anciennement qui dirigeait les diacres et les autres ministres inférieurs, pour le chant et les autres fonctions de leurs emplois.

Dans le chapitre de l'église de Paris, le chantre, qui est la seconde dignité, a une juridiction contentieuse sur tous les maîtres et maîtresses d'école de cette ville. Cette juridiction est exercée par un juge ; un vicegérent, un promoteur, et autres officiers nécessaires. L'appel des sentences Ve au parlement. M. le chantre a aussi un jour marqué dans l'année auquel il tient un synode pour tous les maîtres et maîtresses d'école de cette ville.

La juridiction contentieuse du chantre de l'église de Paris a été confirmée par plusieurs arrêts, des 4 Mars, 28 Juin 1685, 19 Mai 1628, 10 Juillet 1632, 29 Juillet 1650, 5 Janvier 1665, 31 Mars 1683. Voyez les mém. du clergé, édit. de 1716, tome I. pag. 1049 et suiv.

Les Ursulines ne sont pas soumises à sa juridiction. Ibid.

Il y a eu aussi arrêt du 25 Mai 1666 pour les curés de Paris contre M. le chantre, au sujet des écoles de charité. Voyez le recueil de Decombes greffier de l'officialité, part. II. ch. Ve p. 805.

Dans quelques églises, le chantre est la première dignité ; dans d'autres il n'est que la seconde, troisième ou quatrième, etc. cela dépend de l'usage de chaque église. Voyez le traité des mat. bénéfic. de Fuet, liv. II. ch. IVe (A)