Points cardinaux, en Cosmographie, sont les quatre intersections de l'horizon, avec le méridien et le premier vertical. Voyez POINT.

Il y en a deux, savoir, les intersections de l'horizon et du méridien, qu'on nomme nord et sud, ou nord et midy par rapport aux pôles vers lesquels ils se dirigent. Voyez NORD, SUD, MIDY.

Quant à la manière de déterminer ces points, voyez LIGNE MERIDIENNE.

Les deux autres, savoir, les intersections de l'horizon et du premier vertical, s'appellent est et ouest, ou levant et couchant, ou orient et occident. V. ces mots.

Les points cardinaux coïncident donc avec les quatre regions cardinales des cieux, et sont éloignés de quatre-vingt-dix degrés les uns des autres.

Les points intermédiaires s'appellent points collatéraux. Voyez POINTS COLLATERAUX.

Points cardinaux du ciel, se dit aussi quelquefois, mais plus rarement, du lever et du coucher du Soleil, du zénith et du nadir. Voyez LEVER, COUCHER, ZENITH et NADIR.

CARDINAUX, (vents) sont ceux qui soufflent des points cardinaux. Voyez VENT.

CARDINAUX, (signes) adj. pl. en Astronomie. On désigne ainsi les signes du zodiaque, qui sont les premiers où le Soleil est censé entrer au commencement de chaque saison ; savoir, le bélier, le cancer, la balance, et le capricorne. Voyez SIGNE et PRECESSION. (O)

CARDINAUX, (nombres) en Grammaire, ce sont les nombres 1, 2, 3, etc. qui sont indéclinables par opposition aux nombres ordinaux, premier, second, troisième, etc. Voyez NOMBRE.

CARDINAL, s. m. (Histoire ecclésiastique) se dit plus particulièrement d'un prince ecclésiastique, qui a voix active et passive dans le conclave, lors de l'élection du pape. Voyez CONCLAVE.

Quelques auteurs disent que le mot cardinal vient du latin incardinatio, qui signifie l'adoption que faisait une église d'un prêtre d'une église étrangère, d'où il avait été éloigné par quelques malheurs ; que l'usage de ce mot a commencé à Rome et à Ravenne, parce que les églises de ces deux villes étant les plus riches, les prêtres malheureux s'y retiraient ordinairement.

Les cardinaux composent le conseil et le sénat du pape. Il y a dans le vatican une constitution du pape Jean, qui règle le droit et les titres des cardinaux, et qui porte que comme le pape représente Moyse, ainsi les cardinaux représentent les soixante-dix anciens, qui sous l'autorité pontificale jugent et terminent les différends particuliers.

Les cardinaux dans leur première institution, n'étaient autre chose que les prêtres principaux ou les curés des paroisses de Rome. Dans la primitive église le prêtre principal d'une paraisse, qui suivait immédiatement l'évêque, fut appelé presbyter cardinalis. On les distinguait par-là des autres prêtres moins relevés en dignité, qui n'avaient ni église, ni emploi. Ce mot a commencé environ l'an 150 ; d'autres tiennent que ce fut sous le pape Sylvestre l'an 300 : ces prêtres cardinaux étaient les seuls qui pouvaient baptiser et administrer les sacrements. Autrefois les prêtres cardinaux étant faits évêques, leur cardinalat vaquait, parce qu'ils croyaient être élevés à une plus grande dignité. S. Grégoire se sert souvent de ce mot pour exprimer une grande dignité. Sous le pape Gregoire les cardinaux prêtres et les cardinaux diacres n'étaient autre chose que les prêtres ou les diacres qui avaient une église ou une chapelle à desservir. C'est-là ce que ce mot signifiait selon l'ancienne et véritable interprétation. Léon IV. les nomme dans le concîle de Rome, tenu en 853, presbyteros sui cardinis, et leurs églises parochias cardinales.

Les cardinaux demeurèrent sur le même pied jusqu'au XIe siècle : mais la grandeur du pape s'étant depuis extrêmement accrue, il voulut avoir un conseil de cardinaux, plus élevés en dignité que les anciens prêtres. Il est vrai que l'ancien nom est demeuré : mais ce qu'il exprimait n'est plus. Il se passa un assez longtemps sans qu'ils prissent le pas sur les évêques, ou qu'ils se fussent rendus les maîtres de l'élection du pape : mais dès qu'une fois ils ont été en possession de ces privilèges, ils ont eu bien-tôt après le chapeau rouge et la pourpre ; en sorte que croissant toujours en grandeur, ils se sont enfin élevés au-dessus des évêques par la seule dignité de cardinal.

Ducange observe qu'originairement il y avait trois sortes d'églises ? que les vraies églises s'appelaient proprement paroisses : les secondes, diaconies, qui étaient jointes à des hôpitaux desservis par des diacres : les troisiemes de simples oratoires, où on disait des messes particulières, et qui étaient desservis par des chapelains locaux et résidents ; et que pour distinguer les églises principales ou les paroisses, des chapelles ou des oratoires, on leur donna le nom de cardinales. Les églises paroissiales donnèrent en conséquence les titres aux cardinaux prêtres, et quelques chapelles donnèrent ensuite le titre aux cardinaux diacres. Voyez EGLISE.

Tous les cardinaux furent distribués sous cinq églises patriarchales : savoir, de S. Jean de Latran, de Sainte Marie-majeure, de S. Pierre du Vatican, de S. Paul, de S. Laurent. L'église de S. Jean de Latran avait sept cardinaux évêques que l'on appelait collatéraux ou hebdomadaires, parce qu'ils étaient assistants du pape, et faisaient en sa place le service divin chacun leur semaine. Ce sont les évêques d'Ostie, de Porto, de Sylva Candida ou Sainte Rufine, d'Albano, de Sabine, de Frescati, et de Palestrine.

L'évêché de Sainte Rufine est maintenant uni à celui de Porto. L'église de Sainte Marie majeure avait aussi sept cardinaux prêtres ; savoir, ceux de S. Philippe et S. Jacques, de S. Cyriace, de S. Eusebe, de Sainte Prudentienne, de S. Vital, des SS. Pierre et Marcellin, et de S. Clément. L'église patriarchale de S. Pierre avait les cardinaux prêtres de Sainte Marie de-là le Tibre, de S. Chrysogone, de Sainte Cécile, de Sainte Anastasie, de S. Laurent in Damaso, de S. Marc, et des SS. Martin et Sylvestre. L'église de S. Paul avait les cardinaux de Sainte Sabine, de S. Prisce, de Sainte Balbine, des SS. Nerée et Achillée, de S. Xiste, de S. Marcel, et de Sainte Susanne. L'église patriarchale de S. Laurent hors les murs, avait sept cardinaux, ceux de Sainte Praxede, de S. Pierre-aux-liens, de S. Laurent in Lucinâ, des SS. Jean et Paul, des SS. quatre couronnés, de S. Etienne au mont Celio, et de S. Quirice. Baronius sur l'année 1057, cite un rituel ou cérémonial extrait de la bibliothèque du Vatican, qui contient ce denombrement de cardinaux.

D'autres observent qu'on appelait cardinaux, non-seulement les prêtres, mais les évêques, les prêtres et les diacres titulaires, et attachés à une certaine église ; à la différence de ceux qui ne les servaient qu'en passant et par commission. Les églises titulaires où les titres étaient des espèces de paroisses, c'est-à-dire des églises attribuées chacune à un prêtre cardinal, avec un quartier fixé et déterminé qui en dépendait, et des fonts pour administrer le Baptême dans le cas où il ne pouvait pas être administré par l'évêque. Ces cardinaux étaient subordonnés aux évêques. C'est pour cela que dans les conciles, par exemple dans celui de Rome tenu l'an 868, ils ne souscrivent qu'après les évêques. Ce n'était pas seulement à Rome qu'ils portaient ce nom : on trouve des prêtres cardinaux en France. Ainsi le curé de la paraisse de S. Jean des Vignes est nommé cardinal de cette paraisse dans une charte de Thibault, évêque de Saissons, où ce prélat confirmant la fondation de l'abbaye de S. Jean des Vignes, faite par Hugue, seigneur de Château-Thierry, exige que le prêtre cardinal du lieu, presbyter cardinalis illius loci, soit tenu de rendre raison du soin qu'il aura eu de ses paraissiens à l'évêque de Saissons, ou à son archidiacre, comme il faisait auparavant. Les mêmes termes se trouvent employés, et dans le même sens, dans la charte du roi Philippe I. en 1076, portant confirmation de la fondation de S. Jean des Vignes.

On a donné aussi ce titre à quelques évêques, en tant qu'évêques. Par exemple, à ceux de Mayence et de Milan. D'anciens écrits appellent l'archevêque de Bourges cardinal, et l'église de Bourges église cardinale. L'abbé de Vendôme prend le titre de cardinal né.

Les cardinaux sont divisés en trois ordres : six évêques, cinquante prêtres, et quatorze diacres, faisant en tout soixante-dix, qu'on appelle le sacré collège. Voyez COLLEGE.

Les cardinaux évêques, qui sont comme les vicaires du pape, portent le titre des évêchés qui leur sont attribués. Pour les cardinaux prêtres et diacres, ils ont tous des titres tels qu'ils leur sont assignés. Le nombre des cardinaux et des évêques est fixé : mais celui des cardinaux prêtres et diacres, et par conséquent le nombre des membres du sacré-collège, a toujours varié jusqu'à l'année 1125. Le collège des cardinaux était de cinquante-deux ou cinquante-trois. Le concîle de Constance fixa le nombre des cardinaux à vingt-quatre. Sixte IV. sans avoir égard au concile, en grossit le nombre, et le porta jusqu'à cinquante-trois ; ainsi comme le nombre des cardinaux était anciennement réglé à vingt-huit, il fallut établir de nouveaux titres à mesure que l'on créa de nouveaux cardinaux. A l'égard des diacres, ils n'étaient originairement que sept pour les quatorze quartiers de la ville de Rome. On les augmenta ensuite jusqu'à dix-neuf, après quoi le nombre en fut diminué de nouveau.

Selon Onuphre, ce fut le pape Pie IV. qui régla le premier, en 1562, que le pape serait seulement élu par le sénat des cardinaux, au lieu qu'il l'était auparavant par le clergé de Rome. D'autres disent que dès le temps d'Alexandre III. en 1160, les cardinaux étaient déjà en possession d'élire le pape, à l'exclusion du clergé. On remonte encore même plus haut, et l'on croit que Nicolas II. ayant été élu à Sienne en 1058, par les seuls cardinaux, c'est à cette occasion qu'on ôta le droit d'élire le pape au clergé et au peuple romain, qui n'eurent plus que celui de le confirmer, en donnant leur consentement ; ce qui leur fut encore ôté dans la suite. Le P. Papebrock conjecture que c'est Honorius IV. qui a mis le premier des évêques dans le sacré-collège, en y faisant entrer les évêques suffragans du pape, à qui de droit il appartient de le nommer, et en en faisant la première classe des cardinaux.

La constitution du conclave, pour l'élection du pape, fut faite au second concîle de Lyon en 1274. Le decret du pape Urbain VIII. par lequel il est ordonné que les cardinaux seraient traités d'éminence, est de l'année 1630. Avant cela on les traitait d'illustrissime.

Depuis ces nouvelles prérogatives, les cardinaux ont précédé les évêques ; cependant ces derniers, conservant leur prééminence, ont quelquefois pris le pas dans les assemblées et les cérémonies publiques en présence même du pape ; cela se voit dans l'acte de dédicace de l'église de Marmoutier par le pape Urbain II. l'an 1090, lorsqu'il vint en France tenir le fameux concîle de Clermont ; car dans cette cérémonie, Hugues archevêque de Lyon, tenait, après le pape, le premier rang ; les autres archevêques et évêques le suivaient ; et après eux venaient les cardinaux prêtres et diacres qui avaient accompagné le pape dans ce voyage.

Quand le pape crée des cardinaux, il écrit le nom de ceux qu'il veut élever à cette dignité, et il les fait lire dans le consistoire, après avoir dit aux cardinaux habetis fratres, c'est-à-dire vous avez pour frères NN. Le cardinal patron envoye ensuite querir ceux qui se trouvent à Rome, et les mène à l'audience du pape pour recevoir de lui le bonnet rouge, et au premier consistoire sa sainteté leur donne le chapeau. Jusque-là ils demeurent incognito, et ne peuvent se trouver aux assemblées. A l'égard des absens, le pape leur dépêche un de ses cameriers d'honneur pour leur porter le bonnet : mais ils sont obligés d'aller recevoir le chapeau de la main de sa sainteté ; et quand ils entrent à Rome on les reçoit en cavalcade. Les habits des cardinaux sont la soutane, le rochet, le mantelet, la mozette, et le chape papale sur le rochet dans les actions publiques et solennelles. La couleur de leur habit est différente selon le temps, ou de rouge, ou de rose seche, ou de violet : les cardinaux réguliers ne portent point de soie ou d'autre couleur que celle de leur religion, avec une doublure rouge ; mais le chapeau et le bonnet rouge sont communs à tous. Les cardinaux que le pape envoye aux princes souverains, sont décorés du titre de légats à latère ; et lorsqu'ils sont envoyés dans une ville de la domination du pape, leur gouvernement s'appelle légation. Il y a cinq légations, qui sont celles d'Avignon, de Ferrare, de Boulogne, de Perouse, et de Ravenne. Voyez LEGAT et LEGATION ; traité de l'orig. des cardinaux ; Ducange, gloss. Aubery, hist. des cardinaux.

Cardinal se dit aussi d'offices séculiers : ainsi les premiers ministres de la cour de Théodose sont aussi appelés cardinaux. Et Cassiodore, liv. VII. form. 34. fait mention du prince cardinal de la ville de Rome. On trouve parmi les officiers du duc de Bretagne, en 1447, un Raoul de Thorel, cardinal de Quillart, chancelier et serviteur du vicomte de Rohan ; ce qui montre que c'était un officier subalterne. (G)