CHEVALET, (Histoire ancienne) c'était dans les anciens temps une sorte de supplice ou d'instrument de torture, pour tirer la vérité des coupables. Mais l'usage de ces sortes de supplices a été réprouvé par d'habiles jurisconsultes ; et de nos jours, le roi de Prusse en a par ses lois aboli l'usage dans ses états. Il est souvent arrivé qu'un criminel qui avait de la force et de la résolution, soutenait les tortures sans rien avouer ; et souvent aussi l'innocent s'avouait coupable, ou dans la crainte des supplices, ou parce qu'il ne se sentait pas assez de force pour les soutenir. Le chevalet fut d'abord un supplice qui ne s'employait que pour des esclaves : c'était une espèce de table percée sur les côtés de rangées de trous, par lesquels passaient des cordes qui se roulaient ensuite sur un tourniquet. Le patient était appliqué à cette table. Mais par la suite on s'en servit pour tourmenter les Chrétiens. Les mains et les jambes du patient étant attachées sur le chevalet avec des cordes, on l'enlevait et on l'étendait de telle sorte que tous ses os en étaient disloqués : dans cet état on lui appliquait sur le corps des plaques de fer rouge, et on lui déchirait les côtés avec des peignes de fer qu'on nommait ungula ; pour rendre ces plaies plus sensibles, on les frottait quelquefois de sel et de vinaigre, et on les r'ouvrait lorsqu'elles commençaient à se refermer. Les auteurs qui ont traité des tourments des martyrs, en ont donné la figure, qui fait frémir l'humanité.

Cet instrument barbare n'a pas été inconnu aux modernes, non plus que la coutume de mettre les accusés à la torture, pour tirer d'eux l'aveu de leurs crimes. Le duc d'Exeter, gouverneur de la Tour sous le règne d'Henri VI. avec le duc de Suffolk et d'autres, voulant introduire en Angleterre les lois civiles, commencèrent par faire apporter dans la tour un chevalet, qui est un supplice que la loi civîle ordonne en beaucoup de cas ; et on l'y voit encore : on appela dans ce temps-là cet instrument, la fille du duc d'Exeter. (G) (a)

CHEVALET, outil d'Arquebusier, c'est un instrument de fer ou d'acier long de six pouces, épais de deux, et large d'un, surmonté de deux petits piliers carrés, qui y sont arrêtés à demeure en-dessous avec vis et écrou, longs aussi de six pouces, et larges et épais d'un demi-pouce ; le pilier à gauche est percé par en-haut d'un trou rond, dans lequel se passe la broche d'une boite ; l'autre pilier est coupé en deux, et les deux moitiés sont assemblées par une charnière perdue : un peu au-dessous de la charnière est un trou qui répond à l'autre trou de la branche gauche, et qui sort pour soutenir l'autre côté de la broche qui traverse le chevalet. Cette branche fendue est fermée par em-bas avec une vis : au milieu de cette broche est la boite ; cette broche sort un peu en-dehors du côté droit, et l'on y monte une fraise pour abattre les inégalités que l'on a faites dans le bassinet en les creusant avec la gouge. Les Arquebusiers portent ce chevalet dans l'étau, et font tourner la fraise dans le bassinet par le moyen de la boite et de l'archet, à-peu-près comme les forets.

CHEVALET, barre à chevalet, joue de chevalet, chevalet à platine ; voyez l'article BAS AU METIER.

CHEVALET, terme de Passementier-Boutonnier ; c'est un pieu de bois d'environ quatre pieds de hauteur, enfoncé en terre, qui a à son extrémité supérieure une poulie ; à cette poulie est attaché un petit morceau de bois fait en forme de sifflet, qui à chacun de ses bouts a un crochet de fer tournant. Les Boutonniers s'en servent pour couvrir la cartisanne, et pour retordre la guipure.

CHEVALET, en termes de Cardeur, est une espèce de prie-dieu qui porte une grosse droussette, sur laquelle l'ouvrier brise la laine ou le coton avec une autre qu'il tient dans sa main : ce qui rend cette opération aussi aisée que s'il fallait tenir les deux droussettes. Voyez DRAPIER, DROUSSETTE.

CHEVALET, (Chamoiseur) représenté Planche du Chamoiseur, fig. 1. est composé de deux montants de bois de cinq pieds de haut, sur lesquels est assemblée une traverse de même longueur. Cette traverse a une gouttière dans toute sa longueur pour recevoir une règle de bois aussi longue, qui s'y ajuste parfaitement. C'est entre cette règle qui est mobîle et la pièce de bois à gouttière fixe, qu'on fait passer une peau pour la travailler. La règle est tenue serrée par un coin qui entre dans un des montants.

CHEVALET, se dit, en Charpenterie, d'une pièce de bois couchée en-travers sur deux autres pièces, auxquelles elle est perpendiculaire. Ce chevalet, le plus simple de tous, sert en une infinité d'occasions, mais surtout à soutenir les planches qui servent de pont aux petites rivières.

CHEVALET, en termes de Chauderonnier, est un banc garni de deux gros anneaux à chaque bout, où passe et est retenue une sorte de bigorne à table et à boule ou autre, par le moyen des coins dont on la serre autant qu'on veut. Voyez Pl. I. du Chauderonnier, fig. 13. et la fig. 7. qui représente un ouvrier qui travaille sur le chevalet.

CHEVALET, (Corderie) il y en a de deux sortes, ceux des espadeurs et ceux des commetteurs, qui sont très-différents les uns des autres. Le premier est une simple planche assemblée verticalement au bout d'une pièce de bois couchée par terre, qui lui sert de pied ; le bout d'en-haut de cette planche est échancrée demi-circulairement. Le second est un treteau, sur lequel il y a des chevilles de bois ; il sert à supporter les torons et les cordons, pour les empêcher de porter à terre. Voyez l'article CORDERIE.

CHEVALET, terme de Corroyeur, c'est un instrument de bois sur lequel les Corroyeurs étendent leurs cuirs pour les drayer. Le chevalet est une planche assujettie obliquement sur un pied ; ce pied est un assemblage de neuf ou onze pièces de bois, dont deux ont trois pieds de longueur, trois pouces de haut, et quatre de largeur. Ces deux pièces de bois sont posées par terre, et sont éloignées l'une de l'autre par quatre ou six petites traverses qui entrent dans l'une et dans l'autre. Au milieu de ces jumelles sont des mortaises, dans lesquelles on place deux montants de même grosseur et d'un pied de haut, qui sont joints par en-haut par une traverse aussi de même grosseur. La planche qui forme le chevalet se met entre deux des petits barreaux de bois par un bout, son milieu est appuyé sur la traverse d'en-haut, et le haut de la planche sert pour y étendre la peau ou cuir à drayer. Voyez la figure B. Planc. du Corroyeur, qui représente un ouvrier qui draye une peau sur le chevalet. Voyez l'article CORROYEUR.

CHEVALET, est une machine dont se servent les Couvreurs pour soutenir leurs échaffauds lorsqu'ils font des entablements aux édifices couverts en ardoise, et pour continuer de couvrir le reste du comble de même matière ; car pour la tuîle ils n'en font point usage. Ils donnent encore le même nom à des paquets de natte de paille, qu'ils mettent sous leurs échelles lorsqu'ils les couchent sous les combles, et surtout sur ceux en ardoise.

CHEVALET, en termes de Doreurs sur bois ; espèce d'échelle sur laquelle les Doreurs placent leurs quadres pour les dorer. Le chevalet est composé de trois branches, dont l'une joue à volonté entre les deux autres, et se nomme queue ; et les deux de devant sont retenues ensemble par deux traverses, dont celle du bas est plus large que celle d'en-haut. Ces deux derniers pieds ou branches du chevalet sont percés presque dans toute leur longueur de plusieurs trous, où l'on fiche des chevilles qui retiennent les pièces, selon leur grandeur, devant le chevalet. Voyez les fig. 3. et 12. Pl. du Doreur.

CHEVALET, (Hydraulique) en terme de Mécanique, est un treteau qui sert à échafauder, scier de long, et porter des tringles de fer dans une machine hydraulique. (K)

CHEVALET DU TYMPAN, terme d'Imprimerie ; c'est une petite barre de bois aussi longue que le tympan est large, assemblée en-travers sur deux petites barres de bois qui sont enchâssées à plomb dans des mortaises derrière le tympan, sur la planche du coffre. Ce chevalet sert à soutenir et reçoit le tympan, étant un peu courbé en forme de pupitre, lorsque l'ouvrier est occupé à y poser sa feuille, ou qu'au sortir de dessous la platine, il relève le tympan sur lequel est margée la feuille qui vient d'être imprimée. Voyez l'article IMPRIMERIE EN LETTRES.

CHEVALET, dans les instruments de Musique, pièce de bois qu'on pose à-plomb au bas de la table des instruments pour en soutenir les cordes, et leur donner plus de son en les tenant élevées en l'air. Il y a des instruments où les chevalets sont mobiles, comme les violons, violes, etc. d'autres où ils sont immobiles et collés sur la table même de l'instrument, comme dans les luths, théorbes, guittares, etc. Les clavecins ont aussi des chevalets, qui sont les règles de bois garnies de pointes, sur lesquelles passent les cordes. Voyez CLAVECIN, et la figure du clavecin, Pl. XIV. et XV. et l'article VIOLON, pour ce qui concerne les instruments à cordes.

CHEVALET, dont se servent les Tanneurs, Mégissiers, Pelletiers, etc. est un petit banc de bois de chêne de trois pieds et demi de longueur sur un pied trois pouces de largeur, arrondi d'un côté et plat de l'autre, touchant à terre par un bout, et soutenu de l'autre sur un treteau d'environ deux pieds et demi de haut. C'est sur cette machine que les ouvriers mettent les peaux pour en tirer l'ordure, le poil, la chair. Voyez TANNER, CHAMOIS, etc. et la fig. C, dans la vignette du Mégissier.

CHEVALET, (Peintre) nom de l'instrument qui soutient le tableau d'un peintre pendant qu'il le travaille. Le chevalet est composé de deux tringles de bois assez fortes qui en font les montants, et qui sont assemblées par deux traverses, l'une vers le bas, l'autres vers le haut ; ces deux montants sont fort écartés par le bas, et rapprochés par le haut. On arrête à ces deux montants vers le haut, qu'on appelle le derrière du chevalet, deux tasseaux qui sont percés horizontalement d'un trou rond chacun, dans lesquels tournent les deux bouts d'une traverse qui est assujettie au haut de la queue du chevalet. Cette queue est une autre tringle plus longue que celles qui font les montants ; par ce moyen le chevalet est posé sur trois pieds, ce qui lui donne beaucoup de solidité ; et l'on peut incliner la face des montants autant qu'on le veut en-arrière, en reculant la queue. Les montants ont plusieurs trous environ de la grosseur du doigt, percés à égales distances pour y pouvoir mettre des chevilles qui soient saillantes, et qui puissent porter le tableau à la hauteur que l'on veut.

Lorsque le chevalet est trop grand pour le tableau, c'est-à-dire, lorsque les deux montants du chevalet sont trop éloignés l'un de l'autre pour que le tableau puisse poser sur les chevilles des montants, alors on place sur ces chevilles une planche mince, longue d'environ trois ou quatre pieds, de la largeur de trois pouces environ, sur quatre lignes d'épaisseur ; et sur cette planche ainsi posée, on assied par bas le tableau qui se trouve appuyé par le haut sur les montants du chevalet qui vont en se rapprochant. Il y en a de différentes grandeurs. Les Sculpteurs en ont aussi de beaucoup plus solides, pour présenter et poser leurs bas-reliefs. Dictionnaire de Peinture.

CHEVALET, (Rubanerie) est une petite planchette étroite et percée de quatre petits trous, pour être suspendue par deux ficelles aux grandes traverses d'en-haut du métier, entre le bandage et le battant. Il sert à tenir l'ouvrage stable sous le pas de l'ouvrier.

CHEVALET ou MACHINE A FORER, (Serrurerie) elle est composée de trois pièces, la palette, la vis, et l'écrou. La queue de la palette entre dans un trou pratiqué à l'établi dans son épaisseur ; elle peut y rouler. La palette répond à la hauteur et à l'ouverture des mâchoires de l'étau. Vers le milieu de la queue, à la hauteur de la boite de l'étau, est un trou rond dans lequel passe la vis recourbée en crochet ; ce crochet embrasse la boite de l'étau : quant à l'autre extrémité de la vis, elle traverse la queue, et est reçue dans un écrou. Lorsque l'ouvrier a une pièce à forer, il met l'extrémité de la queue du foret dans un des trous de la palette, et il applique la tête contre l'ouvrage à percer, qui est dans les mâchoires de l'étau : puis il monte son arçon sur la boite du foret, et travaille. A mesure que le foret avance dans l'ouvrage et que le trou se fait, l'ouvrier le tient toujours serré contre l'ouvrage par le moyen de l'écrou, qui fait mouvoir la palette du côté de l'étau.

Il peut arriver trois cas : ou que la palette sera perpendiculaire à l'établi et parallèle à l'étau, ou inclinée vers l'étau, ou renversée par rapport à lui. Il est évident qu'il n'y a que le premier cas où le foret perce droit. Dans le second, la palette fait lever la queue du foret, et par conséquent baisser la pointe : et dans le troisième, au contraire, baisser la queue et lever la pointe. Pour éviter l'inconvénient de ces deux dernières positions, on descend ou on monte d'un trou la queue du foret, à mesure que le trou se fait, pour que la forure se fasse toujours bien horizontalement.

CHEVALET à tirer la soie, voyez à l'article SOIE, la description de cette machine.

CHEVALET, terme de Tonnelier ; c'est un banc à quatre pieds, qui a à son extrémité deux morceaux de bois qui se serrent l'un dessus l'autre, et entre lesquels on pose les douves que l'on veut travailler avec la plane plate.

Il y a encore beaucoup d'autres chevalets dont il sera fait mention à l'article des Arts où ils sont employés.