Au sujet du nombre des naissances, voyez MARIAGE, et la proportion observée des naissances aux mariages, des naissances aux enterrements, et des naissances mâles à celles des femelles.

NAISSANCE, s. f. (Société civile) race, extraction illustre et noble ; c'est un heureux présent de la fortune, qu'on doit considérer et respecter dans les personnes qui en jouïssent, non-seulement par un principe de reconnaissance envers ceux qui ont rendu de grands services à l'état, mais aussi pour encourager leurs descendants à suivre leurs exemples. On doit prendre les intérêts des gens de naissance, parce qu'il est utîle à la république, qu'il y ait des hommes dignes de leurs ancêtres : les droits de la naissance doivent encore être révérés, parce qu'elle est le soutien du trône. Si l'on abat les colonnes, que deviendra l'édifice qu'elles appuyaient. De plus la naissance parait être un rempart entre le peuple et le prince, et un rempart qui les défend contre les entreprises mutuelles de l'un sur l'autre ; enfin, la naissance donne avec raison des privilèges distinctifs, et un grand ascendant sur les membres d'un état qui sont d'une extraction moins élevée. Aussi ceux qui jouissent de ce bonheur, n'ont qu'à ne rien gâter par leur conduite, pour être surs d'obtenir légitimement de justes préférences sur les autres citoyens.

Mais ceux que la naissance démêle heureusement d'avec le peuple, et qu'elle expose davantage à la louange ou à la censure, ne sont-ils pas obligés en conséquence de soutenir dignement leur nom ? Quand on se pare des armes de ses pères, ne doit-on pas songer à hériter des vertus qu'ils peuvent avoir eues ? autrement, ceux qui vantent leurs ancêtres, sans imiter leurs belles actions, disposent les autres hommes à faire des comparaisons qui tournent au désavantage de telles personnes qui déshonorent leur nom. Le peuple est si porté à respecter les gens de naissance, qu'il ne tient qu'à eux d'entretenir ce favorable préjugé. En voyant le jour ils entrent en possession des honneurs : les grands emplois, les dignités, le maniement des affaires, le commandement des armées, tombent naturellement dans leurs mains. De quoi peuvent-ils se plaindre que d'eux-mêmes, quand l'envie et la malignité les attaquent ? Sans doute, qu'alors ils ne sont pas faits pour leur place, quoique la place semblât faite pour eux.

On reprochait à Ciceron, d'être un homme nouveau ; la réponse est toute simple : j'aime mieux, répondit-il, briller par mon propre mérite, que par un nom hérité de mes ancêtres ; et il est beau de commencer sa noblesse par les exemples de vertu qu'on laisse à sa postérité. Satius est enim me meis rebus florere, quàm majorum opinione niti, et ità vivère, ut ego sim potius meae nobilitatis initium et virtutis exemplum. A la vérité, on soupçonne les gens qui tiennent ce propos, de faire, si l'on peut parler ainsi, de nécessité vertu. Mais que dire à ceux qui ayant en partage une grande naissance, en comptent pour rien l'éclat, s'ils ne le soutiennent et ne l'illustrent de tous leurs efforts, par de belles actions. Voyez NOBLESSE. (D.J.)

NAISSANCE, JOUR DE LA, (Histoire romaine) Le jour de la naissance était particulièrement honoré chez les Romains. Des mouvements de tendresse et de religion consacraient chez eux une journée, où il semblait qu'ils recevaient leurs enfants des dieux mêmes, et pour ainsi dire de la main à la main. On les saluait avec cérémonie, et dans ces termes, hodiè natte salve : ils invoquaient le Génie comme une divinité qui présidait à la nativité de tous les hommes.

La solennité du jour de cette naissance se renouvellait tous les ans, et toujours sous les auspices du Génie. On dressait un autel de gazon, entouré de toutes les herbes sacrées, et sur lequel on immolait un agneau. On étalait chez les grands tout ce qu'on avait de plus magnifique, des tables, des cuvettes, des bassins d'or et d'argent, mais dont la matière était encore moins précieuse que le travail. Auguste avait toute l'histoire de sa famille gravée sur des meubles d'or et d'argent : le sérieux d'une cérémonie religieuse était égayé, par ce que les fêtes ont de plus galant ; toute la maison était ornée de fleurs et de couronnes, et la porte était ouverte à la compagnie la plus enjouée. Envoyez-moi Philis, dit un berger dans Virgile à Iolas ; envoyez-moi Philis, car c'est aujourd'hui le jour de ma naissance, mais pour vous ne venez ici que lorsque j'immolerai une génisse pour les biens de la terre.

Les amis ce jour-là ne manquaient guère d'envoyer des présents ; Martial raille finement Clyté, qui pour en avoir, faisait revenir le jour de sa naissance sept ou huit fois l'année :

Nasceris octies in anno.

On célébrait même souvent l'honneur de ces grands hommes, dont la vertu consacre la mémoire, et qui enlevés aux yeux de leurs contemporains, se réveillent pour la postérité qui en connait le mérite dans toute son étendue, et quelquefois les dédommage de l'injustice de leur siècle. Pourquoi, dit Séneque, ne fêterai-je pas le jour de la naissance de ces hommes illustres ? Pline dans le troisième livre de ses épitres, rapporte que Silius Italicus célébrait le jour de la naissance de Virgile, plus scrupuleusement que le sien même.

La flatterie tenant une coquille de fard à la main ne manqua pas de solenniser la nativité des personnes que la fortune avait mis dans les premières places, et par qui se distribuaient les grâces et les bienfaits : Horace invite une de ses anciennes maîtresses à venir célébrer chez lui la naissance de Mécénas ; et afin que rien ne trouble la fête, il tâche de la guérir de la passion qu'elle avait pour Téléphus. Philis, j'ai chez-moi, dit-il, du vin de plus de neuf feuilles, mon jardin me fournit de l'ache pour faire des couronnes. J'ai du lierre propre à relever la beauté de vos cheveux : l'autel est couronné de verveine ; les jeunes garçons et les jeunes filles qui doivent nous servir, courent déjà de tous côtés. Venez donc célébrer le jour des ides qui partage le mois d'Avril consacré à Vénus ; c'est un jour solennel pour moi, et presque plus sacré que le jour de ma naissance, car c'est de ce jour-là que Mécénes compte les années de sa vie.

On voit dans ce propos une image bien vive d'une partie destinée à la célébration d'un jour de naissance ; il ne s'agit pas de savoir, si elle était conforme à l'esprit de l'institution ; sans doute que ce vin délicieux, cette parure galante, cette propreté, ce luxe, cette liberté d'esprit que le poète recommande à Philis, plus dangereuse que la passion même ; enfin, cette troupe de jeunes filles et de jeunes garçons n'étaient guère appelés dans les fêtes religieuses, où on songeait sérieusement à honorer les dieux.

Le jour de la naissance des princes était surtout un jour consacré par la piété ou par la flatterie des peuples. Leur caractère, la distinction de leur rang et de leur fortune, devenait la mesure des honneurs et des réjouissances établies à cette occasion. La tyrannie même, bien loin d'interrompre ces sortes de fêtes, en rendait l'usage plus nécessaire, et dans la dureté d'un règne où chacun craignait de laisser échapper ses sentiments, on entrait avec une espèce d'émulation dans toutes les choses dont on pouvait se servir pour couvrir la haine qu'on portait au prince ; tous ces signes équivoques d'amour et de respect, n'empêchèrent pas que les empereurs n'en fussent extrêmement jaloux. Suétone remarque que Caligula fut si piqué de la négligence des consuls, qui oublièrent d'ordonner la célébration du jour de sa naissance, qu'il les dépouilla du consulat, et que la république fut trois jours sans pouvoir exercer l'autorité souveraine.

Ces honneurs eurent aussi leur contraste : on mit quelquefois avec cérémonie au rang des jours malheureux, le jour de la naissance, et c'était-là la marque la plus sensible de l'exécration publique. La mémoire d'Agrippine, veuve de Germanicus, fut exposée à cette flétrissure, par l'injustice et la cruauté de Tibere. Diem quoque natalem ejus, inter nefastos suasit. C'est à ce sujet que M. Racine, si exact dans la peinture des mœurs, fait dire par Narcisse à Néron, en parlant de Britannicus et d'Octavie.

Rome sur les autels prodiguant les victimes,

Fussent-ils innocens, leur trouvera des crimes ;

Et saura mettre au rang des jours infortunés,

Ceux où jadis la sœur et le frère sont nés.

(D.J.)

Act. IV. scen. 4.

NAISSANCE, (Architecture civile) c'est l'endroit où un corbeau, une voute, une poutre, ou quelque chose, en un mot, commence à paraitre.

Naissance de colonne. C'est la partie de la colonne qui joint le petit membre carré en forme de listel, qui pose sur la base de la colonne et qui fait le commencement du fust. On la nomme aussi congé.

Naissance de voute. C'est le commencement de la courbure d'une voute, formé par les retombées ou premières assises, qui peuvent subsister sans ceintre.

Naissances d'enduits. Ce sont dans les enduits, certaines plates-bandes au circuit des croisées et ailleurs, qui ne sont ordinairement distinguées que par du badigeon, des panneaux de crépi, ou d'enduit qu'elles entourent. (D.J.)

NAISSANCE, (Jardinage) est le commencement de la broderie d'un parterre ; ce peut être aussi l'endroit d'où part un rinceau, une palmette, un fleuron, etc.

NAISSANCE D'UNE JUMENT, (Maréchalerie) V. NATURE.

NAISSANT, adj. en terme de Blason, se dit d'un lion, ou autre animal, qui ne montre que la tête, les épaules, les pieds, et les jambes de devant avec la pointe de la queue, le reste du corps demeurant caché sous l'écu, sous la fasce, ou sous le second du coupé, d'où il semble naître ou sortir. Voyez les Planches de Blason.

Naissant diffère d'issant, en ce que dans le premier cas, l'animal sort du milieu de l'écu, et que dans le second, il sort du fond de l'écu. Voyez ISSANT.

Le père Menestrier veut que naissant se dise des animaux qui ne montrent que la tête, comme sortant de l'extrémité du chef ou du dessus de la fasce, ou du second du coupé.

La baume de Suze en Dauphiné, d'or à trois chevrons de sable, au chef d'azur, chargé d'un lion naissant d'argent.