Parmi les Juifs, le nom et la profession de publicain étaient en horreur plus qu'en aucun lieu du monde. Cette nation se piquait particulièrement de liberté, nemini servivimus unquam, disent-ils en saint Jean ch. VIIIe Ve 33. Ils ne pouvaient voir qu'avec une extrême répugnance dans leur patrie les publicains qui exigeaient avec rigueur les droits et les impôts ordonnés par les Romains. Les Galiléens surtout, ou les Hérodiens, disciples de Judas le gaulonite, souffraient très-impatiemment cette servitude, et ne croyaient pas même qu'il fût permis de payer les tributs à une puissance étrangère, comme ils le témoignèrent en demandant à Jésus-Christ, licet ne censum dare Caesari, an non ? En général les Juifs regardaient ceux qui entraient dans ces sortes d'emplois comme des payens, sit tibi sicut ethnicus et publicanus, Matth. XVIIIe 17. On dit même qu'ils ne leur donnaient point entrée dans leur temple, ni dans leurs synagogues, et ne les admettaient point à la participation de leurs prières, ni dans leurs charges de judicature, ni à rendre témoignage en justice. Grotius ad Matth. XVIIIe Lightfoot hor. haebr. in Matth. Enfin, on assure qu'on ne recevait point leurs présents au temple, non plus que le prix de la prostitution, et des autres choses de cette nature.

Il est certain par l'Evangile, qu'il y avait plusieurs publicains dans la Judée du temps de notre Sauveur. Zachée était apparemment un des principaux fermiers, puisqu'il est appelé prince des publicains ; mais saint Matthieu était un simple commis ou publicain. Les Juifs reprochaient à J. C. qu'il était l'ami des publicains, et qu'il mangeait avec eux ; ce qui prouve encore combien cette condition était odieuse aux Israélites. Calmet, dict. de la Bible, tome III. p. 317.

PUBLICAINS, ou POPLICAINS, s. m. pl. (Histoire ecclésiastique) nom que les occidentaux donnent à une branche des nouveaux Manichéens, qui dans le XIe siècle répandirent leurs erreurs dans la Guienne et dans les provinces voisines. Les orientaux les appelaient Pauliniens. Voyez MANICHEENS et PAULINIENS.

On croit que trente de ces hérétiques s'étant réfugiés en Angleterre en 1160, on leur y donna ce nom. Spelman en parle au second tome des ses conciles d'Angleterre, et leur attribue réellement trois des principales erreurs des Manichéens. Bossuet, hist. des variat. tom. II. liv. XI. n °. 43. pag. 146 et 147.

PUBLICAINS, s. m. pl. (Histoire ancienne) c'étaient parmi les Romains, les fermiers des impôts, taxes et autres revenus publics. Il y a apparence qu'il y en avait de diverses classes, puisque les chevaliers romains prenaient à ferme les revenus de la république, et avaient sous eux des commis et des receveurs pour en faire le recouvrement. Cicéron en parle comme d'une compagnie à qui la république était fort redevable, et dont la probité était si reconnue, qu'on les choisissait pour mettre en dépôt les deniers des familles. Mais Tite-Live ni Plutarque n'en font pas un portrait si avantageux ; le dernier surtout rapporte, dans la vie de Lucullus, qu'ils avaient commis d'étranges abus et des exactions criantes en Asie, auxquelles ce général remédia par des règlements ; mais il n'osa chasser les publicains de peur d'ôter à l'état les ressources assurées qu'ils lui fournissaient. Ils étaient surtout en horreur chez les Juifs, qui les regardaient comme des pécheurs et des scélérats. Les tributs, quelque légers qu'ils fussent, paraissaient toujours trop onéreux à ce peuple jaloux de son ancienne gloire, et plusieurs mettaient en doute si l'on devait payer le tribut à César, comme on le voit dans l'Evangile. Cette secte qu'on nommait les Hérodiens, et qui dura jusqu'à la prise de Jérusalem, fut toujours la plus opposée aux publicains, et la plus acharnée contr'eux. S. Matthieu, quoique juif d'origine, était publicain, c'est-à-dire receveur d'un des bureaux des impôts pour les publicains romains ; aussi les Juifs blâmaient-ils hautement Jesus-Christ de recevoir de pareilles gens dans sa compagnie, de les fréquenter et de manger avec eux.

On a donné aussi le nom de publicains aux Arnaldistes et aux Albigeais.