Les paradigmes étant principalement destinés à inculquer la règle générale, par l'image sensible d'une application particulière proposée comme un objet d'imitation : M. le Fèvre de Saumur, avait raison, sans doute, de désirer que ces modèles fussent présentés aux jeunes gens sous une forme agréable et propre à intéresser leur imagination : il faudrait, selon ses vues, qu'ils fussent imprimés sur de beau papier, en beaux caractères, et dans le format de l'in-quarto, afin que chaque article du paradigme n'occupât qu'une ligne, et qu'on ne fut pas obligé d'en renvoyer quelque chose à la ligne suivante.

Ces petites attentions peuvent paraitre minutieuses à bien des gens, qui prétendent au mérite de ne voir les choses qu'en grand : mais ce qu'il est permis aux spectateurs aisifs d'envisager ainsi, doit être exécuté dans toutes ses parties par les maîtres ; et les meilleurs sont toujours ceux qui analysent le plus exactement les détails. Qu'il me soit donc permis d'ajouter ici quelques observations qui me paraissent intéressantes sous ce point de vue. Je les rapporterai surtout aux éléments de la langue latine ; et l'on en sent bien la raison.

1. Déclinaison. Il est généralement avoué, qu'il y avait une barbarie insoutenable dans les anciens rudiments, où les nombres et les cas étaient désignés en latin, singulariter nominativo, etc. comme si les commençans avaient déjà entendu la langue dans laquelle on prétendait pourtant les initier par-là même : on ne saurait leur parler trop clairement ; et il est singulier qu'on se soit avisé si tard d'employer leur propre langue pour les instruire.

Une autre méprise, c'est d'avoir joint au paradigme d'un nom, celui de l'article du même genre ; haec musa, hujus musae, etc. c'est une imitation maladroite des paradigmes des déclinaisons grecques, où l'article parait plus nécessaire, d'où cependant il est encore plus avantageux de le retrancher, pour ne pas partager l'attention des commençans en la surchargeant mal-à-propos ; et c'est le parti que vient de prendre le P. Giraudeau jésuite, dans son Introduction à la langue grecque. A plus forte raison doit-on supprimer cette addition superflue dans les paradigmes latins : et si l'on ne veut y présenter aucun nom, sans en faire connaître le genre aux enfants ; que ce soit simplement par l'une des lettres initiales m, f ou n, quand le nom est d'un genre déterminé ; par deux de ces lettres et le mot ou entre deux, s'il est d'un genre douteux, etc. Voyez GENRE.

On a coutume encore de traduire chaque cas latin, en se servant de notre article défini le, la, les, pour les noms appelatifs ; de la préposition de pour le génitif ; de à pour le datif, et de de ou par pour l'ablatif. Cela peut induire quelquefois en erreur, parce que ces cas ne se traduisent pas toujours de la même manière ; et c'est peut-être ce parallélisme de français et de latin qui a donné lieu à nos Grammairiens d'imaginer faussement que nos noms ont des cas. Voyez CAS : je voudrais donc que l'on mit simplement après le nominatif singulier, la signification française du nom, en parenthèse, en caractères différents de ceux du latin, sans aucun article, et qu'on en fit autant après le nominatif pluriel, en indiquant la différence d'orthographe qu'exige ce nombre, et marquant soigneusement le genre du français dans chacun des deux nombres.

Comme il y a autant d'avantage réel à mettre en parallèle les choses véritablement analogues et semblables, qu'il peut y avoir de danger à comparer des choses qui, sous les apparences trompeuses de l'analogie, sont véritablement dissemblables ; je crois qu'il pourrait être de quelque utilité de mettre sur deux colonnes parallèles les cas du singulier et ceux du pluriel. Alors pour ne pas occuper trop de largeur, on pourrait mettre la traduction française de chaque nombre à la tête des six cas, sous la forme déjà indiquée ; et le format in-octavo devient suffisant.

M. Lancelot, dans l'abrégé de sa Méthode latine, avait imaginé de faire imprimer en lettres rouges les terminaisons qui caractérisent chaque cas : mais il me semble que cette bigarrure n'a d'autre effet que de choquer les yeux, et il parait que le public, en applaudissant aux autres vues de ce sage et laborieux grammairien, n'a pas approuvé cet expédient, puisqu'on n'en a fait aucun usage dans aucun des livres élémentaires que l'on a imprimés depuis. Ce sont en effet les explications et les remarques du maître qui doivent fixer l'attention des disciples sur ces différences ; voici donc un exemple de ce que je veux dire par rapport aux noms.

J'ai choisi le nom Mensa (Table), parce qu'il exprime une chose connue de tous les enfants ; au lieu qu'ils apprennent à décliner Musa, sans savoir ce que c'est qu'une Muse ; ou bien il faut les distraire de leur analogie, pour leur donner les notions mythologiques que suppose ce nom : c'est un double inconvénient qu'il faut également éviter, dans les commencements surtout.

Les pronoms personnels ego, tu, sui, peuvent et doivent être présentés sous le même aspect : et les adjectifs mêmes ne demandent d'autres différences, que celles que l'on Ve voir dans l'exemple suivant.

Si un adjectif a dans plusieurs cas une même terminaison pour plusieurs genres, on peut marquer les genres après chaque terminaison ; par exemple :

Dans cet exemple ; on marque les trois lettres, m, f, n, au premier cas de chaque nombre qui n'a qu'une terminaison pour les trois genres ; les autres qui n'ont également qu'une terminaison sont de même pour les trois genres.

Ce n'est pas assez d'avoir déterminé la forme qui m'a paru la plus convenable pour les paradigmes. L'ensemble du système grammatical adopté dans cet ouvrage, exige encore quelques observations qui auraient dû entrer au mot DECLINAISON ; mais que M. du Marsais ne pouvait pas prévoir, parce qu'il n'avait pas les mêmes idées que moi sur les différentes espèces de mots. Voyez MOT.

Je regarde comme deux espèces très-différentes les noms et les adjectifs ; voyez GENRE, MOT, NOM et SUBSTANTIF, et je crois qu'il n'y a de mots qui soient primitivement et véritablement pronoms, que les trois personnels ego, tu, sui, voyez PRONOM. Je conclus de-là que les déclinaisons doivent être partagées en trois sections : que la première doit comprendre les cinq déclinaisons des noms ; la seconde, les trois pronoms déclinés ; et la troisième, les déclinaisons des adjectifs.

I. La première déclinaison des noms comprend ceux qui ont le nominatif singulier en a ou en as, en e ou en es : ainsi après la règle propre à chaque espèce, il faut un paradigme de chacune. On ajoutera à la fin, comme en exception, le petit nombre de noms en a qui ont le datif et l'ablatif pluriels en abus, afin que le féminin ne soit pas confondu dans ces cas avec ceux des noms masculins en us ; si mula avait formé mulis, comme on le forme de mulus, il y aurait eu équivoque.

La seconde déclinaison comprend les noms en er ou ir, en um et en us : voilà trois espèces et trois paradigmes. On mettra à la suite la déclinaison de Deus, parce que ce mot étant d'un usage fréquent doit être connu ; et l'on remarquera l'irrégularité des noms propres en ius, de ceux en eus venus du grec, et de ceux qui changent de genre au pluriel.

La troisième déclinaison ne peut se diviser qu'en deux classes, les noms masculins et féminins dans l'une, et les neutres dans l'autre : mais on fera bien de présenter aux enfants des paradigmes de différentes terminaisons dans chaque classe. Il faut, je crois, ne faire mention que de peu d'exceptions, parce qu'on ne dirait pas tout, ou l'on excéderait les bornes qui conviennent à des éléments.

Dans la quatrième déclinaison, il suffira de donner un paradigme en us, et un autre en u ; de décliner ensuite domus qui revient fréquemment, et de remarquer quelques noms qui ont le datif et l'ablatif pluriels en ubus.

La cinquième déclinaison ne demande qu'un paradigme, et n'a aucune difficulté.

II. Les trois pronoms ego, tu, sui, doivent être déclinés l'un après l'autre, sans aucune règle énoncée ; ce sont trois mots particuliers qui ne servent d'exemple à aucun autre.

III. Il doit y avoir trois déclinaisons des adjectifs, différenciées, comme celles des noms, par le génitif singulier.

La première déclinaison comprend les adjectifs dont le génitif singulier est en i pour le masculin, en ae pour le féminin, et en i pour le neutre : l'adjectif masculin se décline comme les noms en er ou ir, ou comme les noms en us de la première déclinaison ; l'adjectif féminin, comme les noms en a de la première ; et l'adjectif neutre, comme les noms en um de la seconde. Après les paradigmes des deux adjectifs pulcher et bonus, il est bon de remarquer que meus, a, um, fait au vocatif singulier masculin meus ou mi ; que cujus, a, um, suus, a, um, tuus, a, um, et vester, tra, trum, n'ont point de vocatif, et quelle en est la raison (voyez VOCATIF) ; enfin que les adjectifs pluriels ambo et duo sont hétéroclites, et il sera utîle d'en exposer les paradigmes parallèlement.

Les adjectifs de la seconde déclinaison ont le génitif singulier en ius ou en jus pour les trois genres, et ont d'ailleurs beaucoup d'analogie avec ceux de la première.

Ceux dont le génitif est en ius, sont alius, a, ud ; alter, a, um ; alteruter, tra, trum ; ille, a, ud ; ipse, a, um ; iste, a, ud ; neuter, tra, trum ; nullus, a, um ; solus, a, um ; totus, a, um ; ullus, a, um ; unus, a, um ; uter, tra, trum ; uterlibet, utralibet, utrumlibet ; utervis, utravis, utrumvis ; uterque, utraque, utrumque. Ils ont tous le génitif singulier en ius, et le datif en i pour les trois genres ; l'accusatif neutre est semblable au nominatif ; ils n'ont point de vocatif (voyez VOCATIF) ; du reste ils se déclinent comme les adjectifs de la première déclinaison. Il est bon de présenter ici les paradigmes de alius, a, ud, de uter, tra, trum, et de solus, a, um, qui sont distingués par des différences qui se retrouvent dans les autres adjectifs de la même classe.

Ceux dont le génitif est en jus se déclinent chacun à leur manière, si ce n'est que les composés se déclinent comme les primitifs simples ; ainsi il faut détailler les paradigmes de chacun de ceux-ci : ce sont hic, haec, hoc ; is, ea, id, et son composé idem, eadem, idem ; qui, quae, quod, ou, quis, quae, quid ; et à-peu-près douze composés.

Les adjectifs de la troisième déclinaison ont le génitif singulier en is pour les trois genres, et se partagent en trois espèces.

Ceux de la première espèce n'ont qu'une terminaison au nominatif singulier pour les trois genres, comme nostras (de notre pays), tères (rond), instants (pressant), sapiens (sage), insons (innocent), vecors (lâche), audax (hardi), simplex (simple), felix (heureux), atrox (atroce), trux (cruel). Ils ont le génitif singulier en is ; le datif en i ; l'accusatif en em pour le masculin et le féminin, et semblable au nominatif pour le neutre ; le vocatif est entièrement semblable au nominatif ; et l'ablatif est en e ou en i : le nominatif, l'accusatif, et le vocatif pluriels sont en es pour le masculin et le féminin, et en ia pour le neutre ; le génitif en ium, quelquefois en um par syncope ; le datif et l'ablatif en ibus. Un seul paradigme peut suffire, à-moins qu'on n'aime mieux en donner un pour les adjectifs qui sont terminés par s, et un autre pour ceux dont la finale est Xe

Ceux de la seconde espèce ont deux terminaisons au nominatif singulier, l'une pour le masculin et le féminin, et l'autre pour le neutre ; les uns sont en is et en e, comme fortis, m. f. forte, n. (courageux) ; les autres sont en or et en us, comme fortior, m. f. fortius, n. (plus courageux) ; et ceux-ci sont toujours comparatifs. Ils se déclinent comme les adjectifs de la première espèce, si ce n'est que ceux en is font l'ablatif singulier seulement en i, et que ceux en or ont le nominatif, l'accusatif, et le vocatif pluriels neutres en a, et le génitif en um sans i. Il faut ici deux paradigmes, l'un pour les adjectifs en is, et l'autre pour ceux en or.

Les adjectifs de la troisième espèce ont trois terminaisons au nominatif singulier, er pour le masculin, is pour le féminin, e pour le neutre, comme celeber, bris, bre (célebre). Ils ont le vocatif singulier entièrement semblable au nominatif ; du reste ils se déclinent comme les adjectifs en is de la seconde espèce. Un seul paradigme suffit ici.

Il peut être utîle de donner, après les déclinaisons des adjectifs, la liste de ceux qui sont indéclinables : les principaux sont 1°. les adjectifs pluriels, tot, totidem, quot, aliquot, quotcunque, quotquot, quotlibet, quotvis ; 2°. les adjectifs numéraux collectifs, quatuor, quinque, sex, &c.

On a coutume de regarder comme des pronoms presque tous les adjectifs que je rapporte à la seconde déclinaison, et quelques-uns qui entrent dans les deux autres, comme meus, tuus, suus, cujus, noster, vester qui sont de la première, et cujas, nostras, vestras qui sont de la troisième : mais ce sont de véritables et purs adjectifs, comme je le fais voir ailleurs. Voyez PRONOM.

II. Conjugaisons. Nos anciens rudiments avaient dans les conjugaisons des absurdités semblables à celles des déclinaisons : les dénominations des modes, des temps et des nombres, y étaient en latin ; indicativo modo, tempore praesenti, singulariter, etc. le pronom personnel était exprimé à chaque personne ; ego amo (j'aime), tu amas (tu aimes), etc. on regardait la Grammaire grecque comme un prototype dont il ne fallait pas s'écarter ; et en conséquence on avait imaginé un optatif latin ; optativo modo, tempore praesenti et imperfecto, singulariter, utinam ego amarem ! (plut à Dieu que j'aimasse !) Voyez OPTATIF.

M. Lancelot, dans l'abrégé de sa Méthode latine, a réformé toutes ces fautes ; il nomme les temps, les modes et les nombres, en français ; il supprime les pronoms personnels ; il retranche le prétendu optatif. Mais ses paradigmes ne me paraissent pas encore avoir toute la perfection désirable.

1°. Il met en parallèle les quatre conjugaisons ; et je crois que cette comparaison ne peut que surcharger inutilement l'attention des commençans : c'est à des observations particulières, ou orales, ou écrites, à assigner les différences des conjugaisons, et à l'exercice à les inculquer. Il me semble qu'il ne faut mettre en colonnes parallèles que les deux nombres de chaque temps, comme on doit y mettre les deux nombres de chaque nom, de chaque pronom, et de chaque adjectif.

2°. Il confond les temps de l'indicatif et du subjonctif, et met de suite ceux qui ont le même nom dans les deux modes ; après amo, amas, amat, etc. vient amen, âmes, amet ; puis on trouve amabam, amabas, amabat, etc. suivi d'amarem, amares, amaret, etc. et ainsi de suite. C'est qu'il regarde les modes en général comme des distinctions arbitraires et peu essentielles, qui se prennent indistinctement les unes pour les autres, et tout au plus comme des sous-divisions purement matérielles des mêmes temps. J'ai apprécié ailleurs ce système (voyez MODE) ; et je crois qu'il est facîle de conclure de celui que j'ai établi, que les modes doivent être séparés les uns des autres dans les paradigmes des verbes. J'en ajouterai ici une raison particulière : c'est que les paradigmes doivent présenter les variations du mot sous les points de vue les plus propres à fixer les lois usuelles de la Grammaire de chaque langue. Or tous les temps d'un même mode sont soumis aux mêmes lois grammaticales ; et ces lois sont différentes pour les temps d'un autre mode, même pour les temps de même dénomination : il est donc plus raisonnable de groupper, pour ainsi dire, par modes les temps d'un même verbe, que de confondre ces modes dont la distinction est si essentielle pour l'intelligence de la syntaxe.

3°. Le même auteur traduit en français les temps latins, et il tombe à ce sujet dans bien des méprises. En premier lieu, il traduit en deux manières certains temps du verbe, qui n'ont en effet que l'une des deux significations ; amarem (que j'aimasse, dit-il, ou j'aimerais) ; amavi (j'aimai ou j'ai aimé) ; amavissem (que j'eusse ou j'aurais aimé) : or, amarem appartenant au mode subjonctif, ne peut pas signifier j'aimerais, ni amavissem, j'aurais aimé ; parce que ce sont des temps du mode suppositif qui manque absolument au latin. Voyez MODE, SUBJONCTIF, SUPPOSITIF. C'est la même méprise par rapport à amavi ; il présente toujours le passé sous le même aspect, et conséquemment il doit toujours être rendu en français de la même manière, j'ai aimé : notre j'aimai est un temps qui était inconnu aux Romains. Voyez TEMS. En second lieu, le rudiment de P. R. donne tout à la fois un sens actif et un sens passif à chacun des trois gérondifs et au supin en u : c'est une contradiction frappante qu'il n'est pas possible de croire que l'usage ait jamais autorisée : quelques exemples mal analysés ont occasionné cette erreur ; un peu plus d'attention la corrigera ; il n'y a de gérondifs et de supins qu'à la voix active. Voyez GERONDIF, SUPIN.

Je n'ajouterai pas ici toutes les observations que je pourrais faire sur la dénomination et l'ordre des temps ; on peut voir le système que j'adopte sur cette matière, article TEMS. Je me contenterai donc de présenter quelques temps du verbe amo, sous la forme que je crois la plus convenable pour affecter l'imagination d'une manière utile.

On peut disposer de même les prétérits et les futurs, au subjonctif comme à l'indicatif, à la voix passive comme à la voix active. Il y a seulement à observer qu'une pareille exposition occupant trop de largeur pour une page in-octavo, on peut prendre le parti de mettre sur la page verso qui est à gauche, les dénominations générales des temps, disposées comme on le voit ici ; et sur la page recto qui est à droite, le pur paradigme du verbe sur les deux colonnes parallèles du singulier et du pluriel.

Dans les temps composés, il y a toujours quelques mots qui sont communs à toutes les personnes : il sera utîle de ne les écrire qu'une fois à côté du temps, sur une ligne couchée verticalement. 1°. Cette disposition fera mieux sentir ce qu'il y a de commun et de propre à chaque personne. 2°. Comme l'expédient est également de mise en latin et en français, il servira à diminuer la largeur du paradigme, qui, sans cela, occuperait souvent plus d'espace que n'en comporte la page, et forcerait à mettre une seule personne en deux lignes. Voici sous cette forme le futur défini antérieur du même mode :

On distingue communément quatre conjugaisons régulières des verbes latins, différenciées principalement par la voyelle qui précède le re final du présent de l'infinitif : c'est un a long dans les verbes de la première conjugaison, amre (aimer) ; c'est un e long dans ceux de la seconde, monre (avertir) ; c'est un e bref pour la troisième, legre (lire) ; et c'est un i long pour la quatrième, audre (entendre). On a coutume de donner trois paradigmes à chacune de ces conjugaisons ; l'un, pour les verbes de terminaison active, soit absolus, soit relatifs ; le second, pour les verbes de la voix passive ; et le troisième, pour les verbes déponens. Cela est très-bien ; mais il me semble qu'il serait mieux encore de partager en deux espèces les verbes de la troisième conjugaison, et de mettre dans l'une, ceux qui ont une consonne avant o au présent indéfini de l'indicatif, comme lego, et dans l'autre, ceux qui ont au même temps un i avant o, comme capio : dans ce cas, il faudrait trois paradigmes pour les verbes de la première espèce, par exemple, lego, legor et sequor ; il en faudrait pareillement trois pour ceux de la seconde, par exemple, capio, capior et aggredior : il me semble que ce n'est pas assez pour les commençans, d'une simple remarque telle que celle du rudiment de P. R. pag. 46.

On a coutume de mettre à la suite des conjugaisons régulières, les paradigmes des verbes anomaux ou irréguliers, et l'on fait bien ; mais je voudrais qu'on le fit avec plus d'ordre, et que l'on suivit celui des conjugaisons mêmes. Le rudiment de P. R. débute par eo qui est de la quatrième conjugaison ; viennent ensuite volo, malo, nolo et fero, qui sont de la troisième ; puis, possum et prosum, qui tiennent au verbe substantif ; et enfin, edo et comedo, qui sont encore de la troisième : c'est un vrai désordre, et d'ailleurs la liste des anomaux n'est pas complete .

Comme le verbe sum est un auxiliaire nécessaire dans les conjugaisons régulières, on doit en trouver le paradigme dès le commencement. D'où je conclus que les irréguliers possum et prosum doivent être conjugués les premiers de tous les anomaux. Comme il n'y en a point à la première conjugaison, il faut conjuguer ensuite audeo, dont le prétérit est ausus sum ou fui ; et il servira de paradigme à gaudeo, gavisus sum ou fui, à soleo, solitus sum ou fui, etc. Il y a un verbe de la troisième conjugaison qui suit la même anomalie ; c'est fido, fisus sum ou fui : il faut aussi le conjuguer pour servir de paradigme à ses composés consido, diffido : fio, qui tient lieu de passif à facio dans ses présents, et qui n'a d'autres prétérits ni d'autres futurs, que ceux qu'il emprunte du passif de ce verbe, doit aussi être conjugué ; on peut mettre ensuite la conjugaison active et passive de fero, qui servira de paradigme à tous ses composés, dont il est bon de détailler les temps primitifs, à cause des métamorphoses de la particule composante : puis, le verbe edo, qui sera le paradigme de comedo et exedo : enfin, viendront les trois verbes volo, malo et nolo. Le verbe eo, étant de la quatrième conjugaison, ne peut être placé qu'ici ; et il sera suivi immédiatement de la conjugaison du défectif memini ; qui sera le paradigme de novi, coepi, odi.

Je n'ajouterai plus qu'un mot qui est général. C'est 1°. qu'au-dessous de chaque paradigme il est bon de donner une liste alphabétique de plusieurs mots soumis à la même analogie, afin de fournir aux commençans de quoi s'exercer sur le paradigme, et en même temps pour leur apprendre autant de mots latins, noms, adjectifs, ou verbes. 2°. Il me semble que la règle particulière sera placée plus convenablement après le paradigme qu'avant ; elle ne peut être bien entendue qu'en ce lieu, et c'est d'ailleurs l'ordre naturel, les règles analogiques n'étant que les résultats de l'usage. S'il y a donc des règles communes à toutes les déclinaisons des noms ou des adjectifs, ou à toutes les conjugaisons des verbes, il en faut réserver l'exposition pour la fin : ce sont comme les corrollaires de tout le détail qui précède.

Il est aisé d'appliquer aux paradigmes de quelque langue que ce sait, ce que je viens de dire de ceux de la langue latine, en observant ce que le génie propre de chaque langue exige de particulier, soit en plus, soit en moins. (M. B. R. M.)