Il faut au compositeur, pour exceller dans son état, une grande partie des qualités nécessaires dans le prote, puisque c'est parmi ses semblables que l'on choisit ce dernier. Il a besoin dans ses opérations d'une grande attention pour saisir le sens de ce qu'il compose, et placer la ponctuation à-propos ; pour ne rien oublier, et ne pas faire deux fois la même chose, fautes dans lesquelles la plus légère distraction fait souvent tomber. Il doit éviter dans sa composition les mauvaises divisions d'une ligne à l'autre (on ne devrait jamais diviser un mot d'une page à l'autre) ; espacier également tous les mots de la même ligne, et tâcher qu'une ligne serrée ne suive ou ne précède pas une ligne trop au large ; mettre de l'élégance dans ses titres, sans défigurer le sens ; qu'il prenne garde, en corrigeant ses fautes, de rendre sa composition aussi belle et aussi bien ordonnée que s'il n'y avait pas eu de fautes ; en un mot, qu'il exécute ce qui lui est prescrit à l'article IMPRIMERIE. Voyez aussi COMPOSITEUR.

Un imprimeur à la presse doit joindre à une grande attention sur la teinte et le bel oeil de l'impression, beaucoup de capacité pour juger d'où peuvent provenir les défauts de son impression, soit dans le dérangement de quelqu'une des parties de la presse, soit dans le mauvais apprêt de ses balles, de son papier et de ses étoffes, soit enfin dans la façon de manœuvrer. Son talent est de faire paraitre l'impression également noire et nette, non-seulement sur la même feuille, mais sur toutes les feuilles du même ouvrage, et de faire que toutes les pages tombent exactement l'une sur l'autre. Voyez IMPRIMERIE.

Il faut pour une belle impression qu'elle ne soit ni trop noire, ni trop blanche ; elle doit être d'un beau gris : trop noire, elle vient pochée, le caractère parait vieux, et son oeil est plein ; trop blanche, elle vient égratignée, et fatigue les yeux du lecteur. Au reste on en juge mieux à la vue que par raisonnement.

Il n'est peut-être pas inutîle ici qu'un imprimeur fasse observer aux auteurs que c'est souvent leur faute si leurs livres ont besoin de si longs errata. Leur négligence à écrire lisiblement les noms propres et les termes de sciences ou d'arts qui ne peuvent être familiers à un compositeur, en est presque toujours la cause. Il est impossible qu'un imprimeur entende assez bien toutes les matières sur lesquelles il travaille, pour ne pas se tromper quelquefois. On engage les gens de lettres à vouloir bien faire attention à cet avertissement pour que leurs œuvres ne soient pas déshonorées aussi souvent qu'elles le sont par des fautes grossières.

A l'art d'exprimer et de communiquer nos pensées les plus abstraites, à l'art d'écrire, on ne pouvait rien ajouter de plus intéressant, que celui de répéter cette écriture avec promptitude, avec élégance, avec correction, et presque à l'infini, par le moyen de l'imprimerie. De-là vint que bien-tôt après sa découverte, les imprimeurs se formèrent et se multiplièrent en si grand nombre.

Mais nous devons parler ici principalement de ceux qui joignirent à la science de l'art une vaste érudition, et une grande connaissance des langues savantes ; il y en a même plusieurs qui se sont immortalisés par d'excellents ouvrages sortis de leurs mains. Voici les noms des plus illustres, à qui tous les peuples de l'Europe doivent de la reconnaissance, car ils ont tous profité de leur savoir, de leurs travaux, et de leur industrie.

Amerbach (Jean) Amerbachius, Baslais, fleurissait sur la fin du XVe siècle. Il publia divers auteurs, entre lesquels il corrigea lui-même les œuvres de saint Ambraise qu'il mit au jour en 1492, et celles de saint Augustin qu'il n'acheva qu'en 1506, aidé des secours de son frère, ne désirant que la perfection de l'imprimerie, il fondit de nouveaux caractères ronds, supérieurs à ceux qu'on connaissait en Allemagne : et pour soutenir son art dans sa patrie, il y appela Froben et les Pétri. Il était extrêmement jaloux de la correction des livres qu'il publiait. Il eut des enfants qui se distinguèrent dans la république des lettres, et il leur fit promettre en mourant de donner au public les œuvres de saint Jérome, ce qu'ils exécutèrent avec fidélité.

Badius (Josse), en latin Jodocus Badius, Ascensius, parce qu'il était d'Assche, bourg du territoire de Bruxelles, où il naquit en 1462. Il se rendit célèbre par son savoir et par ses éditions : ayant été reçu professeur en grec à Paris, il y établit une belle imprimerie, sous le nom de praelum ascensianum, de laquelle sortirent entr'autres ouvrages, nos meilleurs auteurs classiques, imprimés en caractères ronds, peu connus avant lui dans ce royaume, et qu'il substitua au gothique, dont on se servait auparavant. Cependant ses caractères n'ont pas l'agrément de ceux des Etiennes, mais ses éditions sont correctes. Il mettait d'ordinaire ce vers latin à la première page de ses livres.

Aere meret Badius, laude auctorem, arte legentem.

Il mourut à Paris en 1535. Deux de ses filles épousèrent de fameux imprimeurs, l'une Michel Vascosan, l'autre Robert Etienne. Cette dernière savait très-bien le latin. Son fils Conrard Badius prit le parti de se retirer à Genève, où il fut à son tour imprimeur et auteur. Les fils, filles et gendres de Josse Badius, firent tous à l'envi prospérer avec zèle l'art admirable de l'Imprimerie.

Blaew (Guillaume), dit Jansonius Caesius, né en Hollande dans le XVIIe siècle avait été ami particulier et disciple de Tycho-Brahé. Ses ouvrages géographiques et ses magnifiques impressions rendent sa mémoire honorable.

Bomberg (Daniel), natif d'Anvers dans le XV. siècle, alla s'établir à Venise, où après avoir appris l'hébreu, il s'acquit une gloire durable par ses éditions hébraïques de la bible, en toutes sortes de formats, et par les commentaires des Rabbins qu'il mit au jour. Il commença ce travail en 1511, et le continua jusqu'à sa mort arrivée vers l'an 1550. On fait grand cas de sa bible hébraïque publiée l'an 1525, en quatre volumes in-fol. Il a donné le Thalmud en XIe volumes in-folio : il imprima trois fois cet ouvrage, et chaque édition lui couta cent mille écus. On dit qu'il dépensa quatre millions d'or en impressions hébraïques, et qu'il mourut fort pauvre. Alors l'imprimerie était glorieuse, aujourd'hui ce n'est qu'un art lucratif.

Camusat (Jean), se distingua dans le XVIIe siècle à Paris, en recherchant par préférence à n'imprimer que de bons livres en eux-mêmes, sans en envisager le profit, de sorte qu'on regardait comme une preuve de bonté pour l'ouvrage, lorsqu'il sortait de son imprimerie.

Collines (Simon de), en latin Colinaeus, né au village de Gentilly près de Paris, dans le XVIe siècle ; il épousa la veuve de Henri Etienne l'ainé, employa d'abord les caractères d'Etienne, mais dans la suite il en fondit lui-même de beaucoup plus beaux. Il introduisit en France l'usage du caractère italique, avec lequel il imprima des ouvrages entiers ; et son italique est préférable à celui d'Alde Manuce, qui en fut l'inventeur. Les éditions des livres grecs donnés par Collines, sont d'une beauté et d'une correction admirable. Il y a de lui une édition du testament grec, où le fameux passage de l'épitre de Saint Jean des trois témoins manque. J'ai une fois acheté par curiosité un petit testament latin dédié au pape, approuvé et imprimé à Louvain, où ce passage ne se trouvait pas mieux. Collines mourut, à ce qu'on croit, vers l'an 1647 ; mais on ignore l'année de sa naissance.

Commelin (Jérome), né à Douay, s'établit et mourut à Heidelberg en 1597. Non-seulement ses éditions sont recherchées des curieux ; mais il était lui-même très-savant dans la langue grecque ; nous en avons pour preuve des notes de sa façon sur Héliodore, Apollodore, et quelques autres auteurs.

Coster (Laurent), natif de Harlem, est celui à qui ses compatriotes attribuent l'invention de l'imprimerie. Ils disent qu'avant l'an 1440 il forma les premiers caractères de bois de hêtre, qu'ensuite il en fit d'autres de plomb et d'étain, et qu'enfin il trouva l'encre dont l'Imprimerie se sert encore. En conséquence de cette opinion on grava sur la porte de la maison de cet homme ingénieux, l'inscription suivante : Memoriae sacrum, typographia, ars artium omnium conservatrix, nunc primùm inventa, circà annum 1440. On conserve encore soigneusement dans la ville de Harlem le premier livre fait par cet artiste, et qui porte pour titre, speculum humanae salvationis ; mais le lecteur peut voir ce qu'on a lieu de penser de la découverte de Coster, au mot IMPRIMERIE.

Cramaisi (Sébastien), né à Paris dont il fut échevin. Il obtint par son mérite la direction de l'imprimerie du louvre, établie par Louis XIII. mourut en 1669, et eut pour successeur son petit-fils. Mais quoique plusieurs de leurs éditions méritent fort d'être recherchées, elles n'ont ni l'exactitude, ni la beauté de celles qui sont sorties des imprimeries des Etienne, des Manuce, des Plantin, et des Froben. Les Martin, Coignard et Muguet ont succédé aux Cramaisi, et ont à leur tour enrichi la république des lettres, d'éditions très-belles et très-estimées.

Crespin (Jean), en latin Crispinus, natif d'Arras au commencement du XVIe siècle, et fils d'un jurisconsulte, était fort versé dans le droit, le grec et les belles-lettres ; fut reçu avocat au parlement de Paris ; mais s'étant retiré à Genève vers l'an 1548, pour y professer en sûreté le calvinisme, il y fonda une belle imprimerie, dans laquelle il publia entr'autres ouvrages un excellent lexicon grec et latin, infolio, dont la première édition vit le jour en 1560. Crespin mourut de la peste en 1572. Eustache Vignon son gendre continua et perfectionna l'imprimerie que son beau-pere avait établie.

Dolet né à Orléans dans le XVIe siècle, imprimeur et Libraire à Lyon, a mis au jour quelques-uns des ouvrages recherchés d'Etienne Dolet, bon humaniste, et brulé à Paris le 3 Aout 1546, pour ses sentiments sur la religion. Il aurait encore imprimé la version française de la plupart des œuvres de Platon, du malheureux Etienne Dolet, s'il n'eut été prévenu par son supplice.

Elzévirs (les), bien des gens regardent les Elzévirs comme les plus habiles imprimeurs, non-seulement de la Hollande, mais de toute l'Europe. Bonaventure, Abraham, Louis, et Daniel Elzévirs, sont les quatre de ce nom, qui se sont tant distingués dans leur art. A la vérité, ils ont été fort au-dessous des Etiennes, tant pour l'érudition, que pour les éditions grecques et hébraïques ; mais ils ne leur ont cédé, ni dans le choix des bons livres qu'ils ont imprimés, ni dans l'intelligence du métier ; et ils les ont surpassé pour l'agrément et la délicatesse des petits caractères. Leur Virgile, leur Térence, leur Nouveau-Testament grec, et quelques autres livres de leur presse, où il se trouve des caractères rouges, sont des chefs-d'œuvres de leur art. Ils ont imprimé plusieurs fois le catalogue de leurs éditions, qui comprennent entr'autres tous les auteurs classiques, dont les petits caractères sont aussi jolis, que nuisibles à la vue.

Etienne (les), je les regarde comme les rois de l'Imprimerie, tant pour l'érudition, que pour les éditions grecques et hébraïques. On nomme huit Etiennes, qui se sont illustrés dans leur carrière ; mais Robert Etienne, et Henri II. son fils, se sont immortalisés par leur goût pour leur art, et par leur savoir. Ils tiennent l'un et l'autre un grade supérieur dans la république des lettres.

Le célèbre Robert Etienne avait acquis une connaissance éminente des langues et des humanités. Il s'appliqua particulièrement à mettre au jour de magnifiques éditions des bibles hébraïques et latines. Il est le premier qui les ait distinguées par versets : François I. lui donna son imprimerie royale. Claude Garamond, et Guillaume le Bé en fondirent les caractères ; mais les traverses injurieuses que Robert Etienne essuya, l'obligèrent de quitter sa patrie vers l'an 1551, et de se retirer à Genève, pour y professer sa religion en liberté. Là il continua d'enrichir le monde des plus beaux ouvrages littéraires.

Les éditions données par cet homme célèbre, sont celles de toute l'Europe, où l'on voit le moins de fautes d'impression. Mill assure que dans son Nouveau-Testament grec des éditions de 1546, 1549, et 1551, ainsi que dans l'édition de 1549 in-seize, il ne s'y trouve pas une seule faute typographique, et qu'il n'y en a qu'une dans la préface latine, savoir pulres pour plures. On sait par quel moyen il parvint à cette exactitude : il exposait à sa boutique et affichait ses dernières épreuves à la porte des colléges en promettant un sol aux écoliers pour chaque faute qu'ils découvriraient, et il leur tenait exactement parole.

Il mourut à Genève le sept Septembre 1559, âgé de 56 ans, après s'être comblé de gloire ; je dis comblé de gloire, parce que nous devons peut-être autant à son industrie seule qu'à tous les autres savants et artistes qui ont paru en France depuis François I. jusqu'à nos jours.

Son bean trésor de la langue latine a immortalisé son nom, quoiqu'il ait été secouru dans ce travail par Budé, Tusan, Baif, Jean Thirry de Beauvaisis, et autres. La première édition est de Paris 1536, la seconde de 1542, la troisième à Lyon en 1573, et la dernière à Londres en 1734, en quatre volumes in-folio.

Son désintéressement et son zèle pour le bien public, peignent le caractère d'un digne citoyen. Je ne lui dois point d'éloges à cet égard ; mais du moins ne fallait-il pas le calomnier, jusqu'à l'accuser d'avoir volé les caractères de l'imprimerie du Roi en se retirant, et d'avoir été brulé en effigie pour ce sujet.

Il entretenait chez lui dix à douze savants de diverses nations ; et comme ils ne pouvaient s'entendre les uns les autres qu'en parlant latin, cette langue devint si familière dans cette maison, que ses correcteurs, sa femme, ses enfants, et les anciens domestiques, vinrent à la parler avec facilité. Il laissa un frère et deux fils dont il me convient de parler.

Etienne (Charles), frère de Robert I. après s'être fait recevoir docteur en Médecine dans la faculté de Paris, eut l'imprimerie du Roi et la soutint honorablement. Les Anatomistes lui doivent trois livres de dissectione partium corporis humani, qui ne sont point tombés dans l'oubli. Cet ouvrage parut en 1545 in-folio avec figures, et l'année suivante en français chez Colinée. Charles Etienne a le premier prouvé contre Galien, que l'oesophage se divisait séparément de la trachée-artère, et que la membrane charnue était adipeuse. Il mourut en 1568, ne laissant qu'une fille nommée Nicole, auteur de quelques ouvrages en prose et en vers. Elle fut recherchée par Jacques Grévin, médecin et poète ; et c'est pour elle qu'il composa ses amours d'Olympe ; mais elle épousa Jean Liébaud médecin.

Etienne (Robert II.) ne voulut pas suivre son père à Genève, et fut conservé conjointement avec son oncle Charles dans la direction de l'imprimerie royale, où il fit imprimer depuis l'année 1560, divers ouvrages utiles, mais dont les éditions n'égalent pas celles de son père.

Etienne (Henri II.) fils de Robert I. et frère de Robert II. eut la réputation d'un des plus savants hommes de son siècle, et des plus érudits dans les langues grecque et latine. Il publia le premier tout jeune encore, les poésies d'Anacréon, qu'il traduisit en latin. Il composa l'apologie pour Hérodote, espèce de satyre contre les moines, qui lui en firent un procès criminel, dont il échappa par la fuite ; mais il s'est immortalisé par son trésor de la langue grecque, en quatre tomes in-folio, qui parurent en 1572. Il mourut à Lyon en 1598. âgé de 70 ans, laissant des fils, et une fille qu'Isaac Casaubon ne dédaigna pas d'épouser.

Almelovéen a donné la vie des Etienne, qu'on peut lire : cette famille a produit je ne sais combien de gens de mérite.

Faust (Jean), associé pour l'imprimerie au célèbre Guttemberg, qui lui en apprit le secret. Ils imprimèrent conjointement avec le secours de Schoèffer, plusieurs livres, et entr'autres la bible, dont les facteurs de Faust apportèrent en 1470, divers exemplaires à Paris, qu'ils vendirent d'abord soixante écus pièce, au lieu de quatre-vingt ou cent écus, qu'ils en pouvaient tirer. Ce bon marché surprit les acheteurs, qui ne se lassaient d'admirer la parfaite ressemblance qu'ils trouvaient dans l'écriture de toutes ces bibles. Il furent encore plus étonnés de voir ces facteurs en diminuer le prix jusqu'à trente écus ; et n'en pouvant démêler la cause, ils les accusèrent de magie. Enfin, ils apprirent que leurs exemplaires de la bible n'étaient point écrits, mais imprimés sans aucun sortilège, par un nouvel art, et à peu de frais, en comparaison de l'écriture. Alors ils se pourvurent en justice contre les facteurs de Faust ; mais le Parlement mit à néant toutes les demandes de ceux qui avaient acheté des bibles de ces étrangers, et les condamnèrent à les payer.

Froben (Jean), natif d'Hammelburg, s'établit à Basle, et y fit fleurir l'Imprimerie sur la fin du XVe siècle. Il fut le premier dans toute l'Allemagne qui sut joindre à la délicatesse de son art, le choix des bons auteurs. On lui doit la première édition des ouvrages d'Erasme en neuf tomes in-folio, les ouvrages de S. Jérôme, et de S. Augustin ; et l'on prétend que ce sont ses trois chefs-d'œuvre pour l'exactitude. Il mourut en 1527, laissant à son fils Jérôme, et à son gendre Episcopius, le soin de maintenir la réputation de son imprimerie. Nous devons à ces deux derniers, aidés de Sigismond Gélénius pour la correction des épreuves, l'édition des pères grecs qu'ils commencèrent par les ouvrages de S. Basîle ; mais quelqu'exactes qu'elles soient, celles du Louvre en ont fait tomber le mérite et le prix.

Géring (Ulric), allemand, fut un des trois imprimeurs, que les docteurs de la maison de Sorbonne firent venir à Paris vers l'an 1470, pour y faire les premières impressions : les deux autres étaient Martin Crantz, et Michel Friburger. Il parait en 1477, que Géring resta le maître des imprimeries établies par la Sorbonne, et qu'il s'associa Maynial en 1479 ; Rembolts prit la place de ce dernier en 1489, et Géring travaillait encore avec lui en 1508. Il mourut en 1510, et employa les grandes richesses qu'il avait acquises dans son art, à des fondations considérables en faveur des colléges de Sorbonne et de Montaigu. Le premier livre qui sortit de la presse de la maison de Sorbonne, sont les épitres de Gasparinus Pergamensis. Ce choix seul prouve assez la barbarie dans laquelle nous étions alors plongés, et que l'art même de l'Imprimerie ne put dissiper de longtemps.

Gravius (Henri), né à Louvain, où il avait enseigné la Théologie ; mais il se rendit à Rome, appelé par le pape Sixte V, qui lui donna l'intendance de la bibliothèque, et de l'Imprimerie du Vatican. Il y mourut peu de temps après, en 1591, âgé de 55 ans.

Gryphius (Sébastien), né à Reutlingen, ville de Souabe, sur la fin du XVe siècle, vir insignis ac litteratus, dit Majorage. Il s'établit à Lyon, où il s'acquit un honneur singulier, par la beauté et l'exactitude de ses impressions. On estime beaucoup ses éditions de la bible en hébreu, et même tout ce qu'il a donné dans cette langue. On ne fait pas moins de cas de la bible latine qu'il publia en 1550, en 2 vol. in-folio. Il se servit pour cette édition latine du plus gros caractère qu'on eut Ve jusqu'alors. Elle ne cede pour la beauté qu'à la seule bible imprimée au Louvre en 1642, en neuf volumes in-folio.

Son trésor de la langue sainte de Pagnin, qu'il mit au jour en 1529, est un chef-d'œuvre. Il avait de très-habiles correcteurs ; l'errata des commentaires sur la langue latine d'Etienne Dolet, n'est que de huit fautes, quoique cet ouvrage forme 2. vol. infolio. Gryphius mourut en 1556 à l'âge de 63 ans ; mais son fils Antoine Gryphius continua de soutenir la réputation de l'imprimerie paternelle.

Guttemberg (Jean), voilà le citoyen de Mayence, à qui l'opinion générale donne l'invention de l'Imprimerie dans le milieu du XVe siècle.

Après avoir essayé quelque temps l'idée qu'il en avait conçue, il s'associa Jean Faust, riche négociant de la même ville ; et avec l'aide de Schoèffer, qui était alors domestique, et qui depuis fut gendre de Faust, ils travaillèrent à exécuter leur dessein depuis 1440. Leur ébauche était d'abord très-imparfaite, puisqu'ils ne firent que tailler des lettres sur des planches de bois, comme on fait quand on veut écrire sur les vignettes gravées en bois. Mais ayant remarqué la longueur du travail qu'ils avaient mis à imprimer de cette manière un vocabulaire latin, intitulé Catholicon, ils inventèrent des lettres détachées et mobiles qu'ils firent de bois dur, jusqu'à ce que Schoèffer s'avisa de frapper des matrices, pour avoir des lettres de métal fondu.

Tritheme qui nous apprend ces particularités, les écrivait en 1514 dans sa chronique de Hirshaugen, où il assure qu'il les tenait de Schoèffer lui-même ; et son témoignage sur cette matière, est appuyé par l'auteur d'une chronique allemande, qui écrivait en 1499, et qui dit qu'il savait ce fait particulier d'Olric Zell hanovrien, imprimeur à Cologne.

Il est certain, que de toutes les premières impressions qui portent quelque date, on n'en connait point de plus ancienne, que celles de Faust et de Schoèffer. D'ailleurs, ils se sont toujours donnés pour les premiers Imprimeurs de l'Europe, en marquant que Dieu avait favorisé la ville de Mayence, de l'invention de ce bel art, sans qu'on voie que personne pendant cinquante ans les ait démentis, ni ait attribué cette découverte à d'autres. Consultez l'article IMPRIMERIE, Histoire des inventions modernes.

Hervagius (Jean), né à Basle, contemporain d'Erasme, qui l'estimait beaucoup. Si Alde Manuce, dit-il, a mis le premier au jour le prince des orateurs grecs, nous sommes redevables à Hervagius, de l'avoir fait paraitre dans un état beaucoup plus accompli, et de n'avoir épargné ni soin, ni dépense, pour lui donner sa perfection. L'imprimerie de Basle, établie par Amerbach, soutenue par Froben, ne tomba point sous Hervagius, qui épousa la veuve de ce dernier.

Jenson (Nicolas), né en France, alla s'établir à Venise en 1486, où il surpassa par la beauté de ses caractères, les imprimeurs allemands que cette ville avait eu jusqu'alors, et jeta les fondements de la réputation que l'imprimerie de Venise s'acquit depuis par les beaux talents des Manuces.

Juntes (les) Juntae, sont à jamais célèbres entre les Imprimeurs du XVIe siècle. Ils s'établirent à Florence, à Rome, et à Venise, et tinrent le premier rang dans l'Italie avec les Manuces. Nous ne cessons d'admirer les éditions dont on leur est redevable ; et on a des catalogues qui font voir avec étonnement l'étendue et la multiplicité de leurs travaux.

Maire (Jean), hollandais, prit le parti de se fixer à Leyde, et d'y donner de charmantes éditions de livres latins. Grotius, Vossius, et Saumaise, en faisaient grand cas.

Manuces (les), ces habiles et laborieux artistes d'Italie, ont élevé l'Imprimerie dans leur pays au plus haut degré d'honneur.

Alde Manuce, Aldus Pius Manucius, le chef de cette famille, était natif de Bassano dans la marche Trévisane. Il a illustré son nom par ses propres ouvrages. On a de lui des notes sur Homère et sur Horace, qui sont encore estimées ; mais il est le premier qui imprima correctement le grec sans abréviations, et grava de même que Collines, les caractères romains de son imprimerie. Il mourut à Venise en 1516, dans un âge fort avancé.

Paul Manuce son fils, né en 1512, soutint la réputation de son père, et fut également versé dans l'intelligence des langues et des humanités. On lui doit en ce genre la publication d'excellents ouvrages de sa main, sur les antiquités grecques et romaines, outre des lettres composées avec un travail infini. On lui doit en particulier une édition très-estimée des œuvres de Cicéron, avec des notes et des commentaires.

Pie IV. le mit à la tête de l'imprimerie apostolique et de la bibliothèque vaticane. Il mourut à 62 ans en 1574, et eut pour fils Alde Manuce le jeune, qui servit encore à rehausser sa gloire.

En effet, ce dernier passa pour l'un des plus savants hommes de son siècle. Clément VIII. lui donna la direction de l'imprimerie du Vatican ; mais cette place étant d'un fort modique revenu, il fut contraint pour subsister, d'accepter une chaire de rhétorique, et de vendre la magnifique bibliothèque que son père, son ayeul, ses grands oncles, avaient formée avec un soin extrême, et qui contenait, diton, quatre-vingt mille volumes. Enfin, il mourut à Rome en 1597, sans autre récompense, que les éloges dus à son mérite ; mais il laissa des ouvrages précieux ; tels sont ses commentaires sur Cicéron, Horace, Salluste, et Velleius Paterculus, de même que son livre dell'antichita delle romane inscrizioni. Ses lettère sont écrites avec la politesse d'un homme de cour qui serait très-éclairé.

Mentel (Jean), gentilhomme allemand de Strasbourg, à qui quelques auteurs attribuent l'invention de l'Imprimerie en 1440. Ils disent qu'il fit des lettres de buis ou de poirier, puis d'étain fondu, et ensuite d'une matière composée de plomb, d'étain, de cuivre, et d'antimoine, mêlés ensemble. Ils ajoutent que Mentel employa Guttemberg pour faire des matrices et des moules ; et qu'ensuite Guttemberg se rendit à Mayence, où il s'associa Faust. Mais, outre que tous ces faits ne sont point appuyés de preuves, on ne produit aucun livre imprimé dans les premiers temps à Strasbourg. Enfin, il est certain que Guttemberg et ses associés, ont passé pendant 50 ans, pour les inventeurs de l'Imprimerie, et s'en sont glorifiés hautement, sans que personne se soit alors avisé de les démentir, ni de leur opposer Mentel.

Millanges (Simon), né dans le Limousin en 1540, après avoir fait ses études, se rendit à Bordeaux en 1572, pour y dresser une belle imprimerie. Les jurats de cette ville soutinrent cette entreprise de leur argent et de leur crédit. Millanges se distingua par la correction de ses éditions, et mourut en 1621 âgé de 82 ans, ayant été un des bons imprimeurs du royaume pendant près d'un demi-siècle.

Morel (les), nous devons aux Morels bien des éloges pour leur savoir et les beaux livres qu'ils ont publiés.

Morel (Guillaume), né en Normandie, selon la Croix du Maine, et célèbre imprimeur de Paris, était savant dans l'intelligence des langues. Il devint correcteur de l'imprimerie royale, après que Turnebe se fut démis de cet emploi en 1555. Ses éditions grecques sont fort estimées. Il commença lui-même quelques ouvrages, entr'autres un dictionnaire grec, latin, français. Il mourut en 1564.

Morel (Frédéric), apparemment parent éloigné de Guillaume, versé dans les langues savantes, fut gendre et héritier de Vascosan, dont il fit valoir l'imprimerie ; et mourut à Paris en 1583, âgé d'environ 60 ans, laissant un fils d'un mérite supérieur, nommé semblablement Frédéric.

Celui-ci après avoir été professeur et interprete du Roi, fut pourvu de la charge d'imprimeur ordinaire de Sa Majesté pour l'hébreu, le grec, le latin, et le français. Le grand nombre d'ouvrages qu'il a publiés et traduits du grec sur les manuscrits de la bibliothèque du Roi, avec des notes, sont des preuves authentiques de son érudition. Il mourut en 1630, âgé de 78 ans, et laissa deux fils Claude, et Gilles.

Claude Morel donna les éditions de plusieurs pères grecs, entr'autres S. Athanase. Gilles Morel son frère lui succéda, et publia les œuvres d'Aristote en quatre vol. in-folio, outre la grande bibliothèque des pères, qu'il mit au jour en 1643, en dix-sept volumes in-folio. Gilles Morel est devenu conseiller au grand-conseil.

Moret (Jean), flamand, gendre de Plantin, et son successeur à Anvers. Plusieurs de ses éditions ne sont pas moins belles, ni moins exactes que celles de son beau-pere. Le docte Kilien donna son temps à les corriger jusqu'en 1607. Moret finit ses jours en 1610, et laissa son imprimerie à son fils Balthasar Moret. Celui-ci se fit connaître par son érudition, et par ses commentaires géographiques sur le théâtre du monde d'Ortélius. Il mourut en 1641.

Nivelle (Sébastien), libraire et imprimeur de Paris, fleurissait au milieu du XVIe siècle. Entre les ouvrages qu'il mit au jour à ses dépens, on ne doit jamais oublier le corps du Droit civil avec les commentaires d'Accurse. C'est un livre précieux, un chef-d'œuvre que Nivelle fit paraitre en 1576, en cinq volumes in-folio ; mais Olivier de Harzy, et Henri Thierry imprimeurs, en partagent aussi la gloire.

Oporin (Jean), natif de Basle, après d'excellentes études, prit le parti de l'Imprimerie, en s'associant aux Winter. Il faisait rouler continuellement six presses, avait plus de cinquante ouvriers, corrigeait toutes les épreuves, et s'attachait surtout à imprimer les ouvrages des anciens avec beaucoup de soin et d'exactitude ; mais il mourut fort endetté en 1568, à 61 ans. On lui doit des tables très-amples de Platon, d'Aristote, de Pline, et autres auteurs de l'antiquité.

Palliot (Pierre), imprimeur et généalogiste, né à Paris en 1608, de bonne famille, se maria à 25 ans à Dijon avec la fille d'un imprimeur ; alliance qui le détermina à embrasser la profession de son beau-pere, qu'il a exercée longtemps, et toujours honorablement. Il a imprimé tous ses livres, qui sont en très-grand nombre, mais qui n'intéressent que les curieux de la généalogie des maisons de Bourgogne. Palliot grava lui-même le nombre prodigieux de planches de blason dont ils sont remplis. C'était un homme exact et infatigable au travail. Il mourut à Dijon en 1698 ; à l'âge de 89 ans, et laissa sur les familles de Bourgogne 13 volumes in-folio de mémoires manuscrits qui étaient dans la bibliothèque de M. Joly de Blezé, maître des Requêtes ; j'ignore où ils ont passé depuis.

Patisson (Mamert), natif d'Orléans, était très-habîle dans les langues savantes et dans la sienne propre. Il épousa la veuve de Robert Etienne en 1580, se servit de son imprimerie et de sa marque. Ses éditions sont correctes, ses caractères beaux, et son papier très-bon. En un mot, il n'a omis aucun des agréments qu'on recherche dans les livres : aussi ses impressions vont presque de pair avec celles de Robert Etienne. Mamert mourut en 1600.

Plantin (Christophe), né en Touraine, acquit du savoir dans les belles-lettres, se retira à Anvers, et y porta l'impression au plus haut point de son lustre. Ses éditions sont extrêmement exactes, par les soins de plusieurs habiles correcteurs dont il se servait, savoir de Victor Giselin, de Théodore Purman, de François Hardouin, de Corneille Kilien, et de Raphelinge, dont il fit son gendre. Le roi d'Espagne lui donna le titre d'archi-imprimeur ; mais ce sont les impressions, et non pas les rois qui donnent ce titre à un artiste. Le chef-d'œuvre de celui-ci est la Polyglotte, qu'il imprima sur l'exemplaire de Complute, et cette édition faillit à le ruiner. M. de Thou passant à Anvers en 1576, vit chez Plantin dix-sept presses roulantes. Guichardin a fait une belle description de son imprimerie ; et d'autres ont vanté la magnificence avec laquelle il vivait. Il finit sa carrière en 1598, âgé de 76 ans.

Quentel (Pierre), allemand, se rendit illustre à Cologne, sur la fin du XVe siècle, par l'édition de tous les ouvrages de Denys le Chartreux, qu'il fit imprimer avec soin, il valait bien mieux faire rouler ses presses sur les livres utiles de l'antiquité qui manquaient en Allemagne.

Schoèffer (Pierre) de Gernsheim, pourrait être regardé comme l'inventeur de l'Imprimerie ; car c'est lui qui imagina de fondre des lettres mobiles, en quoi consiste principalement cet art. Jean Faust son maître fut si charmé de cette découverte, qu'il lui donna sa fille en mariage : ceci arriva vers le milieu du Xe siècle.

Thori ou Tori (Geoffroi), né à Bourges dans le Xe siècle, libraire-juré à Paris, contribua beaucoup à perfectionner les caractères d'imprimerie, et composa un livre qui parut après sa mort, intitulé le Champ-fleuri, contenant l'art et science de la proportion des lettres, vulgairement appelées romaines, à Paris l'an 1592. in-4°. Il mourut en 1550.

Claude Garamond fut élève et contemporain de Tori ; il fleurissait déjà en 1510, et porta la gravure des caractères au plus haut point de perfection, par la figure, la justesse et la précision qu'il y mit. Voyez CARACTERES d'imprimerie.

Vascosan (Michel), né à Amiens, épousa une des filles de Josse Badius, et s'allia à Robert Etienne qui avait épousé l'autre. Tous deux aussi sont les meilleurs imprimeurs que la France ait eu dans ces temps reculés. Tous les livres imprimés par Vascosan sont recommandables par le choix, par la beauté des caractères, la bonté du papier, l'exactitude des corrections, et l'ampleur de la marge.

Vitré (Antoine) parisien, s'est rendu fameux dans le XVIIe siècle, par le succès avec lequel il a porté l'imprimerie, presque au période de la perfection. Quoique de son temps les Hollandais semblassent être les maîtres de cet art. On croit que Vitré était capable de les surpasser, s'il se fût avisé d'observer, comme on a fait depuis, la distinction de la consonne d'avec la voyelle dans les lettres i et j, u et Ve

Quoiqu'il en soit la polyglotte de Guy Michel le Jay qu'il a imprimée, est un chef-d'œuvre de l'art, tant par la nouveauté et la beauté des caractères, que par l'industrie et l'exactitude de la correction. Sa bible latine in-folio et in-4°, Ve de pair avec tout ce qu'on connait de mieux. En un mot il a égalé Robert Etienne pour la beauté de l'imprimerie ; mais il a terni sa gloire en faisant fondre les caractères précieux des langues orientales, qui avaient servi à imprimer la bible de M. le Jay, pour n'avoir aucun rival après sa mort.

M. de Flavigny s'étant avisé de censurer dans une brochure, non l'action de Vitré, mais quelques endroits de la bible magnifique qu'il avait mise au jour, et qu'il était bien permis de critiquer, celui-ci éprouva des chagrins incroyables, par une seule faute d'impression qui n'était point dans son manuscrit. Il avait cité le passage de S. Matthieu, ejice primùm trabem de oculo tuo. Gabriel Sionita prenant un vif intérêt à la défense de la bible où il avait travaillé, ayant lu la critique de M. Flavigny, l'accusa par sa réponse de mœurs corrompues, de sacrilege, et d'une impiété sans exemple, d'avoir osé corriger le texte sacré, en substituant un mot infame, à la place du terme honnête de l'evangéliste. Qui croirait que tous ces sanglans reproches n'avaient d'autre fondement qu'une inadvertance d'imprimerie ? La première lettre du mot oculo s'était échappée fortuitement de la forme, après la revue de la dernière épreuve, lorsque le compositeur toucha une ligne mal dressée, pour la remettre droite.

Wechels (les) Chrétien et André son fils imprimeurs de Paris et de Francfort, sont très-estimés dans leur art, par les éditions qu'ils ont mises au jour. On dit qu'ils possédaient une bonne partie des caractères de Henri Etienne. Mais ce qui a le plus contribué à rendre leurs éditions précieuses, c'est d'avoir eu pour correcteur de leur imprimerie Fréderic Sylburge, un des premiers grecs et des meilleurs critiques d'Allemagne. L'errata d'un in-folio qu'il avait corrigé, ne contenait pas quelquefois plus de deux fautes. Chrétien Wechel vivait encore en 1552, et André qui se retira de Paris après le massacre de la saint Barthelemy, où il courut le plus grand danger, mourut à Francfort en 1582. Jean Wechel son fils lui succéda.

Westphale (Jean) " le premier de ma connaissance, dit Naudé, qui se soit mêlé de l'imprimerie dans les Pays-bas, fut un Jean de Westphale, lequel s'établit à Louvain l'an 1475, et commença son labeur par les morales d'Aristote. Cet imprimeur se nomma tantôt Johannes de Westphalia, tantôt Johannes Westphalia, Paderbornensis ".

Voilà depuis l'origine de l'Imprimerie les principaux maîtres qui se sont rendus célèbres. Dans cette liste je n'ai point parlé des Anglais, parce que les noms de leurs habiles artistes en ce genre, ne sont guère connus hors de leur pays. D'ailleurs, il me semble que c'est seulement au commencement du dernier siècle que cet art fut poussé en Angleterre au point de perfection où il s'est toujours soutenu depuis ; alors on vit des chefs-d'œuvres sortir de leurs imprimeries. Rien dans le monde n'est supérieur à l'édition grecque de saint Jean Chrysostome, en huit volumes in-folio, de l'imprimerie de Norton, achevée en 1613 dans le collège-royal d'Eaton (Etonae) près de Windsor, par les soins du docte Henri Savile.

Mais la beauté des caractères qu'emploient les Imprimeurs anglais, le choix de leur papier, la grandeur des marges, le petit nombre d'exemplaires qu'ils tirent, et l'exactitude de la correction qu'ils mettent dans les livres importants, ne sont pas les seuls avantages qui peuvent attirer à l'Imprimerie de la Grande-Bretagne, une attention toute particulière. (D.J.)

Il y a trois corps et communautés d'Imprimeurs.

Les Imprimeurs de livres, les Imprimeurs en taille-douce, et les Imprimeurs Imagers, Tapissiers et Dominotiers. Voyez DOMINOTIERS.

Avant l'invention des caractères, le corps des Imprimeurs en lettres était composé d'Ecrivains, de Libraires, de Relieurs, d'Enlumineurs, et de Parcheminiers.

Ce corps était tout à fait dépendant de l'université et de son recteur.

Le parcheminier préparait les peaux sur lesquelles on écrivait.

L'écrivain qu'on appelait stationnaire, copiait sur les peaux l'ouvrage que le libraire fournissait.

Le relieur mettait en volume les feuilles copiées.

L'enlumineur peignait, relevait d'or bruni ; en un mot décorait le volume qui retournait chez le libraire qui le vendait.

Nos Imprimeurs en lettres ont succédé à l'état et aux privilèges des stationnaires. Ils sont agrégés à l'université, et soumis aux ordonnances et statuts du recteur ; mais le corps ne comprend plus que les Imprimeurs et les Libraires, que le règlement de 1686 affranchit en grande partie de l'autorité de l'Université.

Ce règlement fixe le nombre des Imprimeurs à trente-six.

Depuis ce règlement il est intervenu un grand nombre d'arrêts, d'édits et déclarations relatifs au corps et à la communauté des Imprimeurs-Libraires.

On a rassemblé toutes ces pièces dans un volume considérable, qui forme ce qu'on appelle le code de la Librairie.

Il est traité dans ce code de tout ce qui appartient aux privilèges, au nombre, à la demeure, aux presses, aux caractères, au papier, à la marge, à l'apprentissage, à la réception, aux visites, à la maitrise, aux connaissances, aux permissions, aux approbations, à la censure, aux syndics, aux adjoints, aux correcteurs, aux compositeurs, aux pressiers, etc. voyez l'article LIBRAIRE.

Avant 1694 les Imprimeurs en taille-douce n'étaient que de simples compagnons que les Graveurs et Imagers de Paris avaient chez eux.

Ce fut dans cette année qu'ils eurent des statuts, dont les principaux règlent le nombre des syndics, l'apprentissage, la bourse commune, le chef-d'œuvre, la reception, etc.

Il n'y a que deux syndics, dont l'un est le trésorier de la bourse commune. Le fond de la bourse consiste au tiers du salaire. Ce produit se distribue tous les quinze jours, frais et rentes constitués de la communauté déduits. Les veuves des maîtres jouissent de la maitrise, et ont part à la bourse. Les apprentifs ne peuvent être obligés pour moins de quatre ans, et chaque maître n'en peut avoir qu'un à la fais. Avant que l'apprentif soit admis au chef-d'œuvre, il doit avoir servi compagnon deux années depuis son apprentissage. Il n'y a que les fils de maîtres qui soient dispensés du chef-d'œuvre. Les maîtres ne peuvent demeurer ailleurs que dans le quartier de l'université, et n'y peuvent avoir ou tenir plus d'une imprimerie. Il est défendu expressément à toutes personnes quelles qu'elles soient d'avoir des presses, soit en lettres, soit en taille-douce.

Imprimeur-Libraire ordinaire du Roi (Histoire, Littérature) Ce sont les titres de ceux qui ont été créés sous Louis XIII. le 22 Février 1620, pour imprimer les édits, ordonnances, règlements, déclarations, etc. et de ceux qui leur ont succédé.

Ces Imprimeurs, de la création de Louis XIII, étaient de ses officiers domestiques, et commensaux de sa maison, avec attribution de gages. Leurs successeurs ont les mêmes prérogatives.

Il n'y en avait que deux. L'une de ces charges est à présent possédée par André François Le Breton, et l'autre par Jacques Colombat, dont le père obtint en 1719 le titre additionnel de préposé à la conduite de l'imprimerie du cabinet de sa majesté.

Ils sont aujourd'hui au nombre de six. Les quatre de création postérieure, n'ont d'abord été que brévetés par chacun des secrétaires d'état.

Plusieurs arrêts consécutifs les ont tous maintenus dans leurs premiers privilèges et anciennes fonctions, et les dernières lettres-patentes qu'ils ont obtenues en leur faveur, sont du 9 Décembre 1716, enregistrées au Parlement le 12 Janvier 1717.

Outre ces Imprimeurs, il y en a encore un particulièrement titré Noteur de la chapelle de sa Majesté, et exclusivement privilégié à l'impression de sa musique. Cette charge fut créée par Henri II. Ce fut un Ballard qui la posséda, et c'est un de ses descendants qui la possède encore aujourd'hui.

Ceux qui ont rangé le code de la Librairie n'ont fait aucune mention de ces places, qui semblent destinées spécialement à ceux qui se conduisent avec honneur dans leurs corps.

IMPRIMEUR, s. f. (Peinture) pour préparer les toiles imprimées à l'huîle dont on se sert dans la peinture ordinaire ; on a un couteau d'un pied et demi de longueur, qui a le tranchant émoussé, et dont le manche fait un angle obtus avec le dos ; on tend la toîle sur un châssis : on la frotte avec la pierre ponce, pour en user les nœuds ; on lui donne un enduit de colle de poisson, lorsqu'elle est grosse et claire ; car si c'est une batiste, ou une autre toîle serrée, comme les Peintres d'un genre précieux ont coutume de les prendre, l'enduit de colle devient superflu. On laisse sécher cet enduit ; on prépare un gris en délayant à l'huîle du blanc et du noir : on jette ce gris sur la toîle ; on l'étend et le traine sur toute sa surface avec le couteau, ce qui s'appelle donner une impression ; on laisse sécher cette première impression : il faut pour cela quatre à cinq jours, selon la saison. Quand cette impression est séche, on en donne une seconde qu'on laisse sécher aussi, et alors la toîle est préparée pour la peinture à l'huile.