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Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Agriculture
S. f. (Agriculture) défaut, maladie, dommage qui arrive aux arbres par de fortes gelées.

La physique des végétaux, et surtout des principaux végétaux, qui sont les arbres, se porte même à la connaissance des accidents qui arrivent extraordinairement ; tels sont ceux que produisent les fortes gelées d'hiver. Elles font quelquefois fendre les arbres, suivant la direction de leurs fibres, et même avec bruit ; c'est ce que les Forestiers appellent gelivures, terme expressif qu'on ne trouve point dans nos meilleurs dictionnaires, et dont il faut pourtant enrichir notre langue.

Nos forêts ont été attaquées de maladies considérables par le froid de 1709 ; et quoique cette énorme gelée paraisse être très-ancienne, elle a produit dans les arbres du royaume des défauts ineffaçables.

Telles sont les gelivures, c'est-à-dire les fentes, les gerçures considérables des arbres dans toute la direction de leurs fibres. Ces arbres ainsi fendus ou gercés, sont marqués d'une arête ou éminence formée par la cicatrice qui a recouvert les gerçures qui restent dans l'extérieur de ces arbres sans se réunir, parce qu'il ne se fait jamais de réunion dans les fibres ligneuses, sitôt qu'elles ont été séparées. On conçoit fort bien que la seve, qui augmente de volume, comme toutes les liqueurs aqueuses, lorsqu'elle vient à geler, produit nécessairement des gelivures ; mais ne pourrait-il pas y en avoir qui fussent quelquefois occasionnées par d'autres causes, comme par une trop grande abondance de seve, ou autres vices de l'arbre ?

Quoi qu'il en sait, on a trouvé de ces défectuosités d'arbres dans tous les terroirs, et à toutes les expositions ; et même on a trouvé quantité d'arbres qui non-seulement étaient gelivés, mais qui avaient même une portion de bois mort renfermée dans de bon bois ; ce que les gens des forêts appellent gelivure entre-lardée. Alors les arbres ainsi malades étant sciés horizontalement, découvrent une portion de l'aubier mort et de l'écorce, entièrement recouverte par le bois vif. Quand ce défaut n'occupe pas toute la longueur du tronc, il y a telles pièces carriées qui paraissent très-saines, et dont on n'a reconnu la gelivure que par hasard ; savoir, quand on a refendu ces pièces équarries, pour en faire des planches et des membrures. Voyez le mémoire de MM. Duhamel et de Buffon sur cette matière, ann. 1737, de l'acad. des Sciences.

On peut tirer une utilité de ces faits ; c'est qu'il faut rebuter pour les ouvrages de conséquence, tous les bois attaqués de gelivures. Il n'y a ni terroir, ni exposition, ni art, qui puisse détourner le tort que les fortes gelées font aux arbres des forêts ; mais ce qui doit nous tranquilliser, c'est que l'évenement est très-rare. La gelée de 1709 a été accompagnée des circonstances d'un faux dégel, et de sur-gelées plus fortes que la première, qui sont des hasards si singuliers, que l'histoire ne parle guère que de trois à quatre hivers semblables. (D.J.)