(Chimie et Histoire naturelle) On entend en général par ce mot, un phénomène physique par lequel les parties solides et homogènes d'un corps qui a été dissous et atténué dans un liquide, se réunissent ensemble, et forment une masse solide dont la figure est constante et déterminée. Cette définition convient à toutes les substances salines et minérales qui présentent ce phénomène.

Les Chimistes emploient plus particulièrement le mot de crystallisation, pour exprimer une opération chimique par laquelle on dispose les molécules d'un sel neutre dissous dans un menstrue convenable, à se réunir ensemble en gardant entr'elles un ordre symétrique, et à former des corps différemment figurés, suivant la nature de chaque sel. Voyez SEL.

Les Physiciens sont partagés sur les causes de ce phénomène : les Cartésiens l'expliquent par l'impulsion de la matière subtîle : les Newtoniens ont recours aux lois de l'attraction, et disent que la crystallisation des sels se fait parce que les molécules salines s'attirent en raison de leurs masses. Becher et Stahl veulent que ces molécules s'attirent et s'unissent en raison de la nature de leurs faces. Sans nous arrêter à discuter cette question, nous nous contenterons de décrire ici les faits principaux qui accompagnent la crystallisation.

Il n'entre point seulement des molécules salines dans la formation des crystaux de sels, il y entre aussi une portion d'eau qui ne leur est point essentielle, attendu qu'elle peut leur être enlevée sans que les sels perdent aucune de leurs propriétés, sinon la figure. C'est cette eau que M. Rouelle appelle l'eau de la crystallisation, pour la distinguer de celle qui a servi à mettre les sels en dissolution, qu'il nomme l'eau de la dissolution. Voyez dans les mémoires de l'académie royale des Sciences, année 1744, p. 353. et suiv. le mémoire de M. Rouelle, dont cet article est entièrement tiré.

Voici en général les règles de la crystallisation. Il faut que la substance qu'on veut faire crystalliser, ait été mise en dissolution dans un dissolvant convenable ; sur quoi l'on observera que plus les sels ont d'eau dans leur crystallisation, moins il en faut pour les mettre en dissolution, et vice versâ. Quand on veut que la crystallisation soit faite avec soin, on passe la dissolution au-travers d'un filtre, afin de la dégager des parties étrangères qui pourraient y être mêlées. Il faut ensuite, pour que la crystallisation s'opere, qu'une partie de la liqueur qui tient les molécules du corps dissous écartées les unes des autres, soit chassée (c'est ce qu'on nomme l'évaporation), afin que ces molécules puissent se rapprocher. Ce rapprochement commence à se faire à la surface du liquide où les molécules se réunissent, et forment une toîle ou pellicule saline qui n'est qu'un amas de petits crystaux, qui, après avoir acquis une pesanteur spécifique plus grande que celle du dissolvant, tombent au fond, et s'y crystallisent sous des figures différentes dont on parlera en traitant de chaque sel. Voyez, SEL.

L'évaporation est d'une grande conséquence dans la crystallisation ; elle y produit des phénomènes très-différents, suivant qu'elle a été plus ou moins rapide : quand elle l'a été trop, les crystaux qu'elle fournit sont confus, et il est très-difficîle d'en observer la figure ; au lieu que plus l'évaporation a été lente, et plus l'on a employé d'eau dans la dissolution, plus les crystaux qu'on obtient sont gros, parfaits et réguliers. Le grand froid nuit aussi à la régularité de la crystallisation, il est cause que les crystaux se forment trop promptement et sans ordre. Voyez SEL et ÉVAPORATION. Tout ce qui a été dit dans cet article sur la crystallisation des sels, peut s'appliquer aux crystallisations que la nature opère dans le règne minéral. Voyez CRYSTAL ou CRYSTAUX. (-)