S. f. en Médecine, se dit de la bouche, distorsio oris, lorsque cette partie du visage et celles qui l'avoisinent, sont tirées de côté, de manière que l'angle des lèvres soit porté en haut ou en bas, ou transversalement hors de leur situation ordinaire.

Lorsque la distorsion de la bouche a lieu des deux côtés, c'est ce qu'on appelle spasme cynique, ou rire de chien, parce que cet animal en colere écarte les deux angles de la gueule vers les oreilles, en relevant et ridant la lèvre supérieure ; ce qui est une menace de mordre : on l'appelle encore rire sardonique, par sa ressemblance avec l'effet d'une plante, qui se trouve dans l'île de Sardaigne : c'est une espèce de renoncule à feuille d'ache, qui cause l'écartement des deux angles de la bouche à ceux qui en ont mangé, et les fait mourir avec l'apparence d'un visage riant ; ce qui a fait donner à cette plante le nom d'apium risus.

On appelle encore distorsion de la bouche, la figure viciée du visage, par la rétraction involontaire d'un des angles des lèvres, et quelquefois le tiraillement de toutes les parties d'un même côté ; ce qui est plus particulièrement nommé par Platerus tortura oris, et qui répond à l'action volontaire de tordre la bouche.

Le mot de distorsion est donc un nom générique, par lequel on exprime toutes ces différentes dépravations de la figure du visage.

La distorsion de la bouche, lorsque cette partie en est affectée des deux côtés, est toujours causée par la convulsion des muscles qui servent à mouvoir les lèvres dans l'action du rire naturel, et surtout des grands zygomatiques et des buccinateurs : la cause de la convulsion de ces muscles en particulier, est la même que la cause des convulsions en général, qui, dans ce cas-ci, n'affecte que les nerfs qui se distribuent aux organes contractés. Voyez CONVULSION ou SPASME.

La distorsion de la bouche, qui n'a lieu que d'un côté, peut provenir de deux causes bien différentes, savoir de convulsion ou paralysie : la première a lieu lorsqu'un des zygomatiques ou des buccinateurs, ou les deux ensemble sont affectés d'un mouvement spasmodique ; les antagonistes ne pouvant pas contrebalancer l'action des premiers, sont eux-mêmes tiraillés avec toute la bouche du côté opposé. Le même effet arrive par la seconde cause : si un des deux zygomatiques devient paralytique, est coupé ou relaché par quelque cause que ce sait, la force de contractilité naturelle dans l'antagoniste n'étant plus contrebalancée, celui-ci tire la bouche de son côté, pendant que le muscle paralysé se laisse allonger : il n'y a ni contraction volontaire, ni convulsion dans ce cas-ci ; le muscle raccourci n'est point dur, la joue de ce côté est molle, les lèvres ne retiennent pas la salive ; ce qui le distingue du premier cas, dans lequel les parties en distorsion sont dures, résistantes, et serrent les lèvres de manière que la salive ne s'écoule pas au-dehors de la bouche comme dans la distorsion, à cause de paralysie ; dans celle-ci, les parties qui cedent et qui sont tirées vers le côté sain sont presque sans sentiment ; le malade en riant ou en prononçant la lettre O, ne remue qu'une partie de la bouche, et le plus souvent la paupière du côté affecté est comme pendante, parce que toute cette partie du visage est aussi dans le relâchement : ce qui a lieu surtout dans l'hémi-plégie.

La distorsion de la bouche qui n'est occasionnée par le vice d'aucune autre partie (dit Hippocrate dans son second livre des prédictions) " se guérit promptement ou d'elle-même, ou en ramenant par force les parties dans leur situation naturelle ".

Si la distorsion de la bouche, du nez ou de l'oeil, survient dans une fiévre continue, c'est un signe de mort prochaine sect. IVe aph. 49. Elle est assez souvent l'avant-coureur des plus fâcheuses maladies, comme l'épilepsie, l'apoplexie.

La curation de cette maladie doit être différente, selon la différente cause qui la produit. Ainsi on doit employer les médicaments antispasmodiques ou antiparalytiques, selon les diverses indications : mais on peut plus particulièrement avoir recours à un bandage en forme de chevêtre, pour réduire le visage à sa forme naturelle et l'y retenir, pendant qu'on travaille à corriger le vice dominant, qui a produit la distorsion ; voyez Sennert, qui traite assez au long de cette maladie ; voyez aussi les art. PARALYSIE, SPASME.

DISTORSION DE L'OEIL, spasmus oculi, vulgò strabismus, oeil louche ; voyez OEIL, STRABISME. (d)