S. m. (Médecine) c'est un mot chinois qui a passé en Médecine, par lequel on désigne une espèce de cholera morbus qui est fréquente à la Chine, à Goa, et dans le Brésil, où on l'appelle mordechi. Cette maladie se déclare brusquement par des vomissements continuels bilieux, par des diarrhées de même nature, auxquels se joignent une fièvre aiguë, soif immodérée, délire, douleur de tête, inquiétudes, etc. Les urines sont pendant tout le cours de la maladie, ardentes, rouges, limpides, le pouls fort roide et inégal. Il est à remarquer que ce caractère du pouls, tel que Dellon dit l'avoir observé (voyage dans les Indes orient. ann. 1689), est exactement le même que celui que l'auteur des recherches sur le pouls dit précéder, désigner et accompagner les excrétions ventrales, le vomissement et la diarrhée. Voyez POULS. Et ce n'est pas la seule occasion, comme je crois l'avoir fait apercevoir ailleurs, où l'on voit des observations antérieures exactes et bien détaillées, quadrer parfaitement avec les classes établies par cet illustre médecin ; et il ne manquerait pas d'observations postérieures plus conformes encore à cette méthode, et plus propres à confirmer et à éclaircir un point aussi intéressant, si l'on voulait voir sans préjugé et raconter sans politique.

Cette maladie est très-grave, toujours dangereuse, et quelquefois funeste : un heureux hasard a découvert depuis longtemps à ces peuples un remède que l'empirisme aveugle a employé, et dont un succès presque constant a démontré l'efficacité. Ce remède consiste dans l'application d'une verge de fer rougie au feu sous le talon, qui chez ces peuples accoutumés à marcher pieds nuds, est très-dur, calleux et peu sensible : on l'y laisse jusqu'à ce que le malade ressente de la douleur ; et alors pour empêcher qu'il ne s'y forme des cloches, on bat doucement la partie avec un soulier plat. Dès l'instant même que l'opération est achevée, on voit pour l'ordinaire diminuer les vomissements, la douleur et la fièvre, qui en est une suite. Ce remède agit, comme l'on voit, moins comme un cautère que comme irritant, et par l'impression douloureuse qu'il fait sur les nerfs de cette partie. Cette méthode est fort analogue à celle qui se pratique à Java pour guérir la colique : on y applique de même un fer rouge indifféremment à la plante des pieds, et on soulage tout-à-coup. Cette façon d'agir singulière, inexplicable dans les théories vulgaires, est très-conforme aux lois bien déterminées de l'économie animale. Voyez ce mot. Dellon nous assure qu'il a éprouvé sur lui-même et sur une infinité d'autres personnes, les bons effets de ce remède : d'où il résulte que des remèdes bien différents guérissent à-peu-près également les mêmes maladies, et l'on voit presque le même nombre de malades échapper ou mourir traités par des méthodes absolument contraires. Il y a lieu de présumer que ce remède souverain à la Chine, aurait les mêmes avantages en France ; mais la délicatesse naturelle à ses habitants, la nouveauté de ce secours, la quantité d'autres plus doux, sont des préjugés très-forts contre son usage, et qui dans les cas ordinaires méritent d'être respectés. Mais quand on a épuisé tous les remèdes inutilement, qu'on est réduit à cette affreuse nécessité de voir périr des malades sans savoir de quel côté se tourner pour les secourir, je serais d'avis qu'on eut recours à un remède qui quoique cruel, l'est bien moins qu'un désespoir fatal. Lorsqu'après l'application de ce remède les symptômes sont diminués, mais la fièvre subsiste encore, ils font prendre au malade des crêmes de ris chargées de beaucoup de poivre ; ils répandent aussi du poivre sur la tête ; ils attendent pour le purger que la maladie soit bien calmée, et que la fièvre soit passée : alors ils donnent quelques purgatifs très-doux ; et quelle que soit l'ardeur de la fièvre dans les commencements, elle ne leur parait jamais exiger la saignée, dont ils s'abstiennent entièrement. Voyez Dellon, voyages dans les Indes orientales, année 1689, et Sauvage, de medicin. sinens. dissertat. (m)