(Médecine) je suis obligé de conserver le mot latin mentagra ; c'était une espèce de dartre lépreuse de mauvaise qualité, qui selon le rapport de Pline, liv. XXVI. ch. j. parut pour la première fois à Rome, sous le règne de Claude ; elle commençait par le menton, d'où elle prit son nom, s'étendait successivement aux autres parties du visage, ne laissait que les yeux de libres, et descendait ensuite sur le cou, sur la poitrine, et sur les mains. Cette maladie ne faisait pas craindre pour la vie, mais elle était extrêmement hideuse ; Pline, de qui nous tenons ce récit, ajoute que les femmes, le menu peuple et les esclaves, n'en furent point atteints, mais seulement les hommes de la première qualité.

On fit venir, continue cet auteur, des médecins d'Egypte, qui est un pays fertîle en semblables maux. La méthode qu'on suivait generalement pour la cure, était de bruler ou de cauteriser en quelques endroits jusqu'aux os pour éviter le retour de la maladie ; mais ce traitement faisait des cicatrices aussi difformes que le mal était laid. Galien parle d'un Pamphîle qui guérissait cette dartre sans employer les cautères, et qui gagna beaucoup d'argent par ses remèdes. Manilius Cornutus, gouverneur d'Aquittaine, composa avec le médecin qui entreprit de le guérir, pour une somme marquée dans Pline de cette manière, HS.. cette ligne mise au-dessus de deux C, indiquerait qu'il faut entendre deux cent mille grands sesterces qui font environ deux millions de livres. Mais comme cette somme parait follement excessive, pour avoir été le salaire de la guérison d'une simple maladie, où d'ailleurs la vie ne se trouvait point en danger ; le P. Hardouin a sans doute raison de croire, qu'il faut entendre seulement deux cent sesterces, c'est-à-dire environ vingt mille livres, ce qui est toujours une récompense magnifique.

On prétend que sous le pontificat de Pélage II. dans un été qui suivit l'inondation du Tibre, il parut à Rome une espèce de dartre épidémique que les Médecins n'avaient jamais vue, et qui tenait des caractères de la mentagra, dont Pline a donné la description. Mais il ne faut pas s'y tromper, la maladie qui ravagea Rome sous le pape Pélage, et dont lui-même périt, était une peste si violente, que souvent on expirait en éternuant ou en baillant ; c'est de-là qu'est venu, selon quelques historiens, la coutume de dire à celui qui éternue, Dieu vous bénisse, et celle de faire le signe de la croix sur la bouche lorsqu'on baille, coutume qui subsiste encore parmi le petit peuple. (D.J.)