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Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Anatomie
S. f. en Anatomie, se dit de la chair ferme et immobile, qui occupe le dessus des alvéoles ou petits trous, dans lesquels les dents sont comme enchâssées. Voyez DENT.

Maladies chirurgicales des gencives. Les personnes saines ont les gencives fermes, vermeilles, et bien collées autour de la couronne de chaque dent, dont elles fortifient l'union dans l'alvéole. Les gencives sont sujettes à se tuméfier dans différentes affections contre nature ; elles deviennent lâches et molles, quelquefois elles s'enflamment et deviennent noirâtres ; elles s'ulcèrent et exhalent une odeur putride et gangreneuse : c'est ce qu'on voit principalement dans le scorbut.

Lorsque le vice des gencives vient de la mauvaise disposition du sang, il faut y remédier en attaquant la cause par les remèdes convenables. Voyez CACHEXIE et SCORBUT. Les remèdes topiques ne doivent pas être négligés. Dans la tension inflammatoire des gencives, on se sert de gargarismes adoucissants et relâchants : lorsqu'elles sont molles, blanches et disposées à l'extubérance, on met en usage les gargarismes fortifiants et astringens : si elles sont gonflées et engorgées de sang à un certain point, on est obligé de les scarifier avec une lancette, pour en procurer le dégorgement ; on met alors en usage les gargarismes vulnéraires. Dans le gonflement scorbutique sans ulcération, lorsqu'il est leger, le suc des limons est un excellent topique. L'eau-de-vie camphrée fortifie les gencives, et est fort utîle contre la disposition à l'ulcération putride ; et dans le cas d'ulcération gangreneuse, on a recours aux anti-putrides, parmi lesquels l'esprit de cochléaria, la teinture de gomme laque, etc. sont fort recommandés.

Fabrice d'Aquapendente prescrit de cautériser légèrement, avec un fer mince, les gencives tuméfiées, livides et pourries ; il les frottait ensuite avec du miel, et faisait gargariser avec du vin miellé.

Il survient quelquefois autour des dents une excroissance charnue, dont il a été parlé au mot EPULIDE. Pour complete r cet article, nous dirons que de tous les moyens proposés, l'extirpation par l'instrument tranchant est le plus convenable ; mais que pour obtenir la guérison parfaite de cette tumeur, il faut presque toujours la cautériser. Les épulis sont susceptibles de grossir au point d'empêcher le malade de parler et de manger. Ambraise Paré dit en avoir emporté de si considérables, qu'elles sortaient en partie de la bouche, et qu'il a été obligé de cautériser à différentes fois la racine de la tumeur, parce qu'elle répullulait ; il n'a obtenu la consolidation parfaite de l'ulcère, qu'après avoir détruit la portion cariée de l'os maxillaire, sur laquelle cette excroissance avait végété.

La carie de l'os est presque toujours la cause ou l'effet des épulis. La plupart des observations qu'on a sur cette maladie, montrent que la carie de la dent en est fréquemment la première cause, comme nous le remarquerons plus bas. Job à Meerkréen fameux chirurgien d'Amsterdam, rapporte qu'un homme vigoureux et de la meilleure constitution, se fractura la mâchoire inférieure par une chute. Il survint une excroissance fongueuse, du volume du poing ; elle empêchait le malade de parler et de manger, et le rendait fort difforme. L'amputation de cette tumeur parut indispensable ; mais l'opérateur voyant en commençant son incision qu'il ne sortait pas une goutte de sang, il jugea qu'il fallait nécessairement procéder à l'extirpation éradicative de la tumeur ; ce qui fut exécuté sur le champ. L'ouverture de la bouche n'était point assez grande pour permettre l'issue de cette excroissance ; il fallut la couper ensuite pour la tirer en différentes parties. On se servit de gargarismes vulnéraires et détersifs, convenables à la mondification de l'os carié. Le surlendemain de l'opération, on sentit deux esquilles vacillantes, et assez fortes ; on en fit l'extraction, et le malade guérit en très-peu de temps.

Il est à-propos que les Chirurgiens soient prévenus que l'amputation des épulis peut être accompagnée d'une hémorrhagie assez considérable. L'auteur que je viens de citer, en donne un exemple remarquable. Une jeune demoiselle était sujette à des fluxions à la tête, aux oreilles, et aux dents. Il lui survint au palais une tumeur blanchâtre, grosse comme un gland, qu'on crut pleine de pus. L'ouverture ne donna issue qu'à du sang vermeil, et en grande quantité. L'hémorrhagie fut arrêtée par une compression avec le doigt, continuée assez longtemps. Cinq ou six jours après, la tumeur avait acquis un volume plus considérable qu'auparavant ; personne ne doutait plus qu'elle ne contint véritablement du pus : on en fit l'ouverture ; le sang sortit avec beaucoup d'impétuosité et d'abondance. On se servit de linge brulé pour arrêter cette seconde hémorrhagie, et l'on ne jugea plus devoir revenir à l'opération, qu'après qu'on aurait des signes certains de purulence. Pour la procurer, l'on fit user de gargarismes avec la décoction d'oignons de lis et de racines d'althaea, de feuilles de mauve et de guimauve, de graines de lin et de figues ; on ajoutait une once de sirop d'althaea à une livre de cette décoction. La malade en tenait fréquemment dans sa bouche : la tumeur diminua de volume, elle s'ouvrit d'elle-même ; mais la guérison ne fut parfaite qu'après l'exfoliation de l'os.

Scultet parle d'une excroissance fongueuse à la partie antérieure du palais, derrière les dents incisives, qui rendait du sang abondamment, pour peu que la malade la poussât avec la langue. Il fit diminuer cette tumeur en la touchant avec un mélange d'esprit de vitriol rectifié, de suc de pourpier, et de teinture de roses : il extirpa le reste en l'arrachant avec des pinces à polype ; la cure fut terminée radicalement en dix jours. Dans ce dernier cas, l'os n'était point altéré ; mais s'il y avait carie, il faudrait après l'extirpation avoir recours au cautère actuel. Ruisch rapporte, dans la quarante-huitième de ses observations anatomiques et chirurgicales, une très-belle cure d'une excroissance fongueuse au palais, avec carie de l'os maxillaire, et opérée par les moyens que je viens de citer.

La carie des dents produit souvent des maladies du sinus maxillaire, qui s'annoncent quelquefois par une tumeur fongueuse aux gencives. Une femme, au rapport de Ruisch, observat. 77. était très-mal d'une tumeur à la joue, avec excroissance maligne aux gencives. Après l'extirpation de cette excroissance et l'arrachement de quelques dents molaires, d'habiles chirurgiens portèrent le cautère actuel jusque dans le sinus maxillaire, dont on tira quelques jours après avec le petit doigt, quantité de tubercules polypeux de la grosseur d'un pois ou environ.

La carie des dents étant la cause la plus fréquente des maladies du sinus maxillaire, leur extraction, si bien indiquée par le mal même dont elles sont attaquées, devient aussi nécessaire par le traitement des maladies du sinus : on peut même arracher une dent saine pour procurer l'issue du pus et déterger le sinus. Drake chirurgien anglais, traitant un homme qui avait un ozene dont le siège était dans le sinus maxillaire, voyant que la matière acre et purulente ne sortait par le nez qu'en très-petite quantité, lorsque le malade était couché sur le côté sain, il prit le parti de tirer la seconde des dents molaires ; il perça ensuite avec un instrument convenable, le fond de l'alvéole, et parvint ainsi dans le sinus même. La matière prit son cours de ce côté ; on fit des injections spiritueuses, et le malade guérit radicalement.

Il peut rester à la suite de l'extraction d'une dent par l'alvéole, de laquelle on a pénétré dans le sinus, un écoulement de sérosité muqueuse, fournie par les tuyaux excréteurs de la membrane qui tapisse le sinus. Higmar, qui a décrit avec tant d'exactitude le sinus maxillaire, qu'on a donné son nom à ce sinus, dit qu'une dame avait un écoulement continuel d'une humeur séreuse à la suite de l'extraction d'une dent canine, avec laquelle une portion de la mâchoire supérieure fut emportée, de sorte qu'il y avait un passage libre dans le sinus. Cette dame fut un jour fort effrayée en cherchant l'origine de cet écoulement. Elle introduisit un stylet d'argent dans l'alvéole, et il entra jusque vers l'orbite ; elle prit ensuite une petite plume dont elle avait ôté les barbes, et la passa presque toute entière dans le sinus, quoiqu'elle eut plus de six travers de doigts de longueur : elle croyait l'avoir portée jusqu'au cerveau. Higmar qu'elle consulta, reconnut que la plume avait tourné en spirale dans le sinus, et il la tranquillisa en lui faisant voir l'étendue de cette cavité sur un of maxillaire préparé ; mais il ne donna aucun conseil sur l'incommodité dont cette personne se plaignait.

J'ai Ve au mois de Mai 1751, avec M. Morand, une dame de 45 à 50 ans, à qui l'on avait arraché dix ans auparavant la première dent molaire de la mâchoire supérieure du côté droit. La racine était restée, ou du-moins la pointe de la racine. Il y avait dix mois, que fatiguée de douleurs et de fluxions, accompagnées d'une issue de pus fétide par le nez dont quelques gouttes coulèrent enfin par l'alvéole de la dent arrachée, cette dame consulta à Compiègne M. de la Martinière et différents médecins et chirurgiens de la cour. M. le premier chirurgien conseilla l'extraction de la seconde molaire, quoiqu'elle fût saine. M. Capperon dentiste du roi, extirpa la dent ; il sortit beaucoup de pus par l'alvéole : il est resté une ouverture dont il distillait une eau salée. Cette-dame se plaignait qu'en se mouchant, l'air entrait par l'alvéole dans le sinus maxillaire, et l'incommodait. Nous avons sondé ce trou, et avons jugé que les parties molles qui en tapissent la circonférence et l'intérieur, étant bien consolidées, ce trou ne se fermerait jamais naturellement, et qu'on pouvait obtenir le bon effet d'une réunion parfaite par l'usage d'un bouchon de cire.

J'ai lu depuis dans le quatrième volume du recueil de dissertations anatomiques, publié par M. de Haller, une thèse de M. Reininger sur les cavités des of de la tête ; il y donne une observation de M. Trew, laquelle a beaucoup de rapport avec le cas dont je viens de parler. Un homme de quarante ans était tourmenté depuis plusieurs années d'une douleur de dents, avec un gonflement de la joue. La troisième dent molaire était entièrement cariée, et il y avait à sa base un trou dans lequel le stylet entrait de la longueur d'un travers de doigt. L'application d'un cataplasme émollient sur la tumeur, détermina une suppuration par ce trou ; on arracha la dent, et il sortit beaucoup de matières purulentes, dont le foyer était dans le sinus. Les injections qu'on y fit pour le mondifier, sortaient en partie par le nez, lorsque le malade panchait la tête en-devant. L'ouverture de l'os ne se consolida point ; et pour empêcher les aliments et l'air de pénétrer dans le sinus et d'incommoder, on conseilla un obturateur fait avec de la cire, à laquelle on ajoutait de la poudre de corail, afin de lui donner plus de consistance. Par ce moyen la personne n'a plus éprouvé la moindre incommodité. Scultet a tenté avec succès l'application du cautère actuel pour obtenir une cure absolument radicale dans un cas de cette nature. Il avait fait des injections dans le sinus maxillaire, après l'extraction d'une dent cariée : ennuyé de ce que l'ouverture ne se fermait point, il porta un fer rouge dans l'alvéole, et en cautérisa assez fortement la circonférence. A la chute de l'escare, l'os lui parut carié ; il le toucha trois ou quatre fois avec les fers chauds, et se servit de remèdes dessicatifs : après l'exfoliation, l'ulcère se consolida fort exactement. Si l'auteur ne s'est pas mépris sur la carie, en prenant pour une altération primitive ce qui n'était que l'effet du cautère actuel et de la chute de l'escare, il aurait épargné de la douleur à son malade, en lui faisant porter un obturateur, comme dans les cas précédents.

Quand la maladie du sinus manifestée par les signes propres, n'est point accompagnée de dent cariée, c'est la troisième molaire qu'il faut arracher, si aucune circonstance ne détermine qu'on en tire une autre, parce qu'elle répond plus précisément au centre du sinus : mais si les dents étant tombées depuis du temps, et l'arcade alvéolaire diminuée dans toutes ses dimensions et en partie effacée, la substance osseuse était devenue plus compacte et plus serrée dans cet endroit, on pourrait ouvrir le sinus dans sa paroi extérieure, au-dessus de l'arcade alvéolaire, à l'endroit où répondait la racine de la troisième dent molaire. Il n'est pas difficîle de concevoir les instruments convenables pour pratiquer cette opération. (Y)