en Anatomie, est la partie de la femelle de quelque genre que ce sait, où le foetus est conçu, et ensuite nourri jusqu'au temps de la délivrance. Voyez FOETUS, CONCEPTION, GENERATION, etc.

Les anciens Grecs appelaient la matrice , de mère ; c'est pourquoi les maux de matrice sont souvent nommés maux de mère. Ils l'appelaient aussi , parce qu'elle est le plus bas des viscères dans sa situation ; ils la nommaient aussi quelquefois , nature, et vulva, vulve, du verbe vulvo, plier, envelopper, ou de valvae, portes.

Platon et Pythagore regardaient la matrice comme un animal distinct, renfermé dans un autre. Paul d'Egine observe qu'on peut ôter la matrice à une femme sans lui causer la mort, et il y a des exemples de femmes qui ont longtemps vécu après qu'on la leur avait ôtée. Rhasis et Paré remarquent que des femmes ont été guéries de certaines maladies par l'extirpation de la matrice. En 1669, on produisit à l'académie royale des Sciences de Paris un enfant qui avait été conçu hors de la matrice, et n'avait pas laissé de croitre de la longueur de six pouces. Voyez EMBRYON, FOETUS.

La matrice dans les femmes est située dans le bassin, ou la capacité de l'hypogastre entre la vessie et l'intestin rectum, et s'étend jusqu'aux flancs : elle est entourée et défendue par différents os ; en-devant par l'os pubis ; en arrière, par l'os sacrum ; de chaque côté par l'os des îles et l'os ischium : sa figure ressemble un peu à celle d'un flacon aplati, ou d'une poire séche. Dans les femmes enceintes, elle s'étend et prend diverses formes, suivant les divers temps et les diverses circonstances de la grossesse : elle a plusieurs membranes, artères, veines, nerfs et ligaments, et elle est tissue de plusieurs différentes sortes de fibres.

Les Anatomistes divisent la matrice en fond ou partie large, et en col ou partie étroite : sa longueur depuis l'extrémité de l'un jusqu'à l'extrémité de l'autre, est d'environ trois pouces : sa largeur dans son fond est d'environ deux pouces et demi, et son épaisseur de deux : elle n'a qu'une cavité, à moins qu'on ne veuille distinguer entre la cavité de la matrice et celle de son col. Celle-ci est très-petite, et contiendrait à peine une feve : elle est fort étroite, surtout dans les vierges, et son extrémité supérieure, c'est-à-dire celle qui regarde le fond de la matrice, se nomme orifice interne. Elle s'ouvre dans les femmes grosses, principalement aux approches de l'accouchement. L'extrémité opposée, ou inférieure du col de la matrice, c'est-à-dire celle qui regarde le vagin, se nomme orifice externe. Elle déborde un peu, et ressemble en quelque façon au gland du membre viril. Voyez nos Planches d'Anatomie.

La substance de la matrice est membraneuse et charnue : elle est composée de trois membranes ou tuniques, ou seulement de deux, selon quelques-uns, qui refusent ce nom à la substance du milieu. La tunique externe, appelée aussi commune, vient du péritoine, et se trouve formée de deux lames, dont l'extérieure est assez unie, et l'intérieure est raboteuse et inégale. Cette tunique enveloppe toute la matrice, et l'attache à l'intestin rectum, à la vessie, etc. La tunique moyenne est très-épaisse, et composée de fibres fortes, disposées en divers sens. Quelques-uns craient qu'elle contribue à l'exclusion du foetus, et d'autres, qu'elle sert seulement à rétablir le ressort de la matrice après une distension violente : la tunique interne est nerveuse.

La matrice est attachée au vagin par son col. Postérieurement et antérieurement elle est attachée à la vessie par sa tunique commune : ses côtés sont attachés à d'autres parties, mais son fond est libre, afin de pouvoir s'étendre et se dilater plus aisément : ses ligaments sont au nombre de quatre, deux qu'on nomme larges, et deux qu'on nomme ronds, à cause de leur figure. Les ligaments larges sont membraneux, lâches et mols ; c'est pourquoi quelques-uns les ont comparés aux ailes d'une chauve-souris, et les ont nommés alae verspertilionum. Les ligaments ronds sont d'un tissu plus ferme, et composés d'une double membrane, enveloppée de ses artères, veines, nerfs et vaisseaux lymphatiques. Les vaisseaux sanguins, tant des ligaments larges que des ronds, font une grande partie de ce qu'on nomme leur substance. Ces deux sortes de ligaments servent à maintenir la matrice dans une situation droite : ils peuvent être facilement endommagés par les sage-femmes mal-adroites. Voyez LIGAMENT.

De chaque côté du fond de la matrice nait un conduit qui s'ouvre dans ce viscère par un petit orifice, mais qui devient plus large à mesure qu'il avance, et qui, vers son extrémité, se retrécit de nouveau. Cette extrémité qui se trouve près des ovaires est libre, et s'épanouit derechef en forme d'un feuillage rond et frangé. Fallope qui découvrit le premier cette expansion, la compara à l'extrémité d'une trompette ; c'est pourquoi tout le conduit a été nommé trompe de Fallope : il est composé d'une double membrane ; les veines et les artères y sont en très-grand nombre, surtout les dernières, qui, par différentes ramifications et différents contours ; forment la principale substance des deux conduits. Le docteur Wharton donne des valvules aux trompes de Fallope, mais les autres Anatomistes les nient. Voyez TROMPE DE FALLOPE.

Cette partie que Platon comparait à un animal vivant, douée d'un sentiment merveilleux, est presque toujours unique ; cependant Julius Obséquents dit, qu'on a Ve autrefois à Rome une femme qui avait une matrice double. Riolan en cite deux autres exemples, l'une d'une femme ouverte dans les écoles des Lombards, en 1599, et l'autre dans une femme qu'il avait lui-même disséquée en 1615, en présence de plusieurs personnes. Bauhin rapporte aussi qu'il a Ve une fois la matrice partagée en deux portions par une cloison mitoyenne. On lit dans l'Histoire de l'académie des sciences un cinquième exemple de deux matrices dans un même sujet, observée par M. Littre en 1705 ; chacune n'avait qu'une trompe et un ovaire, qu'un ligament large et qu'un ligament rond. Enfin, je trouve dans la même Histoire de l'acad. des Sciences, année 1743, une sixième observation tout à fait semblable à celle de M. Littre, de deux matrices dans une femme morte en couches, vues par M. Cruger, chirurgien du roi de Danemark.

Quelquefois l'orifice interne de l'utérus n'est point percé. Fabrice d'Aquapendente dit qu'il a Ve ce vice de conformation dans une jeune fille âgée de quatorze ans, qui en pensa mourir, parce que ses règles ne pouvaient percer ; il fit à cette partie une incision longitudinale, qui donna cours au flux menstruel, et rendit cette fille capable d'avoir des enfants.

Dans le temps de l'accouchement, la matrice, qui est alors extrêmement tendue, peut se déchirer, soit à son fond, soit à ses côtés, soit surtout à son col, qui ne peut soutenir une si grande dilatation, et qui devient très-mince dans le temps du travail. M. Gregoire, accoucheur, a dit à l'acad, des Sciences, qu'en trente ans il avait Ve ce funeste accident arriver seize fais. Histoire de l'académie des Sciences année 1724.

On demande si la matrice peut tellement se renverser, que son fond tombe du dedans en dehors par l'orifice interne jusqu'au-delà du vagin. De Graaf juge la chose impossible dans les vierges, parce que l'orifice interne est alors trop étroit pour livrer le passage : mais il croit ce fait très-possible dans les accouchements, lorsque l'arriere-faix adhere fortement à la matrice, et qu'un accoucheur, ou la sage-femme, soit par ignorance, ou par imprudence, venant à le tirer violemment, entraîne en même temps le fond de la matrice, et en cause le renversement. Cette faute fait périr bien-tôt la malade, si l'on ne la secourt très-promptement. Voyez de nouvelles preuves de la réalité de ce fait dans les Observations anatomiques de Ruysch. (D.J.)

Suffocation de MATRICE. Voyez SUFFOCATION.

Speculum MATRICIS. Voyez SPECULUM.

MATRICE, se dit aussi des endroits propres à la génération des végétaux, des minéraux et des métaux.

Ainsi la terre est la matrice où les graines poussent. Les marcassites sont regardés comme les matrices des métaux. Voyez FOSSILE, MINERAL, MARCASSITE, etc.

MATRICE, se dit figurément de différentes choses, où il parait une espèce de génération et où certaines choses semblent acquérir un nouvel être, ou du moins une nouvelle manière d'être. De ce genre sont les moules où l'on met les caractères d'Imprimerie, et ceux dont on se sert pour frapper les monnaies et les médailles, et qu'on appelle coins. Voyez COIN et MONNOYAGE.

MATRICE, maladies de la, (Médecine) c'est bien avec raison qu'Hippocrate a dit, que la matrice était la source, la cause, et le siege d'une infinité de maladies : elle joue en effet un grand rôle dans l'oeconomie animale ; le moindre dérangement de ce viscère est suivi d'un désordre universel dans toute la machine ; on pourrait assurer qu'il n'est presque point de maladie chez les femmes où la matrice n'ait quelque part ; parmi celles qui dépendent principalement de sa lésion, il y en a qui sont générales, connues sous les noms particuliers de fureur, suffocations utérines, vapeurs, passion hystérique et maladies, qui, quoiqu'elles ne soient pas excitées par un déplacement réel de la matrice, comme quelques anciens l'ont prétendu, sont le plus souvent occasionnées et entretenues par quelque vice considérable dans cette partie que les observations anatomiques démontrent, et qui donnent lieu à ce sentiment. Voyez tous ces articles séparés. Les autres maladies sont spécialement restreintes à cette partie, ou locales ; le vice de la matrice qui les constitue est apparent, et forme le symptôme principal ; dans cette classe nous pouvons ranger toutes celles qui regardent l'évacuation menstruelle, qui sont ou seront traitées à l'article REGLES, voyez ce mot ; ensuite la chute ou descente, l'hernie, l'hydropisie, l'inflammation, l'ulcère, le skirrhe, et enfin le cancer de la matrice ; nous allons exposer en peu de mots ce qu'il y a de particulier sur ces maladies, relativement à leur siege dans cette partie.

Chute ou descente de matrice, prolapsus uteri, . La matrice dans l'état naturel est soutenue par plusieurs ligaments à l'extrémité du vagin, à une certaine distance qui varie dans différents sujets de l'entrée de la vulve ; il arrive quelquefois que la matrice descend dans le vagin, en occupe tout l'espace, quelquefois même elle s'étend en dehors, et pend entre les cuisses. Quelques auteurs uniquement fondés sur leur inexpérience (tels sont Kerkringius, Van-Roonhuysen, Van-Meeckren, &c.) ont refusé de croire que la descente de matrice put avoir lieu, on pourrait leur opposer une foule d'observations qui constatent évidemment ce fait : on peut consulter à ce sujet Fabrice de Hilden, Mauriceau, Deventer, Diemerbroeck, Stalpart, Van-Derwiel, etc. et tous ceux qui ont traité des accouchements et des maladies des femmes ; il est vrai que quelquefois la descente du vagin peut en imposer ; on peut même prendre des tumeurs polypeuses, attachées à l'orifice de la vulve, pour la chute de la matrice, comme Seger rapporte s'y être trompé lui-même. Meeckren a aussi une observation semblable ; mais les ouvertures des cadavres confirment encore ce fait. Graaf, Blasius assurent avoir ouvert des femmes dans lesquelles ils trouvèrent effectivement la matrice déplacée, et presqu'entièrement contenue dans le vagin ; et Jean Bauhin rapporte qu'il avait pris une véritable descente de matrice pour un corps étranger, et qu'il ne connut sa méprise que par l'ouverture du cadavre ; mais ce qui doit ôter tout sujet de doute, c'est qu'on a quelquefois emporté la matrice ainsi descendue ; Ambraise Paré raconte avoir détaché une matrice qui pendait dehors le vagin ; cette opération rétablit la santé à la malade ; mais étant morte d'une autre maladie quelques années après, on l'ouvrit, l'on ne trouva point de matrice ; on peut voir des observations semblables dans Berenger, Langius, Mercurialis, Duret, et plusieurs autres, qui tous assurent avoir extirpé la matrice sans suite facheuse. J'ai connu un chirurgien qui, en accouchant une dame, emporta la matrice, et la faisait voir comme une pièce curieuse, bien éloigné de penser que ce fût effectivement elle ; cet accident couta cependant la vie à la malade.

La descente de matrice est accompagnée de différents symptômes, suivant qu'elle est plus ou moins complete , qui servent à nous la faire reconnaître ; lorsque la matrice n'est descendue que dans le vagin, on s'en aperçoit en y introduisant les doigts, on sent l'orifice interne de la matrice se présenter d'abord à l'ouverture ; le devoir et les plaisirs du mariage sont à charge, insipides, douloureux, difficiles ou impossibles à remplir. Il y a outre cela une difficulté d'uriner, d'aller à la selle, la matrice déplacée comprimant la vessie et le rectum ; on sent aussi pour l'ordinaire des douleurs, des tiraillements aux lombes, partie où vont s'implanter les ligaments larges ; ces douleurs se terminent aussi quelquefois à l'extérieur de la vulve ; aux aines ; et lorsque la matrice est entièrement tombée, on peut par la vue se convaincre de l'état de la maladie ; il faut, pour ne pas se tromper, être bien instruit de la figure de la matrice ; il arrive quelquefois que la matrice en tombant ainsi se renverse, c'est-à-dire, que l'orifice reste en-dedans du vagin, tandis que la partie intérieure du fond se présente au-dehors ; dans ces circonstances, on pourrait, comme il est arrivé plus d'une fais, la confondre avec quelque tumeur, quelque concrétion polypeuse ; mais un bon anatomiste ne risque pas de tomber dans cette erreur, surtout s'il fait attention que les tumeurs augmentent insensiblement, au-lieu que cette descente se fait subitement toujours à la suite d'un accouchement laborieux, et par la faute d'un mauvais chirurgien, ou d'une sage-femme inhabile. D'ailleurs, il suinte continuellement de la matrice quelque sérosité jaunâtre ou sanguinolente. Plusieurs auteurs ont pensé que cette maladie était spécialement affectée aux femmes mariées, qu'on ne l'observait jamais chez les jeunes filles, parce que, disent-ils, les ligaments sont trop forts, la matrice trop serrée et trop ferme ; mais ce mauvais raisonnement est démontré faux par quelques observations : Mauriceau dit avoir Ve la matrice pendre entre les cuisses de la grosseur de la tête d'un enfant dans deux filles, qui portaient cette incommodité depuis sept ans ; il vint à bout malgré cela de la remettre heureusement. Observation xcvj. Il y a même dans quelque auteur un exemple d'une jeune enfant de trois ou quatre ans atteinte de cette maladie. Pour ce qui regarde le renversement de la matrice, il est très-certain qu'il est particulier aux femmes nouvellement accouchées.

Les causes de cet accident consistent dans un relâchement, ou dans la distraction ; et même le déchirement et la rupture totale des ligaments qui retiennent la matrice attachée et suspendue ; le relâchement est principalement occasionné par l'état cachectique, chlorétique, par les fleurs-blanches, par l'hydropisie ; c'est pourquoi Bartholin remarque que les femmes hydropiques sont très-sujettes à la chute de matrice. Ces causes sont favorisées par la grossesse ; l'enfant qui est alors dans la matrice en augmente le poids, et la fait tendre nécessairement vers les parties inférieures ; les personnes enceintes risquent cette maladie lorsqu'elles font des exercices violents, qu'elles font de grands efforts pour lever des fardeaux pesans, pour aller à la selle, pour vomir, tousser, éternuer, etc. lorsqu'elles dansent et sautent beaucoup, lorsqu'elles font des voyages un peu longs dans des voitures mal suspendues qui cahotent beaucoup, etc. Mais de toutes les causes, celle qui est la plus fréquente et la plus dangereuse, c'est l'accouchement laborieux et opéré par un chirurgien mal-adroit, qui ébranlera, secouera, vivement la matrice, tirera sans ménagement les vaisseaux ombilicaux, et voudra détacher par force l'arriere-faix ; par-là il entraînera la matrice en bas, tiraillant ou déchirant ses ligaments, ou il la renversera, et même, ce qui est le plus fâcheux, il emportera tout à fait la matrice.

Lorsque la descente est incomplete , cette maladie est plus incommode que dangereuse ; elle est, outre cela, un obstacle au coït, et par conséquent à la génération ; elle trouble par-là une des fonctions les plus intéressantes et la plus agréable ; on a cependant Ve quelquefois des femmes concevoir dans cet état. Lorsque la matrice est tout à fait tombée, il est à craindre qu'il ne se forme un étranglement qui amène l'inflammation et la gangrene ; l'action de l'air sur des parties qui n'y sont point accoutumées peut être facheuse ; néanmoins les deux filles dont Moriceau nous a laissé l'histoire, gardaient depuis sept ans cette descente sans autre incommodité, étaient très-bien réglées, et il n'en est pas de même lorsque la matrice est renversée ; l'inflammation et la gangrene suivent de près l'accident, et la mort est ordinairement prochaine : les descentes qu'occasionne un défaut dans l'accouchement, sont accompagnées d'un danger beaucoup plus prompt et plus pressant que les autres ; enfin, lorsqu'elle a lieu dans les filles qui le sont réellement, elle est plus opiniâtre et plus difficîle à réduire, à cause que les parties par lesquelles on doit faire rentrer la matrice, naturellement fort étroites, n'ont pas encore été élargies.

Dès qu'on s'aperçoit de la descente de matrice, il faut tâcher de la réduire ; mais on doit auparavant examiner si elle est bien saine, sans inflammation et gangrene : car si on en apercevait quelques traces, il faudrait, avant de la remettre, y faire quelques légères scarifications avec la pointe de la lancette, et la fomenter avec des décoctions de quinquina, de scordium, l'eau-de-vie camphrée, ou autres anti-septiques, ce qu'on pourra continuer quand elle sera resserrée : avant d'essayer la réduction, il faut avoir attention, pour la faciliter, de faire uriner la femme, de la faire aller du ventre par un leger lavement s'il est nécessaire ; après quoi on la fait coucher sur le dos, la tête fort basse, et les fesses élevées ; on prend la matrice, qu'on envelope d'un linge fort souple, et l'on tâche, par des legeres secousses de côté et d'autre, de la repousser en-dedans ; on a soin auparavant d'oindre ces parties d'huîle d'amandes douces, de beurre, ou de graisse bien fraiche, etc. Roderic à Castro, auteur connu par un excellent Traité sur les maladies des femmes, conseille, pour faire rentrer la matrice, d'en approcher un fer rouge, comme si on voulait la bruler ; il assure qu'alors la matrice se retire avec impétuosité ; et pour prouver l'efficacité de ce remède, il cite le succès qu'il a eu dans une descente de boyau, qui fut reduit tout de suite par cet ingénieux artifice. Quand la matrice est bien réduite, il faut en prévenir la rechute, et la contenir par un pessaire qu'on introduira simplement dans le vagin, et non pas dans la matrice, comme le prétend ridiculement Rousset : ces pessaires seront percés pour laisser passer les excrétions de la matrice, et pour laisser le moyen d'injecter quelque liqueur astringente, comme la décoction de plantin, de grenades, les eaux de forge, etc. pour fortifier la matrice ; d'ailleurs la femme peut alors user du coït, quoiqu'elle doive s'en abstenir, et même engendrer, comme il conste par des observations. Si la descente est une suite d'un relâchement occasionné par un état chlorétique, cachectique, d'hydropisie, etc. il faut user des remèdes qui sont convenables dans ces maladies, et surtout insister sur les martiaux. On peut même fortifier les reins par des fomentations astringentes, etc. Si une femme enceinte est sujette à cet accident, il faut qu'elle agisse très-peu, qu'elle reste presque toujours au lit, ou couchée dans une bergère ; et lorsqu'on les accouche, il faut que le chirurgien, ou la sage-femme à chaque douleur soutienne l'orifice de la matrice, en même temps qu'elle tâche d'attirer en-dehors la tête de l'enfant ; sans cette précaution on risque d'entraîner la matrice avec l'enfant. Il arrive quelquefois que la matrice ayant resté trop longtemps dehors, est étranglée dans quelque partie ; l'inflammation se forme, le volume augmente, la gangrene survient ; alors ou la réduction est impossible, ou elle est dangereuse ; il n'y a pas d'autre parti à prendre que de couper entièrement la matrice ; il ne manque pas d'observations qui font voir qu'on peut faire cette opération, sans mettre la vie de la malade dans un danger évident. On a quelquefois pris la matrice pour une tumeur, on l'a extirpée en conséquence, sans qu'il en soit résulté aucun accident fâcheux ; l'art peut imiter et suivre ces heureux hasards ; mais il ne doit le faire que dans une extrême nécessité ; et lorsqu'elle est bien décidée, il ne faut pas balancer à recourir à ce remède, le seul qui puisse avoir quelque heureux succès, sans examiner scrupuleusement s'il est infaillible. Nihil interest, dit Celse, an satis tutum praesidium sit, quod unicum est.

Hernie de la matrice, hystérocele, . La plus légère teinture d'anatomie suffit pour faire sentir combien il est difficîle que la matrice soit portée hors du péritoine, et surtout par les anneaux des muscles du bas-ventre, pour y former une hernie ; mais les raisonnements les plus plausibles ne sauraient détruire un fait, et quelqu'impossible que paraisse un tel déplacement de la matrice, il est certain qu'on en a Ve quelques exemples. Sennert raconte que la femme d'un tonnelier, dans les premiers mois de sa grossesse, aidant à son mari à courber des perches, reçut un violent coup à l'aine gauche de cette perche, qui, étant lâchée, se remettait par son élasticité ; il survint immédiatement après une tumeur, qui augmenta tous les jours, de façon à mettre un obstacle à sa réduction. Lorsque le terme de l'accouchement arriva, il ne fut pas possible de tirer l'enfant par les voies ordinaires ; on fut obligé d'en venir à l'opération césarienne, qu'on pratiqua sur la tumeur. Cette opération fut avantageuse à l'enfant, et préjudiciable à la mère, dont elle accélera la mort d'ailleurs inévitable. Institut. medic. lib. II. part. I. cap. ix. Moriceau dit avoir Ve dans une femme grosse de six mois et demi, une hernie ventrale si considérable, que la matrice et l'enfant étaient presqu'entièrement contenus dans cette tumeur, qui s'élevait prodigieusement par-dessus le ventre. Liv. III. ch. XVe

Pour concevoir comment cette hernie peut se former, il faut faire attention que cette maladie est particulière aux femmes enceintes, qu'alors la matrice augmentant en volume, force les enveloppes extérieures du bas-ventre, les contraint de se dilater ; il peut arriver alors que le péritoine, peu susceptible d'une pareille dilatation, se rompe, que les faisceaux charnus qui composent les muscles du bas-ventre s'écartent, et donnent ainsi passage à la matrice alors distendue. Cette rupture peut plutôt avoir lieu vers le nombril et aux aines, parce que ces endroits sont les parties les plus faibles du ventre ; ces causes dépendantes de la matrice sont beaucoup aidées par les efforts violents, les vomissements continuels, des éternuments fréquents, des chutes, des coups, ou autre cause violente ; et enfin par la vanité et l'imprudence de quelques femmes qui, pour paraitre de plus belle taille, ou pour cacher leur grossesse, se serrent trop la poitrine et le ventre, et empêchent par-là la matrice de s'étendre également de tous côtés, et la poussent avec plus de force vers les parties inférieures.

Si l'on ne remedie pas tout de suite à cet accident, il peut devenir dangereux ; outre qu'il est difforme, incommode, la source d'indigestions, de vomissements, de vapeurs, etc. l'étranglement peut amener l'inflammation, la gangrene, et obliger de recourir à l'opération incertaine, et toujours très-périlleuse du bubonocele ; ou enfin, pour tirer l'enfant dans le temps de l'accouchement à l'opération césarienne, dont les risques ne sont pas moins pressants ; l'hernie peut aussi être funeste à l'enfant dont elle gêne l'accroissement, et que le mauvais état de la matrice ne peut manquer d'incommoder.

La réduction est le seul remède curatif qu'il convient d'employer lorsque l'hernie est bien décidée ; on empêche ensuite par un bandage approprié le retour de l'hernie ; il faut aussi que les femmes elles-mêmes y concourent par leur régime : lorsqu'elles ont à craindre pareils accidents, elles ne doivent porter aucun habillement qui leur serre trop le ventre et la poitrine, et surtout éviter ces corps tissus de baleine, qui ne peuvent prêter aucunement, où la vanité a emprisonné leur taille aux dépens même de leur aisance et de leur santé. Il faut aussi qu'elles s'abstiennent de tout exercice violent, de tout effort subit et considérable, et bien plus, qu'elles gardent tout à fait le lit, si leurs affaires le leur permettent. Si, lorsque le terme de l'accouchement est venu, la réduction n'était pas faite, et que l'hernie étant totale l'enfant ne put sortir par les voies ordinaires, il ne faut pas balancer à tenter l'opération césarienne, dont le succès, quand elle est faite à temps, est presque toujours assuré pour l'enfant, quoiqu'elle soit funeste à la mère, parce que dans ces circonstances, sans cette opération, la mort de la mère est assurée ; avec elle, elle n'est que probable. Je crois qu'il serait à-propos ; lorsqu'on est obligé d'en venir à ces extrémités, en même temps qu'on a fait la section des téguments et de la matrice pour avoir l'enfant, de débrider les parties du péritoine qui forment l'étranglement ; par cette double opération, qui ne serait pas plus cruelle, on pourrait remettre la matrice et guérir l'hernie.

Hydropisie de matrice. Les hydropisies se forment dans la cavité de la matrice, comme dans les autres parties du corps, par l'épanchement et la collection des sérosités qui y sont retenues par le renversement et l'obstruction de l'orifice interne de la matrice, ou qui sont renfermées dans de petites poches particulières qu'on nomme hydatides. C'est ainsi que Pechlin (observ. 19.) trouva la matrice d'une femme morte enceinte, toute parsemée d'hydatides. Tulpius (obs. 45. lib. IV.) raconte qu'une femme portait dans les deux cornes de la matrice, plus de neuf livres d'eau très-limpide, renfermée dans de semblables vessies. Mauriceau a une observation curieuse touchant une femme à qui il tira une mole très-considérable, qui n'était qu'un tissu de petites vésicules remplies d'eau, qui étaient implantées à une masse de chair confuse, observ. 177. Ces eaux se ramassent quelquefois si abondamment dans la matrice, qu'elles la dilatent, distendent les téguments du bas-ventre, et en imposent pour une véritable grossesse. Vésale dit avoir fait l'ouverture d'une femme, dans la matrice de laquelle il y avait plus de soixante mesures d'eau, de trois livres chacune. On lit dans Schenckius plusieurs observations semblables. Il raconte entr'autres qu'on trouva dans une femme la matrice si prodigieusement dilatée par la grande quantité d'eau qu'elle renfermait, qu'elle aurait pu contenir un enfant de dix ans : ce sont ses termes, observ. lib. IV. observ. 6. Fernel nous a laissé l'histoire d'une femme, chez qui l'évacuation menstruelle était précédée d'un écoulement abondant de sérosité, au point qu'elle en remplissait six ou sept grands bassins. Patholog. lib. VI. cap. XVe On peut cependant distinguer l'hydropisie de la matrice d'avec la véritable grossesse. 1°. Par l'état des mamelles qui, chez les femmes enceintes, sont dures, élevées, rebondies et rendent du lait ; chez les hydropiques, sont flasques, molles et abattues. 2°. Par la couleur du visage qui, dans celle-ci, est mauvaise, pâle, jaunâtre, livide. 3°. Par l'enflure du ventre qui, dans l'hydropisie, est uniforme, plus molle et plus arrondie, et ne laisse apercevoir au tact qu'un flottement d'eau sans mouvement sensible qui puisse être attribué à l'enfant ; au lieu que dans la grossesse, le ventre se porte plus en pointe vers le devant, et l'on sent après quelques mois remuer l'enfant. On peut ajouter à cela les accidents qui accompagnent l'hydropisie ; tels sont la langueur, la lassitude, difficulté de respirer, petite quantité d'urine, qui dépose un sédiment rouge et briqueté ; et tous ces signes combinés ne devraient, ce semble, laisser aucun lieu de méconnaître ces maladies. On voit cependant tous les jours des personnes qui espèrent et font esperer un enfant à des mères crédules, qui s'imaginent aussi être enceintes parce qu'elles le souhaitent ardemment, et qui ne sont qu'hydropiques ; d'autres qui traitent d'hydropiques des femmes réellement enceintes. J'ai connu un médecin qui, donnant dans cette erreur, prescrivait à une femme grosse des violents hydragogues, dont le succès fut tel que la prétendue hydropique accoucha au huitième mois d'un enfant qui ne vécut que quelques heures, au grand étonnement de l'inexpérimenté médecin. Il arrive quelquefois aussi que cette hydropisie soit compliquée avec la grossesse ; la sérosité se ramasse alors autour des membranes de l'enfant. Mauriceau fait mention d'une femme enceinte qui vuida beaucoup d'eau par la matrice quelques semaines avant d'accoucher ; et ce qui démontra que cet écoulement était une suite d'hydropisie, et n'était pas produit par les eaux de l'enfant, c'est le délai de l'accouchement ; et d'ailleurs c'est qu'en accouchant cette femme, il trouva les membranes formées et remplies à l'ordinaire, observ. 9. Le même auteur en rapporte d'autres exemples semblables, liv. I. chap. xxiij. et observ. 29, 60. etc. Cette hydropisie ne se connait guère que par l'évacuation de ces eaux, ou par l'enflure prodigieuse du ventre, accompagnée de quelques symptômes d'hydropisie, combinés avec les signes qui caractérisent la grossesse.

L'hydropisie de la matrice peut dépendre des mêmes causes que les collections d'eau dans les autres parties, quelquefois elle n'en est qu'une suite ; d'autres fois elle est déterminée par un vice particulier de ce viscère, par les obstructions, les skirrhes, par la suppression des règles, les fleurs blanches, par les tumeurs, l'hydropisie des ovaires, etc. mais il ne suffit pas que la sérosité vienne en plus grande abondance aborder à la matrice ; il faut, pour former l'hydropisie, qu'elle soit retenue dans sa cavité, ou dans des vésicules, ou dans la matrice, son orifice étant fermé par sa propre constriction, par quelque tumeur, par le resserrement voluptueux qui arrive aux femmes dans le moment qu'elles conçoivent ; la matrice voulant alors garder exactement la semence qu'elle a pompée avec avidité, se ferme. L'imperforation du vagin de la matrice par un hymen trop fort, peut produire le même effet.

Outre le danger commun à toutes les hydropisies, cette espèce a cela de particulier qu'elle est un obstacle à la génération ; elle cause la stérilité ; si elle ne se forme qu'après la conception, ces eaux gênent pour l'ordinaire l'accroissement de l'enfant, l'affoiblissent ; et elles indiquent d'ailleurs un vice dans la matrice, dont l'enfant doit nécessairement se ressentir.

Lorsque l'hydropisie de la matrice n'est point compliquée avec la grossesse, il faut tâcher de relâcher l'orifice interne de la matrice par des bains, des fomentations, des fumigations, des injections ; si ces remèdes ne suffisent pas, on peut y porter la main ou même les instruments nécessaires, la seule dilatation de cet orifice suffit pour évacuer les eaux, lorsque l'hydropisie n'est pas enkistée ou vésiculaire. Si l'hymen s'opposait à leur évacuation, il n'y a qu'à le couper ; cette simple opération guérit quelquefois entièrement l'hydropisie. Lorsque les eaux se sont écoulées, on peut prévenir un nouvel épanchement, par l'usage des légers adstringens, et surtout des martiaux, qui sont ici spécifiques. Si l'eau est renfermée dans les hydatides, l'ouverture de l'orifice de la matrice est superflue ; on ne doit attendre la guérison que d'un repompement qui peut être opéré par la nature, par les purgatifs hydragogues, par les apéritifs, par les diurétiques, etc. qui en même temps dissipent cette sérosité sur-abondante, par les selles ou les urines, etc. Si cette hydropisie se rencontre dans une femme enceinte, elle se termine ordinairement par l'accouchement ; ainsi on doit éviter tout remède violent, dans ces circonstances, ne tenter aucune dilatation de la matrice ; il faut seulement faire observer un régime exact, dessicatif à la malade : on peut aussi lui faire user de quelqu'apéritif léger, et surtout des préparations de fer les moins énergiques, telles que le tartre chalybé, la teinture de mars, etc.

Il y a quelquefois dans la matrice des collections d'air et de sang, qui ressemblent à des hydropisies, et qui en imposent pour la grossesse ; on peut les en distinguer par les signes que nous avons détaillés un peu plus haut, en parlant de l'hydropisie. Mais il est bien difficîle de s'assurer de la nature de ces collections ; on ne les connait le plus souvent que lorsqu'elles se dissipent ; l'air en sortant avec précipitation, fait beaucoup de bruit ; il reste quelquefois emprisonné pendant bien des années, chez quelques femmes il sort par intervalles : on en a Ve chez qui cette éruption sonore et indécente était habituelle et involontaire ; elle se faisait brusquement, sans qu'elles en fussent prévenues par aucune sensation, ce qui les exposait à des confusions toujours désagréables. Ces femmes sont presque dans le cas de celles dont il est parlé dans la folle allégorie des bijoux indiscrets. J'ai connu une jeune dame attaquée d'un cancer à la matrice, qui rendait fréquemment des vents par-là. Cette éruption, à ce qu'elle m'a assuré, la soulageait pendant quelque temps. Ces vents seraient-ils, dans ce cas, produits ou developpés par la putréfaction ? Leur origine est dans les autres occasions extrémement obscure. Lorsque les vents sont renfermés dans la matrice, on n'a pour leur donner issue qu'à en dilater l'orifice ; c'est ordinairement la nature qui opère cet effet : on a Ve quelquefois les purgatifs forts et les lavements irritants, donnés dans d'autres vues, procurer l'expulsion de ces vents ; ce pourrait être un motif pour s'en servir dans ce cas. Si l'éruption est habituelle, elle est incurable, ou suit le sort de la maladie qui la produit et l'entretient. Le sang se ramasse dans la matrice, lorsque son orifice ou celui du vagin est fermé ; alors le sang menstruel, fourni par les vaisseaux, mais n'étant point évacué, se ramasse. Sa quantité augmente tous les mois ; le ventre s'élève quelquefois au point de faire naître des doutes sur la grossesse : cette méprise est de grande conséquence, parce qu'elle peut flétrir la réputation de filles très-sages, ou laisser des femmes dans une funeste sécurité. Un vice qui donne assez ordinairement lieu à cette maladie, est la membrane de l'hymen qui n'est point percée, et qui est quelquefois double. Un fameux médecin de Montpellier, professeur dans la célèbre université de cette ville (M. Fize), me racontait il y a quelques mois, qu'il avait été appelé pour examiner une jeune fille qu'on avait soupçonnée de grossesse, jusqu'à ce qu'elle eut passé le dixième mois, avec une enflure considérable du ventre qui augmentait encore. En visitant cette fille il s'aperçut qu'elle était imperforée ; il ne douta plus alors que cette tumeur ne fût occasionnée par le sang menstruel retenu : il ordonna en conséquence, au chirurgien présent, de couper cette membrane. Cette section donna issue à une quantité prodigieuse de sang, aussi fluide, rouge et naturel que celui qu'on tire de la veine ; et c'est-là le seul secours convenable dans ce cas, quand on est bien assuré de sa réalité. S'il n'y a qu'une simple obstruction, ou resserrement à l'orifice de la matrice, il faut se servir des moyens propres à corriger ces vices, si l'on est assez heureux pour les connaître : le plus souvent la solution de cette maladie, est l'ouvrage de la nature.

Inflammation de la matrice. Cette maladie est peu connue, les médecins modernes en font rarement mention ; les anciens s'y sont un peu plus arrêtés. Paul d'Egine en donne une description fort détaillée. lib. III. cap. 64. Les symptômes qui la caractérisent sont, suivant cet auteur, une fièvre ardente, une chaleur vive, une douleur aiguë, rapportée à la région de la matrice, aux aines, aux lombes, à l'hypogastre, suivant que l'inflammation occupe les parties latérales, postérieures ou antérieures de la matrice ; à ces symptômes se joignent l'extrême difficulté d'uriner, douleur à la tête, à la base des yeux, aux mamelles, qui s'étend de-là au dos et aux épaules, aux jointures des mains, des doigts, etc. les mouvements irréguliers du col, nausées, vomissement, hoquet, défaillance, convulsions, délire, etc. la langue est seche, le pouls est petit, serré, tel en un mot, que celui qui est connu sous le nom de pouls inférieur ; l'orifice de la matrice parait dur et resserré ; les douleurs de la matrice augmentent par la pression, ou par les mouvements de la maladie.

Les causes les plus ordinaires de cette inflammation, sans parler ici des générales, (voyez INFLAMMATION) sont les coups, les blessures, la suppression des règles, ou des vuidanges dans les nouvelles accouchées, le froid, des passions d'ame vives et subites, quelque corps étranger, comme l'arriere-faix resté après l'accouchement en entier ou en partie dans la matrice, un foetus mort y séjournant trop longtemps, un accouchement laborieux, etc.

L'inflammation de la matrice est une maladie très-dangereuse, tous les accidents qui l'accompagnent sont grands ; il est rare qu'elle se termine par la résolution, le plus souvent elle dégénere en ulcère, en skirrhe ou en gangrene, terminaisons toutes très-funestes. Cette maladie met la femme dans un danger beaucoup plus imminent si elle est nouvellement accouchée ou enceinte ; dans ce dernier cas, dit Hippocrate, l'érésipele (ou inflammation) est mortelle. Aphor. 43. lib. V. " Le hoquet, le vomissement, la convulsion, le délire et l'extrême tension du ventre en une femme accouchée, qui a une inflammation de matrice, sont tous signes avant-coureurs de sa mort ". Mauriceau, Aphor. 264.

Les remèdes qui conviennent dans cette maladie sont ceux, à-peu-près, que nous avons ordonné dans l'inflammation et les maladies inflammatoires ; on ne doit pas trop compter sur les saignées ; une, deux et peut-être trois, ne peuvent qu'être avantageuses ; mais trop réitérées, elles pourraient devenir nuisibles. Fréderic Hoffman raconte qu'un médecin ayant fait saigner sept fais, dans l'espace de six jours, une dame qui avait une inflammation à la matrice, d'abord après la septième saignée, ses yeux s'obscurcirent et elle tomba dans une défaillance mortelle. Oper. tom. IIe sect. 2. cap. Xe Les purgatifs sont encore moins convenables. Mauriceau qui, quoique chirurgien, mérite d'en être cru sur cette matière à cause de sa longue expérience, assure que les purgatifs sont pernicieux à la femme qui a une inflammation de matrice. Aphor. 263. Ainsi on doit se restraindre à l'usage intérieur des tempérants, calmants, antiphlogistiques et légers emménagogues, tels que la liqueur minérale anodine d'Hoffman, le nitre, le borax, le sel sédatif, le castor, le camphre etc. Les lavements adoucissants, rafraichissants, peuvent avoir quelqu'effet ; on peut aussi appliquer avec succès, ou du moins sans inconvénient, des fomentations avec l'eau vulnéraire : les incessus, ou bains des pieds, les demi-bains sont de tous les emménagogues ceux qui conviennent le mieux. Si quelque corps étranger est resté dans la matrice, il faut l'en retirer au plutôt. L'inflammation loin d'être un motif de différer l'extraction de quelque morceau d'arriere-faix retenu, ou d'un foetus mort, comme plusieurs ont prétendu, doit au contraire faire accélérer cette opération, quoique la matrice dont l'orifice est dur et serré, y apporte un plus grand obstacle ; mais l'inflammation et l'obstacle augmenteraient continuellement si on laissait persister la cause qui l'a produite et qui l'entretient.

Ulcère de la matrice. L'inflammation de la matrice ordinairement superficielle, ne se termine que rarement en abcès ; lorsqu'elle supure, elle dégénere en ulcère, qui semble n'être qu'un abcès imparfait, dont l'entière formation est prévenue par la rupture trop prompte des vaisseaux. L'ulcère est quelquefois aussi une suite des fleurs blanches invétérées, d'une excoriation faite pendant un accouchement laborieux ; il peut aussi être le produit du virus vénérien, et je crois que dans ce temps-ci cette cause est la plus fréquente. Fréderic Hoffman assure que les femmes qui font beaucoup usage du lait, et celles qui ne peuvent satisfaire leur appetit vénérien, pour l'ordinaire fort grand, sont les plus sujettes à cette maladie. C'est à l'écoulement du pus par le vagin qu'on connait surement l'ulcère de la matrice. On peut même aussi s'assurer de sa présence, et s'instruire de la partie qu'il occupe, par le tact et même la vue, au moyen du speculum de la matrice. Les personnes qui en sont attaquées ressentent des douleurs dans cette partie, sont tristes, languissantes, abattues, sans force, sans appetit : la fièvre, les frissons, les défaillances, etc. surviennent quelquefois. Si l'ulcère occupe les parties antérieures, il est accompagné de strangurie, de discurie, etc. il excite au contraire le tenesme s'il a son siege aux parties postérieures. L'ulcère de la matrice se guérit rarement, il consume insensiblement la malade ; il entraîne ordinairement à sa suite la fièvre lente, le marasme, et enfin la mort. Une des causes fréquentes de l'incurabilité de ces ulcères, est la mauvaise méthode qu'on suit dans leur traitement ; ce n'est ordinairement qu'avec des rafraichissants, des affadissants, et surtout des laitages qu'on attaque cette maladie ; cependant suivant la remarque d'Hoffman, le lait dispose plutôt à ces ulcères qu'il ne les guérit. Il est d'ailleurs certain que ce remède si célèbre affadit, épaissit et énerve entièrement le sang, et s'oppose par-là à la guérison des ulcères ; aussi peut-on s'apercevoir que les ulcères extérieurs, soumis à la vue, sont mollasses, baveux, sordides, et ont beaucoup de peine à se cicatriser tant qu'on use du lait : on doit appliquer cette observation à ceux qui sont dans l'intérieur, et compter un peu moins dans leur curation, sur les propriétés si vantées mais si peu constatées du lait et autres médicaments semblables. Les remèdes qu'on doit regarder comme plus appropriés, sont les décoctions vulnéraires, balsamiques, les baumes, les eaux minérales, sulphureuses, celles de Barege, de Bannière, de saint Laurent, etc. prises intérieurement et injectées dans la matrice. Les succès répétés qu'ont eu ces eaux dans la guérison d'autres ulcères, même intérieurs, nous sont des garants assurés de leur efficacité dans le cas présent. Quant aux injections, il faut avoir attention qu'elles ne soient pas adstringentes, car alors elles seraient extrêmement pernicieuses, et risqueraient de rendre l'ulcère carcinomateux. Si l'ulcère est vénérien, on doit avoir plus d'espérance pour sa guérison, parce que nous connaissons un spécifique sur pour détruire ce virus : le même remède réussirait peut-être dans les autres cas. Du moins lorsqu'il n'est pas permis au médecin de prendre tous les éclaircissements nécessaires, il doit, si la malade veut s'y résoudre, en venir sans crainte à ce remède ; d'autant mieux qu'il y a peu d'occasions où les soupçons qu'on pourrait avoir ne soient bien fondés. La meilleure façon d'employer le mercure, c'est sous forme d'onguent en friction ; l'usage intérieur est quelquefois nuisible, et toujours très-incertain, de quelque façon qu'on le déguise.

Skirrhe de la matrice. Le skirre de la matrice est ordinairement la suite de l'inflammation traitée par des remèdes trop froids, astringens, etc. ou il est précédé et comme préparé par des engorgements, des embarras qui se forment peu-à-peu dans le tissu de ce viscère, qui augmentent insensiblement par un régime peu exact, et qui acquièrent enfin la dureté skirrheuse ; quelquefois la matrice grossit prodigieusement, excite une tumeur considérable à l'hypogastre. On a Ve des matrices dans ce cas-là qui étaient monstrueuses, qui pesaient jusqu'à trente et quarante livres ; la maladie pour lors se connait facilement. Quelquefois au contraire le skirrhe n'occupe qu'une petite partie, le col, par exemple, ou l'orifice ; dans ces circonstances la matrice n'est pas trop tuméfiée, on s'aperçoit cependant de cette tumeur par le fait, en appuyant la main sur le ventre, ou en introduisant le doigt sur le col de la matrice : on sent alors son corps grossi, dur, inégal ; l'orifice interne est aussi plus résistant et plus court que dans l'état ordinaire. Cette maladie est souvent occasionnée par un dérangement dans l'excrétion menstruelle, et elle en est ordinairement accompagnée : le cours des règles est ou supprimé ou plus abondant, et toujours irrégulier. Les femmes qui approchent de cinquante ans et qui sont sur le point de perdre tout à fait leurs règles, sont assez sujettes à cette maladie. Lorsque le skirrhe se forme, il excite des symptômes plus graves, jette la machine dans un plus grand désordre que lorsqu'il est formé ; pendant qu'il se prépare, la femme est dans un malaise presque continuel, sans cesse attaquée de vapeurs, de suffocation, de palpitation, etc. et lorsqu'il est décidé, tous ces symptômes cessent : il semble être le fruit d'un mouvement critique, et former un dépôt salutaire.

On peut rapporter au skirrhe de la matrice son ossification, dont il y a quelques exemples. Un de mes anciens condisciples et amis, M. Desgaux, docteur en Médecine de l'université de Montpellier, a donné une observation très-curieuse touchant une matrice ossifiée, Journal de médecine année 1759, mois d'Octobre, pag. 336. Elle était, assure-t-il, enveloppée d'une membrane mince, à-peu-près comme le périoste, qui recouvrait une substance osseuse, lisse et polie dans la partie extérieure, presque semblable à celle des os du crâne : cette substance n'était point continue, elle paraissait séparée par une partie tendineuse dans son milieu ; la partie extérieure était solide, résistait aux différents coups, et rendait le même son que les os : elle aurait pu supporter la scie et le trépan.... Après la croute osseuse, qui avait environ deux lignes d'épaisseur, était une espèce de diploè aussi solide que celui qu'on trouve dans les condylomes des os de la cuisse ; quelques glandes du vagin parurent aussi ossifiées. La personne de qui on avait tiré cette matrice avait eu dans sa jeunesse les pâles-couleurs, après cela une fièvre intermittente ; elle ressentit ensuite des douleurs à la matrice, qui furent enfin terminées par le skirrhe de la matrice qui s'ossifia à la longue, et augmenta au point qu'elle pesait huit livres et demie. André Cnoèffell rapporte qu'on trouva dans une jeune veuve la matrice entièrement cartilagineuse ; l'ossification ne serait-elle qu'un progrès du skirrhe, ou plutôt un endurcissement propre aux parties nerveuses, musculeuses ? on voit les gros vaisseaux près de leur embouchure devenir d'abord durs, skirrheux, et enfin par succession de temps osseux.

Lorsque le skirrhe de la matrice est encore dans son commencement, dans l'état simple d'engorgement, d'embarras, les symptômes sont plus graves, le danger parait pressant, mais il est moins certain, la guérison est plus facîle ; lorsqu'au contraire il est formé, quelquefois il rétablit la santé, mais le plus souvent il dégénere en cancer, ou donne lieu à des hydropisies funestes ; il est d'ailleurs pour l'ordinaire incurable : alors il ne demande aussi aucun remède ; ceux qui paraitraient les plus indiqués, tels que les apéritifs énergiques, stimulants, les eaux minérales, etc. sont les moins convenables ; ils le font dégénérer plutôt en cancer, ou hâtent l'hydropisie. C'est pourquoi la malade doit s'en tenir à un régime exact, s'abstenir de viandes salées, épicées, des exercices violents, des veilles trop longues, et surtout du coït : par ce moyen elle pourra sans autre incommodité porter son skirrhe pendant de longues années. Quelques observations font voir que les martiaux ne doivent point être compris dans la règle que nous avons établie. Zacutus Lusitanus assure avoir Ve des obstructions dures comme des pierres, lapidoras durities, ramollies et fondues par leur usage. Il raconte avoir guéri par leur moyen une femme qui avait à la matrice une tumeur skirrheuse, dure, indolente, de la grosseur d'une courge, qu'il avait inutilement combattue par les sudorifiques, fomentations, cataplasmes, onguents et autres remèdes aussi peu efficaces. Prax. medic. admirab. lib. II. observ. 88. Si l'engorgement ne fait que commencer, les apéritifs résineux, les emménagogues, les fondants, les eaux minérales, peuvent être employés avec succès.

Cancer de la matrice. Le skirrhe de la matrice dégénere en cancer lorsqu'il est traité par des remèdes trop actifs, échauffans, incendiants le sang ; lorsque la femme qui en est attaquée ne garde aucun régime, fait un usage immodéré des liqueurs ardentes, spiritueuses, aromatiques, des aliments salés, épicés ; qu'elle pousse les veilles fort avant dans la nuit, et surtout quand toutes ces causes sont aidées et déterminées par une disposition héréditaire, naturelle ou acquise. Cette funeste dégénération s'annonce par des douleurs extrêmement aiguës rapportées à l'endroit de la matrice qui paraissait auparavant skirrheux, et qu'on observe toujours dur et inégal : les malades y ressentent dans certains temps comme des piquures d'aiguille ou des traits de flamme qui les dévorent, ainsi qu'elles s'expriment, et que me le disait une jeune dame atteinte de cette cruelle maladie, à la violence de laquelle elle a succombé. Je ne me rappelle qu'avec horreur le souvenir de l'état affreux dans lequel la jetaient les douleurs violentes dont elle était tourmentée ; la fièvre lente, avec frissons et redoublements, est une suite assez ordinaire de cette maladie, de même que les défaillances, les enflures, etc. Tant que le cancer est fermé, il ne se manifeste que par ces symptômes ; mais lorsque sur la fin il vient à s'ouvrir, il donne issue à une sanie noirâtre extrêmement âcre, qui s'échappe par la vulve et excorie en passant tout l'intérieur du vagin. Il semble dans cette maladie que la lymphe éprouve la même altération que le sang dans la gangrene ou dans l'état scorbutique qui en est le commencement : la corruption est quelquefois si grande, qu'il s'y engendre des vers, comme Mauriceau et autres l'ont observé.

Cette maladie, si terrible en elle-même, l'est encore plus par ses suites, qui sont toujours des plus fâcheuses. Elle ne se termine que par la mort, qui arrive souvent trop lentement selon les désirs de la malade, qui semble l'attendre avec indifférence et même avec plaisir, comme le terme de ses peines. Elle est quelquefois précédée par des enflures, des syncopes fréquentes, des cours de ventre colliquatifs, marasme, etc. Le cancer de la matrice est l'écueil de la Médecine : elle ne peut fournir aucune espèce de secours propres, je ne dis pas à guérir, mais même à pallier cette maladie, à en arrêter les progrès : elle élude l'action molle des remèdes adoucissants, inéficaces, et les médicaments actifs héroïques l'aigrissent. Il est plus à-propos de ne pas médicamenter les cancers cachés, dit Hippocrate ; car destitués de remèdes, les malades vivent plus longtemps. Aphor. 38. lib. VI. L'extirpation, secours pour l'ordinaire utîle dans celui qui attaque les mammelles, n'est pas permise dans celui qui a son siège à la matrice ; on n'a pas même la ressource de pouvoir y appliquer des remèdes extérieurs. Il est bien douloureux pour un médecin de voir un malade dans l'état le plus affreux, sans avoir le moindre secours à porter ; et il est bien désespérant pour un malade de se trouver dans ce cas. Cependant pour qu'un médecin ne reste pas aisif spectateur des progrès de la maladie, il peut amuser et consoler la malade en lui prescrivant des petits remèdes indifférents, incapables de pouvoir opérer le moindre effet sensible sur le sang : c'est ici le cas où les laitages pourraient être employés, si on peut les soutenir ; ils sont très-propres à bien remplir cette vue, mais il est rare que leur usage sympathise avec celui des narcotiques, dont on doit sans cesse enivrer la malade, pour lui dérober une partie de son mal, pour calmer la vivacité de ses douleurs. Le plus grand service qu'on puisse lui rendre dans ces cruelles circonstances, est de la rendre insensible. (m)

MATRICE, en Minéralogie, est un synonyme de minière. On nomme ainsi la pierre ou la substance dans laquelle un mineral a été reçu, formé et élaboré. C'est ainsi qu'on dit que le quartz est ordinairement la matrice de l'or. Une mine déjà formée peut servir de matrice ou de réceptacle à une autre mine dont la formation est postérieure. Presque toutes les pierres peuvent devenir des matrices métalliques ; mais celles qui sont les plus propres à cet usage, sont le quartz et le spath. Voyez ces articles et l'article MINIERE. (-)

MATRICE, s. f. (Commerce) se dit des étalons ou originaux des poids et mesures qui sont gardées par des officiers publics dans des greffes ou bureaux, et qui servent pour étalonner les autres. Voyez ÉTALON et ÉTALONNER. Dictionnaire de Commerce.

MATRICES, (Fonderie de caractères d'Imprimerie) servant à fondre les caractères d'imprimerie, sont de petits morceaux de cuivre rouge longs de quinze à dix-huit lignes, et de la largeur proportionnée à la lettre qui est formée.

Il faut des matrices pour toutes les lettres, signes, figures, etc. qui se jettent en moule pour servir à l'impression, parce que c'est dans la matrice que se forme la figure qui laissera son empreinte sur le papier.

La matrice se place à une extrémité du moule, entre les deux registres qui la retiennent ; le métal ayant passé le long du moule où le corps se forme, vient prendre la figure qui est dans ladite matrice. Voyez MOULE.

La matrice se fait avec un poinçon d'acier, sur lequel est gravée la lettre ou autres figures dont on veut la former. Ce poinçon étant trempé, c'est-à-dire l'acier ayant pris sa dureté par l'action du froid et du chaud, on l'enfonce à coups de marteau dans le morceau de cuivre poli et préparé pour cela ; et y ayant laissé son empreinte, on lime ce cuivre jusqu'au degré de proportion qu'il doit avoir pour que la matrice soit parfaite, afin que, cette matrice étant placée au moule, la lettre se forme sur son corps dans la place et proportion où elle doit être. Voyez POINÇON, REGISTRE, et les Pl. de Fond. en carac.

MATRICE, (Gravure). Les graveurs en relief et en creux appellent matrices les carrés qui sont formés et frappés avec des poinçons gravés en relief.

MATRICES, à la monnaie, sont des morceaux d'acier bien trempés et gravés en creux avec les trois espèces de poinçons.

Les matrices sont hautes de quatre à cinq pouces, carrées et rondes par le haut, avec des entailles angulaires. Voyez les Pl.

Voyez la façon de graver ou empreindre les matrices à l'article POINÇON DE MONNOYAGE.

Il n'y a qu'une matrice, appelée la primitive, de chaque espèce pour toutes les monnaies du royaume ; c'est le graveur général qui la conserve, et c'est de cette matrice qu'émanent les carrés que l'on envoie et dont on se sert dans toutes les monnaies du royaume.

MATRICE, en Teinture, se dit des cinq couleurs simples dont toutes les autres dérivent ou sont composées ; savoir le blanc, le bleu, le rouge, le fauve ou couleur de racine, et le noir. Voyez COULEUR et TEINTURE.