S. f. (Anatomie) partie double du corps humain, située à l'extrémité supérieure, et qui est composée de deux pièces osseuses ; l'une antérieure appelée clavicule, et l'autre postérieure dite omoplate. Voyez CLAVICULE, OMOPLATE.

On sait que c'est principalement de l'omoplate que dépendent les différentes attitudes de l'épaule ; car la clavicule ne fait que suivre les mouvements de l'omoplate, en bornant néanmoins ces mouvements dans certaines attitudes : aussi la clavicule n'a d'autre muscle que le souclavier, tandis que l'omoplate en a cinq considérables qui servent à la lever, à l'abaisser, à la porter en-arrière, à la ramener en-devant, en un mot à tous les mouvements de l'épaule.

Les épaules sont plus hautes ou plus basses, plus larges ou plus étroites dans différentes personnes, ce qui dépend des deux pièces qui forment cette partie : mais par leur substance cartilagineuse et flexible dans la première enfance, elles sont susceptibles de prendre de mauvaises conformations, comme de s'arrondir ou de se vouter, de produire l'engoncement, et même de contracter une inégalité de hauteur ; trois difformités principales qui gâtent entièrement la beauté de la taille. Indiquons donc les moyens de prévenir ou de corriger ces sortes de défauts, d'après les bons auteurs d'Orthopédie.

Les épaules s'arrondissent et se voutent en les serrant par-devant, en creusant la poitrine, ou amenant les bras sur l'estomac, comme font quelques personnes dans leurs prières, s'imaginant que cette posture est essentielle à la dévotion : il faut au contraire, pour éviter une voussure, qui ne croit que trop avec l'âge, engager les enfants à avancer la poitrine en-devant, à retirer les épaules en-arrière, à porter leurs coudes sur les hanches.

Une seconde précaution nécessaire pour conserver aux enfants le dos plat, c'est de les empêcher, quand ils sont assis, qu'ils ne se renversent sur leur siège, et les obliger de se tenir à-plomb sur leur séant : en effet quand on est assis renversé, le dos prend nécessairement une courbure creuse en-dedans.

Une troisième précaution, c'est de faire en sorte que la tablette du siège sur laquelle les enfants s'asseyent, au lieu d'être enfoncée dans le milieu, soit absolument plate ; parce que quand on est assis dans un enfoncement, l'effort que l'on fait naturellement et sans dessein pour ramener le corps à l'équilibre, oblige la taille à se vouter encore davantage : c'est cependant dans des sièges enfoncés que l'on assied les enfants dès leurs plus tendres années, au lieu de leur donner des fauteuils ou des chaises dont le siège soit d'une planche de bois bien unie. On peut remédier à l'enfoncement des chaises ou fauteuils de paille dans lesquels on assied les enfants, en mettant sous cet enfoncement une vis de bois qui monte et descende, sur laquelle sera posée une petite planche ; en sorte qu'en tournant la vis selon un certain sens, elle pousse la planche et élève en-haut la paille qui est sous la chaise. Comme cette vis doit porter sur quelque chose qui lui serve d'appui, on la pose sur le milieu d'une petite traverse de bois, dont on cloue en-bas les deux bouts à deux bâtons de la chaise.

Enfin une quatrième précaution est de coucher l'enfant pendant la nuit le plus à-plat qu'il sera possible ; et si une de ses épaules se trouve plus grosse que l'autre, on le fera coucher sur le côté opposé à cette épaule, parce que l'épaule sur laquelle on se couche s'élève toujours sur la surface du dos.

Passons à la seconde difformité, qui consiste dans l'engoncement, c'est-à-dire dans le cou enfoncé dans les épaules.

Les nourrices, les sevreuses, les gouvernantes, qui suspendent sans-cesse un enfant par la lisière en le soulevant en l'air, l'exposent à avoir le cou enfoncé dans les épaules. Les maîtres ou les maîtresses à lire et à écrire, qui font manger, lire, ou écrire dans leurs pensions, un enfant sur une table trop haute, et qui monte au-dessus des coudes de l'enfant (au lieu qu'elle doit être deux doigts plus basse), l'exposent pareillement à avoir le cou enfoncé dans les épaules.

Cet inconvénient est difficîle à éviter dans les écoles publiques, où il n'y a d'ordinaire qu'une même table pour tous les enfants de quelque taille qu'ils soient : ainsi cette table proportionnée seulement pour quelques-uns, se trouve trop haute ou trop basse pour un grand nombre d'autres ; alors ceux pour qui la table est trop haute, sont obligés d'élever les épaules plus qu'il ne faut, ce qui à la longue les rend engoncés ; et ceux pour qui la table est trop basse, sont obligés de se vouter et d'avancer les épaules en-arrière, ce qui ne peut que contribuer à les leur arrondir. Mais dans les maisons domestiques les enfants qui mangent à la même table que leurs pères et mères, ne seront point exposés aux inconvénients dont on vient de parler, dès qu'on leur donnera des sièges proportionnés à la hauteur de la table, avec un marche-pié pour appuyer leurs jambes.

Un autre moyen serait de ne point asseoir les enfants dans des siéges, ou dans des roulettes qui ont des accoudoirs un peu hauts ; parce que de pareils accoudoirs sur lesquels les enfants s'appuient toujours, leur font nécessairement lever les épaules. Le remède, si le défaut est contracté, consiste à se servir des avis que nous venons de donner, et à y joindre tous les moyens qui peuvent tendre à mettre les deux épaules au niveau, où elles doivent être à l'égard de la partie inférieure du cou.

Parlons à présent du surjettement d'une épaule au-dessus de l'autre, ou de l'inégalité de leur hauteur, qui fait que l'une s'élève trop, ou que l'autre baisse trop.

Un bon moyen pour corriger un enfant qui lève ou qui baisse trop une épaule, c'est de lui mettre quelque chose d'un peu lourd sur l'épaule qui baisse, et de ne point toucher à celle qui lève ; car le poids qui sera sur l'épaule qui baisse, la fera lever, et obligera en même temps celle qui lève à baisser.

L'épaule qui porte un fardeau, monte toujours plus haut que celle qui n'est pas chargée ; et alors la ligne centrale de toute la pesanteur du corps et du fardeau, passe par la jambe qui soutient le poids : si cela n'était pas, le corps tomberait ; mais la nature y pourvait, en faisant qu'une égale partie de la pesanteur du corps se jette du côté opposé à celui qui porte le fardeau, et produit ainsi l'équilibre ; car alors le corps est obligé de se pancher du côté qui n'est pas chargé, et de s'y pancher jusqu'à ce que ce côté non chargé participe au poids du fardeau qui se trouve de l'autre côté : d'où il résulte que l'épaule chargée se hausse, et que celle qui ne l'est pas se baisse. Cette mécanique de la nature démontre l'erreur de ceux qui, pour obliger un enfant à baisser l'épaule qui lève trop, lui mettent un plomb sur cette épaule, s'imaginant que ce poids la lui fera baisser ; c'est au contraire le vrai moyen de la lui faire lever davantage.

On peut se contenter, au lieu de lui mettre un poids sur l'épaule qu'on veut faire lever, de faire porter par l'enfant, avec la main qui est du côté de cette épaule, quelque chose d'un peu pesant, il ne manquera point alors de lever l'épaule de ce côté-là, et de baisser l'autre ; ce dernier expédient est surtout d'une grande utilité, quand un enfant a la taille considérablement plus tournée d'un côté que de l'autre ; car dans ce cas, soit qu'on lui fasse porter quelque poids sous le bras, ou qu'on lui fasse lever par exemple une chaise, un tabouret, avec la main qui est du côté vers lequel sa taille panche, il ne manquera point de se pancher du côté opposé. Un autre moyen, c'est d'amuser l'enfant en l'exerçant à porter une petite échelle faite exprès ; en sorte qu'il la soutienne d'une épaule qu'il posera sous un échelon ; l'épaule sur laquelle sera l'échelon, levera, et l'autre baissera.

Nous venons de dire que lorsqu'on soulève d'un bras une chaise ou un tabouret, l'épaule de ce côté-là hausse, et l'autre baisse. Mais il faut observer que si l'on porte avec la main pendante un vase qui ait une anse posée de niveau avec le bord du vase, et que l'on porte ce vase par l'anse, en sorte 1° que le second doigt entre dans l'anse et la soutienne par le haut, 2° que le doigt du milieu aille sous l'anse et en soutienne le bas, 3° que le pouce passe sur l'anse, et que le pouce appuyant en cet endroit sur le bord du vase même, entre un peu dans le vase, alors l'épaule du bras qui porte le vase ne se hausse pas comme dans les cas précédents, mais se baisse au contraire : ainsi c'est un autre moyen dont on peut facilement se servir à l'égard d'une jeune personne qui lève trop une épaule.

Voici deux autres expédiens très-simples et très aisés. Premier expédient. Si l'enfant lève trop une épaule, faites-le marcher appuyé de ce côté-là sur une canne fort basse ; et si au contraire il la baisse trop, donnez-lui une canne un peu haute ; ensuite lorsqu'il voudra se reposer, faites-le asseoir dans une chaise à deux bras, dont l'un soit plus haut que l'autre, en sorte que le bras haut soit du côté de l'épaule qui baisse, et l'autre du côté de celle qui leve. Deuxième expédient. Comme personne n'ignore que lorsqu'on se carre d'un bras, c'est-à-dire qu'on plie le bras en forme d'anse, en appuyant le poing sur la hanche du même côté, l'épaule de ce côté-là leve, et l'autre baisse ; et que si l'on couche alors l'autre bras le long du corps, en sorte qu'il pende jusqu'à l'endroit de la cuisse auquel il peut atteindre, l'épaule de ce côté-là baissera encore davantage : servez-vous de ce moyen simple, et répétez-le, pour rectifier dans un enfant le défaut de l'épaule qui lève ou qui baisse trop.

Enfin quelquefois un enfant panche trop l'épaule sur un des côtés, soit le gauche, soit le droit ; s'il panche trop l'épaule du côté gauche, faites-le soutenir sur le pied droit, car se soutenant alors sur ce pied à l'exclusion de l'autre, qui dans ce temps-là demeure aisif, il arrivera nécessairement que l'épaule droite qui levait trop, baissera, et que l'épaule gauche qui baissait trop, levera : cela se fait naturellement en vertu de l'équilibre, sans quoi le corps serait en risque de tomber ; parce que quand on se soutient sur un seul pied, la jambe opposée, qui alors est un peu pliée, ne soutient point le corps, elle demeure sans action et comme morte, ainsi qu'on le voit dans les enfants qui jouent à cloche-pié ; de sorte qu'il faut nécessairement que le poids d'en-haut qui porte sur cette jambe, renvoye le centre de sa pesanteur sur la jointure de l'autre jambe qui soutient le corps. Si donc l'enfant panche trop l'épaule sur le côté droit, dites-lui de se soutenir sur le pied gauche ; s'il la panche trop sur le côté gauche, dites-lui de se soutenir sur le pied droit.

Je laisse à imaginer d'autres moyens analogues à ceux-ci, et de meilleurs encore ; je remarquerai seulement que tous ceux que nous avons indiqués demandent pour le succès une longue continuation, guidée par des regards attentifs de la part des pères et des mères sur leurs enfants, et ce n'est pas communément la branche de l'éducation dont ils sont le moins occupés ; il est vrai cependant que malgré l'intérêt qu'ils y prennent, l'art orthopédique le plus savant ne corrige les difformités des épaules que dans ces premières années de l'enfance, où les pièces cartilagineuses qui composent les épaules, sont encore tendres et flexibles.

Au reste l'Anatomie, la Chirurgie, et la Mécanique, se prêtent de mutuels secours pour guérir les graves accidents auxquels cette partie du corps humain se trouve exposée. D'un autre côté la Physiologie, Tantùm scientiarum cognatio, juncturaque pollet ! tâche d'expliquer les causes de quelques symptômes singuliers, que le hasard offre quelquefois à nos regards surpris ; et pour en citer un seul exemple, c'est par les lumières de cette science qu'on peut comprendre pourquoi l'on a Ve des personnes qui, après avoir été blessées à l'épaule, ont perdu tout-à coup l'usage de la parole, et ne l'ont recouvert que par la guérison de la plaie. Ce phénomène dépend de la communication d'un des muscles de l'os hyoïde avec l'épaule ; ce muscle qui a deux ventres et un tendon au milieu est le coraco-hyoïdien, qu'on pourrait nommer à plus juste titre omoplato-hyoïdien, parce qu'il a son attache fixe à la côte supérieure de l'omoplate, et finit à la corne de l'os hyoïde. Article de M(D.J.)

EPAULE, (Manège) partie de l'avant-main du cheval.

Accoutumés à n'envisager cet animal que par le dehors et par la superficie, nous avons jusqu'à présent compris dans la dénomination de l'épaule, toute l'étendue qui se trouve depuis la sommité du garrot jusqu'à la portion supérieure de la jambe. On a donc indistinctement confondu cette partie, qui n'est proprement composée que de l'omoplate, avec le bras qui est formé par l'humerus ; et par une suite de cette erreur, on a donné à la partie résultante du cubitus, le nom de bras, tandis qu'elle devrait être appelée l'avant-bras.

Il importait cependant essentiellement à ceux qui s'érigent en connaisseurs, et qui font profession de dresser des chevaux, ainsi qu'aux personnes qui se livrent au traitement de leurs maladies, de se former une idée juste de la structure de cet animal. Comment en effet décider de la franchise et de la beauté de ses mouvements, si on ignore d'où ils doivent partir ? comment juger de la possibilité des actions qu'on lui demande, et mettre en jeu ses ressorts, si l'on n'a acquis la connaissance du lieu et de l'espèce des articulations, à la faveur desquelles ses parties doivent se mouvoir ? d'ailleurs, s'il arrive fréquemment des écarts, des entre-ouvertures, etc. comment y remédier dès qu'on sera hors d'état de s'orienter en quelque façon, relativement aux différents articles, et de parler des ligaments, des muscles, des cartilages, de la synovie, et des vaisseaux des parties qui souffrent ?

Ces considérations m'ont suggéré la division que j'ai faite, et dont je m'écarterais indiscrettement, si je ne rapportais aux bras toutes les observations qui ont été adoptées et qui ont paru ne concerner que l'épaule : ainsi je dirai que le bras ne doit point être recouvert par des muscles trop épais et trop charnus, et que cette partie doit conséquemment être petite, plate, libre, et mouvante. Pour distinguer si elle est douée des deux premières qualités, il suffit de considérer 1°. cette saillie visible formée par l'articulation de l'humerus avec l'omoplate, saillie que l'on appelle encore la pointe de l'épaule ; le muscle commun recouvre cette articulation : or si ce muscle est d'une épaisseur considérable, cette partie au lieu d'être plate sera grosse, ronde, et charnue, et dès-lors le cheval sera pesant, il se lassera aisément, il bronchera, les jambes de devant étant en quelque façon surchargées, ne pourront être que bientôt ruinées ; la grosseur demesurée des os articulés, peut encore occasionner ce défaut. On examinera, en second lieu, le vide ou l'intersection qui est entre le muscle commun et le grand pectoral. Cette intersection marque la séparation du bras et du poitrail, et le grand pectoral forme cette élévation qui est à la partie antérieure de la poitrine de l'animal : or si le repli ou pli que nous apercevons ordinairement, et que je nomme intersection, n'est point distinct, s'il n'est point apparent, attendu le trop de chair ou l'épaisseur des muscles, il en résultera que le cheval sera chargé et ne sera propre qu'au tirage. Enfin, en supposant de la contrainte dans le mouvement de cette partie, l'animal ne marchera jamais agréablement et surement ; parce que son action ne partant en quelque sorte que de la jambe, elle sera hors de la nature de celle à laquelle le membre mu était destiné, et sera inévitablement privée de fermeté, de solidité, et de grâce. Aussi voyons-nous que tels chevaux se fatiguent aisément, pesent à la main, et rasent continuellement le tapis.

Ce défaut de liberté peut se réparer par l'art et par l'exercice, pourvu que cette partie ne soit que nouée et entreprise ; mais si elle se trouve chevillée, ou froide, ou dessechée, ce serait une témérité que de former une pareille espérance.

On reconnaitra qu'elle est chevillée, à un défaut de jeu que les meilleures leçons ne sauraient lui rendre. J'entens par défaut de jeu, une inaction véritable, qui n'a sa source que dans la conformation défectueuse de l'animal, dont les bras sont tellement serrés, qu'ils semblent attachés l'un à l'autre par une cheville.

Nous disons qu'elle est froide, lorsqu'elle est dépourvue de sentiment et de mouvement. Il est rare qu'on y remédie avec efficacité, à moins qu'on ne tente cette cure dès le commencement et dès l'origine du mal. Il provient de plusieurs causes. Premièrement, de la structure naturelle du cheval : ainsi celui dans lequel cette partie sera trop décharnée, sera plus sujet à cette froideur, que celui dans lequel elle sera exactement proportionnée. Que l'on considère, en effet, que les muscles sont les organes du mouvement, et que de leur seule petitesse nait le décharnement dont il s'agit ; comme ils ne peuvent être plus petits, qu'autant que leur tissu est composé d'une moins grande quantité de fibres, ou que ces fibres sont plus minces, dès-lors la force ne peut être que moins grande dans la partie, qui deviendra nécessairement débîle après un certain temps de travail. On observera néanmoins que dans ce cas il n'y a que difficulté de mouvement, sans douleur.

Une seconde cause, est le passage subit de la chaleur au froid. Un cheval sue ; loin de lui abattre la sueur, on le laisse refroidir. Dès-lors les pores se resserrent, et en conséquence de ce resserrement et de cette constriction, la transpiration est interceptée. Cette humeur arrêtée ne peut que contracter de mauvaises qualités et un caractère d'acrimonie, par le moyen duquel elle picote les membranes de l'articulation et des muscles ; ce qui donne lieu à la douleur, à la roideur, et à la difficulté du mouvement dans cette partie.

Une troisième cause sera encore le séjour de l'animal dans un lieu trop humide. En ce cas les vaisseaux se relâcheront insensiblement, principalement les vaisseaux lymphatiques, dans lesquels le cours des liqueurs est toujours plus lent. Ce relâchement produira un engorgement qui sera dans les ligaments de l'article, où ces vaisseaux lymphatiques sont en plus grand nombre. De-là la douleur et la difficulté dans le mouvement, comme nous le voyons dans les rhumatismes ; que si quelquefois nous apercevons de l'enflure, c'est que l'engorgement est plus considérable, et qu'il occupe le tissu cellulaire ou les membranes des muscles.

Enfin, une quatrième cause que l'on peut admettre et reconnaître, est un obstacle quelconque dans la circulation des esprits animaux. Leur cours étant intercepté, la diastole et la systole des artères, ainsi que la contraction des muscles, ne peuvent que diminuer ; ce sont néanmoins autant d'agens nécessaires pour aider au suc nourricier à se porter dans les parties les plus intimes ; aussi l'expérience démontre-t-elle que ces mouvements étant diminués et abolis par la continuation de l'interception, cette partie tombe bientôt dans l'atrophie et dans le desséchement.

Ce desséchement peut provenir du défaut d'exercice. Ainsi, par exemple, si nous supposons un effort, ou un écart, ou quelque mal considérable à un pied, il est constant que l'animal, tant que la maladie subsistera dans toute sa force, ne saurait mouvoir la partie affectée. Or s'il ne peut la mouvoir, et que la maladie soit longue, la circulation ne s'y fera jamais parfaitement ; parce que les liqueurs ne pénétreront plus dans les dernières et dans les plus petites ramifications des vaisseaux, et que c'est précisément dans ces mouvements les plus ténus que s'exécute la nutrition.

Les signes auxquels on reconnaitra que la partie dont il s'agit est froide ou prise, sont le défaut ou la difficulté du mouvement, quelquefois la douleur que l'animal ressent, et la difficulté du mouvement tout ensemble, selon la différence des causes de la froideur. Les symptômes du desséchement sont une inégalité manifeste, et qui frappe dès qu'on examine les deux bras en même temps ; et leur diminution apparente et sensible, ainsi que l'impossibilité de les mouvoir, lorsque l'une et l'autre s'atrophient, ce qui n'arrive que rarement.

Il est certain que si l'on prévient les progrès de ces maladies par des résolutifs spiritueux et aromatiques, et par un exercice modéré, on pourra attirer dans ces parties les sucs qui les entretiennent et qui les nourrissent, et elles seront bientôt ranimées ; mais dès que le mal est ancien, nos tentatives sont infructueuses. On ne peut, en effet, se livrer raisonnablement à l'espoir de faire circuler des liqueurs dans des vaisseaux totalement obstrués et oblitérés. J'ai dit que la nutrition s'exécute dans les dernières et dans les plus petites ramifications. Imaginons donc une partie privée depuis longtemps de la faculté d'agir, la circulation s'y ralentira ; et les liqueurs ne parvenant plus dès-lors dans les dernières series des canaux, ces mêmes canaux, naturellement élastiques et disposés par conséquent à la contraction, se resserreront insensiblement et s'oblitéreront à la fin. Or par quel moyen r'ouvrira-t-on aux fluides cette voie, qui, une fois fermée, leur est à jamais interdite ? C'est assurément tenter l'impossible, et faire profession d'ignorance que de l'entreprendre.

L'épaule ou l'omoplate peut être portée en-avant, en-arrière, en-haut ; elle peut être encore rapprochée des côtes. A l'égard du bras ou de l'humerus joint avec l'omoplate par une articulation très-libre, c'est-à-dire par genou, il peut se mouvoir en tout sens, en-avant, en-arrière, en-dedans, en-dehors, et en rond, en manière de pivot, et en manière de fronde. La libre exécution de tous les mouvements permis à l'une et à l'autre de ces parties, est sans-doute ce que tous les auteurs qui ont écrit sur le Manège, et principalement le duc de Newcastle, ont appelé la souplesse des épaules.

La nécessité de les faciliter à l'animal a été regardée, avec raison, par cet écrivain illustre, comme la base de toutes les actions auxquelles nous pouvons solliciter l'animal ; et ce n'est sans-doute qu'à la force et à la solidité de cette maxime, toujours présente à son esprit, que nous devons une foule de répétitions sur ce point, qui rendent son ouvrage prolixe sans le rendre plus instructif. Je tâcherai d'éviter ce défaut, et de ne pas mériter ce reproche.

Dès que nous connaissons les mouvements dont l'épaule et le bras sont capables, et dès que nous sommes convaincus, qu'assouplir les parties d'un cheval quelconque n'est autre chose que leur faire acquérir par l'habitude la liberté de se mouvoir dans tous les sens qui leur sont possibles, il est aisé de juger par les effets qui peuvent résulter des leçons que nous donnons à l'animal, de celles qui sont les plus propres et les plus convenables à notre objet.

Toute action en-avant, en-arrière, et par le droit, opére nécessairement la flexion, l'élévation, l'extension, l'abaissement, et le port en-arrière des omoplates et des humerus, qui sont les principaux et les uniques agens d'où dépend réellement la translation de l'animal d'un lieu à un autre (voyez MANEGE). Ainsi le pas, le reculer, et principalement le trot déterminé et délié, qui excite ses parties à de grands mouvements, sont des moyens très-efficaces pour les dénouer et pour en faciliter le jeu dans les uns et dans les autres de ces sens ; ces allures sur des cercles, ou quoi qu'il en soit en tournant pour reprendre d'autres lignes droites, influe encore sur elles relativement au mouvement circulaire dont le bras est doué ; mais elles ne suscitent pas ce même mouvement dans toute son étendue ; et leur impression n'étant que faible et légère, et ne pouvant animer tous les ressorts qui l'effectuent, l'animal ne saurait acquérir l'entière facilité par cette voie.

Le duc de Newkastle est le premier qui nous en a ouvert une, en nous indiquant diverses leçons à donner sur les cercles larges et d'une piste ; je ne me propose ici, ni de les extraire, ni d'apprécier sa méthode. M. de la Guerinière, à l'imitation de la Broue, a préféré les leçons données sur les carrés, et admet celles des voltes, qu'il blâme d'ailleurs, parce qu'il croit qu'elles mettent le cheval sur le devant, dans la circonstance, où pour éviter la trop grande sujétion de ce qu'il nomme l'épaule en-dedans, l'animal y porte trop cette même épaule ou y jette la croupe ; ainsi, d'un côté il improuve la pratique des cercles, et de l'autre il la présente comme une ressource dans le cas où la pratique des carrés porte l'animal à se défendre. C'est sans-doute d'après sa propre expérience, que M. de la Guerinière a connu que la tête dedans, la croupe dehors, contraint et asservit beaucoup moins le cheval qui trace une figure ronde, que la tête dedans et la croupe dehors sur des lignes droites ; et c'est apparemment aussi d'après cette vérité dont il s'est convaincu, qu'il veut bien permettre de recourir au cercle pour procurer aux chevaux la première souplesse. Sans m'abandonner à l'examen de tous les raisonnements auxquels il se livre, et sans perdre un temps précieux à marquer les contradictions qui en résultent, il me suffit que l'action sur la volte soit moins pénible, moins difficîle à l'animal, pour que je lui donne la préférence sur toute autre.

On ne doit point oublier que mon unique intention est d'assouplir l'omoplate et l'humerus, et que je ne dois avoir à présent d'autre but que de solliciter le mouvement en rond, dont le bras principalement, ou son articulation sphéroïde, est susceptible ; pénétré de l'importance dont il est de ne travailler d'abord toutes les portions dont la machine entière est formée, que séparément et non ensemble (voyez ENCOLURE) ; mon premier soin sera de diviser en quelque façon celles que j'ai déjà mises en jeu, et celles que je me propose de dénouer ici, des côtes et de la croupe, sur lesquelles je ne dois rien encore entreprendre directement, et que je ne contraindrai dans mes opérations, qu'autant que leur connexion avec la tête, l'encolure, et les épaules pourra m'y obliger.

Les leçons par lesquelles j'ai provoqué les flexions latérales du cou et le port de la tête de côté et d'autre, m'offrent tous les moyens de parvenir à mes vues. Je trouve en elles non-seulement l'avantage que je désire, eu égard à l'action circulaire, mais celui d'augmenter la facilité du pli, dont ces deux premières parties ont déjà contracté l'habitude ; et c'est ainsi qu'une seule route me conduit à tout, assure toujours de plus en plus mes succès, et que j'ôte, en un mot, tout prétexte et toute idée de défense à l'animal, puisque je ne le soumets à l'obéissance que par la liberté que je lui donne d'obéir.

Détournez légèrement, au moyen du port de la rêne de dehors en-dedans, et de l'approche de la jambe de ce même dedans, si la rene déterminante a besoin de ce secours, le cheval dont l'encolure est pliée, et qui par le droit et au pas regarde dans le centre (voyez ENCOLURE), à l'effet de lui faire décrire des cercles d'une étendue proportionnée à son plus ou moins de disposition et de volonté. Aussi-tôt qu'il a quitté la ligne droite sur laquelle il cheminait, augmentez subitement l'action de la rene de dedans à vous, et maintenant la rene de dehors dans un degré de tension, non aussi fort, mais seulement en raison du soutien qui doit en résulter ; croisez-la imperceptiblement et pour seconder simplement celle qui plie. Dans cet état si vous parcourez la ligne de la volte, en élargissant insensiblement le cheval, il est certain que sa jambe de dedans dans chacune de ses foulées se trouvera précisément au-devant de la piste de la jambe de dehors sa voisine ; or elle ne peut s'y placer, qu'autant que les parties supérieures dont elle est une dépendance, et auxquelles elle doit ses mouvements, sont rapprochées du corps de l'animal et mues dans un sens oblique ; d'où nous devons conclure que cette leçon convient parfaitement à notre projet, puisqu'elle suscite dans l'humerus et dans l'omoplate une partie de l'action que nous nous proposions de leur imprimer, et que cette même action n'apportant aucun changement dans la piste du derrière, ne trouble en aucune manière l'ordre des jambes postérieures, dont la marche s'effectue sans qu'elles se resserrent ou se retrécissent.

Le cheval habitué à cheminer aux deux mains, librement et dans cette position où il aura été entretenu par la puissance constamment combinée des deux renes confiées à une main habile, et par des aides modérées de la jambe de dedans, si elles ont été nécessaires, le cavalier pourra tenter de porter les parties qu'il doit dénouer à faire un plus grand effort. Il croisera donc la rene de dehors, dont il cherchera à assurer les effets par l'approche de sa jambe de dedans, de façon que la jambe de dehors du cheval avoisine davantage le centre, et soit dans une opposition plus ou moins forte, selon les progrès de l'animal, avec l'extrémité antérieure de dedans ; alors, et dans chacun des instants où la jambe dirigée vers la volte sera posée ou dans son appui, et ou l'autre extrémité sera élevée ou dans son soutien (voyez MANEGE), il croisera la rene de dedans qui opére principalement le pli par sa tension, et qui opérera encore, par son obliquitté, le port de cette même extrémité vers le dehors et au-delà de la piste qu'elle marquait, lorsque l'une et l'autre étaient moins assujettis ; ainsi au lieu de se placer simplement dans sa battue au-devant de la jambe de dehors, elle chevalera et passera sur cette même jambe. Or si dans la première action nous avons observé que l'omoplate et l'humerus accomplissaient une partie du mouvement que notre unique dessein est de solliciter, il est visible que, dans celle-ci, qui demande de la part du maître qui travaille une précision, une justesse et une attention singulière, nous obtenons de l'animal tout ce qu'il peut nous accorder, et tout ce que nous devons en attendre, dès qu'en nous conformant scrupuleusement à cette sage maxime qui nous astraint à détacher, pour ainsi dire, du corps du cheval les parties que nous voulons assouplir, avant d'entreprendre de les mettre toutes ensemble et d'accord, nous nous bornons à n'exercer ici que le bras et l'épaule, indépendamment des côtés et des hanches, de la souplesse desquelles nous ne sommes point encore occupés.

J'avoue que les extrémités postérieures reçoivent néanmoins dans ce dernier cas une impression dont je ne peux douter, puisque je vois que la jambe de derrière de dedans est pressée et rapprochée de la jambe de derrière de dehors, et que leur piste est à-peu-près marquée comme celle des jambes antérieures, sur les premiers cercles que j'ai assignés ; mais ce retrécissement est inévitable, puisqu'il n'est pas possible de desunir absolument le derrière du devant, et d'interdire entr'eux une relation qui ne pourrait cesser qu'ensuite d'une disjonction entière et réelle, la croupe n'éprouve qu'une légère contrainte, et non une gêne dont l'animal puisse souffrir et se gendarmer.

Tel est aussi le point auquel nous devons nous arrêter. Engager sur ces mêmes cercles le devant, et chasser les hanches, ainsi que le prescrit le duc de Newcastle dans sa leçon de la tête de dedans, de la croupe de dehors, ou exécuter cette même leçon sur les carrés, selon le vœu de M. la Guerinière (qui, s'il n'avait pas jugé à propos de couper une phrase du premier par un etc. n'aurait pu déguiser que les cercles ne mettent un cheval sur le devant que par la faute du cavalier qui néglige de le soutenir), ce serait travailler à la fais, de l'aveu même de l'un et de l'autre, non-seulement les épaules, mais les côtés et la croupe, sans parler de la tête et de l'encolure, pour l'assouplissement desquelles nous ne trouvons dans leur ouvrage aucune leçon particulière.

Que l'on réfléchisse sans partialité sur l'entreprise de faire mouvoir ensemble et tout-à-coup une foule de ressorts, dont la force naturelle prouve la difficulté de vaincre la roideur, tandis que tous nos efforts, pour les mettre en jeu, ne peuvent s'imprimer directement que sur une partie faible, délicate, et aussi sensible que la bouche ; et l'on jugera dès-lors sainement du mérite d'une méthode que j'admirerais, si je ne consultais que le préjugé, le nombre de sectateurs qu'elle a eu, et la multitude de partisans qu'elle a encore. (e)

EPAULE. (Maréchallerie) Cette partie du cheval est sujette à beaucoup d'infirmités, comme entre-ouverture, écart, ou effort d'épaule, &c.

Pour mieux expliquer la cause, les effets de ces genres de maladies, il est important de développer la composition anatomique de la partie qui en est le siège.

L'épaule du cheval renferme dans sa composition des os, des cartilages, des ligaments, des muscles, des vaisseaux sanguins, lymphatiques et nerveux ; la peau sert d'enveloppe à toutes ces parties organiques.

Le premier des os est l'omoplate, qui a presque la figure triangulaire, dont deux angles sont supérieurs, l'un antérieur, et le second postérieur, qui est plus obtus : le troisième est antérieur-inférieur. Cet os a deux sortes de connexions ; la première se fait par sysarcose, avec les vertèbres du garrot, au moyen d'une forte membrane ligamenteuse qui attache et assujettit à cette partie les deux angles supérieurs de cet os, qu'on nomme paleron ; ce ligament, et les muscles qui lui sont propres, l'attachent aux os voisins : l'autre articulation se fait par artrodie avec l'humerus, l'omoplate ayant à son angle antérieur-inférieur une cavité glenoïde qui reçoit la tête de l'humerus. Cette cavité est induite d'un cartilage qui facilite le mouvement : elle a un bord ligamenteux qui la rend plus profonde et plus capable d'embrasser la tête de l'humerus, et en fortifie l'articulation.

Le dernier des os est l'humerus ; il est articulé par ses deux extrémités, par celle d'en-haut avec l'omoplate par artrodie (on appelle vulgairement cette articulation la pointe de l'épaule), et par celle d'enbas doublement, savoir par ginglime avec le cubitus, et par artrodie avec le radius. Le cubitus est adhérant au radius au-dessous de l'apophyse olecrane, partie où le cheval se blesse, quand il se couche en vache.

Ces articulations sont recouvertes de forts ligaments membraneux, qui prennent leur attache aux extrémités des os articulés, qu'ils tiennent fortement joints ensemble, afin qu'ils ne puissent sortir de leur place : ils ont seulement la liberté d'exécuter leurs divers mouvements.

L'omoplate fait ses différents mouvements, au moyen de cinq muscles, qui sont le trapeze, le rhomboïde, le releveur propre, le petit pectoral, et le grand dentelé, qui prend son origine de la base de l'omoplate.

L'humerus est la partie de l'épaule du cheval qui exécute les plus forts mouvements : ces mouvements sont faits par le moyen de plusieurs muscles, qui sont le deltoïde, le sus-épineux, le latissimus, le grand rond, le grand pectoral, le coracoïdien, le sous-épineux, le petit rond, et le sous-scapulaire.

On sait que les muscles ont deux sortes de mouvements, celui de contraction, et celui d'extension, d'où suivent tous les divers mouvements que nous voyons faire à l'animal. On peut y en ajouter un troisième, qu'on appelle mouvement tonique, qui se fait lorsque plusieurs muscles agissent de concert, et tiennent une partie ferme et bandée.

Or la cause principale de l'effort d'épaule vient de ce que l'un de ces mouvements a été exécuté avec violence par cet organe, soit antérieurement, soit postérieurement, soit latéralement, ou dans un sens oblique : les fibres nerveuses, les tendineuses, les petits tuyaux sanguins et lymphatiques qui entrent dans la composition des muscles, et qui se sont trouvés les uns en contraction, et les autres en extension dans ces mouvements forcés, en sont plus ou moins affectés ; ce qui produit un effort d'épaule, ou entr'ouverture, ou disjonction de cette partie, plus ou moins difficîle à guérir, selon le cas. Si les parties qui composent ces muscles n'ont subi que de legers tiraillements, et qu'on y apporte un prompt secours, quoique le cheval en boite, on le guérit facilement ; on appelle cette maladie faux écart, ou effort d'épaule simple : si au contraire la secousse a été assez tumultueuse pour déranger le tissu cellulaire des muscles, rompre et déchirer ses parties organiques, les liquides ne pouvant circuler que difficilement, si on n'y apporte un prompt secours, la partie s'obstrue, la maladie devient souvent incurable, et pour lors on l'appelle disjonction d'épaule ou entre-ouverture ; fausse dénomination qu'on a donnée à beaucoup de maladies qui font boiter le cheval, et dont on ne connait point la cause. Ce n'est pas que l'éloignement des os de l'épaule soit impossible ; mais cet accident constitue un autre genre de maladie que celle que l'on a entendue sous le nom d'entre-ouverture ou disjonction d'épaule.

L'entre-ouverture ou disjonction des os de l'épaule proprement dite, est un des plus funestes accidents qui puissent arriver au cheval ; voici les signes symptomatiques qui le caractérisent : 1°. une grande douleur qui fait boiter cet animal à ne pouvoir poser le pied à terre : 2°. une tumeur qui s'étend quelquefois sur toute cette extrémité, et qui empêche le cheval de se coucher : 3°. la perte du boire et du manger : 4°. un grand battement de flancs qui suppose toujours la fièvre : enfin quelquefois la fourbure, d'où suit assez communément la nécessité de faire tuer le cheval.

Cure pour l'écart ou effort d'épaule simple. On saigne le cheval à la veine céphalique, qu'on appelle communément l'ars, et l'on fait une charge de son sang sur toute la partie affligée : cinq ou six heures après la saignée, on emploie des médicaments résolutifs, pour dissiper les obstructions, et donner aux liqueurs nourricières du mouvement, et les volatiliser. Ces médicaments sont l'esprit de terebenthine, d'aspic ou lavande, l'huîle de pétrole, le baume de sioravanti ou du Pérou, le tout mêlé avec l'esprit-de-vin camfré et appliqué sur la partie : on a soin de les faire pénétrer par des frictions avec la main, d'exposer le cheval, si c'est en été, au grand soleil ; en hiver on présente une pelle de fer bien chaude auprès de la partie, dans la même intention : on attache le cheval à deux longes, l'une au ratelier, et l'autre à la mangeoire, afin qu'il ne puisse point se coucher de neuf jours, pendant lesquels on le laisse à la diete, savoir à la paille, au son mouillé donné en petite quantité, et à l'eau blanche.

Si le cheval n'est point guéri au bout de ce temps, ou qu'il lui reste quelque faiblesse à cette partie, on se sert d'un bain, pour y faire deux fois par jour des fomentations un peu chaudes. Ce bain doit être composé avec les herbes aromatiques et émollientes ; savoir, le scordium, l'absynthe, la sauge, le romarin, la graine de genièvre pilée, les sommités de millepertuis, de camomille, de bouillon blanc, du thym et du pouillot, etc. on fait bouillir pendant une heure le tout dans de la lie de vin, et dans du vin, au defaut de la lie.

Si l'effort d'épaule est ancien, il demande des remèdes plus forts, qui soient capables de résoudre les liqueurs arrêtées dans le tissu cellulaire des muscles. Ces médicaments sont les baumes du Pérou, mêlés avec l'esprit de vin camfré, l'esprit de genièvre, l'esprit de ver de terre, de sel armoniac ou d'urine ; ou, à la place de cette composition, on se servira de l'emplâtre de gomme dissous dans l'huîle de tartre, appliqué un peu chaud sur la partie affligée. Si ces médicaments ne réussissent point, on fait au cheval un cautère entre l'épaule et le sternum, qu'on laisse couler pendant l'espace de dix à douze jours, et plus, si le cas l'exige : on se sert aussi du séton, qu'on lui applique tantôt à une partie de l'épaule, tantôt à une autre. Pour dernier remède on y met le feu en baies ou en pointes ; on y applique un siroène par-dessus le feu, qu'on laisse jusqu'à ce qu'il tombe : enfin on fait promener le cheval en main pendant un certain temps, pour donner la facilité à la nature de rétablir les forces dans cette partie ; car l'effort d'épaule, quoique simple, devient souvent incurable par l'empressement que l'on a de vouloir se servir trop-tôt de l'animal, et de l'erreur où l'on est en le croyant guéri : il peut l'être en effet pour de certains petits usages ; car tel cheval est droit d'un écart pour rouler doucement, qui ne le serait pas pour pousser un relai de quatre ou six lieues sur le pavé, mené vivement : de même si c'est un cheval de selle, il peut être droit pour un voyageur qui ne Ve qu'au pas, et il ne le serait pas si on le menait à la chasse ou à quelqu'autre exercice semblable. On peut conclure de-là que la guérison de cet accident dépend autant du ménagement que l'on doit avoir pour le cheval, que des remèdes qu'on lui administre.

Les épaules des chevaux sont sujettes à un autre genre de maladie, que nous allons diviser en trois espèces différentes, qui ont chacune leur cause particulière, et quelquefois plusieurs ensemble ; on les a souvent confondues sous une même dénomination. On appelle cette sorte de maladie tantôt épaules froides ou entreprises, tantôt épaules chevillées, tantôt épaules étroites ou serrées. 1°. On doit entendre d'un cheval qu'il a les épaules froides, lorsque ses parties étant bien conformées, sans aucune apparence d'accident, il ne laisse pas de boiter, au sortir de l'écurie, des deux jambes de devant, comme s'il était fourbu, jusqu'à ce qu'il soit échauffé par le travail, du moins quand ces parties sont engourdies à un certain degré. 2°. On doit dire que cet animal a les épaules chevillées, lorsqu'il a ces parties fort grosses, fort larges et fort charnues, ainsi que le garrot. 3°. Un cheval a les épaules étroites ou serrées, lorsqu'il a ces parties si près l'une de l'autre, qu'à peine peut-il marcher sans croiser les jambes.

Ces deux derniers défauts sont des vices de conformation, opposés l'un à l'autre : ils causent pour l'ordinaire au cheval la même infirmité que l'accident que nous venons de désigner sous le nom d'épaules froides ou entreprises.

En remontant à la première cause de cet accident, nous allons faire sentir pourquoi les chevaux anglais, et surtout les chevaux de selle, sont plus sujets à cette maladie que ceux des autres nations.

Dans les courses violentes qu'on fait faire à un cheval, avant qu'il ait atteint l'âge et les forces propres à résister à ces fatigues, telles que les Anglais en font soutenir à leurs chevaux, les muscles et les ligaments n'ayant point encore acquis la consistance nécessaire pour supporter les extensions que ces parties éprouvent dans ces mouvements forcés, il arrive que ces ligaments et ces muscles se relâchent ; la synovie perd sa fluidité, les petits vaisseaux lymphatiques et les petits cordons nerveux se distendent ; la lymphe ne pouvant plus circuler dans ses petits tuyaux, non plus que les esprits (s'il en existe réellement), les fibres perdent de leur mouvement et de leur ressort, faute d'être tenus bandés et raccourcis par l'élasticité des nerfs, et l'animal est perclus. Cet accident augmente encore par le passage du chaud au froid, après ces violents exercices ; alors les corpuscules de l'air s'insinuent dans les pores de la peau, que la chaleur a dilatés, coagulent la lymphe, et causent des obstructions dans toute la substance des muscles et des ligaments de l'épaule : d'où suit que la sérosité ne pouvant plus être contenue dans ses petits tuyaux, s'épanche, ne circule que difficilement, et acquiert cette acidité qui cause une éréthisme aux fibres membraneuses, ce qui gêne le mouvement.

Mais comme l'obstruction ne se fait que par degrés, l'affoiblissement et l'engourdissement qu'elle cause ne sont pas tout-à-coup sensibles : quelque palliatif même, et un travail modéré, fait disparaitre pour un temps cette lésion dans les épaules des chevaux ; de sorte que celui qui a envie de les acheter n'en peut rien apercevoir. En effet quel est le connaisseur qui peut deviner qu'un cheval périra par les épaules, lorsqu'il voit ces parties bien conformées et libres en apparence, et que l'animal est d'ailleurs gai, vigoureux, potelé ? car malheureusement l'acquéreur n'a point la liberté de le travailler assez pour le tâter à fond, et de le voir le lendemain troter après qu'il est refroidi. Il ne peut donc que l'acheter au hasard, à moins qu'il n'oblige le marchand à lui donner le temps de l'éprouver et de le connaître ; précaution que celui-ci a intérêt d'éluder, mais qu'on a encore plus d'intérêt à prendre. Au défaut de cet examen, quand on vient, après l'avoir acquis, à le faire travailler un peu fort, on commence par degrés à s'apercevoir de la faiblesse des épaules, tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, et quelquefois des deux en même temps : enfin le cheval s'engourdit tellement, et Ve si près du tapin, qu'il bronche à chaque instant, et devient par succession des temps si perclus, qu'il parait comme fourbu au sortir de l'écurie.

On voit par cet exposé, 1°. pourquoi les chevaux anglais sont plus sujets que d'autres à avoir les épaules froides ou entreprises : 2°. quel danger on court en les achetant, puisque l'on n'a pas le temps de les éprouver à fond. Pour être convaincu de ce danger, il suffit de voir qu'entre ceux que l'on achète pour les remontes des écuries royales, qui sont sans contredit choisis, soignés et montés par d'excellents écuyers, cependant il en est beaucoup qui périssent par ces parties, sans que tout l'art et toute l'expérience possible ait pu les faire prévoir dans les achats.

Cette maladie reconnait encore pour cause seconde, le trop de repos donné au cheval, nommément au cheval anglais, qui a presque toujours subi ces violents exercices dès sa tendre jeunesse : car les muscles et les ligaments restant longtemps dans l'inaction, après ces courses outrées, deviennent roides et inflexibles ; parce que le suc nourricier que leurs fibres fatiguées et distendues reçoivent en cet état, remplit leurs petites cellules, s'y épaissit, s'y condense, et comprime les petits cordons nerveux, ce qui prive ces parties organiques de leur souplesse naturelle, ainsi que de leur élasticité ; d'où résulte cet engourdissement qu'on appelle épaule froide ou entreprise.

Le défaut des épaules chevillées est, comme nous l'avons dit, un vice de conformation de ces parties : car il résulte nécessairement qu'un cheval qui a les épaules et le garrot fort gros et fort charnus, doit avoir le mouvement moins libre que celui qui a ces parties bien faites et bien conformées ; car les muscles et les ligaments propres à mouvoir ces parties étant enveloppés de chair et de graisse, n'executent qu'avec peine leurs divers mouvements.

Les épaules serrées et étroites sont de même un vice de conformation ; car un cheval qui est fort serré et fort étroit des épaules a par conséquent le sternum très-étroit : les omoplates et les humerus appliqués et collés sur le sternum laissent si peu de distance d'un avant-bras à l'autre, qu'à peine l'animal peut troter ou galoper sans se croiser les jambes et se couper ; ce vice fait tomber les épaules du cheval dans un amaigrissement total. Cette espèce d'atrophie influe non seulement sur les graisses, mais encore sur les muscles, sur les ligaments et sur les articulations ; ces parties n'étant pas assez enduites par un nouveau suc nourricier, deviennent si seches et si arides, qu'elles ne peuvent que difficilement agir.

On voit, par ce que nous venons de dire de ces maladies, que celles qui sont produites par vice de conformation sont incurables ; elles ont seulement servi, et servent encore de règle presque générale, pour prédire ce qui doit résulter de l'un ou l'autre. Quoique cette règle souffre des exceptions, il est toujours très-prudent de ne point s'en écarter, surtout dans l'achat des chevaux de selle, et encore plus de ceux qu'on destine à la chasse et à des exercices violents.

Nous finissons à regret l'article de ces maladies, particulièrement de celle des épaules froides ou entreprises, sans pouvoir indiquer aucun spécifique propre à la vaincre : on a fait mille tentatives infructueuses qui n'annoncent que trop notre insuffisance à la guérir : on y a essayé quantité de remèdes internes et externes ; les internes sont les fondants, les sudorifiques, les diurétiques, les panacées mercurielles et antimoniales ; et pour remèdes externes, les fomentations, les frictions, les emplâtres, les onguents, les sétons, les cautères potentiels et actuels, et tout cela fort inutilement ; car si quelques chevaux entrepris des épaules se sont trouvés guéris, on doit plutôt l'attribuer au repos modéré qu'on leur a donné, qu'aux remèdes : mais nous dirons de cette maladie ce que nous avons dit de l'éparvin, que le bon moyen de la guérir c'est de ne pas la causer. Cet article est de M. GENSON.

EPAULE, en terme de Fortification, est la partie du bastion où la face et le flanc se joignent ensemble, et où ils font un angle qu'on appelle l'angle de l'épaule. Voyez BASTION. (Q)

EPAULE DE MOUTON, (Charpentier) la plus grande des coignées dont se servent ces ouvriers pour dresser et équarrir leurs bois.

EPAULES D'UN VAISSEAU, (Marine) virures de l'avant : ce sont les parties du bordage qui viennent de l'éperon vers les hauts bans de misene, où il se forme une rondeur qui soutient le vaisseau sur l'eau. (Z)