IVE, adj. terme de Chirurgie qui se dit des bandages, des sutures et des remèdes.

On appelle bandage incarnatif celui qui est capable de procurer la réunion des lèvres d'une plaie. On donne plus particulièrement ce nom à l'espèce de bandage qu'on applique pour les plaies en long, et qui se fait avec une bande roulée à deux chefs, et fendu dans le milieu. Voyez Pl. II. fig. 23. On commence l'application de cette bande sur la partie du membre qui est opposée à la plaie. On ramène les deux globes, l'un d'un côté, l'autre de l'autre côté, jusques sur les bords de la division qu'on se propose de réunir. On passe un des chefs de la bande par l'ouverture susdite, qui doit se trouver précisément sur la plaie ; on tire également les deux chefs en les portant vers la partie opposée, jusqu'à ce que les lèvres de la plaie soient exactement rapprochées, et l'on finit par des circulaires. Ce bandage est un moyen curatif, et est connu sous le nom d'unissant. Le chirurgien avant de l'appliquer, doit prendre toutes les précautions prescrites par les règles de l'art, pour assurer le succès de la réunion, tels que débarasser l'intérieur de la plaie des corps étrangers, des caillots de sang qui empêcheraient la consolidation. Voyez PLAIE. Ce bandage est particulièrement fort utîle dans l'opération du bec-de-lièvre. Voyez BEC-DE-LIEVRE.

La suture incarnative est celle qui rejoint les lèvres d'une plaie, et qui les tient unies ensemble. On la fait de plusieurs manières, dont on parlera au mot SUTURE. Mais il est bon d'avertir que la Chirurgie moderne éclairée par les progrès qu'on a faits dans cette science, Ve tous les jours avec succès au rabais des opérations ; qu'on a des moyens plus doux, plus efficaces, et moins chargés d'inconvénients que les sutures, pour la réunion des plaies. On peut voir à ce sujet un excellent mémoire composé par M. Pibrac, et imprimé dans le troisième volume des Mémoires de l'académie royale de Chirurgie, sur l'abus des sutures.

Les remèdes incarnatifs sont, suivant tous les auteurs, des médicaments qui ont la vertu de faire croitre la chair dans les ulcères ; on leur a aussi donné le nom de sarcotiques. Quand on examine avec reflexion la nature des médicaments qu'on donne pour incarnatifs, on voit qu'ils n'ont d'autre vertu que celle de déterger et de dessécher. Les auteurs se sont abusés dans l'énumération des indications curatives des ulcères, qu'ils disent être la suppuration, la mondification, l'incarnation, et l'exsiccation. Il n'y a aucun temps de la cure où il soit question de reproduire des chairs, si cette régénération est un être de raison ; et c'est ce qu'on trouve prouvé dans les livres mêmes qui ont approfondi cette question, quoiqu'on y explique cette prétendue régénération. La plaie qui résulte d'une amputation, n'offre aucunes indications pour la régénération des chairs ; il suffit que leur surface desséchée, ou mastiquée avec le sang qui s'y est répandu, soit humectée et nettoyée par la suppuration, et que ces chairs fournissent le peu de séve qui est nécessaire pour la production de la cicatrice. M. Quesnay premier médecin ordinaire du Roi, dont les lumières et l'expérience garantissent la solidité de sa doctrine, rapporte à ce sujet une observation très-importante. " Il me souvient, dit-il, que dans les premiers temps que je commençais à pratiquer la Chirurgie, je fis l'amputation d'une jambe, et qu'après que la suppuration fut établie, je continuai l'usage du digestif ordinaire ; les chairs devinrent fort molles et fort gonflées, et il survint une suppuration si abondante, que le malade tomba dans une espèce d'épuisement et de faiblesse, qui l'aurait peut-être fait mourir, si je n'eusse pas reprimé au plutôt cette grande suppuration. Je me servis, continue M. Quesnay, pour cet effet de charpie seche, ayant reconnu que dans ces plaies il faut dès que la suppuration est établie, avoir immédiatement la cicatrice en vue ; et qu'aussi-tôt que cette suppuration devient excessive, on doit avoir recours sur le champ à de légers dessicatifs ". Voyez ce que nous avons dit des vues générales pour la curation des ulcères, au mot DETERSIF.

Si la nature agit sans régénération de chairs dans la plaie d'une amputation qu'on mène à cicatrice, peut-on supposer un autre mécanisme pour la réunion d'une plaie profonde dans un membre que l'on conserve ? Les parties sont les mêmes dans l'un et dans l'autre cas : la réunion ne doit pas se faire par des lois différentes dans des parties qui ont la même texture, la même organisation, et à l'action desquelles la forme ou la figure de la plaie n'apporte ni ne peut apporter aucun changement essentiel. Nous tâcherons de donner la preuve de cette vérité au mot INCARNATION. (Y)