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Catégorie parente: Science de Dieu
Catégorie : Divination
S. f. (Ordre encyclopédique, Entendement, Raison ou Science, Science des esprits vivants, Divination) C'est l'art prétendu de connaître l'avenir par des moyens superstitieux. Cet art est très-ancien. Voyez ENTHOUSIASME, PROPHETIE, etc.

Il est parlé dans l'Ecriture de neuf espèces de divination. La première se faisait par l'inspection des étoiles, des planètes et des nuées ; c'est l'astrologie judiciaire ou apotélesmatique, que Moyse nomme méonen. La seconde est désignée dans l'Ecriture par le mot menachesch, que la vulgate et la plupart des interpretes ont rendu par celui d'augure. La troisième y est appelée mecascheph, que les Septante et la vulgate traduisent maléfices ou pratiques occultes et pernicieuses. La quatrième est celle des hhober ou enchanteurs. La cinquième consistait à interroger les esprits pythons. La sixième, que Moyse appelle des judeoni, était proprement le sortilège et la magie. La septième s'exécutait par l'évocation et l'interrogation des morts, et c'était par conséquent la necromantie. La huitième était la rabdomantie ou sort par la baguette ou les bâtons, dont il est question dans Osée, et auquel on peut rapporter la bélomantie qu'Ezéchielel a connue. La neuvième et dernière était l'hépatoscopie, ou l'inspection du foie. Le même livre fait encore mention des diseurs de bonne aventure, des interpretes de songes, des divinations par l'eau, par le feu, par l'air, par le vol des oiseaux, par leur chant, par les foudres, par les éclairs, et en général par les météores, par la terre, par des points, par des lignes, par les serpens, etc.

Les Juifs s'étaient infectés de ces différentes superstitions en Egypte, d'où elles s'étaient répandues chez les Grecs, qui les avaient transmises aux Romains.

Ces derniers peuples distinguaient la divination en artificielle et en naturelle.

Ils appelaient divination artificielle, un pronostic ou une induction fondée sur des signes extérieurs liés avec des événements à venir (voyez SIGNE et PROGNOSTIC) et divination naturelle, celle qui présageait les choses par un mouvement purement intérieur, et une impulsion de l'esprit indépendante d'aucun signe extérieur.

Ils subdivisaient celle-ci en deux espèces, l'innée et l'infuse : l'innée avait pour base la supposition que l'âme circonscrite en elle-même, et commandant aux différents organes du corps, sans y être présente par son étendue, avait essentiellement des notions confuses de l'avenir, comme on s'en convainct, disaient-ils, par les songes, les extases, et ce qui arrive à quelques malades dans les approches de la mort, et à la plupart des autres hommes lorsqu'ils sont menacés d'un péril imminent. L'infuse était appuyée sur l'hypothèse que l'âme semblable à un miroir, était éclairée sur les événements qui l'intéressaient, par une lumière réfléchie de Dieu ou des Esprits.

Ils divisaient aussi la divination artificielle en deux espèces : l'une expérimentale, tirée de causes naturelles, et telle que les prédictions que les Astronomes font des éclipses, etc. ou les jugements que les Médecins portent sur la terminaison des maladies, ou les conjectures que forment les politiques sur les révolutions des états, comme il arriva à Jugurtha sortant de Rome, où il avait réussi à force d'argent à se justifier d'un crime atroce, lorsqu'il dit : O venalem urbem, et mox perituram, si emptorem inveneris ! L'autre chimérique, extravagante, consistant en pratiques capricieuses, fondées sur de faux jugements, et accréditées par la superstition.

Cette dernière branche mettait en œuvre la terre, l'eau, l'air, le feu, les oiseaux, les entrailles des animaux, les songes, la physionomie, les lignes de la main, les points amenés au hasard, les nombres, les noms, les mouvements d'un anneau, d'un sas, et les ouvrages de quelques auteurs ; d'où vinrent les sorts appelés praenestinae, virgilianae, homericae. Il y avait beaucoup d'autres sorts. Voici les principaux.

Les anciens avaient l'alphitomantie ou aleuromantie, ou le sort par la fleur de farine ; l'axinomantie, ou le sort par la hache ; la bélomantie, ou le sort par les flèches ; la botanomantie, ou le sort par les plantes ; la capnomantie, ou le sort par la fumée ; la catoptromantie, ou le sort par un miroir ; la céromantie ou le sort par les figures de cire ; le clédonisme, ou le sort par des mots ou voix ; la cleidomantie, ou le sort par les clés ; la coscinomantie, ou le sort par le crible ; la dactyliomantie, ou le sort par plusieurs anneaux ; l'hydromantie, ou le sort par l'eau de mer ; la pegomantie, ou le sort par l'eau de source ; la geomantie, ou le sort par la terre ; la lychnomantie, ou le sort par les lampes ; la gastromantie, ou le sort par les phioles ; l'ooscopie, ou le sort par les œufs ; l'extispicine, ou le sort par les entrailles des victimes ? la keraunoscopie, ou le sort par la foudre ; la chyromantie, ou le sort par l'inspection des lignes de la main ; la crystallomantie, ou le sort par le crystal ou un autre corps transparent ; l'arithmomantie, ou le sort par les nombres ; la pyromantie, ou le sort par le feu ; la lythomantie, ou le sort par les pierres ; la necromantie, ou le sort par les morts ; l'oneirocritique, ou le sort par les songes ; l'ornithomantie, ou le sort par le vol et le chant des oiseaux, l'alectryomantie, ou le sort par le coq ; la lecynomantie, ou le sort par le bassin, la rhabdomantie, ou le sort par les bâtons, etc. Voyez tous ces sorts à leurs articles ; et pour en avoir une connaissance encore plus étendue, voyez le livre de sapientiâ de Cardan, et les disquisitiones magicae de Delrio.

Ce dernier auteur propose des notions et des divisions de la divination un peu différentes de celles qui précédent. Il définit la divination, la révélation des choses cachées, en vertu d'un pact fait avec le démon ; (significatio occultorum ex pactis conventis cum doemone) définition qui n'est pas exacte, puisqu'il y a des espèces de divination, telle que la naturelle, qui ne sont fondées sur aucun engagement avec le diable.

Delrio distingue deux espèces de pacts, l'un implicite, l'autre explicite ; conséquemment il institue deux sortes de divinations : il comprend sous la première la théomantie ou les oracles, et la manganie on goétie, à laquelle il rapporte la nécromantie, l'hydromantie, la géomantie, etc. Il range sous la seconde l'haruspicine, avec l'hanthropomantie, la céromantie, la lithomantie, toutes les divinations qui se font par l'inspection d'un objet, les augures, les aruspices, les sorts, etc. les conjectures tirées des astres, des arbres, des éléments, des météores, des plantes, des animaux, etc. il observe seulement que cette dernière est tantôt licite, tantôt illicite ; et par cette distinction il détruit sa définition générale : car si toute divination est fondée sur un pact, soit implicite, soit explicite, il n'y en a aucune qui puisse être innocente.

Les Grecs et les Romains eurent pour toutes ces sottises le respect le plus religieux, tant qu'ils ne furent point éclairés par la culture des Sciences ; mais ils s'en désabusèrent peu-à-peu. Caton consulté sur ce que prognostiquaient des bottines mangées par des rats, répondit qu'il n'y avait rien de surprenant en cela ; mais que c'eut été un prodige inoui si les bottines avaient mangé les rats. Cicéron ne fut pas plus crédule : la myomantie n'est pas mieux traitée dans ses livres, et il n'épargne pas le ridicule à toutes les autres sortes de divinations, sans en excepter ni les oracles, ni les augures, ni les aruspices. Après avoir remarqué que jamais un plus grand intérêt n'avait agité les Romains, que celui qui les divisait dans la querelle de César et de Pompée ; il ajoute que jamais aussi on n'avait tant interrogé les dieux : hoc bello civili dii immortales quam multa luserunt !

M. Pluche, dans son histoire du ciel, conséquemment au système qu'il s'est formé, fait naître la divination chez les Egyptiens de l'oubli de la signification des symboles, dont on se servait au commencement pour annoncer au peuple les devoirs et les occupations, soit de la vie civile, soit de la religion ; et lorsqu'on lui demande comment il s'est pu faire que la signification des symboles se soit perdue, et que tout l'appareil de la religion ait pris un tour si étrange ; il répond " que ce fut en s'attachant à la lettre que les peuples reçurent presqu'universellement les augures, la persuasion des influences planétaires, les prédictions de l'Astrologie, les opérations de l'Alchimie, les différents genres de divinations, par les serpens, par les oiseaux, par les bâtons, etc. la magie, les enchantements, les évocations, etc. Le monde, ajoute-t-il, se trouva ainsi tout rempli d'opinions insensées, dont on n'est pas par-tout également revenu, et dont il est très-utîle de bien connaître le faux, parce qu'elles sont aussi contraires à la vraie piété et au repos de la vie, qu'à l'avancement du vrai savoir ". Mais comment arriva-t-il que les peuples prirent tous les symboles à la lettre ? Il ne faut pour cela qu'une grande révolution dans un état, qui soit suivie de trois ou quatre siècles d'ignorance. Nous avons l'expérience, et de ces révolutions dans l'état, et de l'effet des siècles d'ignorance qui les ont suivies, sur les idées et les opinions des hommes, tant en matière de sciences et d'arts, qu'en matière de religion.

M. l'abbé de Condillac a fait aussi quelques conjectures philosophiques sur l'origine et les progrès de la divination : comme elles sont très-justes, et qu'elles peuvent s'étendre à beaucoup d'autres systèmes d'erreurs, nous invitons le lecteur à lire particulièrement ce morceau, dans le traité que le métaphysicien que nous venons de citer a publié sur les systèmes. Voici ses idées principales, auxquelles nous avons pris la liberté d'entrelacer quelques-unes des nôtres.

Nous sommes alternativement heureux et malheureux, quelquefois sans savoir pourquoi : ces alternatives ont été une source naturelle de conjectures pour ces esprits qui croient interroger la nature, quand ils ne consultent que leur imagination. Tant que les maux ne furent que particuliers, aucune de ces conjectures ne se répandit assez pour devenir l'opinion publique ; mais une affliction fut-elle épidémique, elle devint un objet capable de fixer l'attention générale, et une occasion pour les hommes à imagination de faire adopter leurs idées ? Un mot qui leur échappa peut-être alors par hasard, fut le fondement d'un préjugé : un Etre qui se trouve heureux en faisant le malheur du genre humain, introduit dans une apostrophe, dans une exclamation pathétique, fut à l'instant réalisé par la multitude, qui se sentit pour ainsi dire consolée, lorsqu'on lui présenta un objet à qui elle put s'en prendre dans son infortune.

Mais lorsque la crainte eut engendré un génie malfaisant, l'espérance ne tarda pas à créer un génie favorable ; et l'imagination conduite par la diversité des phénomènes, des circonstances, de la combinaison des idées, des opinions, des événements, des réflexions, à en multiplier les espèces, en remplit la terre, les eaux, et les airs, et leur établit une infinité de cultes divers, qui éprouvèrent à leur tour une infinité de révolutions différentes. L'influence du soleil surtout ce qui existe était trop sensible pour n'être pas remarquée ; et bientôt cet astre fut compté parmi les êtres bienfaisant. On supposa de l'influence à la lune ; on étendit ce système à tous les corps célestes : l'imagination aidée par des conjectures que le temps amène nécessairement, dispensa à son gré entre ces corps un caractère de bonté ou de malignité ; et les cieux parurent aussi concerter le bonheur ou le malheur des hommes : on y lut tous les grands événements, les guerres, les pestes, les famines, la mort des souverains, etc. on attacha ces événements aux phénomènes les plus rares, tels que les éclipses, l'apparition des cometes ; ou l'on supposa du rapport entre ces choses, ou plutôt la coincidence fortuite des événements et des phénomènes fit croire qu'il y en avait.

Un moment de réflexion sur l'enchainement universel des êtres, aurait renversé toutes ces idées : mais la crainte et l'espérance réfléchissent-elles ? le moyen de rejeter en doute l'influence d'une planète, lorsqu'elle nous promet la mort d'un tyran ?

La liaison qu'on est si fort tenté de supposer entre les noms et les choses, dirigèrent dans la dispensation des caractères qu'on cherchait à attacher aux êtres : la flatterie avait donné à une planète le nom de Jupiter, de Mars, de Venus : la superstition rendit ces astres dispensateurs des dignités, de la force, de la beauté : les signes du Zodiaque dû.ent leurs vertus aux animaux d'après lesquels ils avaient été formés. Mais toute qualité a ses analogues : l'analogie arrondit donc le cortège des bonnes ou mauvaises qualités qu'un corps céleste pouvait darder sur un être à la naissance duquel il présidait ; l'action des corps célestes se tempéra réciproquement.

Ce système était exposé à beaucoup de difficultés : mais ou l'on ne daignait pas s'y arrêter, ou l'on n'était guère embarrassé d'y trouver des réponses. Voilà donc le système d'Astrologie judiciaire élevé : on fait des prédictions ; on en fait une bonne sur neuf cent quatre-vingt-dix-neuf mauvaises ; mais la bonne est la seule dont on parle, et sur laquelle on juge de l'art.

Cette seule prédiction merveilleuse racontée en mille manières différentes, se multiplie en mille prédictions heureuses : le mensonge et la fourberie entrent en jeu ; et bien-tôt on a plus de faits et plus de merveilles qu'il n'en faut pour faire face à la philosophie méfiante à la vérité, mais à qui l'expérience ne manque jamais d'en imposer ; quand on la lui objecte.

Lorsque les influences des corps célestes furent bien avouées, on ne put se dispenser d'accorder quelqu'intelligence à ces êtres : on s'adressa donc à eux, on les évoqua. On saisit une baguette ; on traça des figures, sur la terre, dans les airs ; on prononça à voix haute ou basse des discours mystérieux, et l'on se promit d'obtenir tout ce qu'on désirait.

Mais l'on considéra que s'il était important de pouvoir évoquer les êtres bien ou malfaisants, il l'était bien plus d'avoir sur soi quelque chose qui nous en assurât la protection : on suivit les mêmes principes, et l'on construisit des talismants, des amuletes, etc.

S'il est des événements fortuits qui secondent la découverte des vérités, il en est aussi qui favorisent les progrès de l'erreur : tel fut l'oubli du sens des caractères hiéroglyphiques, qui suivit nécessairement l'établissement des caractères de l'alphabet. On attribua donc aux caractères hiéroglyphiques telle vertu qu'on désira ; ces signes passèrent dans la magie : le système de la divination n'en devint que plus composé, plus obscur, et plus merveilleux.

Les hiéroglyphes renfermaient des traits de toute espèce : il n'y eut donc plus de ligne qui ne devint un signe ; il ne fut plus question que de chercher ce signe sur quelque partie du corps humain, dans la main par exemple, pour donner naissance à la chiromancie.

L'imagination des hommes n'agit jamais plus fortement et plus capricieusement que dans le sommeil ; mais à qui la superstition pouvait elle attribuer ces scènes d'objets si singulières et si frappantes, qui nous sont offertes dans certains songes, si ce n'est aux dieux ? Telle fut l'origine de l'oneirocritique : il était difficîle qu'on n'aperçut pas entre les événements du jour et les représentations nocturnes quelques vestiges d'analogie ; ces vestiges devinrent le fondement de l'oneirocritique : on attacha tel événement à tel objet ; et bien-tôt il se trouva des gens qui eurent des prédictions prêtes pour tout ce qu'on avait rêvé. Il arriva même ici une bizarrerie, c'est que le contraire de ce que l'on avait rêvé pendant la nuit, étant quelquefois arrivé pendant le jour, on en fit la règle de prédire par les contraires.

Mais que devait-il arriver à des hommes obsédés des prestiges de la divination, et se croyant sans-cesse environnés d'êtres bien ou mal-faisants, sinon de se jeter sur tous les objets et sur tous les événements, et de les transformer en types, en avertissements, en signes, en pronostics, etc. Aussi ils ne tardèrent pas d'entendre la volonté des dieux dans le chant d'un rossignol, de voir leurs decrets dans le mouvement des ailes d'une corneille, et d'en lire les arrêts irrévocables dans les entrailles d'un veau, surtout pendant les sacrifices ; et tels furent les fondements de l'art des aruspices. Quelques paroles échappées au sacrificateur, se trouvèrent par hasard relatives au motif secret de celui qui recourait à l'assistance des dieux ; on les prit pour une inspiration : ce succès donna occasion à plus d'une distraction de cette espèce : moins on parut maître de ses mouvements, plus ils semblèrent divins ; et l'on crut qu'il fallait perdre la raison à force de s'agiter, pour être inspiré et rendre un oracle. Ce fut par cette raison qu'on éleva des temples dans les lieux où les exhalaisons de la terre aliénaient l'esprit.

Il ne manquait plus que de faire mouvoir et parler les statues, et la fourberie des prêtres eut bientôt contenté la superstition des peuples.

L'imagination Ve vite quand elle s'égare. S'il y a des dieux, ils disposent de tout : donc il n'y a rien qui ne puisse être le signe de leur volonté, et de notre destinée ; et voilà tout d'un coup les choses les plus communes et les plus rares érigées en bons ou mauvais augures ; mais les objets de vénération ayant à cet égard quelque liaison de culte avec les dieux, on les crut plus propres que les autres à désigner leur volonté, et l'on chercha des prophéties dans les poèmes de la guerre de Troie.

Ce système d'absurdités acheva de s'accréditer par les opinions qu'eurent les Philosophes de l'action de Dieu sur l'âme humaine, par la facilité que quelques hommes trouvèrent dans les connaissances de la Médecine pour s'élever à la dignité de sorciers, et par la nécessité d'un motif respectable pour le peuple, qui déterminât ses chefs à agir ou à attendre, sans se compromettre, et sans avoir à répondre ni du délai, ni du succès : cette nécessité rendit la politique favorable aux augures, aux aruspices, et aux oracles ; et ce fut ainsi que tout concourut à nourrir les erreurs les plus grossières.

Ces erreurs furent si générales que les lumières de la religion ne purent empêcher qu'elles ne se répandissent, du moins en partie, chez les Juifs et chez les Chrétiens. On vit même parmi ceux-ci des hommes prétendre interroger les morts et appeler le diable, par des cérémonies semblables à celles des Payens dans l'évocation des astres et des démons. Mais si l'universalité d'un préjugé peut empêcher le philosophe timide de le braver ; elle ne l'empêchera point de le trouver ridicule ; et s'il était assez courageux pour sacrifier son repos et exposer sa vie, afin de détromper ses concitoyens d'un système d'erreurs qui les rendraient misérables et mécans, il n'en serait que plus estimable, du moins aux yeux de la postérité qui juge les opinions des temps passés sans partialité. Ne regarde-t-elle pas aujourd'hui les livres que Cicéron a écrits sur la nature des dieux et sur la divination, comme ses meilleurs ouvrages, quoiqu'ils aient dû naturellement lui attirer de la part des prêtres du paganisme les titres injurieux d'impie, et de la part de ces hommes modérés qui prétendent qu'il faut respecter les préjugés populaires, les épithetes d'esprit dangereux et turbulent ? D'où il s'ensuit qu'en quelque temps, et chez quelque peuple que ce puisse être, la vertu et la vérité méritent seules notre respect. N'y a-t-il pas aujourd'hui, au milieu du dix-huitième siècle, à Paris, beaucoup de courage et de mérite à fouler aux pieds les extravagances du paganisme ? C'était sous Néron qu'il était beau de médire de Jupiter ; et c'est ce que les premiers héros du Christianisme ont osé, et ce qu'ils n'eussent point fait, s'ils avaient été du nombre de ces génies étroits et de ces âmes pusillanimes qui tiennent la vérité captive, lorsqu'il y a quelque danger à l'annoncer.




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