S. m. pl. (Histoire ecclésiastique) nom d'une secte, qui se forma de celle des Puritains vers la fin du seizième siècle : elle fut ainsi nommée de Robert Brown son chef.

Ce Robert Brown qui a écrit plusieurs livres pour appuyer ses sentiments, n'était point, comme le prétend Moréri, un maître d'école de Southwark, mais un homme de bonnes mœurs, et même savant. Il était d'une assez bonne famille de Rutlandshire, et allié au lord-thrésorier Burleigh. Il fit ses études à Cambridge, et commença à publier ses opinions et à déclamer contre le gouvernement ecclésiastique à Norwich en 1580 ; ce qui lui attira le ressentiment des évêques. Il se glorifiait lui-même d'avoir été pour cette cause mis en trente-deux différentes prisons, si obscures qu'il ne pouvait pas y distinguer sa main, même en plein midi. Par la suite il sortit du royaume avec ses sectateurs, et se retira à Middelbourg en Zélande, où lui et les siens obtinrent des états la permission de bâtir une église, et d'y servir Dieu à leur manière. Peu de temps après, la division se mit parmi le petit troupeau : plusieurs s'en séparèrent ; ce qui dégouta tellement Brown, qu'il se démit de son office, retourna en Angleterre en 1589, y abjura ses erreurs, et fut élevé à la place de recteur dans une église de Northampthonshire. Il mourut en 1630.

Le changement de Brown entraina la ruine de l'église de Middelbourg : mais les semences de son système ne furent pas si aisées à détruire en Angleterre. Sir Walter Baleigh, dans un discours composé en 1692, compte déjà jusqu'à vingt mille personnes imbues des opinions de Brown.

Ce n'était pas pour les articles de foi qu'ils se séparaient des autres communions, mais à cause de la discipline ecclésiastique, et surtout de la forme du gouvernement de l'église anglicane, qu'ils improuvaient hautement, sans adopter davantage celui des Presbytériens, et blâmant également les consistoires et les synodes, les évêques et les ministres. Ils ne voulaient se joindre à aucune église réformée, n'étant pas assurés, disaient-ils, de la sainteté et de la régénération des membres de ces églises, puisqu'elles souffraient les pécheurs et communiquaient avec eux ; ce qui, selon les Brownistes, était le comble de l'impiété. Ils condamnaient la célébration solennelle des mariages, qui n'étant, disaient-ils, que des engagements civils, n'avaient besoin que de l'intervention du magistrat séculier, et nullement de celle des ecclésiastiques. Ils ne voulaient pas non plus que les enfants fussent baptisés par les prêtres anglicans, ou les ministres presbytériens, qu'ils ne regardaient pas comme membres de l'Eglise, et qui, ajoutaient-ils, ne prenaient nul soin de ceux qu'ils avaient baptisés. Ils rejetaient toute forme de prière, disant que l'oraison dominicale ne devait pas être regardée comme une prière, mais seulement comme un modèle de prière que Jesus-Christ nous a donné. Voyez SEPARATISTES et NON-CONFORMISTES.

Ils établissaient un gouvernement ecclésiastique de forme démocratique. Quand une de leurs églises était assemblée, celui qui voulait être incorporé à leur société, faisait une profession de foi, et signait une formule, par laquelle il s'obligeait de suivre l'évangîle dans le même sens qu'eux. Le pouvoir d'admettre ou d'exclure les membres, et la décision de toutes les contestations, appartenait à toute la société. Ils choisissaient entr'eux leurs officiers et leurs ministres, pour prêcher et prendre soin des pauvres. On instituait ces ministres, et on leur départait leurs différentes fonctions par le jeune, la prière, et l'imposition des mains de quelques-uns de la société, sans croire néanmoins qu'ils eussent d'ordre ou de caractère ; car ils les réduisaient quelquefois à l'état des laïques, persuadés qu'à cet égard ils pouvaient détruire leur propre ouvrage ; et comme ils enseignaient qu'une église n'était que l'assemblée d'un certain nombre de personnes dans un même endroit, ils pensaient conséquemment que le pouvoir du ministre préposé à cet endroit, y était tellement limité, qu'il ne pouvait ni administrer la communion, ni baptiser ni exercer aucune autre fonction, dans une autre église que la sienne. Il était permis à tous ceux de cette secte, même aux laïques, de faire des exhortations à l'assemblée, de proposer des questions après le prêche, et de raisonner sur ce qui avait été prêché. En un mot chaque église des Brownistes était une assemblée où chaque membre avait la liberté de tendre au bien général de la société, sans être comptable de ses actions devant aucun supérieur, synode, ou tribunal. Les indépendants qui se formèrent par la suite d'entre les Brownistes, adoptèrent une partie de ces opinions. Voyez INDEPENDANS.

La reine Elisabeth poursuivit vivement cette secte. Sous son règne les prisons furent remplies de Brownistes ; il y en eut même quelques-uns de pendus. La commission ecclésiastique et la chambre étoilée sévirent contr'eux avec tant de vigueur, qu'ils furent obligés de quitter l'Angleterre. Plusieurs familles se retirèrent à Amsterdam, où elles formèrent une église, et choisirent pour pasteur Johnson, et après lui, Aynsworth connu par un commentaire sur le Pentateuque. On compte encore parmi leurs chefs, Barrow et Wilkinson. Leur église s'est soutenue pendant environ cent ans. (G)