S. m. (Théologie) anciens hérétiques, dont on prétend que la secte subsiste encore aujourd'hui dans une grande partie du Levant, et dont la principale doctrine est que Marie n'est point mère de Dieu. Voyez MERE DE DIEU.

Ils ont pris leur nom de Nestorius, qui de moine devint clerc, prêtre et fameux prédicateur, et fut enfin élevé par Théodose au siege de Constantinople après la mort de Sisinnius, l'an 428.

Il fit paraitre d'abord beaucoup de zèle contre les hérétiques dans les sermons qu'il prononçait en présence de l'empereur ; mais s'étant émancipé jusqu'à dire qu'il trouvait bien dans l'Ecriture que la Vierge était mère de J. C. mais qu'il n'y trouvait pas qu'elle fût mère de Dieu, tout son auditoire fut choqué de ses paroles, et une grande partie se sépara de sa communion.

Ses écrits se répandirent bientôt après dans la Syrie et en Egypte, où ils séduisirent beaucoup de monde malgré les oppositions de S. Cyrille.

Il soutenait qu'il y avait deux personnes en J. C. que la Vierge n'était point mère de Dieu, mais seulement de J. C. comme homme. Voyez PERSONNE. Sa doctrine fut condamnée dans le concîle d'Ephese, où assistèrent 274 évêques : Nestorius y fut anathématisé et déposé de son siege.

Nestorius n'était pas le premier auteur de cette hérésie ; il l'avait apprise à Antioche où il avait étudié. Théodore de Mopsueste avait enseigné la même chose avant lui.

Il est difficîle de savoir si les chrétiens chaldéens, qui font encore aujourd'hui profession du nestorianisme, sont dans les mêmes sentiments que Nestorius, qu'ils regardent comme leur patriarche. Ils ont fait diverses réunions avec l'Eglise romaine ; mais il ne parait pas qu'elles aient subsisté longtemps. La plus considérable est celle qui arriva sous le pontificat de Paul V.

Jusqu'au temps de Jules III. les Nestoriens n'avaient reconnu qu'un patriarche, qui prenait la qualité de patriarche de Babylone. Mais une division qui survint entr'eux fut cause que le patriarchat fut divisé, au-moins pour quelque temps. Le pape Jules leur en donna un autre qui établit sa résidence à Carémit en Mésopotamie ; mais ses successeurs incapables de balancer le pouvoir de celui de Babylone, furent obligés de se retirer en Perse. Les affaires demeurèrent dans cet état jusqu'au pontificat de Paul V. sous lequel il se fit une réunion solennelle avec l'Eglise romaine. Leur patriarche reconnut qu'elle était la mère et la maîtresse de toutes les autres Eglises du monde, et dépêcha vers le pape des personnes habiles pour négocier cette réunion, et composer ensemble une explication des articles de leurs religions, prétendant que leurs disputes avec l'Eglise romaine n'étaient que des disputes de nom.

De-là quelques savants prétendent qu'il n'y a plus de véritable hérésie nestorienne, ce qu'ils prouvent par les actes que les Nestoriens mêmes ont produit à Rome sous le pape Paul V. et qui ont été imprimés dans la même ville, dans le recueil de Strozza, l'an 1617. Elie qui était alors patriarche des Nestoriens, joignit à la lettre qu'il écrivit au pape, une confession de foi de son église, où il témoigne avoir des sentiments orthodoxes sur le mystère de l'incarnation, quoique les expressions ne soient pas toujours les mêmes que celles des Latins. Voici quelle est selon ces auteurs, la croyance des Nestoriens sur ce mystère. Ils assurent que J. C. a pris un corps de la sainte Vierge, qu'il est parfait tant en l'âme qu'en l'entendement, et en tout ce qui appartient à l'homme : que le verbe étant descendu en une vierge, s'est uni avec l'homme, et qu'il est devenu une même chose avec lui : que cette unité est sans mélange et sans confusion, et que c'est pour cela que les propriétés de chaque nature ne peuvent être détruites après l'union. Pour ce qui est du reproche qu'on leur fait qu'ils n'appellent point la Vierge mère de Dieu, mais mère de J. C. le patriarche Elie répond, qu'ils en usent ainsi pour condamner les Appollinaristes qui prétendent que la divinité est en J. C. sans l'humanité, et pour confondre Themisthius qui assurait que le Christ n'était que l'humanité sans la divinité. Il réduit ensuite les points de créance dans lesquels on dit que les Nestoriens ne conviennent point avec l'Eglise romaine, à cinq chefs : savoir en ce que les Nestoriens n'appellent point la sainte Vierge mère de Dieu, mais mère de J. C. 2° en ce qu'ils reconnaissent en J. C. deux personnes 3° en ce qu'ils n'admettent en lui qu'une puissance et une volonté. 4° en ce qu'ils disent simplement que le S. Esprit procede du Père. 5°. en ce qu'ils craient que la lumière qu'on fait le jour du Samedi saint au sépulchre de notre Seigneur, est une lumière véritablement miraculeuse. L'abbé Adam, un des députés du patriarche, expliqua ainsi les trois premiers articles ; car pour les deux autres, tous les Orientaux les soutiennent aussi-bien que les Nestoriens. Il dit donc pour la justification des siens : 1°. qu'il est facîle de concilier l'Eglise romaine, qui appelle la Vierge mère de Dieu, avec la nestorienne qui l'appelle mère de Christ, parce que c'est un principe reçu des deux églises, que la divinité n'engendre point, ni n'est point engendrée ; qu'il est vrai que la Vierge a engendré Jésus-Christ, qui est Dieu et Homme tout ensemble ; que néanmoins ce ne sont pas deux fils, mais un seul et véritable fils. Il ajoute que les Nestoriens ne nient pas qu'on ne puisse appeler la Vierge mère de Dieu, parce que Jésus-Christ est véritablement Dieu. Mais conformément à leurs anciens préjugés ils s'abstiennent de ces expressions, et ne se conforment pas au langage de l'Eglise romaine. 2° Il est constant que les Latins reconnaissent en J. C. deux natures et une seule personne, au lieu que les Nestoriens disent qu'il y a en lui deux personnes et une prosopa ou personne visible, et outre cela qu'il n'y a en J. C. qu'une puissance ou vertu. L'Abbé Adam concilie ces deux sentiments qui paraissent opposés, par l'explication qu'il donne de ce mystère. Les Nestoriens, selon lui, distinguent per mentem, ou dans leur entendement, deux personnes conformément aux deux natures qui sont en J. C. et ne voient de leurs yeux qu'un seul J. C. qui n'a que la prosopa, ou apparence d'une seule filiation ; et c'est en ce sens qu'ils ne reconnaissent qu'une puissance ou vertu en lui, parce qu'ils ne le considèrent que comme un prosopa ou personne visible. Mais dans l'Eglise romaine, on distingue ces puissances ou vertus, en divinité et humanité, parce qu'on les considère par rapport aux deux natures. Et ainsi cette diversité de sentiments n'est qu'apparente, puisque les Nestoriens avouent avec les Latins, qu'il y a deux natures en J. C. et que chaque nature a sa puissance et sa vertu. 3° Enfin, il concilie le sentiment des Nestoriens sur le troisième article avec celui de l'Eglise romaine, par le même principe, s'appuyant sur ce qu'il n'y a qu'une filiation ; et comme cette filiation ne fait qu'un J. C. les Nestoriens disent par rapport à cela, qu'il n'y a en lui qu'une volonté et une opération, parce qu'il est un en effet et non pas deux J. C. ce qui ne les empêche pas de reconnaître en lui deux volontés et deux opérations par rapport aux deux natures, et de la même manière que les Latins.

Mais on croit que ce député ne représentait pas sincérement la créance de ceux de sa secte. Car il est certain que ces chrétiens d'Orient sont encore aujourd'hui dans les sentiments de Nestorius sur l'incarnation. Leur patriarche seul n'est point marié ; mais leurs prêtres ne gardent point le célibat, même après la mort de leur première épouse, contre la coutume des autres sectes chrétiennes d'Orient. Ils font l'office en langue chaldaïque, quoiqu'ils parlent grec, arabe ou curde, selon les lieux qu'ils habitent. Strozza, de dogmatib. Chaldeor. M. Simon, l'abbé Renaudot, tom. IV. de la perpét. de la foi. Moréri, diction. tom. IV. lettre N au mot Nestorius.