S. m. (Chronologie) nom d'un mois des habitants de Delphes et de Bythinie ; c'était le cinquième de l'année ; et leur année commençant en Octobre, il répondait à notre Février.

HERACLEE, (Géographie ancienne) nom commun à un si grand nombre de villes, que dans l'empire romain on en comptait plus de trente ainsi nommées. Le culte d'Hercule, ce héros que les Grecs appelaient , était étendu au point que la plupart des lieux qui lui étaient particulièrement consacrés, portaient son nom : de-là vient qu'il s'en trouve tant qui sont appelées Héraclée, Héracléopolis, Héracleum, Héracleotes, et autres dont les noms sont formés de celui d'Hercule. Mais je me contenterai de parler dans l'article suivant de la plus fameuse Héraclée, de l'Héraclée du Pont en Bithynie, auprès de laquelle était la presqu'île Achérusiade, d'où Hercule descendit aux enfers et en tira par force le Cerbere, ce chien terrible dont le cou, disent les Poètes, était entouré de couleuvres, et qui faisait des hurlements affreux, quand quelqu'un voulait s'échapper du Ténare. (D.J.)

HERACLEE DU PONT, Heraclea Pontica, (Géographie ancienne) ville d'Asie en Bithynie sur les fleuves Lycus et Hyppius. Les Milésiens la fondèrent, et les Mégariens y envoyèrent ensuite une colonie. Tous les anciens, Diodore, Pausanias, Xénophon, Eustathe, Arrien, Denys le Périégete, Ptolomée, Strabon, Pomponius Méla, Pline et tant d'autres nous parlent beaucoup de cette ville. En effet, au dire de M. Tournefort, elle devait être une des plus belles de l'orient, s'il en faut seulement juger par les ruines, et surtout par les vieilles murailles bâties de gros quartiers de pierre qui étaient encore sur le bord de la mer au commencement de ce siècle.

La médaille de Julia Domna que possède le Roi de France, et dont le revers représente un Neptune, qui de la main droite tient un dauphin et de la gauche un trident, marque bien la puissance que cette ville avait sur mer. Mais rien ne fait plus d'honneur à son ancienne marine, que la flotte qu'elle envoya au secours de Ptolomée, après la mort de Lysimachus, un des successeurs d'Alexandre. Ce fut par ce secours que Ptolomée battit Antigonus. Il y avait dans cette flotte un vaisseau nommé le Lion, d'une beauté surprenante et d'une grandeur si prodigieuse, qu'il contenait plus de trois mille hommes d'équipage. L'histoire est remplie d'autres traits qui prouvent la puissance des Héracliens sur mer, et par conséquent la bonté de leur port, qui n'existe plus aujourd'hui.

La caverne par laquelle on a supposé qu'Hercule descendit aux enfers pour enlever le Cerbere, et que l'on montrait encore du temps de Xénophon, dans la péninsule d'Achérusie, n'est plus trouvable, quoiqu'elle eut deux stades, c'est-à-dire deux cent cinquante pas de profondeur. Elle doit s'être abimée depuis ce temps-là ; car il est certain qu'il y a eu une caverne de ce nom, laquelle a donné lieu à la fable du Cerbere représentée sur plusieurs médailles.

Si Hercule n'a pas été le fondateur d'Héraclée, il y a du-moins été en grande vénération : Pausanias nous apprend qu'on y célébrait tous les travaux de ce héros. Quand Cotta eut pris la ville d'Héraclée, il y trouva dans le marché une statue d'Hercule dont tous les attributs étaient d'or pur. Pour marquer la fertilité de leurs campagnes, les Héracliens avaient fait frapper des médailles avec des épis et des cornes d'abondance : et pour exprimer la bonté des plantes médicinales que produisaient les environs de leur ville, on avait représenté sur une médaille de diadumène, un Esculape appuyé sur un bâton autour duquel un serpent était entortillé.

Cette ville ne fut pas seulement libre dans son origine, mais recommandable par ses colonies ; elle se soutint avec éclat jusqu'au temps que les Romains se rendirent formidables en Asie. Elle refusa d'abord l'entrée de son port à l'armée de Mithridate ; ensuite, à la persuasion d'Archélaus, les Héracliens lui accordèrent cinq galeres et coupèrent la gorge aux Romains qui se trouvèrent dans leur ville.

Luculle ayant battu Mithridate, fit assiéger Héraclée par Cotta, qui l'ayant prise par trahison et entièrement pillée, la réduisit en cendres. Il en obtint le nom de Pontique à Rome ; mais les richesses qu'il avait acquises au sac d'Héraclée lui attirèrent de cruelles affaires. Un sénateur lui dit : " Nous t'avions ordonné de prendre Héraclée, mais non pas de la détruire ". Le sénat indigné renvoya tous les captifs, et rétablit les habitants dans la possession de leurs biens ; on leur permit l'usage de leur port et la faculté de commercer. Britagoras n'oublia rien pour la repeupler, et fit longtemps sa cour à Jules César, pour obtenir la première liberté de ses citoyens ; mais il ne put réussir. Auguste après la bataille d'Actium, la mit du département de la province de Pont jointe à la Bithynie. Voilà comment cette ville fut incorporée à l'empire Romain, sous lequel elle florissait encore.

Héraclée vint ensuite à passer dans l'empire des Grecs ; et lors de la décadence de cet empire, on lui donna le nom de Pendérachi, lequel même, suivant la prononciation, parait un nom corrompu d'Héraclée du Pont. Théodore Lascaris l'enleva à David Commene empereur de Trébizonde. Les Génois se saisirent de Pendérachi dans leurs conquêtes d'orient, et la gardèrent jusqu'à ce que Mahomet II. les en chassa. Depuis elle est restée aux Turcs ; ils l'appellent Eregri : un seul cadi y exerce la justice. Un waivode y exige la taille et la capitation des Grecs. Les Turcs y paient seulement les droits du prince, trop heureux de fumer tranquillement parmi ces belles masures, sans s'embarrasser de ce qui s'y est passé autrefois.

L'ancienne Héraclée, ou, si l'on aime mieux, Eregri, est située près de la mer à vingt lieues S. O. de Constantinople, 22 N. O. de Gallipoli, et 26 S. E. de Trajanopoli. Long. 45. 23. latit. 40. 57. (D.J.)