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Catégorie : Philosophie
ou SECTE STOÏCIENNE, ou ZENONISME, (Histoire, Philosophie) le stoïcisme sortit de l'école cynique : Zénon qui avait étudié la Morale sous Cratès, en fut le fondateur. Aussi disait-on que d'un stoïcien à un cynique, il n'y avait que l'habit de différence. Cependant Zénon rendit sa philosophie plus étendue et plus intéressante que celle de Diogène ; il ne s'en tint pas à traiter des devoirs de la vie ; il composa un système de philosophie universelle d'après les maîtres qu'il avait entendus, et il donna aux exercices de l'école une face nouvelle.

Zénon naquit à Citium, ville maritime de l'île de Chypre ; Citium avait été bâti par une colonie phénicienne ; ce qui lui attira quelquefois le reproche qu'il n'était qu'un étranger ignoble. Mnésius son père faisait le commerce ; l'éducation de son fils n'en fut pas plus négligée ; les affaires du bon - homme l'appelaient souvent à Athènes, et il n'en revenait point sans rapporter au jeune Zénon quelques livres de Socrate. A l'âge de trente à trente deux ans, il vint lui - même dans la ville fameuse pour y vendre de la pourpre, et pour entendre les hommes dont il avait lu les ouvrages. Tout en débarquant, il demanda où ils demeuraient ; on lui montra Cratès qui passait, et on lui conseilla de le suivre. Zénon suivit Cratès, et devint son disciple. Il ne pouvait assez admirer l'élévation que son maître montrait dans sa conduite et dans ses discours ; mais il ne se faisait point au mépris de la décence qu'on affectait dans son école ; il se livra tout entier à la méditation, et bien-tôt il parut de lui un ouvrage intitulé de la République, qu'il avait écrit, disait-on, assez plaisamment, sous la queue du chien. Les Cyniques ne s'occupaient que de la Morale ; ils ne faisaient aucun cas des autres sciences. Zénon ne les approuvait pas en ce point ; entrainé par le désir d'étendre ses connaissances, il quitta Cratès, qui ne digéra pas sans peine cette désertion. Il fréquenta les autres écoles ; il écouta Stilpon pendant dix ans ; il cultiva Zénocrate ; il vit Diodore Cronus ; il interrogea Polémon : enrichi des dépouilles de ces hommes, il ouvrit boutique ; il s'établit sous le portique ; cet endroit était particulièrement décoré des tableaux de Polygnote et des plus grands maîtres, on l'appelait le stoa, d'où la secte de Zénon prit le nom de stoïcienne ; il ne manqua pas d'auditeurs, sa morale était sévère ; mais il savait tempérer par le charme de l'éloquence l'austérité de ses leçons ; ce fut ainsi qu'il arrêta une jeunesse libertine que ses préceptes nuds et secs auraient effarouchée ; on l'admira ; on s'attacha à lui ; on le chérit ; sa réputation s'étendit, et il obtint la bienveillance même des rais. Antigonus Gonatès de Macédoine, qui n'avait pas dédaigné de le visiter sous le portique, l'appela dans ses états ; Zénon n'y alla point, mais lui envoya Persée son disciple ; il n'obtint pas seulement des Athéniens le nom de grand philosophe, mais encore celui d'excellent citoyen ; ils déposèrent chez lui les clés des châteaux de leur ville, et l'honorèrent de son vivant d'une statue d'airain ; il était d'une faible santé, mais il était sobre ; il vivait communément de pain, d'eau, de figues, et de miel ; sa physionomie était dure, mais son accueil prévenant ; il avait conservé l'ironie de Diogène, mais tempérée. Sa vie fut un peu troublée par l'envie ; elle souleva contre lui Arcésilaus et Carnéadès, fondateurs de l'académie moyenne et nouvelle ; Epicure même n'en fut pas tout à fait exempt ; il souffrit avec quelque peine qu'on donnât particulièrement aux stoïciens le nom de sages. Cet homme qui avait reçu dans ses jardins les grâces et la volupté, dont le principe favori était de tromper par les plaisirs les peines de la vie, et qui s'était fait une manière de philosopher douce et molle, traitait le stoïcisme d'hypocrisie. Zénon de son côté ne ménagea pas la doctrine de son adversaire, et le peignit comme un précepteur de corruption ; s'il est vrai que Zénon prétendit qu'il était aussi honnête, naturam matris fricare, quam dolentem aliam corporis partem fricando juvare ; et que dans un besoin pressant, un jeune garçon était aussi commode qu'une jeune fille ; Epicure avait beau jeu pour lui répondre. Mais il n'est pas à croire qu'un philosophe dont la continence avait passé en proverbe, enseignât des sentiments aussi monstrueux. Il est plus vraisemblable que la haine tirait ces conséquences odieuses d'un principe reçu dans l'école de Zénon, et très-vrai, c'est qu'il n'y a rien de honteux dans les choses naturelles. Le livre de la république ne fut pas le seul qu'il publia ; il écrivit un commentaire sur Hésiode, où il renversa toutes les notions reçues de théologie, et où Jupiter, Junon, Vesta, et le reste des dieux, étaient réduits à des mots vides de sens. Zénon jouit d'une longue vie ; âgé de quatre-vingt dix-huit ans, il n'avait plus qu'un moment à attendre pour mourir naturellement ; il n'en eut pas la patience ; s'étant laissé tomber au sortir du portique, il crut que la nature l'appelait : me voilà, lui dit-il, en touchant la terre du doigt qu'il s'était cassé dans sa chute, je suis prêt ; et de retour dans sa maison, il se laissa mourir de faim. Antigone le regretta, et les Athéniens lui élevèrent un tombeau dans la Céramique.

Sa doctrine était un choix de ce qu'il a puisé dans les écoles des académiciens, des Erétriaques ou Eristiques, et des cyniques. Fondateur de secte, il fallait ou inventer des choses, ou déguiser les anciennes sous de nouveaux noms ; le plus facîle était le premier. Zénon disait de la dialectique de Diodore, que cet homme avait imaginé des balances très - justes, mais qu'il ne pesait jamais que de la paille. Les stoïciens disaient qu'il fallait s'opposer à la nature ; les cyniques, qu'il fallait se mettre au-dessus, et vivre selon la vertu, et non selon la loi ; mais il est inutîle de s'étendre ici davantage sur le parallèle du stoïcisme, avec les systèmes qui l'ont précédé ; il résultera de l'extrait des principes de cette philosophie, et nous ne tarderons pas à les exposer.

On reproche aux stoïciens le sophisme. Est - ce pour cela, leur dit Séneque, que nous nous sommes coupé la barbe ? on leur reproche d'avoir porté dans la société les ronces de l'école ; on prétend qu'ils ont méconnu les forces de la nature, que leur morale est impraticable, et qu'ils ont inspiré l'enthousiasme au-lieu de la sagesse. Cela se peut ; mais quel enthousiasme que celui qui nous immole à la vertu, et qui peut contenir notre âme dans une assiette si tranquille et si ferme, que les douleurs les plus aiguës ne nous arracheront pas un soupir, une larme ! Que la nature entière conspire contre un stoïcien, que lui fera-t-elle ? qu'est-ce qui abattra, qu'est-ce qui corrompra celui pour qui le bien est tout, et la vie n'est rien ? Les philosophes ordinaires sont de chair comme les autres hommes ; le stoïcien est un homme de fer, on peut le briser, mais non le faire plaindre. Que pourront les tyrants sur celui sur qui Jupiter ne peut rien ? il n'y a que la raison qui lui commande ; l'expérience, la réflexion, l'étude, suffisent pour former un sage ; un stoïcien est un ouvrage singulier de la nature ; il y a donc eu peu de vrais stoïciens, et il n'y a donc eu dans aucune école autant d'hypocrites que dans celle-ci ; le stoïcisme est une affaire de tempérament, et Zénon imagina, comme ont fait la plupart des législateurs, pour tous les hommes, une règle qui ne convenait guère qu'à lui ; elle est trop forte pour les faibles, la morale chrétienne est un zénonisme mitigé, et conséquemment d'un usage plus général ; cependant le nombre de ceux qui s'y conforment à la rigueur n'est pas grand.

Principes généraux de la philosophie stoïcienne. La sagesse est la science des choses humaines et des choses divines ; et la philosophie, ou l'étude de la sagesse, est la pratique de l'art qui nous y conduit.

Cet art est un, c'est l'art par excellence ; celui d'être vertueux.

Il y a trois sortes de vertus ; la naturelle, la morale, et la discursive ; leurs objets sont le monde, la vie de l'homme, et la raison.

Il y a aussi trois sortes de philosophies ; la naturelle, la morale, et la rationelle, où l'on observe la nature, où l'on s'occupe des mœurs, où l'on perfectionne son entendement. Ces exercices influent nécessairement les uns sur les autres.

Logique des stoïciens. La logique a deux branches, la rhétorique et la dialectique.

La rhétorique est l'art de bien dire des choses qui demandent un discours orné et étendu.

La dialectique est l'art de discuter les choses, où la briéveté des demandes et des réponses suffit.

Zénon comparait la dialectique et l'art oratoire, à la main ouverte et au poing fermé.

La rhétorique est ou délibérative, ou judiciaire, ou démonstrative ; ses parties sont l'invention, l'élocution, la disposition, et la prononciation ; celles du discours, l'exorde, la narration, la réfutation, et l'épilogue.

Les académiciens récens excluaient la rhétorique de la philosophie.

La dialectique est l'art de s'en tenir à la perception des choses connues, de manière à n'en pouvoir être écarté ; ses qualités sont la circonspection et la fermeté.

Son objet s'étend aux choses et aux mots qui les désignent ; elle traite des conceptions et des sensations ; les conceptions et les sensations sont la base de l'expression.

Les sens ont un bien commun ; c'est l'imagination.

L'ame consent aux choses conçues, d'après le témoignage des sens : ce que l'on conçoit se conçoit par soi - même ; la compréhension suit l'approbation de la chose conçue, et la science, l'imperturbabilité de l'approbation.

La qualité par laquelle nous discernons les choses les unes des autres, s'appelle jugement.

Il y a deux manières de discerner le bon et le mauvais, le vrai et le faux.

Nous jugeons que la chose est ou n'est pas, par sensation, par expérience, ou par raisonnement.

La logique suppose l'homme qui juge, et une régle de jugement.

Cette règle suppose ou la sensation, ou l'imagination.

L'imagination est la faculté de se rappeler les images des choses qui sont.

La sensation nait de l'action des objets extérieurs, et elle suppose une communication de l'âme aux organes.

Ce qu'on a vu, ce qu'on a conçu reste dans l'âme, comme l'impression dans la vue, avec ses couleurs, ses figures, et ses éminences, et ses creux.

La compréhension formée d'après le rapport des sens, est vraie et fidèle ; la nature n'a point donné d'autre fondement à la science ; il n'y a point de clarté, d'évidence plus grande.

Toute appréhension vient originairement des sens ; car il n'y a rien dans l'entendement qui n'ait été auparavant dans la sensation.

Entre les choses comprises, il y en a de plus ou de moins sensibles ; les incorporelles sont les moins sensibles.

Il y en a de rationelles et d'irrationelles, de naturelles et d'artificielles, telles que les mots.

De probables et d'improbables, de vraies et de fausses, de compréhensibles et d'incompréhensibles ; il faut pour les premières qu'elles naissent d'une chose qui sait, qu'elles y soient conformes, et qu'elles n'impliquent aucune contradiction.

Il faut distinguer l'imagination du fantôme, et le fantôme du fantastique qui n'a point de modèle dans la nature.

Le vrai est ce qui est, et ce qui ne peut venir d'ailleurs que d'où il est venu.

La compréhension, ou la connaissance ferme, ou la science, c'est la même chose.

Ce que l'esprit comprend, il le comprend ou par assimilation, ou par composition, ou par analogie.

L'homme reçoit la sensation, et il juge ; l'homme sage réfléchit avant que de juger.

Il n'y a point de notions innées ; l'homme vient au monde comme une table rase sur laquelle les objets de la nature se gravent avec le temps.

Il y a des notions naturelles qui se forment en nous sans art ; il y en a qui s'acquièrent par industrie et par étude ; je laisse aux premières le nom de notions, j'appelle celles-ci anticipations.

Le senti est dans l'animal, il devient le conçu dans l'homme.

Les notions communes le sont à tous, il est impossible qu'une notion soit opposée à une notion.

Il y a la science, et l'opinion, et l'ignorance ; si l'on n'a pas éprouvé la sensation, on est ignorant ; s'il reste de l'incertitude après cette épreuve, on est incertain ; si l'on est imperturbable, on sait.

Il y a trois choses liées, le mot, la chose, l'image de la chose.

La définition est un discours qui analyse, devient la réponse exacte à la question, qu'est-ce que la chose ? elle ne doit rien renfermer qui ne lui convienne ; elle doit indiquer le caractère propre qui la distingue.

Il y a deux sortes de définitions ; les unes des choses qui sont, les autres des choses que nous concevons.

Il y a des définitions partielles, il y en a de totales.

La distribution d'un genre dans ses espèces les plus prochaines, s'appelle division.

Un genre s'étend à plusieurs espèces ; un genre suprême n'en a point au-dessus de lui ; une espèce infinie n'en a point au-dessous d'elle.

La connaissance complete se forme de la chose du mot.

Il y a quatre genres ; la substance, la qualité, l'absolu, le rapport.

Les énonciations qui comprennent sous un point commun des choses diverses, s'appellent catégories ; il y a des catégories dans l'entendement, ainsi que dans l'expression.

L'énonciation est ou parfaite, ou imparfaite et défectueuse ; parfaite, si elle comprend tout ce qui est de la chose.

Une énonciation est ou affirmative ou négative, ou vraie ou fausse.

Une énonciation affirmative ou négative, parfaite, est un axiome.

Il y a quatre catégories ; la directe, l'oblique, la neutre, et l'active ou passive.

Un axiome est ou simple ou composé ; simple, si la proposition qui l'énonce est simple ; composée, si la proposition qui l'énonce est composée.

Il y a des axiomes probables ; il y en a de rationnels, il y en a de paradoxals.

Le lemme, le proslemme et l'épiphore, sont les trois parties de l'argument.

L'argument est concluant ou non ; syllogistique ou non.

Les syllogismes sont ou liés, ou conjoints, ou disjoints.

Il y a des modes, selon lesquels les syllogismes concluans sont disposés.

Ces modes sont simples ou composés.

Les arguments syllogistiques qui ne concluent pas, ont aussi leurs modes. Dans ces arguments, la conclusion ne suit pas du lien des prémisses.

Il y a des sophismes de différents genres ; tels, par exemple que le sorite, le menteur, l'inexplicable, le paresseux, le dominant, le voile, l'électre, le cornu, le crocodile, le réciproque, le déficient, le moissonneur, le chauve, l'occulte, etc.

Il y a deux méthodes, la vulgaire et la philosophique.

On voit en effet, que toute cette logique n'a rien de bien merveilleux. Nous l'avons dépouillée des termes barbares dont Zénon l'avait revêtue. Nous aurions laissé à Zénon ses mots, que les choses n'en auraient pas été plus nouvelles.

Physiologie des stoïciens. Le chaos était avant tout. Le chaos est un état confus et ténébreux des choses, c'est sous cet état que se présenta d'abord la matière, qui était la somme de toutes les choses revêtues de leurs qualités, le réservoir des germes et des causes, l'essence, la Nature, s'il est permis de s'exprimer ainsi, grosse de son principe.

Ce que nous appelons le monde et la nature ; c'est ce chaos débrouillé, et les choses ténébreuses et confuses prenant l'ordre et formant l'aspect que nous leur voyons.

Le monde ou la nature est ce tout, dont les êtres sont les parties. Ce tout est un ; les êtres sont ses membres ou parties.

Il faut y distinguer des principes différents des éléments.

De ces principes, l'un est efficient ; l'autre est passif. L'efficient est la raison des choses qui est dans la matière, ou Dieu. Le passif est la matière même.

Ils sont l'un et l'autre d'une nature corporelle. Tout ce qui agit ou souffre, est corporel. Tout ce qui est, est donc corps.

La cause efficiente ou Dieu, est un air très - pur et très-limpide, un feu artificiel, placé à la circonférence des cieux la plus éloignée, séjour de tout ce qui est divin.

Le principe passif ou la matière, est la nature considérée sans qualité, mérite, chose prête à tout, n'étant rien, et cessant d'être ce qu'elle devient, se reposant, si rien ne la meut.

Le principe actif est opposé au principe passif. Ce feu artificiel est propre à former de la matière, avec une adresse suprême et selon les raisons qu'il a en lui-même, les semences des choses. Voilà sa fécondité. Sa subtilité permet qu'on l'appelle incorporel, immatériel.

Quoiqu'il soit corps, en conséquence de son opposition avec la matière, on peut dire qu'il est esprit.

Il est la cause rationnelle, incorruptible, sempiternelle, première, originelle, d'où chaque substance a les qualités qui lui sont propres.

Cette cause est bonne. Elle est parfaite. Il n'y a point de qualités louables qu'elle n'ait.

Elle est prévoyante ; elle régit le tout et ses parties ; elle fait que le tout persévère dans sa nature.

On lui donne différents noms. C'est le monde dont elle est en effet la portion principale, la nature, le destin, jupiter, Dieu.

Elle n'est point hors du monde ; elle y est comprise avec la matière ; elle constitue tout ce qui est, ce que nous voyons et ce que nous ne voyons pas ; elle habite dans la matière et dans tous les êtres ; elle la pénétre et l'agite, selon que l'exige la raison universelle des choses ; c'est l'âme du monde.

Puisqu'elle pénétre toutes les portions de la matière, elle y est intimement présente, elle connait tout, elle y opère tout.

C'est en agitant la matière et en lui imprimant les qualités qui étaient en elle, qu'elle a formé le monde. C'est l'origine des choses. Les choses sont d'elle. C'est par sa présence à chacun qu'elle les conserve ; c'est en ce sens que nous disons qu'elle est Dieu, et que Dieu est le père des choses, leur ordinateur et leur conservateur.

Dieu n'a point produit le monde par une détermination libre de sa volonté ; il en était une partie ; il y était compris. Mais il a rompu l'écorce de la matière qui l'enveloppait ; il s'est agité et il a opéré par une force intrinséque, selon que la nécessité de sa nature et de la matière le permettait.

Il y a donc dans l'univers une loi immuable et éternelle, un ordre combiné de causes et d'effets, enchainés d'un lien si nécessaire, que tout ce qui a été, est et sera, n'a pu être autrement ; et c'est-là le destin.

Tout est soumis au destin, et il n'y a rien dans l'univers qui n'en subisse la loi, sans en exempter Dieu ; puisque Dieu suit cet ordre inexplicable et sacré des choses ; cette chaîne qui lie nécessairement.

Dieu, ou la grande cause rationnelle n'a pourtant rien qui la contraigne : car hors d'elle et du tout, il n'y a que le vide infini ; c'est la nature seule qui la nécessite ; elle agit conformément à cette nature, et tout suit conformément à son action ; il ne faut pas avoir d'autre idée de la liberté de Dieu, ni de celle de l'homme ; Dieu n'en est ni moins libre, ni moins puissant ; il est lui-même ce qui le nécessite.

Ce sont les parties ou les écoulements de cet esprit universel du monde, distribués par-tout, et animant tout ce qu'il y a d'animé dans la nature, qui donnent naissance aux démons dont tout est rempli.

Chaque homme a son Génie et sa Junon qui dirige ses actions, qui inspire ses discours, et qui mérite le plus grand respect ; chaque particule du monde a son démon qui lui est présent et qui l'assiste ; c'est là ce qu'on a désigné sous les noms de Jupiter, de Junon, de Vulcain, de Cérès. Ce ne sont que certaines portions de l'âme universelle, résidentes dans l'air, dans l'eau, dans la terre, dans le feu, etc.

Puisque les dieux ne sont que des écoulements de l'âme universelle, distribuées à chaque particule de la nature, il s'ensuit que dans la déflagration générale qui finira le monde, les dieux retourneront à un Jupiter confus, et à leurs anciens élements.

Quoique Dieu soit présent à tout, agite tout, veille à tout, en est l'âme, et dirige les choses selon la condition de chacune, et la nature qui lui est propre ; quoiqu'il soit bon, et qu'il veuille le bien, il ne peut faire que tout ce qui est bien arrive, ni que tout ce qui arrive soit bien ; ce n'est pas l'art qui s'y oppose, mais c'est la matière qui est indocîle à l'art. Dieu ne peut être que ce qu'il est, et il ne peut changer la matière.

Quoiqu'il y ait un lien principal et universel des choses, qui les enchaine, nos âmes ne sont cependant sujettes au destin, qu'autant et que selon qu'il convient à leur nature ; toute force extérieure a beau conspirer contre elles, si leur bonté est originelle et première, elle perséverera ; s'il en est autrement, si elles sont nées ignorantes, grossières, féroces ; s'il ne survient rien qui les améliore, les instruise, et les fortifie ; par cette seule condition, sans aucune influence du destin, d'un mouvement volontaire et propre, elles se porteront au vice et à l'erreur.

Il n'est pas difficîle de conclure de ces principes, que les stoïciens étaient matérialistes, fatalistes, et à proprement parler athées.

Nous venons d'exposer leur doctrine sur le principe efficient ; voici maintenant ce qu'ils pensaient de la cause passive.

La matière première ou la nature est la première des choses, l'essence et la base de leurs qualités.

La matière générale et première est éternelle ; tout ce qu'il en a été est, elle n'augmente ni ne diminue, tout est elle ; on l'appelle essence, considérée dans l'universalité des êtres ; matière, considérée dans chacun.

La matière dans chaque être, est susceptible d'accroissement et de diminution ; elle n'y reste pas la même, elle se mêle, elle se sépare, ses parties s'échappent dans la séparation, s'unissent dans le mélange ; après la déflagration générale, la matière se trouvera une, et la même dans Jupiter.

Elle n'est pas stable, elle varie sans-cesse, tout est emporté comme un torrent, tout passe, rien de ce que nous voyons ne reste le même ; mais rien ne change l'essence de la matière, il n'en périt rien, ni de ce qui s'évanouit à nos yeux ; tout retourne à la source première des choses, pour en émaner derechef ; les choses cessent ; mais ne s'anéantissent pas.

La matière n'est pas infinie ; le monde a ses limites.

Il n'y a rien à quoi elle ne puisse être réduite, rien qu'elle ne puisse souffrir, qui n'en puisse être fait ; ce qui serait impossible si elle était immuable ; elle est divisible à l'infini ; or ce qui est divisible ne peut être infini ; elle est contenue.

C'est par la matière, par les choses qui sont de la matière, et par la raison générale qui est présente à tout, qui en est le germe, qui le pénetre, que le monde est, que l'univers est, que Dieu est ; on entend quelquefois le ciel par ce mot, Dieu.

Le monde existe séparé du vide qui l'environne, comme un œuf, la terre est au centre ; il y a cette différence entre le monde et l'univers, que l'univers est infini ; il comprend les choses qui sont, et le vide qui les comprend ; le monde est fini, le monde est compris dans le vide qui n'entre pas dans l'acception de ce mot.

Au commencement il n'y avait que Dieu et la matière ; Dieu, essence des choses, nature ignée, être prolifique, dont une portion combinée avec la matière, a produit l'air, puis l'eau ; il est au monde comme le germe à la plante ; il a déposé le germe du monde dans l'eau, pour en faciliter le développement ; une partie de lui-même a condensé la terre, une autre s'est exhalée ; de-là le feu.

Le monde est un grand animal, qui a sens, esprit, et raison ; il y a, ainsi que dans l'homme, corps et âme dans ce grand animal ; l'âme y est présente à toutes les parties du corps.

Il y a dans le monde, outre de la matière nue de toute qualité, quatre éléments, le feu, l'air, l'eau, et la terre ; le feu est chaud, l'air froid, la terre seche, et l'eau moite ; le feu tend en haut, c'est son séjour ; cet élément, ou sa portion connue sous le nom d'aether, a été le rudiment des astres et de leurs sphères ; l'air est au-dessous du feu ; l'eau coule sous l'air et sur la terre ; la terre est la base du tout, elle est au centre.

Entre les éléments deux sont légers, le feu et l'air ; deux pesans, l'eau et la terre ; ils tendent au centre qui n'est ni pesant ni léger.

Il y a une conversion réciproque des éléments entr'eux ; tout ce qui cesse de l'un, passe dans un autre ; l'air dégénere en feu, le feu en air ; l'air en eau, l'eau en air ; la terre en eau, l'eau en terre ; mais aucun élément n'est sans aucun des autres : tous sont en chacun.

Le feu est le premier des éléments, il a son séjour vers le ciel, et le ciel est, comme nous l'avons dit, la limite dernière du monde, où ce qui est divin a sa place.

Il y a deux feux ; l'artificiel qui sert à nos usages, le naturel qui sert aux opérations de la nature ; il augmente et conserve les choses, les plantes, les animaux ; c'est la chaleur universelle sans laquelle tout périt.

Ce feu très-haut, répandu en tout, enveloppe dernière du monde, est l'aether, est aussi le Dieu tout-puissant.

Le soleil est un feu très-pur, il est plus grand que la terre, c'est un orbe rond comme le monde ; c'est un feu, car il en a tous les effets ; il est plus grand que la terre, puisqu'il l'éclaire et le ciel en même temps.

Le soleil est donc à juste titre, le premier des dieux.

C'est une portion très-pure de l'aether, de Dieu ou du feu, qui a constitué les astres ; ils sont ardents, ils sont brillans, ils sont animés, ils sentent, ils conçoivent, ils ne sont composés que de feu, ils n'ont rien d'étranger au feu ; mais il n'y a point de feu qui n'ait besoin d'aliment ; ce sont les vapeurs des eaux, de la mer, et de la terre, qui nourrissent le feu des astres.

Puisque les astres sont des portions du feu naturel et divin, qu'ils sentent et qu'ils conçoivent, pourquoi n'annonceraient-ils pas l'avenir ? ce ne sont pas des êtres où l'on puisse lire les choses particulières et individuelles, mais bien la suite générale des destinées ; elle y est écrite en caractères très-évidents.

On appelle du nom d'astres le soleil et la lune ; il y a cette différence entre un astre et une étoile, que l'étoîle est un astre, mais que l'astre n'est pas une étoile.

Voici l'ordre des astres errants ; saturne, jupiter, mars, mercure, vénus, le soleil, la lune ; la principale entre les cinq premières, c'est vénus, l'astre le plus voisin du soleil.

La lune occupe le lieu le plus bas de l'aether, c'est un astre intelligent, sage, d'une nature ignée ; mais non sans quelque mélange de terrestre.

La sphère de l'air est et commence au-dessous de la lune, elle est moyenne entre le ciel et les eaux, sa figure est ronde, c'est Junon.

La région de l'air se divise en haute, moyenne, et basse ; la région haute est très-seche et très-chaude ; la proximité des feux célestes la rend très-rare et très-tenue ; sa région basse, voisine de la terre, est dense et ténébreuse ; c'est le réceptacle des exhalaisons ; la région moyenne plus temperée que celle qui la domine, et que celle qu'elle presse, est seche à sa partie supérieure, humide à sa partie inférieure.

Le vent est un courant d'air.

La pluie, un changement de nue en eau ; ce changement a lieu toutes les fois que la chaleur ne peut diviser les vapeurs que le soleil a élevées de la terre et des mers.

La terre, la portion du monde la plus dense, sert de base au tout, comme les os dans les animaux ; elle est couverte d'eaux qui se tiennent de niveau à sa surface ; elle est au centre ; elle est une, ronde, finie, ainsi que l'exige la nature de tout centre ; l'eau a la même figure qu'elle, parce que son centre est le même que celui de la terre.

La mer parcourt l'intérieur de la terre, par des routes secrètes ; elle sort de ses bassins, elle disparait, elle se condense, elle se filtre, elle se purifie, elle perd son amertume, et offre, après avoir fait beaucoup de chemin, une eau pure aux animaux et aux hommes.

La terre est immobile.

Il n'y a qu'un seul monde.

Il est éternel, c'est Dieu et la nature ; ce tout n'a point commencé, et ne finira point ; son aspect passera.

Comme l'année a un hiver et un été, le monde aura une inondation et une déflagration ; l'inondation couvrira toute la surface de la terre, et tout périra.

Après cette première révolution par l'eau, le monde sera embrasé par le feu, répandu dans toutes ses parties, il consumera l'humidité, et s'assimilera les êtres ; ils prendront peu-à-peu sa nature, alors tout se résoudra en Jupiter, et le premier chaos renaitra.

Ce chaos se débrouillera comme le premier, l'univers se reformera comme il est, et l'espèce humaine sera reproduite.

Le temps est à la dernière place entre les êtres.

Anthropologie des Stoïciens. L'homme est une image du monde, le monde est en lui, il a une âme et un corps comme le grand tout.

Les principes de l'espèce humaine étaient dans l'univers naissant ; les premiers hommes sont nés par l'entremise du feu divin, ou par la providence de Dieu.

Dans l'acte de la génération, le germe de l'homme s'unit à la portion humide de l'âme.

La liqueur spermatique ne produit que le corps, elle contient en petit tous les corps humains qui se succéderont.

L'ame ne se forme point dans la matrice, elle vient du dehors, elle s'unit au corps avant qu'il ait vie.

Si vous remontez à la première origine de l'âme, vous la ferez descendre du feu primitif dont elle est une étincelle ; elle n'a rien de pesant ni de terrestre ; elle est de la même nature que la substance qui forme les astres, et qui les fait briller.

L'ame de l'homme est une particule de Dieu, une petite portion de l'âme universelle qui en a été, pour ainsi dire, détachée : car l'âme du monde est la source féconde de toutes les ames.

Il est difficîle d'expliquer la nature ; elle est ignée, ardente, intelligente, et raisonnable.

Il y a des âmes mortelles, et il y en a d'immortelles.

Après la déflagration générale, et le renouvellement des choses, les âmes retourneront dans les corps qu'elles ont animés avant cet événement.

L'ame est un corps, car elle est, et elle agit ; mais ce corps est d'une ténuité et d'une subtilité extrêmes.

On y distingue huit facultés ; les cinq sens, la faculté d'engendrer, celle de parler une partie principale.

Après la mort, elle remonte aux cieux ; elle habite les astres, elle converse avec les dieux, elle contemple, et cet état durera jusqu'à ce que le monde consumé, elle et tous les dieux se confondent, et ne forment qu'un seul être, Jupiter.

L'ame du sage, après la dissolution du corps, s'occupe du cours du soleil, de la lune, et des autres astres, et vérifie les connaissances qu'elle a acquises sur la terre.

Principes de la philosophie morale des Stoïciens. Dans la vie, c'est surtout la fin qu'il faut regarder ; la fin est l'être par qui tout se fait, pour qui tout est, à qui tout se rapporte.

La fin peut se considérer sous trois aspects, l'objet, les moyens, et le terme.

La fin de l'homme doit être de conformer sa conduite aux lois de la nature.

La nature n'est autre chose que la raison universelle qui ordonne tout ; conformer sa conduite à celle de la nature, c'est se voir comme une partie du grand tout, et conspirer à son harmonie.

Dieu est la portion principale de la nature ; l'âme de l'homme est une particule de Dieu ; la loi de la nature, ou de Dieu, c'est la règle générale par qui tout est coordonné, mu, et vivifié ; vivre conformément à la nature, imiter la divinité, suivre l'ordre général, c'est la même chose sous des expressions différentes.

La nature est tout ce qu'il y a de bon et beau.

La vertu a ces deux qualités comme la nature.

Le bonheur en est une suite.

Bien vivre, aimer le beau, pratiquer le bien, et être heureux, c'est une même chose.

La vertu a son germe dans l'âme humaine, c'est une conséquence de son origine ; particule émanée de la divinité, elle tend d'elle-même à l'imitation du principe de son émanation ; ce principe la meut, la pousse et l'inspire.

Cette particule détachée de la grande âme, et spécifiée par son union à tel ou tel corps, est le démon de cet homme, ce démon le porte au beau, au bon, et à la félicité.

La souveraine félicité consiste à l'écouter : alors on choisit ce qui convient à la nature générale ou à Dieu, et l'on rejette ce qui contredit son harmonie et sa loi.

Chaque homme ayant son démon, il porte en lui le principe de son bonheur, Dieu lui est présent. C'est un pontife sacré qui préside à son autel.

Dieu lui est présent ; c'est Dieu-même attaché à un corps de figure humaine.

La nature du bonheur de l'homme est la même que la nature du bonheur de Dieu. C'est la vertu.

La vertu est le grand instrument de la félicité.

Le bonheur souverain n'est pas dans les choses du corps, mais dans celles de l'âme.

Il n'y a de bien que ce qui est honnête. L'honnête n'est relatif qu'à l'âme. Rien de ce qui est hors de l'homme ne peut donc ajouter solidement à son bonheur.

Le corps, les jouissances, la gloire, les dignités sont des choses hors de nous et de notre puissance ; elles ne peuvent donc que nuire à notre bonheur, si nous nous y attachons.

Le dernier degré de la sagesse consiste à bien distinguer le bon du mauvais.

Entre les choses, il y en a qui sont bonnes ; il y en a qui sont mauvaises, et d'autres qu'on peut regarder comme indifférentes.

Une chose est bonne relativement à la nature d'un être : une créature raisonnable ne peut être heureuse que par les objets analogues à la raison.

Ce qui est utîle et honnête est bon. La bonté ne se conçoit point séparée de l'utilité et de l'honnêteté.

L'utîle consiste à se conformer à la fin du tout dont on est partie ; à suivre la loi du principe qui commande.

La vertu est le vrai bien ; la chose vraiment utile. C'est-là que la nature parfaite nous invite.

Ce n'est point par des comparaisons de la vertu avec d'autres objets, par des discours, par des jugements que nous découvrons que la vertu est le bien. Nous le sentons. C'est un effet énergique de sa propre nature qui se développe en nous, malgré nous.

La sérénité, le plaisir et la joie sont les accessoires du bien.

Tout ce qui est opposé au bien est mal. Le mal est un écart de la raison générale du tout.

Les accessoires du mal sont les chagrins, la douleur, le trouble.

La vertu et ses accessoires constituent la félicité.

Il y a des biens présents ; il y en a de futurs. Des biens constants, des biens intermittens, de durables et de passagers ; des biens d'objets, de moyens, de fin, d'utilité, d'intérieurs, d'extérieurs, d'absolus, de relatifs, etc.

Le beau c'est la perfection du bien.

Tous les biens sont égaux. Il faut les désirer tous. Il n'en faut négliger aucun.

Il y a entre le bien ou l'honnête ; entre le mal ou le honteux, des choses intermédiaires qui ne peuvent ni contribuer au bonheur, ni y nuire. On peut ou les négliger, ou les rechercher sans conséquence.

Le sage est sévère ; il fuit les distractions ; il a l'esprit sain ; il ne souffre pas ; c'est un homme dieu ; c'est le seul vrai pontife ; il est prophète ; il n'opine point ; c'est le Cynique par excellence ; il est libre ; il est roi ; il peut gouverner un peuple ; il n'erre pas, il est innocent ; il n'a pitié de rien ; il n'est pas indulgent, il n'est point fait pour habiter un désert ; c'est un véritable ami ; il fait bien tout ce qu'il fait ; il n'est point ennemi de la volupté ; la vie lui est indifférente ; il est grand en tout ; c'est un économe intelligent ; il a la noblesse réelle ; personne n'entend mieux la médecine ; on ne le trompe jamais ; il ne trompe point ; c'est lui qui sait jouir de sa femme, de ses enfants, de la vie ; il ne calomnie pas ; on ne saurait l'exiler, etc.

Les Stoïciens à ces caractères en ajoutaient une infinité d'autres qui semblaient en être les contradictoires. Après les avoir regardés comme les meilleurs des hommes, on les eut pris pour les plus mécans. C'était une suite de leur apathie, de leur imitation stricte de la divinité, et des acceptions particulières des mots qu'ils employaient. La définition du stoïcien était toute semblable à celle que Vanini donnait de Dieu.

L'ame, semblable à un globe parfaitement rond, est uniforme ; elle n'est capable ni de compression, ni d'expansion.

Elle est libre ; elle fait ce qu'elle veut ; elle a sa propre énergie. Rien d'extérieur ne la touche, ni ne peut la contraindre.

Si on la considère relativement au tout, elle est sujette au destin ; elle ne peut agir autrement qu'elle agit ; elle suit le lien universel et sacré qui unit l'univers et ses parties.

Dieu est soumis au destin, pourquoi l'âme humaine, qui n'en est qu'une particule, en serait-elle affranchie ?

Aussi-tôt que l'image du bien l'a frappée, elle le désire.

Le principe qui se développe le premier dans un être animé, est celui de sa propre conservation.

S'il atteint ce qui est conforme à la nature, son bonheur commence.

Les désirs suivent la connaissance ou l'opinion des choses.

C'est de la connaissance de l'ordre universel, que dépend celle du vrai bien.

Si l'on présente à l'homme un bien convenable à sa nature, et qu'il s'y porte avec modération, il est sage et non passionné ; s'il en jouit paisiblement, il est serein et content ; s'il ne craint point de le perdre, il est tranquille, etc.

S'il se trompe sur la nature de l'objet ; s'il le poursuit avec trop d'ardeur ; s'il en craint la privation ; s'il en jouit avec transport ; s'il se trompe sur sa valeur ; s'il en est séduit ; s'il s'y attache, s'il aime la vie, il est pervers.

Les désirs fondés sur l'opinion, sont des sources de trouble. L'intempérance est une des sources les plus fécondes du trouble.

Le vice s'introduit par l'ignorance des choses qui font la vertu.

Il y a des vertus de théorie. Il y en a de pratique. Il y en a de premières. Il y en a de secondaires.

La prudence qui nous instruit de nos devoirs ; la tempérance qui règle nos appétits ; le courage qui nous apprend à supporter ; la justice qui nous apprend à distribuer, sont des vertus du premier ordre.

Il y a entre les vertus un lien qui les enchaine ; celui à qui il en manque une, n'en a point. Celui qui en possède bien une, les a toutes.

La vertu ne se montre pas seulement dans les discours ; mais on la voit aussi dans les actions.

Le milieu entre le vice et la vertu n'est rien.

On forme un homme à la vertu. Il y a des méchants qu'on peut rendre bons.

On est vertueux pour la vertu - même. Elle n'est fondée ni dans la crainte, ni dans l'espérance.

Les actions sont ou des devoirs, ou de la générosité ; ou des procédés indifférents.

La raison ne commande ni ne défend les procédés indifférents ; la nature ou la loi prisent les devoirs. La générosité immole l'intérêt personnel.

Il y a des devoirs relatifs à soi-même ; de relatifs au prochain, et de relatifs à Dieu.

Il importe de rendre à Dieu un culte raisonnable.

Celui-là a une juste opinion des dieux qui croit leur existence, leur bonté, leur providence.

Il faut les adorer avant tout, y penser, les invoquer, les reconnaître, s'y soumettre, leur abandonner sa vie, les louer même dans le malheur, etc.

L'apathie est le but de tout ce que l'homme se doit à lui-même. Celui qui y est arrivé est sage.

Le sage saura quand il lui convient de mourir ; il lui sera indifférent de recevoir la mort ou de se la donner. Il n'attendra point à l'extrémité pour user de ce remède. Il lui suffira de croire que le sort a changé.

Il cherchera l'obscurité.

Le soir il se rappellera sa journée. Il examinera ses actions. Il reviendra sur ses discours. Il s'avouera ses fautes. Il se proposera de faire mieux.

Son étude particulière sera celle de lui-même.

Il méprisera la vie et ses amusements ; il ne redoutera ni la douleur, ni la misere, ni la mort.

Il aimera ses semblables. Il aimera même ses ennemis.

Il ne fera d'injure à personne. Il étendra sa bienveillance sur tous.

Il vivra dans le monde, comme s'il n'y avait rien de propre.

Le témoignage de sa conscience sera le premier qu'il recherchera.

Toutes les fautes lui seront égales.

Soumis à tout événement, il regardera la commisération et la plupart des vertus de cet ordre, comme une sorte d'opposition à la volonté de Dieu.

Il jugera de même du repentir.

Il n'aura point ces vues de petite bienfaisance étroite, qui distingue un homme d'un autre. Il imitera la nature. Tous les hommes sont égaux à ses yeux.

S'il tend la main à celui qui fait naufrage, s'il console celui qui pleure, s'il reçoit celui qui manque d'asîle ; s'il donne la vie à celui qui périt ; s'il présente du pain à celui qui a faim, il ne sera point ému. Il gardera sa sérénité. Il ne permettra point au spectacle de la misere, d'altérer sa tranquillité. Il reconnaitra en tout la volonté de Dieu et le malheur des autres ; et dans son impuissance à les secourir, il sera content de tout, parce qu'il saura que rien ne peut être mal.

Des disciples et des successeurs de Zénon. Zénon eut pour disciples Philonide, Calippe, Possidonius, Zenode, Scion et Cléanthe.

Persée, Ariston, Herille, Denis, Spherus et Athénadore se sont fait un nom dans sa secte.

Nous allons parcourir rapidement ce qu'il peut y avoir de remarquable dans leurs vies et dans leurs opinions.

Persée était fils de Démétrius de Cettium. Il fut, disent les uns, l'ami de Zénon ; d'autres, un de ces esclaves qu'Antigone envoya dans son école, pour en copier les leçons. Il vivait aux environs de la cxxx. olympiade. Il était avancé en âge, lorsqu'il alla à la cour d'Antigone Gonatas. Son crédit auprès de ce prince fut tel, que la garde de l'Acro-Corinthe lui fut confiée. On sait que la sûreté de Corinthe et de tout le Péloponnèse dépendait de cette citadelle. Le philosophe répondit mal à l'axiome stoïque, qui disait qu'il n'y avait que le sage qui sache commander. Aratus de Sycione se présenta subitement devant l'Acro-Corinthe, et le surprit. Il empêcha Antigone de tenir à Menedeme d'Erétrie la parole qu'il lui avait donnée, de remettre les Erétriens en république ; il regardait les dieux comme les premiers inventeurs des choses utiles chez les peuples qui leur avaient élevé des autels. Il eut pour disciples Hermagoras d'Amphipolis.

Ariston de Chio était fils de Miltiade. Il était éloquent, et il n'en plaisait pas davantage à Zénon qui affectait un discours bref. Ariston qui aimait le plaisir, était d'ailleurs peu fait pour cette école sévère. Il profita d'une maladie de son maître pour le quitter. Il suivit Polémon, auquel il ne demeura pas longtemps attaché. Il eut l'ambition d'être chef de secte, et il s'établit dans le Cynosarge, où il assembla quelques auditeurs, qu'on appela de son nom les Aristoniens : mais bien-tôt son école fut méprisée et déserte. Ariston attaqua avec chaleur Arcesilaus, et la manière de philosopher académique et sceptique. Il innova plusieurs choses dans le Stoïcisme : il prétendait que l'étude de la nature était au-dessus de l'esprit humain ; que la Logique ne signifiait rien, et que la Morale était la seule science qui nous importât ; qu'il n'y avait pas autant de vertus différentes qu'on en comptait communément, mais qu'il ne fallait pas, comme Zénon, les réduire à une seule ; qu'il y avait entr'elles un lien commun ; que les dieux étaient sans intelligence et sans vie, et qu'il était impossible d'en déterminer la forme. Il mourut d'un coup de soleil qu'il reçut sur sa tête qui était chauve. Il eut pour disciple Eratosthene de Cyrene. Celui-ci fut grammairien, poète et philosophe. Il se distingua aussi parmi les Mathématiciens. La variété de ses connaissances lui mérita le nom de philologue, qu'il porta le premier, et les Ptolémées, Philopator et Epiphane lui confièrent le soin de la bibliothèque d'Alexandrie.

Persée ne fut pas le seul qui abandonna la secte de Zénon. On fait le même reproche à Denis d'Héraclée. On dit de celui-ci qu'il regarda la volupté comme la fin des actions humaines, et qu'il passa dans l'école cyrénaïque et épicurienne.

Hérille de Carthage n'eut pas une jeunesse fort innocente. Lorsqu'il se présenta pour disciple à Zénon, celui-ci exigea pour preuve de son changement de mœurs, qu'il se coupât les cheveux qu'il avait fort beaux. Hérille se rasa la tête, et fut reçu dans l'école stoïque. Il regarda la science et la vertu comme les véritables fins de l'homme, ajoutant qu'elles dépendaient quelquefois des circonstances, et que semblables à l'airain dont on fondait la statue d'Alexandre ou de Socrate, il en fallait changer selon les occasions ; qu'elles n'étaient pas les mêmes pour tous les hommes ; que le sage avait les sciences qui n'étaient pas celles du fou, etc.

Sphaerus le borysthénite, le second disciple de Zénon, enseigna la Philosophie à Lacédémone, et forma Cléomene. Il passa de Sparte à Alexandrie : il modifia le principe des Stoïciens, que le sage n'opinait jamais. Il disait à Ptolémée qu'il n'était roi, que parce qu'il en avait les qualités, sans lesquelles il cesserait de l'être. Il écrivit plusieurs traités que nous n'avons pas.

Cléanthès, né à Asse en Lycie, succéda à Zénon sous le Stoa. Il avait été d'abord athlete. Son extrême pauvreté lui fit apparemment goûter une philosophie qui prêchait le mépris des richesses. Il s'attacha d'abord à Cratès, qu'il quitta pour Zénon. Le jour il étudiait ; la nuit il se louait, pour tirer de l'eau dans les jardins. Les Aréopagistes, touchés de sa misere et de sa vertu, lui décernèrent dix mines sur le trésor public : Zénon n'était pas d'avis qu'il les acceptât. Un jour qu'il conduisait des jeunes-gens au spectacle, le vent lui enleva son manteau, et le laissa tout nud. La fortune et la nature l'avaient traité presqu'avec la même ingratitude. Il avait l'esprit lent : on l'appelait l'âne de Zénon, et il disait qu'on avait raison, car il portait seul toute la charge de ce philosophe. Antigone l'enrichit ; mais ce fut sans conséquence pour sa vertu. Cléanthès persista dans la pratique austère du Stoïcisme. La secte ne perdit rien sous lui de son éclat ; le portique fut plus fréquenté que jamais : il prêchait d'exemple la continence, la sobriété, la patience et le mépris des injures : il estimait les anciens philosophes de ce qu'ils avaient négligé les mots, pour s'attacher aux choses ; et c'était la raison qu'il donnait de ce que beaucoup moindres en nombre que de son temps, il y avait cependant parmi eux beaucoup plus d'hommes sages. Il mourut âgé de 80 ans : il fut attaqué d'un ulcère à la bouche, pour lequel les médecins lui ordonnèrent l'abstinence des aliments ; il passa deux jours sans manger ; ce régime lui réussit, mais on ne put le déterminer à reprendre les aliments. Il était, disait-il, trop près du terme pour revenir sur ses pas. On lui éleva, tard à la vérité, une très-belle statue.

Mais personne ne s'est fait plus de réputation parmi les Stoïciens que Chrysippe de Tarse. Il écouta Zénon et Cléanthès : il abandonna leur doctrine en plusieurs points. C'était un homme d'un esprit prompt et subtil. On le loue d'avoir pu composer jusqu'à cinq cent vers en un jour : mais parmi ces vers, y en avait-il beaucoup qu'on put louer ? L'estime qu'il faisait de lui-même n'était pas médiocre. Interrogé par quelqu'un qui avait un enfant, sur l'homme à qui il en fallait confier l'instruction : à moi, lui répondit-il ; car si je connaissais un précepteur qui valut mieux, je le prendrais pour moi. Il avait de la hauteur dans le caractère : il méprisa les honneurs. Il ne dédia point aux rois ses ouvrages, comme c'était la coutume de son temps. Son esprit ardent et porté à la contradiction lui fit des ennemis. Il éleva Carnéade, qui ne profita que trop bien de l'art malheureux de jeter des doutes. Chrysippe en devint lui-même la victime. Il parla librement des dieux : il expliquait la fable des amours de Jupiter et de Junon d'une manière aussi peu décente que religieuse. S'il est vrai qu'il approuvât l'inceste et qu'il conseillât d'user de la chair humaine en aliments, sa morale ne fut pas sans tache. Il laissa un nombre prodigieux d'ouvrages. Il mourut âgé de 83 ans : on lui éleva une statue dans le Céramique.

Zénon de Tarse, à qui Chrysippe transmit le portique, fit beaucoup de disciples et peu d'ouvrages.

Diogène le babylonien eut pour maîtres Chrysippe et Zénon. Il accompagna Critolaus et Carnéade à Rome. Un jour qu'il parlait de la colere, un jeune étourdi lui cracha au visage, et la tranquillité du philosophe ne démentit pas son discours. Il mourut âgé de 98 ans.

Antipater de Tarse avait été disciple de Diogène, et il lui succéda. Ce fut un des antagonistes les plus redoutables de Carnéade.

Panaetius de Rhodes laissa les armes auxquelles il était appelé par sa naissance, pour suivre son goût et se livrer à la Philosophie. Il fut estimé de Cicéron, qui l'introduisit dans la familiarité de Scipion et de Laelius. Panaetius fut plus attaché à la pratique du Stoïcisme qu'à ses dogmes. Il estimait les philosophes qui avaient précédé, mais surtout Platon, qu'il appelait leur Homère. Il vécut longtemps à Rome, mais il mourut à Athènes. Il eut pour disciples des hommes du premier mérite, Mnesarque, Possidonius, Laelius, Scipion, Fannius, Hécaton, Apollonius, Polybe. Il rejetait la divination de Zénon : écrivit des offices ; il s'occupa de l'histoire des sectes. Il ne nous reste aucun de ses ouvrages.

Possidonius d'Apamée exerça à Rhodes les fonctions de magistrat et de philosophe ; et au sortir de l'école, il s'asseyait sur le tribunal des lois, sans qu'on l'y trouvât déplacé. Pompée le visita. Possidonius était alors tourmenté de la goutte. La douleur ne l'empêcha point d'entretenir le général romain. Il traita en sa présence la question du bon et de l'honnête. Il écrivit différents ouvrages. On lui attribue l'invention d'une sphère artificielle, qui imitait les mouvements du système planétaire : il mourut fort âgé. Cicéron en parle comme d'un homme qu'il avait entendu.

Jason, neveu de Possidonius, professa le Stoïcisme à Rhodes, après la mort de son oncle.

Voyez à l'article de la PHILOSOPHIE DES ROMAINS l'histoire des progrès de la secte dans cette ville sous la république et sous les empereurs.

Des femmes eurent aussi le courage d'embrasser le Stoïcisme, et de se distinguer dans cette école par la pratique de ses vertus austères.

La secte stoïcienne fut le dernier rameau de la secte de Socrate.

Des restaurateurs de la Philosophie stoïcienne parmi les modernes. Les principaux d'entr'eux ont été Juste-Lipse, Scioppius, Heinsius et Gataker.

Juste-Lipse naquit dans le courant de 1447. Il fit ses premières études à Bruxelles, d'où il alla perdre deux ans ailleurs. Il étudia la Scholastique chez les jésuites ; le goût de l'éloquence et des questions grammaticales l'entrainèrent d'abord ; mais Tacite et Séneque ne tardèrent pas à le détacher de Donat et de Cicéron. Il fut tenté de se faire jésuite ; mais ses parents qui n'approuvaient pas ce dessein, l'envoyèrent à Louvain où sa vocation se perdit. Là il se livra tout entier à la Littérature ancienne et à la Jurisprudence. Il se lia sous Corneille Valere, leur maître commun, à Delrio, Giselin, Lermet, Shott, et d'autres qui se sont illustrés par leurs connaissances. Il écrivit de bonne heure. Il n'avait que dix-neuf ans, lorsqu'il publia ses livres de variis lectionibus : il les dédia au cardinal Perrenot de Granvelle, qui l'aima et le protégea. A Rome, il se plongea dans l'étude des antiquités : il y connut Manuce, Mercurialis et Muret. De retour de l'Italie en Flandres, il s'abandonna au plaisir, et il ne parut pas se ressouvenir beaucoup de son Epictete : mais cet écart de jeunesse, bien pardonnable à un homme qui était resté si jeune sans père, sans mère, sans parents, sans tuteurs, ne dura pas. Il revint à l'étude et à la vertu. Il voyagea en France et en Allemagne, en Saxe, en Bohème, satisfaisant par-tout sa passion pour les sciences et pour les savants. Il s'arrêta quelque temps en Allemagne, où le mauvais état de sa fortune, qui avait disparu au milieu des ravages de la guerre allumée dans son pays, le détermina à abjurer le Catholicisme, pour obtenir une chaire de professeur chez des Luthériens. Au fond, indifférent en fait de religion, il n'était ni catholique, ni luthérien. Il se maria à Cologne. Il s'éloigna de cette ville pour aller chercher un asîle où il put vivre dans le repos et la solitude ; mais il fut obligé de préférer la sécurité à ces avantages et de se réfugier à Louvain, où il prit le bonnet de docteur en droit. Cet état lui promettait de l'aisance : mais la guerre semblait le suivre par-tout ; elle le contraignit d'aller ailleurs enseigner parmi les Protestants la Jurisprudence et la Politique. Ce fut là qu'il prétendit qu'il ne fallait dans un état qu'une religion, et qu'il fallait pendre, bruler, massacrer ceux qui refusaient de se conformer au culte public : quelle morale à débiter parmi des hommes qui venaient d'exposer leurs femmes, leurs enfants, leur pays, leurs fortunes, leur vie, pour s'assurer la liberté de la conscience, et dont la terre fumait encore du sang que l'intolérance espagnole avait répandu ! On écrivit avec chaleur contre Juste-Lipse. Il devint odieux : il médita de se retirer de la Hollande. Sa femme superstitieuse le pressait de changer de religion ; les jésuites l'investissaient : il augurait mal du succès de la guerre des Provinces-Unies. Il simula une maladie : il alla à Spa ; il passa quelques années à Liege, et de-là il vint à Cologne, où il rentra dans le sein du Catholicisme. Cette inconstance ne nuisit pas autant à sa considération qu'à sa tranquillité. Les jésuites, amis aussi chauds qu'ennemis dangereux, le préconisèrent. Il fut appelé par des villes, par des provinces, par des souverains. L'ambition n'était certainement pas son défaut : il se refusa aux propositions les plus avantageuses et les plus honorables. Il mourut à Louvain en 1606, âgé de 58 ans. Il avait beaucoup souffert, et beaucoup travaillé ; son érudition était profonde : il n'était presqu'aucune science dans laquelle il ne fût versé ; il avait des lettres, de la critique et de la philosophie. Les langues anciennes et modernes lui étaient familières. Il avait étudié la Jurisprudence et les Antiquités. Il était grand moraliste ; il s'était fait un style particulier, sententieux, bref, concis et serré. Il avait reçu de la nature de la vivacité, de la chaleur, de la sagacité, de la justesse même, de l'imagination, de l'opiniâtreté et de la mémoire. Il avait embrassé le Stoïcisme ; il détestait la philosophie des écoles. Il ne dépendit pas de lui qu'elle ne s'améliorât. Il écrivit de la politique et de la morale ; et quoiqu'il ait laissé un assez grand nombre d'ouvrages, qu'ils aient presque tous été composés dans les embarras d'une vie tumultueuse, il n'y en a pas un qu'on lise sans quelque fruit : sa physiologie stoïcienne, son traité de la constance, ses politiques, ses observations sur Tacite ne sont pas les moins estimés : il eut des mœurs, de la douceur, de l'humanité, assez peu de religion. Il y a dans sa vie plus d'imprudence que de méchanceté : ses apostasies continuelles sont les suites naturelles de ses principes.

Gaspard Scioppius, dont on a dit tant de bien et de mal, marcha sur les pas de Juste-Lipse. Il publia des éléments de la philosophie stoïcienne ; ce n'est guère qu'un abrégé de ce qu'on savait avant lui.

Daniel Heinsius a fait le contraire de Scioppius. Celui - ci a délayé dans une oraison de philosophiâ stoicâ ce que Scioppius avait resserré.

Gataker s'est montré fort supérieur à l'un et à l'autre dans son commentaire sur l'ouvrage de l'empereur Antonin. On y retrouve par-tout un homme profond dans la connaissance des orateurs, des poètes et des philosophes anciens : mais il a ses préjugés. Il voit souvent Jesus-Christ, S. Paul, les évangélistes, les pères sous le portique, et il ne tient pas à lui qu'on ne les prenne pour des disciples de Zénon. Dacier n'était pas éloigné des idées de Gataker.




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