S. f. (Métaphysique) Nécessité, c'est en général ce qui rend le contraire d'une chose impossible, quelle que soit la cause de cette impossibilité. Or, comme l'impossibilité ne vient pas toujours de la même source, la nécessité n'est pas non plus partout la même. On peut considérer les choses, ou absolument en elles-mêmes, et en ne faisant attention qu'à leur essence ; ou bien on peut les envisager sous quelque condition donnée qui, outre l'essence, suppose d'autres déterminations qui ne sont pas un résultat inséparable de l'essence, mais aussi qui ne lui répugnent point. De ce double point de vue résulte une double nécessité ; l'une absolue, dont le contraire implique contradiction en vertu de l'essence même du sujet ; l'autre hypothétique, qui ne fonde l'impossibilité que sur une certaine condition. Il est absolument nécessaire que le parallélograme ait quatre côtés, et qu'il soit divisible par la diagonale en deux parties égales : le contraire implique en tout temps, aucune condition ne saurait le rendre possible. Mais si ce parallélograme est tracé sur du papier, il est hypothétiquement nécessaire qu'il soit tracé, la condition requise pour cet effet ayant eu lieu : cependant il n'impliquerait pas qu'il eut été tracé sur du parchemin, ou même qu'il ne l'eut point été du-tout. La certitude, l'infaillibilité de l'événement suivent de la nécessité hypothétique, tout comme de la nécessité absolue.

On confond d'ordinaire la nécessité avec la contrainte : néanmoins la nécessité d'être homme n'est point en Dieu une contrainte, mais une perfection. En effet la nécessité, selon M. de la Rochefoucault, diffère de la contrainte, en ce que la première est accompagnée du plaisir et du penchant de la volonté, et que la contrainte leur est opposée. On distingue encore dans l'école, nécessité physique et nécessité morale, nécessité simple et nécessité relative.

La Nécessité physique est le défaut de principes ou de moyens naturels nécessaires à un acte, on l'appelle autrement impuissance physique ou naturelle.

Nécessité morale signifie seulement une grande difficulté, comme celle de se défaire d'une longue habitude. Ainsi on nomme moralement nécessaire ce dont le contraire est moralement impossible, c'est-à-dire, sauf la rectitude de l'action ; au lieu que la nécessité physique est fondée sur les facultés et sur les forces du corps. Un enfant, par exemple, ne saurait lever un poids de deux cent livres, cela est physiquement impossible ; au lieu que la nécessité morale n'empêche point qu'on ne puisse agir physiquement d'une manière contraire. Elle n'est déterminée que par les idées de la rectitude des actions. Un homme à son aise entend les gémissements d'un pauvre qui implore son assistance. Si le riche a l'idée de la bonne action qu'il fera en lui donnant l'aumône, je dis qu'il est moralement impossible qu'il la lui refuse, ou moralement nécessaire qu'il la lui donne.

Nécessité simple est celle qui ne dépend point d'un certain état, d'une conjoncture, ou d'une situation particulière des choses, mais qui a lieu par-tout et dans toutes les circonstances dans lesquelles un agent peut se trouver. Ainsi c'est une nécessité pour un aveugle de ne pouvoir distinguer les couleurs.

Nécessité relative est celle qui met un homme dans l'incapacité d'agir ou de ne pas agir en certaines circonstances ou situations dans lesquelles il se trouve, quoiqu'il fût capable d'agir ou de ne pas agir dans une situation différente.

Telle est, dans le système des Jansénistes, la nécessité où se trouve un homme de faire le mal lorsqu'il n'a qu'une faible grâce pour y résister, ou la nécessité de faire le bien dans un homme qui, ayant sept ou huit degrés de grâce, n'en a que deux ou trois de concupiscence.

NECESSITE, (Mythologie) divinité allégorique qui tenait tout l'univers, les dieux, et Jupiter même asservis sous son empire. De-là vient qu'elle est souvent prise chez les poètes pour le destin à qui tout obéit ; c'est en ce sens qu'ils ont dit que les Parques étaient les filles de la fatale Nécessité. Pausanias rapporte qu'il y avait dans la citadelle de Corinthe un petit temple dédié à la Nécessité et à la Violence, dans lequel il n'était permis à personne d'entrer qu'aux prêtres de ces déesses. On représentait la Nécessité accompagnée de la fortune, ayant des mains de bronze dans lesquelles elle tenait des chevilles et des coins. (D.J.)