S. f. (Grammaire et Philosophie morale) c'est l'effet de l'impression d'un objet présent à nos sens ou à notre réflexion, en conséquence de laquelle nous sommes portés tout entiers vers cet objet comme vers un bien dont nous avons la connaissance, et qui excite notre appétit, ou nous en sommes éloignés comme d'un mal que nous connaissons aussi, et qui excite notre crainte et notre aversion. Aussi il y a toujours un objet dans l'action de la volonté ; car quand on veut, on veut quelque chose ; de l'attention à cet objet, une crainte ou un désir excité. De-là vient que nous prenons à tout moment la volonté pour la liberté. Si l'on pouvait supposer cent mille hommes tous absolument conditionnés de même, et qu'on leur présentât un même objet de désir ou d'aversion, ils le désireraient tous et tous de la même manière, ou le rejetteraient tous, et tous de la même manière. Il n'y a nulle différence entre la volonté des fous et des hommes dans leur bon sens, de l'homme qui veille et de l'homme qui rêve, du malade qui a la fièvre chaude et de l'homme qui jouit de la plus parfaite santé, de l'homme tranquille et de l'homme passionné, de celui qu'on traine au supplice ou de celui qui y marche intrépidement. Ils sont tous également emportés tout entiers par l'impression d'un objet qui les attire ou qui les repousse. S'ils veulent subitement le contraire de ce qu'ils voulaient, c'est qu'il est tombé un atome sur le bras de la balance, qui l'a fait pancher du côté opposé. On ne sait ce qu'on veut lorsque les deux bras sont à-peu-près également chargés. Si l'on pese bien ces considérations, on sentira combien il est difficîle de se faire une notion quelconque de la liberté, surtout dans un enchainement de causes et des effets, tels que celui dont nous faisons partie.

VOLONTE en Dieu, (Théologie) c'est l'attribut par lequel Dieu veut quelque chose.

Quoique cette volonté soit en Dieu, comme son entendement, un acte très-simple, et qui n'est pas distingué de la nature divine, cependant proportionnellement aux différents objets vers lesquels se porte cette volonté, et pour s'accommoder à notre manière de concevoir, les théologiens distinguent en Dieu diverses sortes de volontés.

Ils la divisent donc en volonté de signe et volonté de bon plaisir, volonté antécédente et volonté conséquente, volonté efficace et volonté inefficace, volonté absolue et volonté conditionnée.

Ils appellent volonté de signe celle que Dieu nous fait connaître par quelque signe extérieur, comme les conseils, les préceptes qu'on appelle par métaphore la volonté de Dieu. Aussi convient-on généralement que cette volonté n'est que métaphorique. Les théologiens en distinguent cinq espèces, savoir le précepte, la prohibition, la permission, le conseil et l'opération : ce qu'ils expriment par ce vers technique :

Praecipit et prohibet, permittit, consulit, implet.

La volonté de bon plaisir est une volonté intérieure et réelle qui réside en Dieu. C'est celle dont l'apôtre a dit : ut probetis quae sit voluntas Dei bona et beneplacens et perfecta. Rom. XIIe Ve 2. La volonté de bon plaisir est toujours jointe à celle de signe dans ce que Dieu opère ; elle y est quelquefois jointe, et quelquefois elle en est séparée dans ce qu'il commande, conseille ou défend ; mais elle n'y est jamais unie dans ce qu'il permet quant au péché ; car ce serait un blasphême que de dire que Dieu veut intérieurement et réellement qu'on commette le péché.

La volonté de bon plaisir se divise en volonté antécédente et volonté conséquente. Par volonté antécédente on entend celle qui considère un objet en lui-même, abstraction faite des circonstances particulières et personnelles ; on l'appelle ordinairement volonté de bonté et de miséricorde. La volonté conséquente est celle qui considère son objet accompagné et revêtu de toutes ses circonstances tant générales que particulières. On la nomme aussi volonté de justice. On trouve cette distinction dans S. Chrysostome, homel. 1. sur l'épitre aux Ephésiens ; dans S. Jean Damascène, lib. II. de fid. orthodox. cap. xxix. et plus expressément encore dans S. Thomas, part. I. quaest. XIX. art. 6, respons. ad 1.

La volonté efficace en Dieu est celle qui a toujours son effet. La volonté inefficace est celle qui est privée de son effet par la résistance de l'homme.

Enfin par volonté absolue on entend celle qui ne dépend d'aucune condition, mais uniquement des decrets libres de Dieu, telle qu'a été la volonté de créer le monde ; et par volonté conditionnée l'on entend celle qui dépend d'une condition ; telle est la volonté de sauver tous les hommes, pourvu qu'eux-mêmes veuillent coopérer à la grâce, et observer les commandements de Dieu.

Que Dieu veuille sauver tous les hommes, c'est une vérité de foi clairement exprimée dans les Ecritures ; mais de quelle volonté le veut-il ? C'est un point sur lequel ont erré divers hérétiques, et qui partage extrêmement les théologiens.

Les Pélagiens et les semi-Pélagiens ont prétendu que Dieu voulait sauver indifféremment tous les hommes, sans prédilection particulière pour les élus, et qu'en conséquence Jesus-Christ avait versé son sang pour tous les hommes également. Les Prédestinatiens au contraire ont avancé que Jesus-Christ n'était mort que pour les élus, et que Dieu ne voulait sincèrement le salut que des seuls prédestinés. Calvin a soutenu la même erreur, et Jansénius l'a imité, quoique d'une manière plus captieuse et plus enveloppée ; car il reconnait que Dieu veut le salut de tous les hommes, en ce sens que nul n'est sauvé que par sa volonté, ou que le mot tous se doit entendre de plusieurs, d'un grand nombre, ou enfin parce qu'il leur inspire le désir et la volonté de se sauver. Mais toutes ces explications sont insuffisantes. Le véritable nœud de la difficulté est de savoir si Dieu prépare ou confère sincèrement à tous les hommes des grâces vraiment suffisantes pour opérer leur salut ; et c'est ce que Jansénius et ses disciples refusent de reconnaître.

Parmi les théologiens quelques-uns, comme Hugues de Saint-Victor, Robert Pullus, etc. disent que la volonté de Dieu pour le salut de tous les hommes, n'est qu'une volonté de signe, parce qu'ils n'admettent en Dieu de volonté vraie et réelle que celle qui est efficace, et qu'il est de fait que tous les hommes ne se sauvent pas ; mais d'un autre côté, ils reconnaissent qu'en conséquence de cette volonté de signe, Dieu donne aux hommes des grâces vraiment suffisantes.

D'autres, comme S. Bonaventure et Scot, admettent en Dieu une volonté antécédente, vraie, réelle et de bon plaisir pour le salut de tous les hommes ; mais, selon eux, elle n'a pour objet que les grâces vraiment suffisantes qui précèdent le salut ; et c'est pour cela qu'ils la nomment volonté antécédente.

Sylvius, Estius, Bannez, etc. enseignent que cette volonté antécédente pour le salut de tous les hommes n'est pas proprement et formellement en Dieu, mais seulement virtuellement et éminemment, parce que Dieu est une source infinie de bonté et de miséricorde, et qu'il offre à tous les hommes des moyens généraux et suffisans de salut.

Aureolus, Suarez et d'autres expliquent cette volonté antécédente d'un amour de complaisance en Dieu pour le salut de tous les hommes, amour nécessaire et actif, qui leur prépare des grâces avec lesquelles ils se sauveraient s'ils en usaient bien.

Vasquez distingue entre les adultes et les enfants. Il prétend que Dieu veut d'une volonté antécédente et sincère le salut des premiers, mais qu'on ne peut pas dire la même chose des enfants qui meurent dans le sein de leur mère, et auxquels on n'a pas pu conférer le baptême.

Enfin Lemos, Alvarès, Gamache, Isambert, Duval, Bellarmin, Tournely et la plupart des théologiens modernes pensent que Dieu veut d'une volonté antécédente, vraie, réelle et formelle le salut de tous les hommes, même des reprouvés et des enfants qui meurent sans baptême, et qu'il leur prépare, leur offre ou leur confère des moyens suffisans de salut, et que Jesus Christ est mort et a répandu son sang pour le salut d'autres que des prédestinés.

On convient cependant généralement que Dieu ne veut d'une volonté conséquente le salut que des seuls élus, et que c'est aussi d'une volonté absolue, conséquente et efficace, que Jesus-Christ est mort pour le salut des prédestinés ; car, comme le dit expressément le concîle de Trente, sess. V. c. IIIe quoique le Sauveur du monde soit mort pour tous, tous néanmoins ne reçoivent pas le bienfait de sa mort.

VOLONTE dernière, (Jurisprudence) est une disposition faite en vue de la mort, et que celui qui dispose, regarde comme la dernière qu'il fera, quoiqu'il puisse arriver qu'il en change : les actes de dernière volonté, sont les testaments et codicilles, les partages des pères entre leurs enfants. Voyez CODICILLE, TESTAMENT, PARTAGE. (A)