S. m. (Physique) une agitation sensible dans l'air, par laquelle une quantité considérable d'air est poussée d'un lieu dans un autre.

Les vents sont divisés en permanens, réglés, et variables, en généraux et particuliers.

Les vents permanens ou constants, sont ceux qui soufflent toujours du même côté ; il y a un de ces vents extrêmement remarquable entre les tropiques, lequel souffle constamment de l'est à l'ouest, et qu'on appelle vent général alisé. Voyez ALISE.

Les vents réglés ou périodiques, sont ceux qui reviennent constamment dans de certains temps. Tels sont les vents de terre et de mer qui soufflent de la terre à la mer sur le soir, et de la mer à la terre le matin. Tels sont encore les vents alisés, changeants et particuliers, qui dans certains mois de l'année soufflent d'un côté, et qui soufflent du côté opposé dans les autres mois. Par exemple, les vents appelés moussons, qui sont sud est depuis Octobre jusqu'en Mai, et nord ouest depuis Mai jusqu'en Octobre, entre la côte de Zanguebar et l'île de Madagascar. Voyez MOUSSON.

Les vents variables, sont ceux qui soufflent, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, et qui commencent ou cessent sans aucune règle, soit par rapport aux lieux, soit par rapport aux temps. Tels sont les vents observés dans l'intérieur de l'Angleterre, quoique quelques-uns paraissent suivre certaines heures, comme le vent d'ouest qui est assez fréquent sur le soir, le vent du sud dans la nuit, et le vent du nord le matin. Voyez TEMS.

Le vent général est celui qui souffle dans le même temps et du même côté, sur une partie considérable de la terre et pendant la plus grande partie de l'année. Il n'y a de vent à qui on donne ce nom, que le vent général alisé.

Ce vent a cependant des interruptions car 1°. dans les terres on ne s'en aperçoit presque pas, à cause qu'il est rompu par les montagnes, etc. 2°. en mer auprès des côtes, il est aussi détourné par les vapeurs, les exhalaisons et les vents particuliers qui viennent de terre ; en sorte qu'on ne le peut guère regarder comme général, qu'en pleine mer ; 3°. et en pleine mer même, il est sujet à être altéré par les nuages poussés des autres régions.

Les vents particuliers renferment tous les autres, excepté les vents généraux alisés.

Les vents particuliers d'un petit canton sont appelés vents topiques, tel est le vent du nord au côté occidental des Alpes, qui ne s'étend que sur environ deux lieues de long et beaucoup moins en largeur.

L'histoire des vents est assez bien connue par les soins de plusieurs physiciens qui ont voyagé ou qui se sont appliqués dans leur pays pendant plusieurs années à la connaissance de ce méteore. M. Muschenbroèck a donné sur ce sujet une dissertation fort curieuse à la fin de ses Essais de physique ; où il fait entrer non seulement tout ce qu'il a observé lui-même, mais encore tout ce qu'il a pu recueillir des écrits de M. Halley, de M. Derham, etc. mais il s'en faut bien que nous soyons autant instruits touchant les causes ; j'entends les plus éloignées, celles qui occasionnent les premiers mouvements dans l'athmosphère : car on sait en général que les vents viennent immédiatement d'un défaut d'équilibre dans l'air, c'est-à-dire de ce que certaines parties se trouvant avoir plus de force que les parties voisines, s'étendent du côté où elles trouvent moins de résistance. Mais quelle est la cause qui produit ce défaut d'équilibre ; c'est ce qu'on ne sait encore que très-imparfaitement : nous allons cependant rapporter les principales opinions des Philosophes sur cette matière.

Cause physique des vents. Quelques philosophes, comme Descartes, Rohault, rapportent le vent général au mouvement de rotation de la terre, et tirent tous les vents particuliers de ce vent général. L'athmosphère, disent ils, enveloppe la terre et tourne autour d'elle, mais elle se meut moins vite que la terre ; de sorte que les points de la terre qui sont, par exemple, situés sous l'équateur, se meuvent plus vite d'occident en orient, que la colonne d'air qui est au-dessus. C'est pourquoi ceux qui habitent ce grand cercle doivent sentir continuellement une espèce de résistance dans l'athmosphère, comme si l'athmosphère se mouvait à leur égard d'orient en occident.

Ce qui semble confirmer cette hypothèse, c'est que les vents généraux n'ont guère lieu qu'entre les tropiques, c'est-à dire dans les latitudes où le mouvement diurne est le plus prompt.

Mais on en voit aisément l'insuffisance par les calmes constants de la mer Atlantique vers l'équateur, par les vents d'ouest qui soufflent à la côte de Guinée, et les moussons d'ouest périodiques dans la mer des Indes sous l'équateur.

D'ailleurs, l'air étant adhérent à la terre par la force de la gravité, a dû avec le temps acquérir la même vitesse que celle de la surface de la terre, tant à l'égard de la rotation diurne, qu'à l'égard du mouvement annuel autour du soleil qui est environ trente fois plus considérable. En effet, si la couche d'air voisine de nous se mouvait autour de l'axe de la terre avec moins de vitesse, que la surface du globe qui lui est contiguè, le frottement continuel de cette couche contre la surface du globe terrestre, l'obligerait bientôt à faire sa rotation en même temps que le globe ; par la même raison la couche voisine de celle-ci en serait entrainée, et obligée à faire sa rotation dans le même temps ; de sorte que la terre et son athmosphère parviendrait fort promptement à faire leur rotation dans le même temps autour de leur axe commun, comme si l'un et l'autre ne faisaient qu'un seul corps solide ; par conséquent, il n'y aurait plus alors de vents alisés.

C'est ce qui a engagé le docteur Halley à chercher une autre cause qui fût capable de produire un effet constant, et qui ne donnant point de prise aux mêmes objections, s'accordât avec les propriétés connues de l'eau et de l'air, et avec les lois du mouvement des fluides. M. Halley a cherché cette cause, tant dans l'action des rayons du soleil sur l'air et sur l'eau, pendant le passage continuel de cet astre sur l'Océan, que dans la nature du sol et la situation des continens voisins. Voici une idée générale de son explication.

Suivant les lois de la statique, l'air qui est le moins rarefié par la chaleur et qui est conséquemment le plus pesant, doit avoir un mouvement vers celui qui est plus rarefié, et par conséquent plus léger : or, quand le soleil parcourt la terre par son mouvement diurne apparent, ou plutôt quand la terre tourne sur son axe, et présente successivement toutes ses parties au soleil, l'hémisphère oriental sur lequel le soleil a déjà passé, contient un air plus chaud et plus rarefié que l'hémisphère occidental ; c'est pourquoi cet air plus rarefié doit en se dilatant, pousser vers l'occident l'air qui le précède, ce qui produit un vent d'est.

C'est ainsi que le vent général d'orient en occident peut être formé dans l'air sur le grand Océan. Les particules de l'air agissant les unes sur les autres, s'entretiennent en mouvement jusqu'au retour du soleil, qui leur rend tout le mouvement qu'elles pouvaient avoir perdu, et produit ainsi la continuité de ce vent d'est.

Par le même principe, il s'ensuit que ce vent d'est doit tourner vers le nord dans les lieux qui sont au septentrion de l'équateur, et tourner au contraire vers le sud dans les lieux qui sont plus méridionaux que l'équateur ; car près de la ligne l'air est beaucoup plus rarefié qu'à une plus grande distance, à cause que le soleil y donne à plomb deux fois l'année, et qu'il ne s'éloigne jamais du zénith de plus de 23 degrés ; et à cette distance, la chaleur qui est comme le carré du sinus de l'angle d'incidence n'est guère moindre, que lorsque les rayons sont verticaux. Au lieu que sous les tropiques, quoique le soleil y frappe plus longtemps verticalement, il y est un temps considérable à 47 degrés de distance du zénith, ce qui fait une sorte d'hiver dans lequel l'air se refroidit assez pour que la chaleur de l'été ne puisse pas lui donner le même degré de mouvement que sous l'équateur ; c'est pourquoi l'air qui est vers le nord et vers le sud étant moins rarefié, que celui qui est au milieu, il s'ensuit que des deux côtés, l'air doit tendre vers l'équateur. Voyez CHALEUR.

La combinaison de ce mouvement avec le premier vent général d'est, suffit pour rendre raison des phénomènes des vents généraux alisés, lesquels souffleraient sans cesse et de la même manière, autour de notre globe, si toute sa surface était couverte d'eau comme l'Océan atlantique et éthiopique. Mais comme la mer est entrecoupée par de grands continens, il faut avoir égard à la nature du sol et à la position des hautes montagnes. Car ce sont les deux principales causes qui peuvent altérer les règles générales des vents. Il suffit, par exemple, qu'un terrain soit plat, bas, sablonneux, tels qu'on nous rapporte que sont les déserts de Libye, pour que les rayons du soleil s'y mêlent et échauffent l'air d'une manière si prodigieuse, qu'il se fasse continuellement un courant d'air, c'est-à-dire, un vent de ce côté là.

On peut rapporter à cette cause, par exemple, le vent des côtes de Guinée, qui porte toujours vers la terre, et qui est ouest au lieu d'être est ; car on imagine bien quelle doit être la chaleur prodigieuse de l'intérieur de l'Afrique, puisque les seules parties septentrionales sont d'une chaleur si considérable, que les anciens avaient cru que tout l'espace renfermé entre les tropiques ne pouvait pas être habité. Voyez ZONE et TORRIDE.

Il ne sera pas plus difficîle d'expliquer les calmes constants qui règnent dans certaines parties de l'Océan atlantique vers le milieu ; car dans cet espace qui est également exposé aux vents d'ouest vers la côte de Guinée, et aux vents alisés d'est, l'air n'a pas plus de tendance d'un côté que de l'autre, et est par conséquent en équilibre. Quant aux pluies qui sont fréquentes dans ces mêmes lieux, elles sont encore aisées à expliquer, à cause que l'athmosphère diminuant de poids par l'opposition qui est entre les vents, l'air ne saurait retenir les vapeurs qu'il reçoit. Voyez PLUIE.

Comme l'air froid et dense doit à cause de son excès de pesanteur presser l'air chaud et raréfié, ce dernier doit s'élever par un courant continuel et proportionnel à sa raréfaction ; et après s'être ainsi élevé, il doit pour arriver à l'équilibre, se répandre et former un courant contraire ; en sorte que par une sorte de circulation le vent alisé de nord-est doit être suivi d'un vent de sud-ouest. Voyez COURANT, COURANT INFERIEUR, etc.

Les changements instantanés d'une direction à celle qui lui est opposée, qu'on voit arriver dans le vent lorsqu'on est dans les limites des vents alisés, semblent nous assurer que l'hypothèse précédente n'est pas une simple conjecture ; mais ce qui confirme le plus cette hypothèse, c'est le phénomène des moussons qu'elle explique aisément, et qu'on ne saurait guère comment expliquer sans son secours. Voyez MOUSSONS.

Supposant donc la circulation dont nous venons de parler, il faut considérer que les terres qui touchent de tous les côtés à la mer septentrionale des Indes, telles que l'Arabie, la Perse, l'Inde, etc. sont pour la plupart au-dessous de la latitude de 30d., et que dans ces terres, ainsi que dans celles de l'Afrique, qui sont voisines de la Méditerranée, il doit y avoir des chaleurs excessives, lorsque le soleil est dans le tropique du cancer ; qu'au contraire l'air doit y être assez tempéré lorsque le soleil s'approche de l'autre tropique, et que les montagnes voisines des côtes sont, suivant qu'on le rapporte, couvertes de neige, et capables par conséquent de refroidir considérablement l'air qui y passe. Or de-là il suit que l'air qui vient, suivant la règle générale du nord-est à la mer des Indes, est quelquefois plus chaud, et quelquefois plus froid que celui qui par cette circulation retourne au sud-ouest, et par conséquent il doit arriver tantôt que le vent, ou courant inférieur, vienne du nord-est, et tantôt du sud-ouest.

Les temps où les moussons soufflent, font voir suffisamment qu'ils ne sauraient avoir d'autre cause, que celle qu'on vient d'exposer ; car en Avril lorsque le soleil commence à réchauffer ces contrées vers le nord, les moussons sud-ouest se lèvent et durent tout le temps de la chaleur, c'est-à-dire, jusqu'en Octobre ; le soleil s'étant alors retiré, et l'air se refroidissant dans les parties du nord, tandis qu'il s'échauffe dans les parties du sud, les vents de nord est commencent et soufflent pendant tout l'hiver jusqu'au retour du printemps ; et c'est sans-doute par la même raison, que dans les parties australes de la mer des Indes, les vents de nord-ouest succédent à ceux de sud-est, lorsque le soleil approche du tropique du capricorne. Voyez MAREE.

Voilà l'idée générale de l'explication de M. Halley ; quelque ingénieuse qu'elle sait, il semble qu'elle est un peu vague, et qu'elle manque de cette précision nécessaire pour porter dans l'esprit une lumière parfaite ; cependant la plupart des physiciens l'ont adoptée ; mais ces savants ne paraissent pas avoir pensé à une autre cause générale des vents, qui pourrait être aussi considérable que celle qui provient de la chaleur des différentes parties de l'athmosphère. Cette cause est la gravitation de la terre et de son athmosphère vers le soleil et vers la lune, gravitation qui produit le flux et reflux de la mer, comme tous les Philosophes en conviennent aujourd'hui, et qui doit produire aussi nécessairement dans l'athmosphère un flux et reflux continuel.

Cette hypothèse ou cette explication de la cause des vents généraux a cet avantage sur celle de M. Halley, qu'elle donne le moyen de calculer assez exactement la vitesse et la direction du vent, et par conséquent de s'assurer si les phénomènes répondent aux effets que le calcul indique : au lieu que l'explication de M. Halley ne peut donner que des raisons fort générales des différents phénomènes des vents, &, comme nous l'avons déjà dit, assez vagues. Car, quoiqu'on ne puisse nier que la différente chaleur des parties de l'athmosphère ne doive y exciter des mouvements, c'est à-peu-près à quoi se bornent nos connaissances sur ce sujet. Il parait difficîle de démontrer en rigueur de quel côté ces mouvements doivent être dirigés.

Au contraire, si on calcule dans l'hypothèse de la gravitation les mouvements qui doivent être excités dans l'athmosphère par l'action du soleil et de la lune, on trouve que cette action doit produire sous l'équateur un vent d'est perpétuel ; que ce vent doit se changer en vent d'ouest dans les zones tempérées, à quelque distance des tropiques ; que ce vent doit changer de direction selon le plus ou le moins de profondeur des eaux de la mer ; que les changements qu'il produit dans le baromètre doivent être peu considérables, etc. Nous ne pouvons donner ici que les résultats généraux que le calcul donne sur ce sujet ; ceux qui voudront en savoir davantage, pourront avoir recours à quelques dissertations où cette matière a été plus approfondie, et qui ont été composées à l'occasion du sujet proposé par l'académie des sciences de Berlin, pour l'année 1746.

Le mouvement de la terre autour de son axe, peut aussi être regardé sous un autre aspect comme une autre cause des vents ; car l'athmosphère se charge et se décharge continuellement d'une infinité de vapeurs et de particules hétérogènes ; de sorte que les différentes colonnes qui la composent, souffrent continuellement une infinité de variations, les unes étant plus denses, les autres plus rares. Or l'athmosphère tournant avec la terre autour de son axe, ses parties tendent sans cesse à se mettre en équilibre, et y seraient effectivement, si l'athmosphère demeurait toujours dans le même état. Mais comme ces parties sont continuellement altérées dans leur pesanteur et leur densité, leur équilibre ne saurait subsister un moment ; il doit être continuellement rompu, et il doit s'ensuivre des vents variables presque continuels. Des exhalaisons qui s'amassent et qui fermentent dans la moyenne région de l'air, peuvent encore occasionner des mouvements dans l'athmosphère ; c'est la pensée de M. Homberg et de plusieurs autres savants ; et si les vents peuvent naître de cette cause, comme il est probable, on ne doit point être surpris qu'ils soufflent par secousses et par bouffées ; puisque les fermentations auxquelles on les attribue, ne peuvent être que des explosions subites et intermittentes. Ces fermentations arrivent très-fréquemment dans les grottes souterraines par le mélange des matières grasses, sulphureuses, et salines qui s'y trouvent : aussi plusieurs auteurs ont-ils attribué les vents accidentels à ces sortes d'éruptions vaporeuses. Connor rapporte qu'étant allé visiter les mines de sel de Cracovie, il avait appris des ouvriers et du maître même, que des recoins et des sinuosités de la mine, il s'élève quelquefois une si grande tempête, qu'elle renverse ceux qui travaillent et emporte leurs cabanes. Gilbert, Gassendi, Scheuchzer, font mention d'un grand nombre de cavernes de cette espèce, d'où il sort quelquefois des vents impétueux, qui prenant leur naissance sous terre, se répandent dans l'athmosphère, et y continuent quelque temps.

On ne saurait donc douter qu'il ne sorte des vents de la terre et des eaux : il en sort des antres, des gouffres, des abîmes. Il en nait un en Provence de la montagne de Malignon, lequel ne s'étend pas plus loin que le penchant de la montagne. Il en nait un autre dans le Dauphiné, près de Nilfonce, lequel s'étend assez peu ; l'on voit quelquefois en plein calme les eaux de la mer se friser tout-d'un-coup autour d'un navire ; avant que les voiles s'enflent, les flots se former en sillons, se pousser les uns les autres vers un certain côté ; puis on sent le souffle du vent. Or comment se forment ces sortes de vents ? Pour le comprendre, on peut comparer les creux souterrains à la cavité d'un éolipyle, les chaleurs souterraines à celles du feu, sur lequel on met l'éolipyle et les fentes de la terre, les antres, les ouvertures, par où les vapeurs peuvent s'échauffer, au trou de l'éolipyle ; mettez sur le feu un éolipyle, qui contienne un peu d'eau ; bien tôt l'eau s'évapore, les vapeurs sortent rapidement, forcées de passer en peu de temps d'un grand espace par un petit, poussent l'air ; et cette impression rapide fait sentir une espèce de vent de même que les fermentations, les chaleurs souterraines, font sortir brusquement de certains endroits de la terre et des eaux, comme d'autant d'éolipyles de grands amas de vapeurs ou d'exhalaisons. Ces exhalaisons, ces vapeurs élancées violemment, chassent l'air selon la direction qu'elles ont reçue en sortant de la terre et des eaux.

L'air chassé violemment communique son mouvement à l'air antérieur ; de là ce courant sensible d'air, en quoi consiste le vent ; de-là ce flux successif d'air, qui semble imiter le mouvement des flots, et fait les bouffées. En effet, quelquefois lorsque le temps est serein, et l'air tranquille, sur la Garonne proche de Bordeaux, dans le lac de Genève, et dans la mer, on voit des endroits bouillonner tout-à-coup, et dont les bouillonnements sont suivis de vents impétueux, de furieuses tempêtes. Qu'est ce qui produit les typhons, ces vents si redoutables dans les mers des Indes ? Les vapeurs et les exhalaisons souterraines, car avant les typhons, les eaux de la mer deviennent tiedes ; on sent une odeur de soufre, et le ciel s'obscurcit. M. Formey.

On cite encore l'abaissement des nuages, leurs jonctions, et les grosses pluies, comme autant de causes qui font naître ou qui augmentent le vent : et en effet, une nuée est souvent prête à fondre par un temps calme, lorsqu'il s'élève tout-d'un coup un vent impétueux : la nuée presse l'air entre elle et la terre, et l'oblige à s'écouler promptement.

Cette agitation violente de l'air forme un vent qui dure peu, mais impétueux. Ces sortes de vents sont suivis ordinairement de pluies, parce que les nuées, dont la chute les produit, se resolvent en gouttes dans leur chute. Quelquefois les mariniers aperçoivent au-dessus d'eux une nuée qui parait d'abord fort petite, parce qu'elle est fort élevée, mais qui semble s'élargir peu à peu, parce qu'elle descend et s'approche, et dont la chute sur la mer est accompagnée de pluie, d'orage, et de tempête.

La hauteur, la largeur, et la situation des montagnes, retrécit quelquefois le passage des vapeurs et de l'air agités, et cause par-là de l'accélération dans leur mouvement. Ce mouvement devient sensible, et c'est un vent réel ; aussi quand les vaisseaux passent le long de la côte de Gènes, où il y a de hautes montagnes, et qu'ils sont vis-à-vis de quelques vallées dont la direction regarde la mer, on sent un vent considérable qui vient des terres. M. Formey.

Comme quelques auteurs modernes ont cru pouvoir pousser la théorie des vents au point d'y appliquer les règles des Mathématiques, nous allons donner au lecteur une idée de leur travail, avec quelques remarques.

Lois de la production des vents. Si le ressort de l'air est affoibli dans quelque lieu plus que dans les lieux voisins, il s'élevera un vent qui traversera le lieu où est cette moindre élasticité. Voyez AIR et ELASTICITE.

Car, puisque l'air fait effort par son élasticité pour s'étendre de tous les côtés, il est clair que si cette élasticité est moindre dans un lieu que dans un autre, l'effort de l'air le plus élastique surpassera celui de l'air qui l'est moins, et que par conséquent l'air le moins élastique résistera avec moins de force que celui qui est pressé par une plus grande force élastique ; en sorte que cet air moins élastique sera chassé de sa place par l'air le plus élastique.

2°. Or comme le ressort de l'air augmente proportionnellement au poids qui le comprime, et que l'air plus comprimé est plus dense que l'air moins comprimé, tous les vents iront du lieu où l'air est le plus dense dans ceux où il est le plus rare.

3°. L'air le plus dense étant spécifiquement plus pesant que le plus rare, toute légéreté extraordinaire de l'air produira nécessairement un vent extraordinaire, ou une tempête. Il n'est donc pas étonnant qu'on s'attende à un orage, lorsqu'on voit baisser considérablement le baromètre. Voyez BAROMETRE.

4°. Si l'air vient à être soudainement condensé dans quelqu'endroit, et si cette altération est assez grande pour affecter le baromètre, il y aura un vent qui soufflera.

5°. Mais comme l'air ne saurait être condensé soudainement, qu'il n'ait été auparavant raréfié considérablement ; l'air sera agité du vent lorsqu'il se refroidira après avoir été violemment échauffé.

6°. De la même manière si l'air vient à être soudainement raréfié, son ressort sera soudainement augmenté, ce qui le fera couler aussitôt vers l'air contigu, sur lequel n'agit point la force raréfiante. Ensorte que dans ce cas, le vent viendra de l'endroit où l'air sera soudainement raréfié.

7°. Le soleil dont la force pour raréfier l'air est connue, doit avoir une grande influence sur la production des vents. Ces dernières lois de la production des vents, ne paraissent pas s'accorder trop bien avec les premières ; par ces dernières, on prétend sans-doute expliquer comment la chaleur du soleil doit faire mouvoir l'athmosphère d'orient en occident, et par celles qu'on a données d'abord, il semblerait qu'on pourrait expliquer de même comment le soleil serait mouvoir l'athmosphère dans un sens contraire, si en effet elle se mouvait ainsi. Telle est la nature de presque toutes les explications que les physiciens essaient de donner des différents phénomènes de la nature ; elles sont si vagues et si peu précises, qu'elles pourraient servir à rendre raison de phénomènes tout contraires. Voyez CHALEUR, RAREFACTION.

8°. Il sort pour l'ordinaire des caves, un vent qui est plus ou moins fort suivant les circonstances.

On connait par expérience les vents qui s'élèvent, ou les changements qui leur arrivent, par le moyen des girouettes qui sont au-dessus des maisons ; mais on ne connait par ce moyen que les vents qui soufflent à la hauteur où ces girouettes sont placées, et M. Wolf assure d'après des observations de plusieurs années, que les vents plus élevés qui poussent les nuages, sont différents de ceux qui font tourner les girouettes. M. Derham de son côté, a fait des remarques qui ne s'éloignent pas de celles-là. Physic. Théor. l. I. c. IIe

Cet auteur rapporte qu'en comparant plusieurs suites d'observations faites en Angleterre, en Irlande, en Suisse, en Italie, en France, dans la nouvelle Angleterre, etc. on trouve que les vents qui soufflent dans ces différents pays, ne s'accordent gueres communément, excepté lorsqu'ils sont d'une violence extraordinaire, et qu'ils soufflent pendant un temps considérable du même côté, et plus, suivant lui, lorsque ces vents sont au nord ou à l'est, que dans les autres points. Il remarque encore que les vents qui sont violents dans un lieu, sont souvent faibles ou modérés dans un autre, suivant que ce second lieu est plus ou moins éloigné du premier. Phil. Tr ans. n °. 267. et 321.

Lois de la force et de la vitesse du vent. Le vent n'étant autre chose qu'une agitation dans l'air, c'est-à-dire dans un fluide sujet aux mêmes lois que les autres, sa force pourra s'estimer exactement. " Ainsi la raison de la pesanteur spécifique de l'air à celle d'un autre fluide, étant donnée avec l'espace que ce fluide pousse par la pression de l'air, décrit dans un temps donné ; on pourra trouver l'espace que l'air poussé par la même force, décrira dans le même temps, en employant la règle suivante ".

1°. La pesanteur spécifique de l'air est à celle de tout autre fluide, en raison renversée du carré de l'espace que ce fluide, poussé par une force quelconque, parcourt dans un temps donné, au carré de l'espace que l'air décrit dans le même temps, en vertu de la même impulsion. Supposant donc que la proportion de la pesanteur spécifique de cet autre fluide à celle de l'air, soit celle de b à c, et que l'espace parcouru par ce même fluide, soit s, tandis que celui qui est parcouru par l'air dans le même temps, est nommé Xe on aura par cette règle x = (b 2 : c) ainsi si l'on veut que l'eau poussée par une force donnée, fasse deux pieds dans une seconde de temps, on aura s = 2, et la pesanteur spécifique de l'eau étant supposée à celle de l'air, comme 970 à 1, b sera 970, et c = 1, ce qui donnera x = (9701 4) = 3880 = 623 pieds. Dans ce cas la vitesse du vent sera à celle de l'eau mue par la même force, comme 623 à 2, ou ce qui revient au même, lorsque l'eau fera 2 pieds dans une seconde, l'air en fera 623.

2°. Il suit de la même formule que s = (cx2 : b) c'est-à-dire que l'espace parcouru dans un temps donné, par un fluide, en vertu d'une impression quelconque, se trouve, en prenant d'abord la quatrième proportionnelle à trois nombres dont les deux premiers expriment le rapport des pesanteurs spécifiques des deux fluides, et dont le troisième exprime l'espace parcouru par le vent, dans le temps donné ; et en prenant ensuite la racine carrée de cette quatrième proportionnelle.

M. Mariotte ayant trouvé par différentes expériences qu'un vent passablement fort fait parcourir à l'air 24 pieds dans une seconde, on trouvera l'espace que l'eau poussée par la même force que l'air parcourait dans le même temps, en faisant c = 1, x = 28, b = 970, car on aura alors s, ou l'espace cherché = (576 : 970) = 311/31.

3°. La vitesse du vent étant donnée, on déterminera la pression capable de produire cette vitesse, par la règle suivante : l'espace parcouru par le vent, dans une seconde de temps, est à la hauteur qu'un fluide devrait avoir dans un tube vide, pour avoir une pression capable de donner cette vitesse, dans la raison composée de la pesanteur spécifique de ce fluide, à celle de l'air, et du quadruple de la hauteur qu'un corps parcourt en tombant pendant une seconde, à cet espace dont on vient de parler, parcouru par l'air dans une seconde.

Plusieurs physiciens ont essayé de mesurer la vitesse des vents, en lui donnant à emporter de petites plumes et d'autres corps légers ; mais les expériences qu'on a faites sur ce sujet, s'accordent fort peu entr'elles. M. Mariotte prétend que la vitesse du vent le plus impétueux, est de 32 pieds par seconde. M. Derham la trouve environ deux fois plus grande.

Il a fait ses expériences avec des plumes légères, et de la semence de pissenlis, que le vent emporta avec la même rapidité que l'air même. Il fit en 1705, le 11 Aout, un furieux orage qui renversa presque tout un moulin à vent. Le vent qui soufflait alors, parcourait 66 pieds d'Angleterre dans une seconde, et par conséquent 45 milles d'Angleterre dans l'espace d'une heure ; mais l'orage extraordinaire de 1703. fut encore plus furieux, puisqu'alors le vent parcourait 50 à 60 milles en une heure. Ces vents rapides ont quelquefois tant de force qu'ils renversent presque des rocs entiers, et qu'ils déracinent des arbres de 100 et 200 ans, quelque gros qu'ils puissent être.

Il y a au-contraire d'autres vents dont le cours est si lent qu'ils ne sauraient dévancer un homme à cheval ; d'autres ont une vitesse médiocre, et ne parcourent que dix milles d'Angleterre par heure. M. Formey.

La force du vent se détermine par une machine particulière qu'on appelle anemomètre, laquelle étant mise en mouvement par le moyen d'ailes semblables à celles d'un moulin à vent, élève un poids qui s'écartant de plus en plus du centre du mouvement, en glissant le long d'un bras creusé en gouttière et adapté sur l'aissieu des voiles, résiste d'autant plus qu'il est plus élevé, jusqu'à ce que devenant en équilibre avec la force du vent sur les voiles, il en arrête le mouvement. Une aiguille fixée sur le même axe à angle droit avec le bras, montre en s'élevant ou en descendant, la force du vent sur une espèce de cadran divisé en degrés. Voyez ANEMOMETRE.

On trouvera dans le traité du navire de M. Bouguer, la description d'un anemomètre, que cet habîle géomètre a inventé, et auquel nous renvoyons. Ce n'est autre chose qu'un morceau de carton appliqué à un peson d'Allemagne. M. Poleni a aussi donné la description d'un instrument semblable, dans la pièce qui a remporté le prix de l'académie en 1733.

Qualités et effets du vent. 1°. " Un vent qui vient du côté de la mer, est toujours humide, et de plus froid en été et chaud en hiver, à moins que la mer ne soit gelée : ce qui peut se prouver ainsi. " Il s'élève continuellement une vapeur de la surface de toute eau, et cette vapeur est beaucoup plus considérable qu'on ne peut l'imaginer lorsque l'eau est exposée à l'action des rayons du soleil ; c'est un fait qu'il est aisé de reconnaître, en exposant à l'air un vase rempli d'eau, et en remarquant que l'eau diminue sensiblement au bout d'un assez petit espace de temps. Voyez VAPEUR.

De-là il suit que l'air qui est au dessus de la mer est chargé de beaucoup de vapeurs : or les vents qui viennent du côté de la mer, balayant et ramassant ces vapeurs, doivent être par conséquent humides.

De plus en été l'eau s'échauffe moins que la terre par l'action des rayons du soleil ; au-lieu qu'en hiver l'eau de la mer est plus chaude que la terre, qui est souvent couverte de glace et de neige : or comme l'air qui est contigu à un corps, partage son degré de froid ou de chaud, il s'ensuit que l'air contigu à la mer est plus chaud en hiver que celui qui est contigu à la terre ; et que le même air est réciproquement plus froid en été. On peut dire encore que les vapeurs que l'eau exhale en hiver, étant plus chaudes que l'air dans lequel elles s'élèvent, ainsi qu'on le peut juger par la condensation de ces vapeurs qui les rend visibles aussitôt qu'elles s'élèvent dans l'air ; il faut que ces vapeurs échauffent continuellement la partie de l'athmosphère qui est au-dessus de la mer, et en rendent la chaleur plus considérable que dans celle qui est au-dessus de la terre ; mais en été, les rayons du soleil réfléchis de la terre dans l'air, étant en bien plus grand nombre que ceux qui sont réfléchis de l'eau dans l'air, l'air contigu à la terre échauffé par une plus grande quantité de rayons que celui qui est contigu à la mer, sera par conséquent plus chaud. De tout-celà il s'ensuit que les vents de mer produisent des temps épais et couverts, et des brumes.

2°. " Les vents qui viennent des continens sont toujours secs, chauds en été, et froids en hiver " : car comme il s'élève beaucoup moins de vapeurs de la terre que de l'eau, il faut aussi que l'air qui est au-dessus des terres soit beaucoup moins chargé de vapeurs que celui qui est au-dessus des mers. D'ailleurs les vapeurs ou exhalaisons qui s'élèvent de la terre, par les grands degrés de chaleur, sont beaucoup plus déliées et moins sensibles que celles qui viennent de l'eau. Il faut donc que le vent qui vient du continent amène peu de vapeur, et qu'il soit par conséquent sec. De plus la terre étant plus échauffée dans l'été, que ne l'est l'eau, quoique exposée aux mêmes rayons du soleil, il faut donc que l'air qui est contigu à la terre, et par conséquent le vent qui vient de terre, soit plus chaud que celui qui vient de la mer : on verrait de la même manière que les vents de terre doivent être plus froids en hiver que les vents de mer ; et on verrait aussi que ces mêmes vents de terre, en hiver, doivent rendre le temps froid, clair et sec. Voyez TEMS.

Quoiqu'il en sait, les vents du nord et du sud, qui sont communément estimés les causes des temps froids et des temps chauds, doivent être plutôt regardés, suivant M. Derham, comme les effets du froid et du chaud de l'athmosphère : car nous voyons fréquemment un vent chaud de sud se changer subitement en un vent de nord, s'il survient de la neige ou de la grêle ; et de même le vent qui est au nord, dans une matinée froide, se changer en vent de sud quand le soleil a échauffé la terre, et retourner ensuite sur le soir au nord ou à l'est, lorsque la terre se refroidit. Voyez à l'article du BAROMETRE, les effets du vent sur le baromètre.

La nature qui ne fait rien d'inutile, sait mettre les vents à profit : ce sont eux qui transportent les nuages, pour arroser les terres, et qui les dissipent ensuite pour rendre le beau temps ; leurs mouvements purifient l'air, et la chaleur ainsi que le froid se transmettent d'un pays à un autre. Quelquefois aussi les vents nous sont nuisibles, comme lorsqu'ils viennent d'un endroit mal sain, ou lorsqu'ils apportent des graines de mauvaises plantes dans des endroits où on désirerait qu'il n'en crut point. Quel secours ne tirons-nous pas des moulins à vent, pour moudre le grain, extraire l'huîle des semences, fouler les draps, etc. De quelle utilité le vent n'est il pas à la navigation ? le secours du vent est si commode, et ses avantages sont si bien connus, que nous nous en procurons souvent quand nous en manquons : le forgeron se sert d'un soufflet pour allumer son feu ; le boulanger nettoie son blé en le faisant passer devant une espèce de roue, qui en agitant l'air, chasse la poussière, etc.

VENT, dans la Navigation, est l'agitation de l'air considérée comme servant à faire mouvoir les navires. Voyez NAVIGATION.

La division des vents dans la Navigation est relative aux points de l'horizon d'où ils soufflent, en cardinaux et collatéraux.

Les vents cardinaux sont ceux qui soufflent des points cardinaux, c'est-à-dire de l'est, de l'ouest, du nord et du sud. Voyez CARDINAL.

Les vents collatéraux sont ceux qui sont entre les vents cardinaux. Le nombre de ces vents est infini, ainsi que les points d'où ils soufflent. Mais il n'y en a qu'un petit nombre qu'on considère dans la pratique, ou plutôt auxquels on ait donné des noms particuliers.

Les Grecs ne considérèrent d'abord que les quatre vents cardinaux ; ils y joignirent ensuite quatre autres vents collatéraux. Quant aux Romains, ils ajoutèrent aux quatre vents cardinaux vingt vents collatéraux, auxquels ils donnèrent des noms particuliers qu'on trouve dans Vitruve.

Les modernes dont la navigation est beaucoup plus perfectionnée que celle des anciens, ont donné des noms à vingt-huit des vents collatéraux qu'ils partagent en principaux et secondaires ; divisant ensuite les secondaires en première et seconde espèce. Voyez RHUMB. Les noms français des rhumbs et des vents collatéraux principaux sont composés des noms cardinaux, et sont toujours précédés de nord ou de sud.

Les noms des vents collatéraux secondaires du premier ordre sont composés des noms des cardinaux et des principaux collatéraux dont ils sont voisins. Ceux du second ordre sont composés des noms des cardinaux ou principaux collatéraux voisins, en y ajoutant le nom du cardinal ou du collatéral principal le plus proche précédé du mot quart. Les Latins avaient donné des noms particuliers à chacun de ces vents. On trouvera tous ces noms dans la table suivante.

Noms des rhumbs de vent.

Les noms anciens joints ici aux modernes, à la manière du P. Riccioli, ne sont pas précisément les mêmes que ceux que les anciens avaient donnés aux vents ; mais ce sont seulement les noms qui suivant leurs dénominations doivent exprimer les vents des modernes. Car la division des anciens n'étant pas la même que la nôtre, les noms dont ils se sont servis ne peuvent pas exprimer exactement nos vents.

Quant aux vrais noms anciens des vents qui, suivant Vitruve, sont au nombre de vingt-quatre, ils sont tous exposés dans la table suivante.

Quant à l'usage des vents dans la Navigation, voyez NAVIGATION, RHUMB, etc.

VENT, (Marine) c'est un mouvement de l'air, qui a des directions différentes, et qui sert par-là à pousser les vaisseaux à quelque endroit de la terre qu'ils veuillent aller. C'est donc une connaissance essentielle pour les marins que celle des vents. Aussi tous les navigateurs intelligens se sont attachés à les observer dans leurs voyages, et à en tenir compte : et voici un précis du fruit de leurs observations.

1°. Entre les tropiques, le vent d'est souffle pendant tout le cours de l'année, et ne passe jamais le nord-est ou sud-est.

2°. Hors les tropiques on trouve des vents variables, qu'on appelle vents de passages, dont les uns soufflent tous d'un même côté, et dont les autres sont périodiques, et soufflent pendant six mois d'un certain côté, et pendant les six autres mois d'un autre côté. On donne à ceux-ci le nom particulier de moussons. Dans la grande mer du Sud, dans la partie de la mer des Indes qui est au sud de la ligne, dans une partie de la mer du nord, et dans la mer Ethiopique, le vent d'est souffle toujours depuis 30 deg. de latit. boréale, jusqu'à 30 deg. de latit. méridionale ; mais il est plus méridional au sud de l'équateur, savoir sur l'est-sud-est ; et plus septentrional au nord de l'équateur, à environ est-nord-est.

Ceci doit s'entendre du vent de passage qui règne en pleine mer ; car à la distance de 150 ou 200 milles des côtes, le vent de passage souffle dans la grande mer du Sud, du côté de l'ouest de l'Amérique méridionale ; ce qui est causé vraisemblablement en partie par les côtes, et en partie par ces hautes montagnes qu'on appelle les Andes. Du côté de l'est des côtes ce vent souffle jusqu'auprès du rivage, et il se mêle même avec les vents des côtes. Enfin au nord de la mer Indienne règne le vent ordinaire de passage, depuis Octobre jusqu'en Avril, et il est diamétralement opposé dans les autres mois.

3°. Le long de la côte du Pérou et de Chili, règne un vent de sud, de même que le long de la côte de Monomotapa et de celle d'Angola, il y a presque toujours aux environs de la côte de la Guinée un vent de sud-ouest.

4°. On divise les vents qui soufflent près des côtes, en vents de mer, et en vents de terre. Le vent de mer s'élève en plusieurs endroits sur les 9 heures du matin, et il augmente toujours jusqu'à midi ; après quoi il décroit jusqu'à 3 heures après midi, où il cesse entièrement : ce vent souffle droit sur la côte lorsque le temps est serein. Les vents de terre les plus forts se font sentir dans les baies profondes, et presque point, ou fort peu, dans les côtes élevées.

5°. Les grandes tempêtes, les vents violents et momentanés, et encore ceux qui soufflent de tous côtés, que les marins appellent travades ou ouragans ; et les vents qui accompagnent les orages, n'entrent point dans l'histoire des vents, parce qu'ils ne sont point de longue durée.

Ce n'est point ici le lieu de rechercher la cause des vents ; il faut recourir pour cela à l'article vent du Dictionnaire universel de mathématique et de physique, où l'on trouvera le titre des ouvrages qui contiennent des connaissances plus détaillées sur le météore qui vient de faire le sujet de cet article. Voyez encore les articles suivants à l'égard des noms des vents. Voyez ROSE DE VENT. Voyez Marine, Pl. XXI. fig. 3. les noms des 32 rumbs des vents de la boussole.

Vent alisé, nom qu'on donne au vent qui souffle entre les tropiques, presque toujours du même côté ; savoir depuis le nord-est jusqu'à l'est, au nord de la ligne ; et depuis le sud-est jusqu'à l'est, au sud de la ligne.

Vent arrière, on appelle ainsi le vent dont la direction ne fait qu'une même ligne avec la quille du vaisseau.

Vent d'amont, vent d'orient qui vient de terre : on l'appelle sur les rivières vent solaire ou vent équinoxial.

Vent d'aval, vent malfaisant qui vient de la mer et du sud ; c'est aussi l'ouest et le nord-ouest.

Vent de bouline, c'est un vent dont la direction fait un angle aigu avec la route du vaisseau. Voyez ALLER A LA BOULINE.

Vent de quartier, nom qu'on donne au vent qui est perpendiculaire à la route du vaisseau.

Vent en poupe, voyez vent arrière.

Vent en poupe largue la soute, cela signifie que le vent étant bon de bouline, on peut donner des vivres à l'équipage comme à l'ordinaire, supposé qu'on en eut retranché.

On dit encore que le vent en poupe fait trouver la mer unie, parce qu'on ne se sent point alors de l'agitation de la mer.

Vent largue, nom d'un vent qui fait un angle obtus avec la route. Voyez LARGUE.

Vent routier, vent qui sert pour aller et pour venir en un même lieu.

Vents variables, ce sont des vents qui changent et qui soufflent tantôt d'un côté, tantôt d'un autre.

On appelle encore sur mer vent à pic, un vent qui n'a point de direction déterminée ; et on dit que le vent est au soleil, lorsqu'il n'y a point de vent.

Vent, au plus près de, terme de Marine. Voyez ALLER au plus près du vent.

VENT, (Critique sacrée) ; ce mot, outre sa signification ordinaire, désigne les parties de la terre d'où les vents soufflent. Les anges assembleront les élus des quatre vents, c'est-à-dire d'un bout du monde à l'autre, Matth. xxiv. 31. Les vents dans Zach. VIe 5. marquent les quatre monarchies qui se sont succédées ; comme les vents règnent successivement dans l'air, ils se prennent figurément pour des ennemis puissants : Inducam quatuor ventos à quatuor plagis coeli. Jérém. xlix. 35. c'est-à-dire je ferai fondre de toutes parts des ennemis sur les Elamites. Enfin ventus urents, un vent brulant, dénote un malheur inopiné, Job. xxvij. 21. Pascère ventum, c'est prendre des peines inutiles. Seminare ventum, c'est perdre son travail. Observare ventum, c'est laisser échapper l'occasion par trop de circonspection. (D.J.)

VENT, (Physiologie) les vents qui sortent soit par la bouche, soit par l'anus, sont de l'air que ces viscères chassent de leur cavité, en se mettant dans une contraction assez forte, pour surmonter les puissances qui s'opposent à la sortie des matières contenues dans ces cavités. Ces puissances sont deux sphincters, dont l'un ferme l'orifice supérieur de l'estomac, et l'autre l'anus. Quant à ce qui concerne les vents, comme maladie, Voyez FLATUOSITE. (D.J.)

VENT, (Maréchalerie) avoir du vent, se dit d'un cheval qui commence à devenir poussif. Porter le nez au vent, ou porter au vent, c'est la même chose. Voyez PORTER.

VENT DU BOULET, c'est dans l'artillerie, la différence qu'on observe entre le calibre de la pièce et celui du boulet, afin qu'il y entre facilement et qu'il en sorte de même, sans causer beaucoup de frottement dans l'âme du canon ; ce qui ralentirait le mouvement du boulet, et userait le métal de la pièce trop promptement. Voyez BOULET.

VENT, (Jardinage) le vent est l'élément le plus nuisible aux jardins, c'est une agitation violente de l'air. Les Jardiniers et les Vignerons en craignent de plusieurs sortes.

Il y a le vent d'amon, celui d'aval, de galerne, de bise, les vents roux et ceux du nord.

Le vent d'amon est un vent de terre, il vient d'orient ou du levant.

Celui d'aval ou d'abas est son opposé, c'est un vent de mer ; il vient d'occident ou du couchant, et est très-malfaisant.

Le vent de galerne vient d'orient, et est très-froid ; il gèleordinairement les vignes et les fruits ; les Italiens l'appellent greco, il souffle entre l'orient et le septentrion.

Le vent de bise est un vent froid et sec, qui gèleles vignes et perd les fleurs. Il règne dans le fort de l'hiver, et souffle entre l'est et le septentrion : sur l'Océan on l'appelle nord, et les Italiens le nomment la tramontana, ainsi le vent du nord et celui de bise sont les mêmes.

Le roux-vent ou le vent-roux est un vent froid et sec : que les Jardiniers craignent beaucoup dans le mois d'Avril, parce qu'il gâte les jets tendres des arbres fruitiers, ce qui fait recoquiller leurs feuilles.

Les modernes distinguent les quatre vents cardinaux en trente-deux parties égales ou rumbs, ce qui regarde plus la navigation que l'agriculture et le jardinage.

On dit encore en parlant des arbres, un arbre à plein-vent, c'est-à-dire en plaine campagne ou isolé dans un verger.

VENT, terme de Fauconnerie, aller contre le vent se dit quand l'oiseau vole, ayant le bec tourné du côté du vent ; aller vau le vent, c'est quand il a le balai ou queue tournée contre le vent ; bander le vent se dit de l'oiseau, quand il tient les chemins et fait la cresserelle ; chevaucher le vent, tenir le bec au vent, c'est quand l'oiseau résiste au vent sans tourner la queue ; prendre le haut-vent se dit quand l'oiseau vole au-dessus du vent ; vent léger, c'est celui qui est doux, gracieux et propre pour bien voler ; vent clair est celui qui souffle lorsque le temps est beau et serein.

VENTS, (Mythologie) les vents nuisibles étaient, selon Hésiode, fils des géants Typhéus, Astréus et Persée ; mais les vents favorables, savoir Notus, Borée et Zéphire, étaient enfants des dieux. Homère et Virgile établissent le séjour des vents aux îles Eoliennes. C'est-là, dit le poète latin, que dans un antre vaste et profond Eole tient tous les vents enchainés, tandis que les montagnes qui les renferment retentissent au-loin de leurs fureurs ; s'ils n'étaient sans cesse retenus, ils confondraient bien-tôt le ciel, la terre, la mer et tous les éléments.

L'antiquité payenne sacrifiait aux vents pour se les rendre favorables. Hérodote le dit des Perses. Xénophon rapporte dans l'expédition du jeune Cyrus, que le vent du nord causant un grand dommage à l'armée, un devin conseilla de lui sacrifier ; on obéit, et le vent cessa. Pausanias raconte qu'on voyait près de l'Asope une montagne consacrée aux vents, et qu'un prêtre y faisait chaque année des sacrifices pour apaiser leurs violences. Les Troie.s étant prêts à s'embarquer, Anchise, pour se rendre les vents propices, immole une brebis noire aux vents orageux, et une blanche aux aimables zéphirs. Séneque assure qu'Auguste étant dans les Gaules, dédia un temple au vent Circéus ; c'est le vent d'ouest ou quart de nord-ouest, que les Gaulois honoraient particulièrement, dans la croyance qu'ils lui devaient la salubrité de l'air. Enfin on a découvert en Italie divers autels consacrés aux vents. (D.J.)