S. f. (Physique générale) suc végétal concret, qui suinte à-travers l'écorce de certains arbres, soit naturellement, soit par incision, et qui s'endurcit ensuite ; la gomme qui découle d'elle-même, parait être en Physique une espèce de maladie de la seve des arbres, qui étant viciée, s'extravase, et devient en quelque manière solide. Elle perce par quelque endroit tendu, écorché, ou rompu de la plante, et fait mourir les parties voisines ; de sorte que pour arrêter les progrès du mal, il faut couper la branche malade un peu au-dessus de l'endroit affligé. Mais ce suc végétal gommeux qui transsude quelquefois sur le fruit, n'est pas une maladie, c'est une simple surabondance de seve qui sort à-travers la peau. On voit souvent sur plusieurs pommes des pays chauds, comme en Languedoc, en Provence, en Italie, une gomme claire, insipide, et dure. Cette gomme n'est autre chose qu'une extravasation du suc du fruit, que l'air et le soleil ont endurci, et cette extravasation se trouve quelquefois en plusieurs endroits de la même pomme. Les prunes domestiques et sauvages, offrent souvent aux observateurs une gomme toute semblable ; le laurier-cerise jette une fine gomme transparente, de couleur blanche, sans gout, et qu'on peut manger, sans qu'il en arrive aucun mauvais effet, tandis que l'infusion des feuilles du même arbre cause des convulsions, la paralysie, et la mort. (D.J.)

GOMME, (Chimie, Pharmacie, et Matière médicale) les gommes proprement dites remplissent avec les mucilages une division de la classe générale des corps muqueux végétaux. La gomme est soluble dans les menstrues aqueux ; elle est capable de la fermentation vineuse, elle est nourrissante. Voyez VIN et NOURRISSANT.

Cette substance qui a beaucoup d'eau dans sa composition, quoiqu'elle ait déjà essuyé une véritable dessication (Voyez GOMME, Physique), en prend encore une quantité considérable, avec laquelle elle acquiert la consistance d'un mucilage mou et gélatineux : réduire une gomme dans cet état, s'appelle très-improprement dans le langage ordinaire de la pharmacie, tirer le mucilage d'une gomme.

La gomme se réduit en poudre, et même en poudre très-subtile, si on la pîle dans un mortier très-chaud ; cette précaution est surtout nécessaire pour pulvériser la gomme adragant.

La gomme mise sur le feu se boursouffle, bouillonne, et se réduit bien-tôt en une matière friable et demi-torréfiée, qui est soluble dans l'esprit-de-vin, comme tous les autres sucs végétaux légèrement grillés.

On emploie en pharmacie la gomme arabique, la gomme du Senégal, et la gomme adragant : on ne fait aucune distinction dans l'usage des deux premières ; et on leur peut substituer sans inconvénient les gommes de notre pays ; celle du cerisier, de l'amendier, ou du prunier. Voyez ADRAGANT (gomme.) Voyez aussi ARABIQUE (gomme).

On donne encore en Pharmacie le nom de gomme à deux espèces de sucs végétaux concrets bien différents de celui-ci ; savoir à des résines et à des gommes-résines. Voyez RESINE et GOMME-RESINE.

Les substances qui sont dans ces cas sont les suivantes :

Gomme animé, voyez ANIME.

Gomme copale, voyez COPAL.

Gomme caragne, voyez CARANNA.

GOMME-RESINE, (Chimie, Pharmacie, et Matière médicale) Les gommes résines sont formées par le mélange d'une substance gommeuse et d'une substance résineuse faiblement unies.

Cette légère union se manifeste lorsqu'on essaye de les faire fondre dans les menstrues aqueux, en ce qu'on n'obtient point une dissolution transparente, mais une liqueur laiteuse. Cette liqueur éclaircie par le repos, fournit un dépôt où la résine pure domine, et dont on peut la retirer par le moyen de l'esprit-de-vin.

On peut aussi retirer du corps entier des gommes-résines par le moyen de l'esprit-de-vin, et surtout de l'esprit-de-vin alkalisé, la partie résineuse, et la séparer ainsi de la partie gommeuse.

Le corps entier des gommes-résines est dissous par le vin et par le vinaigre ; ces dissolutions ne sont pourtant pas parfaites, mais elles sont suffisantes pour les usages pharmaceutiques ; on introduit commodément par ce moyen dans la composition des emplâtres les gommes-résines qu'on ne pourrait mettre que difficilement en poudre, telles que le galbanum, la gomme ammoniac, l'opopanax, le sagapenum. Au reste celles-ci même peuvent se réduire en poudre quand elles sont mêlées avec beaucoup d'autres drogues, comme dans la poudre de la thériaque. Les gommes-résines employées en Médecine, sont les suivantes : la gomme ammoniac, l'assa foetida, le bdellium, l'euphorbe, le galbanum, la myrrhe, l'opopanax, le sagapenum et la sarcocolle. Voyez les articles particuliers. Toutes ces substances, à l'exception de l'euphorbe qui est un purgatif et un errhin très-violent, sont surtout connues en Médecine par leurs qualités communes, et on les emploie assez fréquemment ensemble. Elles sont emménagogues, hystériques, et antispasmodiques dans l'usage intérieur, et elles passent pour des puissants résolutifs dans l'usage extérieur ; c'est à ce titre qu'elles entrent dans un grand nombre d'emplâtres auxquels elles donnent une autre qualité, sinon plus réelle, du-moins plus évidente, savoir de la viscosité. Voyez EMPLATRE, RESOLUTIF, PIQUEIQUE. L'auteur d'un petit traité qu'on nous a traduit de l'anglais depuis quelques années sous le nom de pharmacien moderne, prétend qu'il faut mettre l'oliban au rang des gommes-résines. (b)

GOMME ELEMI, voyez ELEMI.

GOMME TACAMAQUE, voyez TACAMAQUE.

GOMME AMMONIAC, voyez l'art. AMMONIAC.

GOMME DE NOTRE PAYS, gummi nostras, (Matière médicale) offic. nom abrégé et reçu dans les boutiques, pour désigner la gomme qui découle des cerisiers, des pêchers, des pommiers, des pruniers, et autres arbres de nos climats. Leur gomme a les mêmes propriétés que la gomme arabique ; mais on préfère cette dernière en Médecine, parce que ses vertus sont connues et approuvées par une longue expérience, et l'on réserve la gomme de notre pays pour les usages de Mécanique. (D.J.)

GOMME DU GOMMIER, (Histoire naturelle des Drogues) chibou-gummi, et par nos Epiciers galipot d'Amérique. C'est une gomme ou résine blanche, assez semblable au galipot, mais moins puante, qui découle en abondance d'un grand arbre des îles de l'Amérique, appelé gommier par les Français, à cause de la grande quantité de gomme qu'il jete.

Il se trouve deux sortes de gommiers en Amérique, et surtout à la Guadeloupe, le blanc et le rouge.

Le gommier blanc est un des plus hauts et des plus gros arbres de cette ile. Son bois est blanc, gommeux, dur, traversé, fort, et par conséquent difficîle à mettre en œuvre. On en fait des canots ; il a les feuilles semblables au laurier, mais beaucoup plus grandes. Ses fleurs sont petites, blanches, disposées par bouquets aux sommets des rameaux. Son fruit est gros comme une olive, presque triangulaire, uni, verd au commencement, et ensuite rouge-brun : sa chair est tendre, et remplie d'une résine gluante et blanchâtre.

Le gommier rouge a le tronc assez gros, droit, et élevé ; son bois est fort tendre et blanchâtre ; son écorce épaisse, verdâtre, et couverte d'une pellicule ou épiderme rousse, fort déliée, et fort aisée à détacher par de grandes lames en-travers. Ses branches s'étendent à la manière de celles de nos grands pins. Elles sont garnies à leurs extrémités de quelques touffes de feuilles presque semblables à celles de nos frênes, mais un peu plus larges, et sans aucune dentelure. Elles sont lisses, vert-foncées, et chargées de quelques petites nervures. Les fleurs blanches et menues naissent par bouquets au bout des rameaux ; le pistil qui est au milieu de chaque fleur, devient un fruit charnu semblable aux pistaches, gros comme une olive, presque triangulaire, uni et verd dans sa formation, ensuite rouge-brun dans sa maturité. Sa chair est tendre, et remplie d'une résine blanchâtre et gluante. Ce fruit renferme un noyau dur, un peu pressé par les côtés ; et de la grosseur d'un grain de mays. Le gommier rouge est moins estimé que le gommier blanc ; son bois est de peu de durée, et se pourrit bien-tôt.

Le P. Plumier prétend que les gommiers dont on vient de parler, diffèrent seulement de nos térébinthes par la structure de leurs fleurs qui ne sont pas à étamines. On trouve quantité de ces arbres dans les îles de l'Amérique, particulièrement dans les lieux secs et arides.

Hernandez, liv. III. chap. xx. de son histoire des plantes du Mexique, appelle le gommier copaltic, et dit que les Mexiquains font un grand cas de sa résine dans toutes sortes de flux-de-sang. Ils s'en servent extérieurement pour amollir, pour résoudre, et pour fortifier les nerfs. Ils emploient en qualité de vulnéraires extérieurs les feuilles de l'arbre qui ont été trempées dans de l'eau-de-vie bouillante. Enfin ils brulent quelquefois cette résine au lieu d'huile. On dit qu'elle sort par incision du tronc des gommiers en si grande quantité, qu'il y a tel de ces arbres d'où l'on en peut tirer jusqu'à cinquante livres.

Nous l'employons en Europe aux mêmes usages que l'huîle de térébenthine ; on nous l'apporte des îles de l'Amérique, dans des barrils de différents poids, enveloppée dans de larges feuilles qui naissent sur un grand arbre du pays qu'ils appellent cachibou, d'où est venu le nom chibou de la gomme. Les Amériquains se servent des feuilles de l'arbre par préférence à d'autres dans leurs paniers d'aromates, afin d'empêcher que l'air n'y pénetre.

Quelques marchands trompeurs tant en Amérique qu'en Europe, sofistiquent la gomme chibou en la lavant dans quelque huîle odoriférante, et la vendent les uns pour de la gomme animé, les autres pour de la gomme tacamahaca, et d'autres assez communément pour le vrai élémi. Les connaisseurs savent distinguer ces différentes gommes ; mais ceux qui ne sont pas du métier, en apprennent seulement la différence par les effets.

James a confondu la gomme du gommier, qu'on appelle quelquefois élemi d'Amérique, avec la véritable gomme élemi. Voyez ÉLEMI. (D.J.)

GOMME DE GENEVRIER, voyez ci-devant l'article GENEVRIER. Cette gomme s'appelle aussi sandaraque des Arabes. Voyez SANDARAQUE DES ARABES.

GOMME DE LIERRE, voyez LIERRE.

GOMME-GUTTE, (Histoire naturelle, Drogues exotiques) suc concret, résineux et gommeux, inflammable, sec, compacte, dur, brillant, opaque, d'une couleur de safran jaunâtre, formé en masses rondes ou en petits bâtons cylindriques, sans odeur et presque sans goût ; au-moins quand on le retient dans la bouche, il n'a d'abord d'autre goût que celui de la gomme arabique, mais peu de temps après il laisse dans le gosier une légère acrimonie avec un peu de sécheresse.

On tire la gomme-gutte de Camboge, du royaume de Siam, de la Chine, et même, dit-on, de quelques provinces de l'Amérique : elle a reçu une quantité de noms différents, tels que gutta ad podagram, gumma-gutta, gutta-gamba, gutta gamandra, cambodium, cambogium, et plusieurs autres qui lui ont été donnés, soit à cause de la goutte que l'on s'imaginait qu'elle guérissait, soit à cause de Cambaye, Cambodje, ou Camboge, selon que différentes nations prononcent, soit à cause des différents pays d'où on l'apporte.

Les anciens ne la connaissaient point du tout, et ce n'est que depuis environ un siècle, qu'elle est employée beaucoup par les Peintres, et de-temps-en-temps par les Médecins. Elle fut envoyée pour la première fois à Clusius l'an 1603, et dès-lors son usage s'est étendu peu-à-peu dans l'Europe.

On estime celle qui est pure, qui n'est point mêlée de sable, ni souillée d'ordures, d'une couleur fauve, ou d'un beau safran, inflammable sur le feu et donnant la couleur jaune à la salive et à l'eau.

Les auteurs ont été longtemps incertains sur l'origine de ce suc ; mais on croit savoir aujourd'hui assez surement qu'il découle de deux arbres, dont l'un est une espèce d'oranger de Malabar appelé ghoraka cingalensibus, coddam-pulli, et par Acosta carcapuli. Voyez CARCAPULI. L'autre est nommé ghoraka dulcis, et diffère du précédent par sa fleur et son fruit, qui n'est que de la grosseur d'une cerise. Herman, témoin oculaire sur les lieux, rapporte qu'il dégoutte un suc laiteux et jaunâtre des incisions que l'on fait aux arbres dont nous venons de parler ; que ce suc s'épaissit d'abord à la chaleur du soleil ; et que lorsqu'on peut le manier, on en forme de grandes masses orbiculaires ou des bâtons. M. Richer prétend qu'il y a un arbre à Cayenne qui donne aussi de la gomme-gutte ; mais comme il n'a point envoyé de cette gomme-gutte de Cayenne, et qu'il n'a point décrit l'arbre qui la fournit, nous ne reconnaissons pour véritable gomme-gutte que celle des Indes orientales.

L'usage de cette gomme est considérable, parce qu'on en tire un très-beau jaune facîle à employer, et dont on se sert pour la miniature et pour les lavis ; mais comme la gomme-gutte est en même temps un des plus puissants cathartiques que l'on connaisse dans le genre végétal, il mérite notre curiosité à cet égard. Voyez donc ci-dessous GOMME-GUTTE, (Medec. Mat. méd.) (D.J.)

GOMME GUTTE, (Medec. Mat. méd. et Chimie.) Quoique l'Histoire naturelle des drogues soit un vaste pays dont on tire plus de dépouilles par l'amour du gain, que par l'envie de connaître la nature, cependant il y a des philosophes qui ne sont épris que de cette dernière ambition. Nous pouvons donner parmi nous cette louange à MM. Boulduc et Geoffroi, d'avoir consacré leurs veilles à des recherches utiles sur les simples efficaces. Les mémoires de l'académie royale des Sciences le prouvent. L'année 1701 de ce recueil nous offre, par exemple, une excellente dissertation de M. Boulduc, et le traité de matiére médicale de M. Geoffroi contient un très-bon morceau sur la gomme-gutte en particulier. Profitons de leurs travaux, et appliquons-nous toujours à les étendre.

La gomme-gutte étant approchée de la flamme, s'allume, brule, jette elle-même une flamme brillante comme les résines, et répand beaucoup de fumée ; elle se dissout dans l'esprit-de-vin, mais non pas entièrement, car la sixième partie ou environ, reste sans se dissoudre, et c'est la partie gommeuse, laquelle se dissout promptement dans l'eau chaude, ou dans l'huîle de tartre. La gomme-gutte parait se dissoudre dans les menstrues aqueux, mais elle ne fait que se convertir comme la scammonée, en un lait blanchâtre ou jaunâtre, se précipite ensuite au fond du vaisseau, et l'eau demeure claire et limpide.

Il semble résulter de l'analyse chimique, que la gomme-gutte est un composé salin, résineux, et gommeux, formé d'abord d'un soufre leger, lequel donne l'amertume et l'odeur au phlegme qui sort le premier ; ensuite d'un soufre grossier, qui ne s'élève et ne se sépare de la terre que par un feu violent ; et finalement d'un sel tartareux, un peu ammoniacal, qui par le moyen de la distillation se résout partie en acide, et partie en sel nitreux.

La dissolution entière de la gomme-gutte acquiert la couleur du sang, en y versant de l'huîle de tartre par défaillance, ou de l'eau de chaux, peut-être parce que les parties sulphureuses se développent, comme il arrive dans la dissolution du soufre minéral, par une forte lessive alkaline.

C'est d'après les principes chimiques de la gomme-gutte, qu'on soupçonne que sa vertu cathartique dépend d'une substance sulphureuse, ténue et mêlée avec une certaine portion de sel volatil, en sorte que ses particules salines, sulphureuses, développées par le suc gastrique, irritent violemment les membranes de l'estomac et des intestins, et excitent les nausées, les vomissements, et la purgation ; mais on ne doit donner ces sortes d'explications que pour des hypothèses, et non pour des vérités.

M. Boulduc n'a pu réussir à obtenir des fleurs de la gomme-gutte, ainsi qu'on en obtient du benjoin ; la résine de cette gomme tirée à l'esprit-de-vin, purge avec beaucoup plus de force et d'irritation, que la gomme même.

Cette gomme dans les expériences que ce chimiste a faites, s'est dissoute dans une égale quantité d'eau bouillante, à l'exception d'un petit nombre de particules terrestres ; cette liqueur étant filtrée, a donné après son évaporation à petit feu, une espèce de sel grisâtre qui coule aisément lorsqu'on n'a pas soin de bien boucher le vaisseau dans lequel on l'enferme. Cet extrait salin purge avec moins d'activité et en moindre dose que la gomme ; mais comme il ulcère la gorge, il faut quand on l'emploie, l'envelopper dans quelque substance onctueuse et adoucissante.

Nous avons déjà remarqué que la gomme-gutte ne se dissout point dans l'eau, qu'elle se précipite au fond du vase en substance laiteuse de couleur jaunâtre, et laisse l'eau aussi nette qu'auparavant ; nous ajoutons ici que ce résidu ne diffère en rien de la gomme, mais qu'il est plus pur. Le vinaigre distillé éclaircit cette substance laiteuse ; l'huîle de vitriol la trouble, et l'esprit-de-vin la rend de couleur d'or.

Puisque la gomme-gutte est un des plus puissants cathartiques du règne végétal, et par conséquent un des plus propres à produire de grands effets, il importe de savoir à qui, comment, à quelle dose, et avec quelle précaution ou correctif on peut la prescrire.

Elle ne convient point aux tempéraments délicats dont les nerfs sont attaqués, ni aux personnes qui ont une grande difficulté à vomir. Lorsque la maladie l'exige dans certains cas, il est bon de la donner sous la forme de bol ou de pilules, parce qu'il n'y a point de menstrue capable d'en extraire toutes les qualités : on ne peut la bien pulvériser, sans y ajouter quelque peu de sel lixiviel, tel que celui de tartre ou du sucre, qui d'ailleurs ont l'avantage de diviser ses parties résineuses, et de les empêcher de s'attacher trop fortement aux membranes de l'estomac et des intestins.

Cette gomme évacue surtout et promptement, les humeurs séreuses et bilieuses, ténues, tant par haut que par bas. Les médecins éclairés qui savent administrer ce remède avec prudence, y trouvent les avantages suivants, qu'il est sans goût et sans odeur, qu'on le donne en petite dose, qu'il fait son effet en peu de temps, qu'il dissout puissamment les sucs visqueux et tenaces en quelque partie du corps qu'ils se trouvent, et enfin qu'il chasse par le vomissement ceux qui sont dans l'estomac, et les autres en abondance par les selles. Ces mêmes médecins assurent avoir employé ce remède avec un grand succès dans l'apoplexie séreuse, l'hydropisie, l'asthme humide, et d'autres graves maladies catarrheuses.

Ils prescrivent la gomme-gutte depuis deux grains jusqu'à quatre, et ils ont observé que ce remède donné à cette dose, excitait peu ou point de vomissement ; et que lorsqu'il en causait, cet effet cessait d'ordinaire à la seconde ou troisième prise.

Ce remède depuis quatre grains jusqu'à sept, développé dans beaucoup de liqueur, purge par haut et par bas, mais communément sans violence. Si on le donne à cette dose sous la forme de bol ou de pilules, il fait d'abord vomir ; mais le vomissement est très-leger, ou n'arrive point du tout, si on joint la gomme avec du mercure doux.

Cependant quand on a considéré que la gomme-gutte était du nombre de ces violents cathartiques, qui causent le bouleversement de l'estomac et la superpurgation, on s'est attaché à lui chercher des correctifs, pour modérer son activité : on a proposé à ce sujet les substances incrassantes, les sels lixiviels, tels que celui de tartre, le sucre, le mercure doux, et quelques autres moyens.

M. Boulduc a imaginé pour y parvenir, une expérience assez singulière ; il a enfermé la gomme-gutte dans un sachet, a mis ce sachet dans un pain tout chaud, et l'y a laissé pendant vingt-quatre heures ; ensuite il a pulvérisé sa gomme, l'a remise dans un autre sachet, et a repété son procédé quatre ou cinq fois consécutivement. Il nous assure que cette préparation a détruit la violence irritante de la gomme-gutte, sans diminuer ses vertus. Il ajoute que la croute du pain où il avait enfermé cette gomme, possédait une qualité purgative et émétique.

Tout cela se peut ; mais outre qu'une telle épreuve est très-fautive, la gomme-gutte de M. Boulduc n'en était pas moins émétique ; et en effet tous les correctifs du monde ne sauraient détruire l'éméticité de ce remède : d'ailleurs, il n'est pas besoin de recourir à des correctifs, pourvu qu'on donne la gomme à une petite dose, avec un adjoint convenable, ou en la délayant suffisamment. D'autres chimistes préparent une résine et un magistère avec ce suc ; mais de telles préparations sont inutiles et font même plus de mal que de bien, car les résines des purgatifs purgent généralement moins, et allument un plus grand feu dans les viscères.

Je finis par une observation sur la gomme-gutte, c'est que tandis qu'elle purge violemment, le fruit de l'arbre qui la produit est très-sain, se mange avec délices comme nos oranges ; et quand il est sec, il sert de remède efficace pour arrêter les flux de ventre séreux et bilieux. (D.J.)

* GOMME, terme de Chamoiseur, c'est une espèce de graisse qui se rencontre dans les peaux de moutons ou de chèvres que l'on passe en chamois. On fait sortir ce qui reste de chaux et de gomme dans ces peaux, par le moyen du confit. Voyez CHAMOIS, à l'endroit où il est parlé de la manière de passer et préparer les peaux de moutons en huîle ou autrement dit en chamois.