S. f. en Mécanique, le point de suspension d'une balance est le point où la balance est arrêtée et suspendue. Les points de suspension des poids de la balance sont les points où sont attachés ces poids. Le point de suspension d'une balance à bras égaux est le point de milieu de la balance. Il n'en est pas de même de la balance romaine, dont le point de suspension est fort près d'une de ses extrémités. Voyez APPUI, BALANCE, LEVIER, PESON, ROMAINE. (O)

SUSPENSION, (Belles Lettres) figure de rhétorique par laquelle l'orateur commence son discours de manière que l'auditeur n'en prévait pas la conclusion, et que l'attente de quelque chose de grand excite son attention et pique sa curiosité. Telle est cette pensée de Brebeuf dans ses entretiens solitaires. Il s'adresse à Dieu :

Les ombres de la nuit à la clarté du jour,

Les transports de la rage aux douceurs de l'amour,

A l'étroite amitié la discorde et l'envie,

Le plus bruyant orage au calme le plus doux,

La douleur au plaisir, le trépas à la vie,

Sont bien moins opposés que le pécheur à vous.

Autre sorte de suspension :

Vel pater omnipotens adigat me fulmine ad umbras,

Pallentes umbras erebi, noctemque profundam,

Ante pudor quam te violo, aut tua jura resolvo.

Didon s'arrête à la fin du premier vers ; elle fortifie son serment, elle s'effraye elle-même par des spectres, afin de s'encourager à tenir son serment.

Voici une même suspension dans des vers qui ne le cedent point en beauté à ceux de Virgile ; c'est Clitemnestre qui s'adresse à Oreste qui avait demandé en mourant que sa cendre fut déposée à côté de celle d'Agamemnon son père ; elle lui dit : tu veux donc

Que je descende au fond de ces grands monuments ;

Où la nuit du trépas, cette nuit immobile,

De l'ombre de ton père est l'éternel azile.

SUSPENSION, s. f. en Musique ; on appelle ainsi tout accord sur la basse duquel on soutient un ou plusieurs sons de l'accord précédent, avant que de passer à ceux qui lui appartiennent ; comme si la basse passant de la tonique à la dominante, je suspens encore quelques instants sur cette dominante l'accord de la tonique qui la précède, avant que de le résoudre sur le sien, c'est une suspension.

Il y a des suspensions qui se chiffrent et entrent dans l'harmonie ; quand elles sont dissonantes, ce sont toujours des accords par supposition. Voyez SUPPOSITION. D'autres suspensions ne sont que de goût ; mais de quelque nature qu'elles soient, on doit toujours les assujettir aux trois règles suivantes.

1°. La suspension doit se faire sur le frappé de la mesure, ou du moins sur un temps fort.

2°. Elle doit toujours se résoudre diatoniquement, soit en montant, soit en descendant, c'est-à-dire que chaque partie qui a suspendu, ne doit ensuite monter ou descendre que d'un degré, pour arriver à l'accord naturel de la note de basse qui a porté la suspension.

3°. Toute suspension chiffrée doit se sauver en descendant, excepté la seule note sensible qui se sauve en montant.

Avec ces précautions il n'y a point de suspension qui ne puisse se pratiquer avec succès ; mais c'est au goût seul qu'il appartient de les distribuer à-propos. (S)

SUSPENSION, (Jurisprudence) signifie quelquefois cessation, interruption, comme quand on dit qu'il y a eu cessation de poursuites.

Quelquefois suspension signifie interdiction ; c'est ainsi que les défenses que les cours font aux officiers inférieurs, portent ordinairement la clause à peine de suspension de leurs charges. Voyez INTERDICTION.

En matière canonique on dit plutôt suspense que suspension. Voyez SUSPENSE. (A)

SUSPENSION D'ARMES, en terme de Guerre, est une treve de peu de jours dont les parties belligerantes conviennent pour avoir le temps d'inhumer leurs morts, d'attendre du secours ou les ordres de leurs souverains, etc. Chambers.

C'est aussi une treve ou un temps pendant lequel on convient de ne faire aucun acte d'hostilité de part et d'autre. Voyez ARMISTICE. (Q)

SUSPENSION, terme d'Horlogerie, se dit en général des pièces ou parties par lesquelles un régulateur est suspendu.

Suspension par des soies. La suspension la plus usitée du pendule, lorsqu'il est court et léger, comme celui des pendules à ressort, des réveils, etc. est une soie doublée et attachée au coq par ses deux extrémités ; le haut de la verge du pendule qui dans ce cas est recourbé, s'accroche au milieu de la soie, et le mouvement est communiqué à ce pendule au moyen de la fourchette qui le prend aux environs du tiers de sa longueur. Voyez FOURCHETTE et PENDULE.

Suspension par des ressorts. Dans les pendules à grandes vibrations, au lieu de soie on se sert de deux ressorts très-affoiblis, qui passant au-travers du coq sont retenus par les parties de cuivre où ils sont rivés. Dans cette pratique, la fourchette a le même usage que dans la précédente. Voyez la fig.

Suspension par des couteaux. Une autre suspension qui est encore fort usitée dans les pendules, surtout en Angleterre, c'est celle qu'on appelle suspension à couteaux. Elle n'exige point de fourchette, le pendule y est suspendu à une tige, aux extrémités de laquelle on forme des angles d'environ 30 degrés, ou des couteaux, lesquels s'appuient dans des angles internes plus ouverts fixés sur chacune des platines, ou comme le pratique M. Graham sur des plans droits parallèles ; les angles étant alors le centre de l'arc décrit, le frottement devient peu considérable ; et l'on remédie au petit retard qui peut naître de la diminution d'élasticité des ressorts.

Suspension par des rouleaux. M. Suly, ingénieux artiste, employait pour le régulateur de ses pendules et montres marines, une suspension que quelques horlogers ont aussi appliquée aux pendules ordinaires. Elle consistait en deux grands rouleaux posés parallèlement aux platines, et formant entr'eux un angle curviligne aussi grand qu'il se pouvait. Le pivot de l'arbre qui portait le pendule et qui en était le plus près venait s'appuyer dans l'angle ci-dessus. Quand le pendule était en vibration, tout le frottement de la suspension était peu sensible ; ce frottement se transportant sur les pivots des rouleaux, qui parcouraient un espace diminué, dans le rapport de leur grandeur à celle de leurs pivots. L'expérience a fait voir que cette suspension, quoiqu'inférieure aux précédentes dans les pendules, pouvait devenir fort utîle pour diminuer le frottement des pivots des balanciers.