S. f. en Géométrie, est la formation qu'on imagine d'une ligne, d'un plan, ou d'un solide, par le mouvement d'un point, d'une ligne, ou d'une surface. Voyez LIGNE, POINT, SURFACE. Par exemple, on peut imaginer qu'une sphère est formée par le mouvement d'un demi-cercle autour de son diamètre : on appelle pour lors ce diamètre, axe de révolution ou de rotation. De même on peut regarder un parallélogramme comme engendré par le mouvement d'une ligne droite qui se meut toujours parallèlement à elle-même, et dont tous les points se meuvent en ligne droite : dans ce dernier cas, la ligne suivant laquelle le mouvement se fait, s'appelle quelquefois la directrice. Voyez DIRECTRICE et ENGENDRER.

GENERATION, en Physique, c'est en général l'action de produire ce qui n'existait point auparavant ; ou, pour parler plus exactement, c'est le changement d'un corps en un autre, qui ne conserve aucun reste de son état précédent. Car, à proprement parler, la génération ne suppose point une production de nouvelles parties, mais seulement une nouvelle modification de ces parties : c'est en cela que la génération diffère de ce que nous appelons création. Voyez CREATION.

Génération diffère d'altération, en ce que dans celle-ci le sujet parait toujours le même ; les accidents seuls et les affections sont changés ; comme quand un animal en santé tombe malade, ou quand un corps qui était rond devient carré.

Enfin génération est opposé à corruption, qui est la destruction d'une chose qui existait ; comme lorsque ce qui était auparavant bois ou œuf, n'est plus ni l'un ni l'autre. Les anciens philosophes concluaient de-là que la génération d'une chose est proprement la corruption d'une autre. Voyez CORRUPTION. Chambers.

La génération des corps en général, est un mystère dont la nature s'est réservé le secret. Pour savoir comment les corps s'engendrent, il faudrait résoudre des questions qui sont fort au-dessus de notre portée. Il faudrait savoir 1°. si les parties d'un corps quelconque, d'une plante, par exemple, sont différentes des parties d'un autre corps, comme d'une pierre ; en sorte que les parties qui composent une plante, combinées comme on voudra, ne puissent jamais faire une pierre : ou si les parties de tous les corps, les premiers éléments qui les composent, sont les mêmes, et produisent par la seule diversité de leur arrangement, les différents corps que nous voyons. 2°. Quand cette question serait décidée, le mystère de la génération n'en serait pas plus clair. Il faudrait ensuite savoir comment il arrive qu'un grain de blé, par exemple, étant mis en terre, ce grain de blé aidé par l'action des sucs terrestres, attire et dispose d'une manière convenable, pour former l'épi, ou les parties de blé qui sont dans le sein de la terre, ou les parties de terre, et d'autres substances, qui par une nouvelle modification deviennent des parties de blé. Que répondre à ces questions ? se taire et admirer les ressources de la nature : sans-doute on peut faire sur ce sujet des systèmes, des raisonnements à perte de vue, de grands discours ; mais que nous apprendront-ils ? rien. (O)

GENERATION, en Théologie, se dit de la procession ou de la manière dont le Fils de Dieu procede du Père éternel ; on l'appelle génération, au lieu que la procession du S. Esprit retient le nom de procession. Voyez TRINITE.

On dit en ce sens, que le Père produit son Verbe et son Fils de toute éternité, par voie de génération ; expression fondée sur plusieurs textes précis de l'écriture, et qui attache au mot génération une idée particulière ; elle signifie une progression réelle quant à l'entendement divin, qui produit un terme semblable à lui-même en nature ; parce qu'en vertu de cette progression, le verbe devient semblable à celui dont il tire son origine ; ou, comme S. Paul l'exprime, il est la figure ou l'image de sa substance, c'est-à-dire de son être et de sa nature.

Les anciens pères grecs appelaient cette génération , en latin prolationem, terme qui pris à la lettre signifie l'émanation d'une chose de la substance d'une autre chose. Cette expression fut d'abord rejetée par l'abus qu'en faisaient les Valentiniens pour expliquer la prétendue génération de leurs éons. Voyez ÉONS. Aussi voit-on qu'Origène, S. Athanase, S. Cyrille, ne veulent pas qu'on se serve de ce mot pour expliquer la génération éternelle du Verbe : mais depuis on fit réflexion que ce terme pris en lui-même et en écartant les idées d'imperfection qu'emporte avec soi le mot génération appliqué aux hommes, n'avait rien de mauvais ; et l'on ne balança plus à s'en servir, comme il parait par Tertullien, dans son ouvrage contre Praxée, chap. VIIIe par S. Irénée, liv. II. chap. xlviij. et par S. Grégoire de Nazianze, orat. 35.

Les scolastiques définissent la génération, l'origine d'un être vivant d'un autre être vivant par un principe conjoint en ressemblance de nature ; définition dont tous les termes sont inintelligibles : voici celle qu'en donne M. Witasse, un des auteurs les plus estimés sur cette matière.

On l'appele, dit-il, origine, c'est-à-dire émanation, procession ; nom commun à toute production.

2°. D'un être vivant ; parce qu'il n'y a que ce qui est vivant qui soit proprement engendré.

3°. D'un autre être vivant ; parce qu'il n'y a point de génération proprement dite, si ce qui engendre n'est vivant : ainsi, ajoute cet auteur, on dit qu'Adam fut formé du limon, mais non pas engendré du limon.

4°. Par un principe conjoint ; ce qui signifie deux choses. 1°. Que cet être vivant d'où procede un autre être vivant, doit être le principe actif de la production de celui-ci : par cette raison, Eve ne peut point être appelée proprement la fille d'Adam, parce qu'Adam ne concourut pas activement, mais seulement passivement, à la formation d'Eve : 2°. que cet être vivant qui produit un autre être vivant, doit lui être conjoint ou uni par quelque chose qui lui soit propre ; comme les pères, quand ils engendrent leurs enfants, leur communiquent quelque partie de leur substance.

5°. En ressemblance de nature ; termes qui emportent encore deux idées ; 1°. que la génération exige une communion de nature au-moins spécifique ; 2°. que l'action qu'on nomme génération doit par elle-même tendre à cette ressemblance de nature ; car le propre de la génération est de produire quelque chose de semblable à celui qui engendre.

De-là ils concluent que la procession du Verbe doit seule être appelée génération, et non procession ; et que la différence qui se trouve entre cette génération et la procession du S. Esprit vient de ce que le Verbe procede du Père par l'entendement, qui est une faculté affirmative, c'est-à-dire qui produit un terme semblable à elle-même en nature ; au lieu que le S. Esprit procede du Père et du Fils par la volonté, qui n'est pas une faculté assimilative ; ce que S. Augustin a exprimé ainsi, lib. IX. de trinit. c. XIIe ments notitiam suam gignit cum se novit ; et amorem suum non gignit cum se amat. Cependant il faut convenir que les anciens pères n'ont pas poussé si loin que les théologiens leurs recherches sur ces matières mystérieuses ; et S. Augustin lui-même avoue qu'il ignore comment on doit distinguer la génération du fils de la procession du S. Esprit, et que sa pénétration succombe sous cette difficulté : distinguere inter illam generationem et hanc processionem nescio, non valeo, non sufficio. lib. II. contrà Maxim. c. XIVe n°. 1.

GENERATION, se dit encore, quoique un peu improprement, pour signifier généalogie, ou la suite des enfants et des descendants qui sortent tous d'une même tige. Ainsi l'évangîle de S. Matthieu commence par ces mots, liber generationis Jesu-Christi, que les traducteurs les plus exacts rendent par ceux-ci, le livre de la généalogie de Jesus-Christ. Voyez GENEALOGIE. (G)

GENERATION, (Histoire ancienne et moderne) est synonyme à peuple, race, nation, surtout dans les traductions littérales de l'Ecriture-sainte, dans laquelle on rencontre presque par-tout le mot génération, où le latin porte generatio, et le grec ou : ainsi, " c'est une génération méchante et perverse qui demande des miracles, etc. ".

Une génération passe, et il en vient une autre.

GENERATION, se dit aussi de l'âge ou de la vie ordinaire de l'homme. Voyez AGE.

De-là nous disons, jusqu'à la troisième et quatrième génération : en ce sens les Historiens comptent ordinairement une génération pour l'espace de trente-trois ans ou environ. Voyez SIECLE.

Hérodote met trois générations pour cent ans ; et ce calcul, selon les auteurs modernes de l'arithmétique politique, parait assez juste. Voyez ARITHMETIQUE POLITIQUE et CHRONOLOGIE.

GENERATION, (Physiologie) on entend en général par ce terme, la faculté de se reproduire, qui est attaché aux êtres organisés, qui leur est affectée, et qui est par conséquent un des principaux caractères par lequel les animaux et les végétaux sont distingués des corps appelés minéraux.

La génération actuelle est donc, par rapport au corps végétant et vivant, la formation d'un individu semblable par sa nature à celui dont il tire son origine, à raison des principes préexistants qu'il en reçoit, c'est-à-dire de la matière propre et de la disposition à une forme particulière que les êtres générateurs fournissent pour la préparation, le développement et l'accroissement des germes qu'ils produisent ou qu'ils contiennent. Voyez GERME.

C'est donc par le moyen de la génération que se forme la chaîne d'existences successives d'individus, qui constitue l'existence réelle et non interrompue des différentes espèces d'êtres, qui n'ont qu'une durée limitée relativement à l'état d'organisation qui donne une forme déterminée et propre aux individus de chaque espèce.

C'est par la disposition même des parties en quoi consiste cette organisation, que celle-ci est bornée dans sa durée ; disposition que l'auteur de la nature a établie de telle manière, que ce qui est dans les êtres organisés le principe de leur existence comme tels, c'est-à-dire de la vie végétante ou animée dont ils jouissent entant qu'il y entretient l'action, le mouvement des parties solides et fluides dont ils sont composés, tend continuellement à devenir sans effet, et par conséquent à détruire la vie par l'exercice même des moyens vivifiants ; parce qu'après avoir employé un certain temps à procurer à ces êtres le degré de consistance soit absolue soit respective qui en fait la perfection essentielle, il ne peut continuer à agir sans augmenter cette consistance à un point où elle devient excessive, et forme un défaut radical en rendant les organes toujours moins propres à perpétuer le jeu qui leur est affecté, entant qu'il les prive insensiblement de la flexibilité qui leur est nécessaire pour cet effet, et qu'il laisse perdre la fluidité des parties, qui ne la conservaient que par accident, par l'effet de l'action à laquelle elles étaient exposées, de cette action qui dépend de la flexibilité dont on vient de dire que les organes étaient enfin privés.

C'est cette considération qui a fait dire à un ancien, que vivère est continuò rigescère ; c'est-à-dire que la condition de tous les corps organisés est de prendre par degré de la solidité, de se durcir, de se rendre roides de plus en plus, et de devenir ainsi dans la suite toujours moins propres à entretenir la vie par les mêmes effets qui ont d'abord formé ces corps, et qui les font subsister : d'où il s'ensuit dans les individus tant végétaux qu'animaux, le changement d'état qu'on appelle mort, qui n'est autre chose que la cessation du mouvement propre à ces individus entant que vivants, qui ne présente pour toute différence qu'une inaction commune à tout corps privé d'organisation, ou dont l'organisation n'est pas actuellement vivifiée : par conséquent, cet état laisse les corps organisés, comme tous ceux qui ne le sont pas, exposés aux impressions des agens destructeurs de toutes les formes particulières qui dégradent l'organisation, et réduisent la matière qui l'avait reçue à la condition de la matière brute, informe, jusqu'à ce que ces matériaux des corps organisés soient de nouveau tirés du chaos et mis en œuvre pour servir à la construction d'un corps vivifié, à la reproduction d'un végétal ou d'un animal.

Cette disposition, qui sans cesser d'être la même essentiellement, produit dans le même individu des effets si contraires en apparence : cette disposition, qui commence, entretient et finit la vie dans les êtres organisés, est sans-doute un ouvrage bien merveilleux ; mais quelque étonnant, quelque admirable qu'il nous paraisse, ce n'est pas dans la manière dont existe chaque individu qu'est la plus grande merveille, c'est dans la succession, dans le renouvellement et dans la durée des espèces, que la nature parait tout à fait inconcevable, qu'elle présente un sujet d'admiration tout opposé dans cette vertu procréatrice, qui s'exerce perpétuellement sans se détruire jamais ; dans cette faculté de produire son semblable, qui réside dans les animaux et dans les végétaux, qui forme cette espèce d'unité toujours subsistante. C'est pour nous un mystère dont on a si peu avancé jusqu'à-présent à sonder la profondeur, que les tentatives les plus multipliées semblent n'avoir servi qu'à convaincre de plus en plus de leur inutilité ; en sorte même que c'est, pour ainsi dire, violer le sein de la pudeur, où la nature cache son travail, que d'oser seulement tenter de chercher à en apercevoir la moindre ébauche. Aussi ayant à traiter dans cet article d'une matière si difficîle et si délicate, nous ne ferons point de recherches nouvelles, nous nous bornerons à faire un exposé simple et aussi discret qu'il est possible, des moyens évidents qu'elle a voulu employer pour préparer ce travail secret, et du peu de phénomènes que de hardis observateurs ont pu dérober à cette chaste ouvrière.

Ces moyens, c'est-à-dire les opérations mécaniques qui servent à la reproduction des végétaux et des animaux, sont de differente espèce, par rapport à ces deux genres d'êtres et à chacun d'eux en particulier. Généralement les animaux ont deux sortes d'organisations, essentiellement distinctes, destinées à l'ouvrage de la reproduction. Cette organisation constitue ce qu'on appelle les sexes. Voyez SEXE. C'est par l'accouplement ou l'union des deux sexes, que les individus de ce genre se multiplient le plus communément ; au lieu qu'il n'y a aucune sorte d'union, d'accouplement sensible des individus générateurs, dans le genre végétal ; la reproduction s'y fait en général par le développement des graines ou des semences qui ont été fécondées par le moyen des fleurs. Voyez VEGETAL, PLANTE, FLEUR. Ce développement des semences s'opère entièrement hors de l'individu qui les fournit : la reproduction des végétaux s'opère aussi par l'extension d'une portion de plante, qui, lorsqu'elle est une branche vivante, ou portion de branche séparée du tronc, du corps de la plante, et en tant qu'elle est destinée à cet usage, s'appelle bouture. Voyez BOUTURE. Et lorsqu'elle est une partie détachée de la racine de la plante, elle porte le nom de cayeu.

Il vient d'être dit que l'accouplement ou l'union des sexes dans les animaux est le moyen le plus commun par lequel se fait la multiplication des individus ; ce qui suppose qu'il n'est par conséquent pas l'unique. En effet il y a des animaux qui se reproduisent comme les plantes et de la même manière. La génération des pucerons qui se fait sans accouplement, est semblable à celle des plantes par les graines, qui sont fécondées et disposées au développement sans le concours de deux individus ; et celle des polypes, qui peut se faire en les coupant par pièces, ressemble à la reproduction des végétaux par boutures. Mais ces mêmes animaux avec la faculté particulière de se multiplier à la manière des plantes, sans accouplement, ne laissent pas d'avoir aussi la faculté commune à tous les autres animaux, de se reproduire par l'accouplement qui est la plus ordinaire pour ceux-là, comme elle est unique pour la plupart de ceux-ci ; ce qui fait aussi que c'est celle que l'on désigne spécialement par le mot de génération, et qui doit faire le sujet de cet article. Pour ce qui est donc des autres manières mentionnées dont se reproduisent ou peuvent se reproduire les animaux et les végétaux, manières qui établissent à cet égard quelques rapports particuliers entr'eux, voyez les articles ANIMAL, VEGETAL, PLANTE, REPRODUCTION, SEMENCE, GRAINE, BOUTURE, PUCERON, POLYPE.

La génération de l'homme entre tous les animaux étant celle qui nous intéresse le plus, est par conséquent celle qui doit nous servir d'exemple, et qui Ve faire ici le principal objet des recherches dont nous allons rendre compte ; d'autant plus que ce qui peut être dit sur ce sujet par rapport à l'espèce humaine, convient presqu'entièrement à toutes les autres espèces d'animaux, pour la reproduction desquels il est nécessaire que se fasse le concours de deux individus, c'est-à-dire qu'un mâle et une femelle exercent ensemble la faculté qu'ils ont de produire un troisième, qui a constamment l'un ou l'autre des deux sexes. Ces sexes consistant dans une disposition particulière d'organes destinés à la génération, il est nécessaire d'avoir une connaissance exacte de la structure de ces organes et des rapports qui existent entr'eux : mais cette exposition étant faite dans les différents articles appartenant aux noms de ces organes, elle ne sera pas répétée ici. On la peut consulter si on en a besoin, pour l'intelligence de ce qui Ve être dit ici concernant la génération.

L'âge auquel l'homme commence à être propre à se reproduire, est celui de la puberté : jusqu'alors la nature parait n'avoir travaillé qu'à l'accroissement et à l'affermissement de toutes les parties de cet individu ; elle ne fournit à l'enfant que ce qui lui est nécessaire pour se nourrir et pour augmenter de volume ; il vit, ou plutôt il ne fait encore que végéter d'une vie qui lui est particulière, toujours faible, renfermée en lui-même, et qu'il ne peut communiquer : mais bien-tôt les principes de vie se multiplient en lui ; il acquiert de plus en plus non-seulement tout ce qu'il lui faut pour son être, mais encore de quoi donner l'existence à d'autres êtres semblables à lui. Cette surabondance de vie, source de la force et de la santé, ne pouvant plus être contenue au-dedans, cherche à se répandre au-dehors.

L'âge de la puberté est le printemps de la nature, la saison des plaisirs ; mais surtout de ceux que l'usage de nouveaux sens peut procurer : tous ceux dont l'homme est doué, se forment avec lui et s'exercent dès qu'il jouit de la vie ; parce qu'ils lui sont tous nécessaires ou utiles pour l'exciter ou pour l'aider à satisfaire aux différents besoins attachés à la conservation de son individu. Les organes susceptibles du sentiment qui le porte à s'occuper des moyens par lesquels il peut contribuer à la propagation de son espèce, sont les seuls qui ne se développent, et n'ont de fonctions que lorsque l'individu est presque parvenu à son dernier degré d'accroissement, et que toutes les parties ont acquis la fermeté, la solidité qui en fait la perfection : ces organes n'étant pas destinés à son propre service, il convenait qu'il fut pourvu de tout ce qui peut contribuer à sa durée, avant qu'il contribuât lui-même à sa reproduction. Ainsi le développement des parties destinées à la génération, tant dans l'individu masculin que dans le féminin, est, pour ainsi dire, une nouvelle production qui s'annonce par plusieurs signes, et principalement par les premières impressions de l'appétit vénérien : d'où s'ensuit le sentiment, qui fait connaître dans chaque individu la différence des deux sexes, d'une manière plus caractérisée qu'elle n'avait été jusqu'alors. Voyez PUBERTE, ORGASME.

Le sentiment du désir dont il vient d'être fait mention ; cet appétit qui porte les individus des deux sexes, ordinairement de même espèce, à se faire réciproquement une tradition de leurs corps pour l'acte prolifique, est attaché à une disposition physique de l'animal, qui consiste dans une sorte d'érétisme des fibres nerveuses des organes de la génération. Cet érétisme est produit par la qualité stimulante des humeurs particulières qu'ils contiennent, ou par la dilatation des vaisseaux qui entrent dans leur composition, remplis, distendus au-delà de leur ton naturel ; effet d'un abord de fluides plus considérable, tout étant égal, qu'il ne se fait dans les autres vaisseaux du corps, ou par tout attouchement, tout contact propre à exciter une sorte de prurit dans ces organes ; ou par les effets de l'imagination dirigée vers eux, effets qui y produisent les mêmes changements que le prurit. D'où s'ensuit une sorte de fièvre dans ces parties, une sorte d'inflammation commençante qui les rend susceptibles d'impressions propres à ébranler tout le genre nerveux, à rendre ses vibrations plus vives, à redoubler le flux et le reflux qui s'en fait du cerveau à ces organes, et de ces organes au cerveau ; en sorte que l'animal dans cet état ne sent presque plus son existence, que par celle de ce sens voluptueux, qui semble alors devenu le siège de son âme, de toute sa faculté sensitive, à l'exclusion de toute autre partie, c'est-à-dire qui absorbe toute la sensibilité dont il est susceptible, qui en porte l'intensité à un point qui rend cette impression si forte, qu'elle ne peut être soutenue longtemps sans un désordre général dans toute la machine. En effet la durée de ce sentiment fait naître une sorte d'agitation, d'inquiétude, qui porte l'animal à en chercher le remède comme par instinct, dans ce qui peut tirer de cette intensité même des efforts propres à en détruire la cause, en produisant une excrétion des humeurs stimulantes, en faisant cesser l'érétisme, et par conséquent en faisant tomber dans le relâchement les fibres nerveuses et tous les organes, dont la tension était auparavant comme l'aliment même de la volupté.

Telle est donc la disposition physique que l'auteur de la nature a voulu employer pour porter l'homme par l'attrait du plaisir, à travailler à se reproduire, comme il l'a engagé par le même moyen à se conserver, en satisfaisant au sentiment qui le porte à prendre de la nourriture ; il ne s'occupe dans l'un et l'autre cas, que de la sensation agréable qu'il se procure, tandis qu'il remplit réellement l'objet le plus important qu'ait pu se proposer le conservateur suprême de l'individu et de l'espèce.

La secrétion de la liqueur spermatique ; la réserve de cette liqueur toujours renouvellée, mais en même temps toujours retenue en suffisante quantité pour remplir plus ou moins les vésicules séminaires ; la disposition constante à ce que le membre viril acquierre l'état d'érection, qui peut seul le rendre propre à être introduit dans le vagin, et à y être mis en mouvement à différentes reprises, pour donner lieu au frottement de l'extrémité de ce membre, douée d'un sentiment exquis, contre les plis veloutés des parois de ce canal, resserrées et lubrifiées (comme sont dans le vivant celles d'un boyau vide), pour continuer ce frottement jusqu'à ce qu'il excite par communication, dans toutes les parties relatives, une sorte de prurit convulsif, d'où s'ensuive l'éjaculation : telles sont dans l'homme les conditions réquises pour qu'il soit habîle à la fonction appelée coït ou copulation, par laquelle il concourt essentiellement à l'œuvre de la génération. Voyez SEMENCE (Physiolog.), TESTICULE, VESICULE SEMINALE, VERGE, ERECTION, EJACULATION.

Le coït ou la copulation n'étant autre chose que l'acte par lequel l'homme s'unit à la femme par l'intromission de la verge dans le vagin, et par lequel s'opère la fécondation, moyennant le concours des dispositions efficaces pour le succès de cette œuvre ; elles consistent ces dispositions de la part de la femme, en ce que le canal dans lequel doit se faire cette intromission, en soit susceptible ; qu'il puisse être dilaté ; que ses parois se laissent écarter et pénétrer sans de grands obstacles, jusqu'à l'orifice de la matrice, et qu'elles résistent cependant assez pour donner lieu au frottement nécessaire, qui doit produire dans les parties génitales de l'homme qui en sont susceptibles, le prurit et l'émission convulsive de la liqueur séminale dans ce même canal, en sorte que cette liqueur puisse y être retenue, pour opérer ensuite les effets auxquels elle est destinée.

Ce frottement excité dans le coït entre la verge et le vagin, ne donne pas seulement lieu au prurit, qui s'excite en conséquence dans les parties génitales de l'homme : il produit aussi cet effet dans celles de la femme, attendu le sentiment délicat dont est doué ce canal ; sentiment qui par le moyen des nerfs correspondants, se communique à tous les organes qui concourent au même usage ; d'où s'ensuit une véritable érection du clitoris, un gonflement et une tension générale dans toute l'étendue des membranes spongieuses et nerveuses du vagin et de la matrice ; une sorte de constriction spasmodique dans le cercle des fibres musculaires qui entourent le vagin ; d'où suit un retrécissement du canal et un plus grand resserrement de la verge qui y est actuellement contenue ; d'où suit encore vraisemblablement en même temps une autre sorte d'érection dans les trompes de Fallope, qui les applique à ce qu'on appelle les ovaires, pour les effets qui seront expliqués dans la suite. Ce sont ces différentes dispositions qui constituent le plus grand degré d'orgasme, qui n'est autre chose qu'un érétisme commun à toutes ces parties, par l'effet duquel, s'il est suffisamment continué, les glandes qui ont leur conduit excrétoire dans les cavités du vagin et de la matrice, étant fortement exprimées, y répandent l'humeur dont leurs vaisseaux sont remplis ; et cette effusion se fait comme celle de la semence dans l'homme, par une sorte d'action convulsive qui la rend semblable à l'éjaculation, et n'a pas peu contribué sans-doute à faire regarder cette liqueur de la femme comme une vraie semence, une liqueur aussi prolifique que celle de l'homme. Voyez SEMENCE (Physiol.).

C'est parce que la copulation produit cet orgasme, cette tension du genre nerveux dans les organes de la génération de l'un et de l'autre sexe, tension qui se communique, s'étend souvent à toutes les parties du corps, au point d'y causer aussi des secousses, des agitations comme convulsives, que Démocrite a comparé les phénomènes qui accompagnent le coït, à ceux que l'on observe dans de legeres attaques d'épilepsie. Voyez ORGASME.

Telle est l'exposition abrégée que l'on a cru devoir placer ici, du mécanisme qui dispose à l'œuvre de la génération, et de ce qui est relatif à ce mécanisme : mais cette œuvre ne dépend elle-même essentiellement d'aucune opération mécanique, tout y est physique : la nature emploie les moyens les plus secrets, les moins susceptibles de tomber sous les sens pour opérer elle-même la fécondation, dont les individus des deux sexes n'ont fait par la copulation que lui fournir les matériaux, ou, pour parler plus exactement, rassembler ceux qu'elle avait préparés elle-même dans chacun de ces individus. C'est dans la manière dont elle les met en œuvre ces matériaux, que consiste le grand mystère de la génération, qui a excité dans tous les temps la curiosité des Physiciens, et les a portés à faire tant de recherches pour parvenir à le pénétrer, tant d'expériences pour réussir à prendre la nature sur le fait ; c'est pour révéler son secret que l'on a imaginé tant de différents systèmes, qui se sont détruits les uns les autres, sans que du choc des opinions si longtemps et si violemment répété, il en ait résulté plus de lumières sur ce sujet : au contraire il semble que l'on ne fait que se convaincre de plus en plus, que le voîle derrière lequel la nature se cache, est essentiellement impénétrable aux yeux de l'esprit le plus subtil, et qu'il faut ranger la cause de la formation de l'animal parmi les causes premières, telles que celles du mouvement et de la pesanteur, dont nous ne pourrons jamais connaître que les résultats, sans-doute parce qu'il n'y a que cette connaissance qui nous soit utile.

Nous nous bornerons donc à faire ici l'histoire des différentes idées par lesquelles les Philosophes ont tenté de représenter l'ouvrage de la nature dans la génération (ouvrage qu'ils n'ont jamais vu) ; et afin qu'il ne manque dans cet article rien de ce qui appartient aux connaissances humaines sur ce sujet, ou pour mieux dire, aux efforts que l'on a faits dans tous les temps pour étendre ces connaissances sur toute sorte de matières, il sera joint à cette exposition des principaux systèmes sur la reproduction de l'homme, un précis des raisons qui ont été employées ou qui peuvent l'être, pour réfuter ou pour faire sentir l'insuffisance de ces explications.

Platon, dans le Timée, établit que la génération de l'homme, des animaux, des plantes, des éléments, et même celle du ciel et des dieux, se fait par des simulacres réfléchis, et par des images extraites de la Divinité créatrice, lesquelles par un mouvement harmonique, se sont arrangées selon les propriétés des nombres, dans l'ordre le plus parfait. L'essence de toute génération consiste donc, selon ce philosophe, dans l'unité d'harmonie du nombre trois, ou du triangle ; celui qui engendre, celui dans lequel on engendre, et celui qui est engendré : c'est pour cela qu'il a fallu deux individus pour en produire un troisième : c'est-là ce qui constitue l'ordre essentiel du père et de la mère, et la relation de l'enfant.

Quelle idée plus sublime, s'écrie à cette occasion le célèbre auteur moderne de l'histoire naturelle ! quelles vues plus nobles ! mais quel vide, quel désert de spéculations ! Nous ne sommes pas en effet de pures intelligences ; d'ailleurs le réel peut-il être produit par l'abstrait ? Prendre les nombres pour des êtres effectifs, dire que l'unité numérique est un individu général, qui non-seulement représente en effet tous les individus, mais même qui peut leur communiquer l'existence ; prétendre que cette unité numérique a de plus l'exercice actuel de la puissance d'engendrer réellement une autre unité numérique, à-peu-près semblable à elle-même ; constituer par là deux individus, deux côtés d'un triangle qui ne peuvent avoir de lien et de perfection que par le troisième côté de ce triangle, par un troisième individu qu'ils engendrent nécessairement : n'est-ce pas le plus grand abus que l'on puisse faire de la raison ? Mais quand on accorderait au divin Platon que la matière n'existe pas réellement, en peut-il résulter que nos idées soient du même ordre que celles du créateur ; qu'elles puissent en effet produire des existences ? la supposition d'une harmonie triangulaire peut-elle faire la substance des éléments ? le père et la mère n'engendrent-ils un enfant que pour terminer un triangle ? Ces idées platoniciennes, grandes au premier coup-d'oeil, ont deux aspects bien différents ; dans la spéculation, elles semblent partir de principes nobles et sublimes ; dans l'application, elles ne peuvent arriver qu'à des conséquences fausses et puériles, puisque nos idées ne viennent que par les sens, et que par conséquent bien loin qu'elles puissent être les causes des choses, elles n'en sont que des effets, et des effets très-particuliers, etc. On peut voir une exposition plus étendue de ce système si singulièrement métaphysique, à l'article où il sera traité de la philosophie de Platon en général. Voyez PLATONISME.

Les autres anciens philosophes, tels qu'Epicure, au lieu de se perdre comme Platon dans la région des hypothèses, s'appuient au contraire sur des observations, rassemblent des faits, et parlent un langage plus intelligible. L'homme et la femme ayant l'un et l'autre la faculté de répandre une liqueur dans le congrès, elle fut d'abord regardée comme prolifique en tant que leur mélange se présenta naturellement à l'esprit, pour expliquer l'origine de l'homme : c'est pourquoi tel fut le premier système physique sur la génération, qui est reproduit de nos jours sous differentes combinaisons. Lucrèce l'a décrit aussi clairement qu'aucun philosophe de l'antiquité.

Et commiscendo, cum semen forte virîle

Foemina commulsit subitâ vi, corripuitque ;

&c....

Semper enim partos duplici de semine constat.

&c....

Lib. IV. de naturâ rerum.

Selon ce grand poète philosophe lui-même, non-seulement le sperme viril doit être mêlé avec celui de la femme pour qu'elle conçoive, mais il ajoute encore deux singularités frappantes par le rapport qu'elles ont avec quelques systèmes modernes ; c'est que chacune de ces semences a un caractère qui lui est propre, relativement au sexe de l'individu qui la fournit ; en sorte que si dans le mélange qui s'en fait dans le corps de la femme ; la qualité de sa semence contribue plus à la formation de l'enfant, il a beaucoup de ressemblance avec elle ; de même qu'il tient beaucoup du père, si c'est sa semence qui est prédominante par ses effets ; et si l'ouvrage se forme également des deux liqueurs, il arrive que le résultat de cette tendre alliance est le portrait du père et de la mère : d'ailleurs pour la construction des différentes parties du corps, les deux semences étant composées de parties hétérogènes, le concours de celles qui ont de l'analogie entr'elles, forme les différents organes, comme le concours des atomes en général a pu former les différentes parties de l'univers.

Hippocrate parait avoir adopté ce qu'il y a d'essentiel dans le système d'Epicure, pour en former le sien, avec quelques legeres différences, qui consistent principalement en ce qu'il fait de plus grandes recherches sur les causes et sur les effets. Il suppose que la semence vient de toutes les parties du corps, mais particulièrement de la tête, d'où il la fait descendre par la moèlle épinière dans les reins ; et en admettant donc la liqueur prolifique de chaque sexe, il prétend que ces deux semences sont chacune de deux qualités différentes, dont l'une est forte, a plus de chaleur, c'est-à-dire plus d'esprits ; l'autre faible, chargée d'humidité, moins active ; que les mâles se forment lorsque la semence, tant du mâle que de la femelle, se trouve forte ; et les femelles, lorsque les semences dominantes sont faibles ; et pour la ressemblance de l'enfant au père et à la mère, elle dépend, comme dans le système précédent, du plus ou du moins de semence que l'un ou l'autre fournit.

Hippocrate, d'après le maître de Lucrèce, appuie son hypothèse sur le fait suivant ; savoir, que plusieurs femmes, qui d'un premier mari, n'ont produit que des filles, d'un second ont produit des garçons ; et que ces mêmes hommes, dont les premières femmes n'avaient produit que des filles, ayant pris d'autres femmes, ont engendré des garçons, selon, dit ce médecin philosophe, que la semence forte ou faible du mâle ou de la femelle est prédominante dans ces differents cas ; mais s'il arrive que le mélange des liqueurs prolifiques se fasse en quantité et qualité égales, qui contribuent par conséquent autant l'une que l'autre à l'œuvre de la génération, l'enfant participera-t-il également à la ressemblance et au sexe de son père et de sa mère ? Et d'ailleurs, dans le cas même le plus ordinaire à supposer, où cette égalité dans les semences n'existe pas, et où la liqueur séminale d'un des deux individus générateurs prédomine et influe le plus sur la ressemblance, pourquoi cette ressemblance n'est-elle pas autant dans le sexe, que dans les traits du visage ? L'expérience démontre que ces deux choses se rencontrent très-rarement ensemble ; ainsi cela seul semblerait suffisant pour faire rejeter cette opinion de l'existence des deux semences dans chaque sexe, et même d'une seule semence prolifique dans la femme en particulier ; ce qui dans la suite de cet article sera encore réfuté par d'autres raisons.

Voici comment se fait, selon Hippocrate, la formation du fétus : les liqueurs séminales s'étant mêlées dans la matrice, s'y épaississent par la chaleur du corps de la mère ; le mélange reçoit et tire l'esprit de la chaleur ; et lorsqu'il en est tout rempli, l'esprit trop chaud sort au-dehors : mais par la respiration de la mère, il arrive un esprit froid ; et alternativement il entre un esprit froid, et il sort un esprit chaud dans le mélange, ce qui lui donne la vie, et fait naître une pellicule à la surface du mélange, qui prend une forme ronde ; parce que les esprits agissant du milieu comme centre, étendent également de tous côtés le volume de cette matière. Il se forme peu-à-peu une autre pellicule, de la même façon que la première pellicule s'est formée ; le sang menstruel dont l'évacuation est supprimée, fournit abondamment à la nourriture : ce sang fourni par la mère au fétus, se coagule par degrés, et devient chair ; cette chair s'articule à mesure qu'elle croit, et c'est l'esprit qui donne cette forme à la chair : chaque chose prend sa place. Les parties solides se joignent aux parties solides ; celles qui sont humides aux parties humides : chaque chose cherche à s'unir à celle qui lui est semblable ; et le fétus est enfin entièrement formé par ces causes et ces moyens.

Aristote, qui est celui de tous les anciens qui a le plus écrit sur la reproduction des êtres organisés, et qui a traité de ce sujet le plus généralement, établit pour principe à cet égard, que la matière n'étant qu'une capacité de recevoir les formes, prend dans la génération une forme semblable à celle des individus qui la fournissent ; et par rapport aux animaux qui ont des sexes, son sentiment est que le mâle fournit seul le principe prolifique, et que la femelle ne donne rien qu'on puisse regarder comme tel. Voyez les œuvres de ce philosophe, de generatione, lib. I. cap. xx. et lib. II. cap. IVe Car quoi qu'il dise ailleurs, en parlant des animaux en général, que la femelle dans le coït répand une liqueur au-dedans d'elle-même, il parait qu'il ne regarde pas cette liqueur comme un principe prolifique ; et cependant selon lui, la femelle fournit toute la matière nécessaire à la génération. Cette matière est le sang menstruel, qui sert à la formation, à la nourriture et au développement du fétus ; mais le principe efficient existe seulement dans la liqueur séminale, laquelle n'agit pas comme matière, mais comme cause.

Averroès, Avicenne et plusieurs autres philosophes, qui ont suivi le sentiment d'Aristote, ont cherché des raisons pour prouver que les femelles n'ont point de liqueur prolifique. Ils ont dit que comme les femelles ont la liqueur menstruelle, et que cette liqueur est nécessaire et suffisante à la génération, il ne parait pas naturel de leur en accorder une autre, et qu'on peut penser que le sang menstruel est en effet la seule liqueur fournie par les femelles pour la génération, puisqu'elle ne commence à paraitre que dans le temps de la puberté ; comme la liqueur prolifique du mâle ne parait aussi que dans ce temps. D'ailleurs, disent-ils, si la femelle a réellement une liqueur séminale et prolifique, comme celle du mâle, pourquoi les femelles ne produisent-elles pas d'elles-mêmes, et sans l'approche du mâle, puisqu'elles contiennent le principe de fécondation, aussi-bien que la matière nécessaire pour former l'embryon ? Cette raison métaphysique est une difficulté très-considérable contre tous les systèmes de la génération, dans lesquels on admet une semence prolifique, propre à chaque individu des deux sexes. M. de Buffon en traitant de ce sujet, dans son grand ouvrage de l'histoire naturelle, témoigne avoir senti toute la force de cette difficulté, à l'égard même de son système, qui est un de ceux de ce genre ; mais cette objection peut être encore étayée par bien d'autres que font les Aristotéliciens. Ils ajoutent donc, que s'il existait une liqueur prolifique dans les femelles, elle ne pourrait être répandue que par l'effet du plaisir vénérien, comme il arrive à l'égard de celle du mâle ; mais qu'il y a des femmes qui conçoivent sans aucun plaisir ; que ce n'est pas le plus grand nombre des femmes qui répandent de la liqueur dans l'acte de la copulation ; qu'en général celles qui sont brunes, et qui ont l'air hommasse, ne répandent rien, et cependant n'engendrent pas moins que celles qui sont blanches, et dont l'air est plus féminin, qui répandent beaucoup ; qu'ainsi on peut conclure aisément de toutes ces raisons, que la liqueur que les femmes répandent, ou qu'elles ont la faculté de répandre dans le coït, n'est point essentielle à la génération ; qu'elle n'est par conséquent point prolifique.

N'est-il pas en effet plus vraisemblable qu'elle n'est que comme une salive excrémenteuse, destinée à lubrifier les cavités du vagin et de la matrice ; que lorsqu'elle est répandue d'une manière sensible, ce n'est que par l'effet d'une plus forte expression des glandes ou vaisseaux qui la contiennent, excitée par la tension ou la constriction convulsive qu'y opère le prurit vénérien ?

Mais pour revenir aux raisonnements des Péripatéticiens, ils pensent absolument que les femelles ne fournissent rien que le sang menstruel, qui est la matière de la génération, dont la liqueur séminale du mâle est la cause efficiente, entant qu'elle contient le principe du mouvement ; qu'elle communique aux menstrues une espèce d'ame, qui donne la vie ; que le cœur est le premier ouvrage de cette âme ; que cet organe contient en lui-même le principe de son accroissement ; qu'il a la puissance d'arranger, de réaliser successivement tous les viscères, tous les membres ; qu'ainsi les menstrues contiennent en puissance toutes les parties du fétus.

Voilà le précis du système sur la génération, proposé par Aristote, et étendu par ses sectateurs : Hippocrate et lui ont eu chacun les leurs. Presque tous les philosophes scolastiques, en adoptant la philosophie d'Aristote, ont aussi pensé comme lui à l'égard de la réproduction des animaux, presque tous les médecins ont suivi le sentiment d'Hippocrate sur ce sujet ; et il s'est passé dix-sept ou dix-huit siècles sans qu'il ait plus rien paru de nouveau sur cette matière, attendu la stupide vénération pour ces deux maîtres, que l'on a conservée pendant tout cet espace de temps, au point de regarder leurs productions comme les bornes de l'esprit humain : en sorte qu'il ne pouvait pas être permis même de tenter de les franchir, parce qu'on le croyait impossible ; jusqu'à Descartes qui a été heureusement assez osé pour prouver le contraire, et pour convaincre par ses succès, qu'il fallait l'imiter, en secouant comme lui le joug de l'autorité, pour n'être soumis qu'à celui de la raison.

Cependant ce même Descartes a cru, comme les anciens, que l'homme était formé du mélange des liqueurs que répandent les deux sexes. Ce grand philosophe, dans son traité de l'homme, a cru pouvoir aussi expliquer, comment par les seules lois du mouvement et de la fermentation, il se formait un cœur, un cerveau, un nez, des yeux, etc. Voyez l'homme de Descartes, et la formation du fétus dans ses œuvres.

Le sentiment de Descartes sur cette formation a quelque chose de remarquable, et qui préviendrait en sa faveur, dit l'auteur de la Vénus physique, si les raisons morales pouvaient entrer ici pour quelque chose ; car on ne croira pas qu'il l'ait embrassé par complaisance pour les anciens, ni faute de pouvoir imaginer d'autres systèmes.

En effet, au renouvellement des sciences, quelques anatomistes ayant fait des recherches plus particulières sur les organes de la génération, elles firent découvrir auprès de la matrice, au lieu de deux testicules qu'y avaient vus les anciens, deux corps blanchâtres, formés de plusieurs vesicules rondes, remplies d'une liqueur semblable à du blanc d'œuf ; l'analogie s'en empara ensuite. On regarda ces deux corps dans l'espèce humaine et dans toutes les espèces d'animaux où ils se trouvaient, comme faisant le même office, que ce qu'on appelle les ovaires dans les oiseaux ; et les vesicules dont étaient composés ces corps, parurent être de véritables œufs. Sténon fut le premier qui assura que les testicules des femelles sont de vrais ovaires ; ils furent après lui plus particulièrement examinés par Wanhorne et Graaf. Mais c'est principalement au fameux Harvey et au célèbre Malpighi, que l'on doit les observations qui ont le plus contribué à établir le nouveau système sur la génération, d'après la découverte des œufs ; mais comme ils sont placés au-dehors de la matrice, comment les œufs, quand ils seraient détachés de l'ovaire, pourront-ils être portés dans la cavité de la matrice, dans laquelle, si l'on ne veut pas que le fétus se forme, il est du-moins certain qu'il prend son accroissement ? Fallope avait trouvé deux tuyaux dépendants de la matrice, qui furent bientôt jugés propres à établir une communication entre les deux sortes d'organes dont il s'agit : on vit bientôt que les extrémités des deux tuyaux flottantes dans le bas-ventre, qui se terminent en forme de trompe par des espèces de membranes frangées, peuvent par l'effet d'une sorte d'érection s'approcher des ovaires, les embrasser, recevoir l'œuf, et servir à le transmettre dans la matrice, où ces espèces de tuyaux ont leur embouchure.

Dans ce temps donc, dit l'auteur de la Vénus physique (en faisant l'exposition des differents systèmes sur la génération), dans ce temps la Physique renaissait, ou plutôt prenait un nouveau tour : on voulait tout comprendre, et on croyait le pouvoir. La formation du fétus par le mélange des deux liqueurs, ne satisfaisait plus les savants : des exemples de développement que la nature offre par-tout à nos yeux, firent penser que les fétus sont peut-être contenus, et déjà tous formés dans chacun des œufs ; que ce qu'on prenait pour une nouvelle production, n'est que le développement des parties contenues dans le germe, rendues sensibles par l'accroissement. Il suivait de-là que la fécondité retombe presque toute sur les femelles, puisque dans cette hypothèse, les œufs destinés à fournir les rudiments des corps des mâles, ne contiennent chacun qu'un seul mâle ; et que l'œuf d'où doit sortir une femelle, contient non-seulement cette femelle entière, mais la contient avec ses ovaires, dans lesquels d'autres femelles contenues et déjà toutes formées, sont une source de générations à l'infini : car toutes les femelles contenues ainsi les unes dans les autres, et de grandeur toujours diminuante, dans le rapport de la première à son œuf, n'alarment que l'imagination. La matière divisible, au-moins à l'indéfini, peut avoir aussi distinctement dans l'œuf la forme du fétus qui naitra dans mille ans, que celle du fétus qui doit naître dans neuf mois : la petitesse qui cache le premier à nos yeux, ne le dérobe point aux lais, suivant lesquelles le chêne qu'on voit dans le gland, se développe et couvre la terre de ses branches.

Cependant quoique tous les hommes soient déjà formés dans les œufs de mère en mère, ils y sont sans vie : ce ne sont que de petites statues renfermées les unes dans les autres, comme les ouvrages du tour, où l'ouvrier s'est plu à faire admirer l'adresse avec laquelle il conduit son ciseau en formant cent boètes, qui se contenant les unes les autres, sont toutes contenues dans la dernière. Il faut pour que ces petites statues deviennent des hommes, quelqu'agent nouveau, quelqu'esprit subtil, qui s'insinue dans leurs organes, leur donne le mouvement, la végétation et la vie. Cet esprit est fourni par le mâle dans la liqueur qu'il répand avec tant de plaisir dans la copulation ; liqueur dont les effets sont semblables à ceux du feu, que les poètes ont feint que Prométhée avait dérobé au ciel, pour donner l'âme à des hommes qui n'étaient auparavant que des automates.

Mais avant de passer outre concernant ce système de la génération, par le moyen des œufs, il faut observer que les Anatomistes n'ont pas cependant d'abord tous entendu la même chose par le mot œuf. Lorsque le fameux Harvey a pris pour devise, omnia ex ovo, ce n'est qu'en tant qu'il pensait que le premier produit de la conception dans les vivipares, comme dans les ovipares, est une espèce d'œuf : il croyait avoir Ve cet œuf se former comme un sac sous ses yeux, après la copulation du mâle et de la femelle ; cet œuf, selon lui, ne venait pas par conséquent de l'ovaire, ou du testicule de la femelle. On voit bien qu'il n'y a rien là qui soit semblable à ce qu'on entend ordinairement par le mot œuf, si ce n'est que la figure d'un sac peut-être celle d'un œuf sans coquille, comme celle d'un tel œuf peut être celle d'un sac.

Cet auteur établit que la génération est l'ouvrage de la matrice ; qu'elle conçoit le fétus par une espèce de contagion que la liqueur du mâle lui communique, à peu-près comme l'aimant communique au fer la vertu magnétique : non-seulement cette contagion masculine agit sur la matrice, mais elle se communique encore à tout le corps féminin qui est fécondé en entier, quoique dans toute la femelle il n'y ait que la matrice qui ait la faculté de concevoir le fétus, comme le cerveau a seul la faculté de concevoir les idées ; et ces deux sortes de conceptions se font de la même façon. Les idées que conçoit le cerveau sont semblables aux images des objets qu'il reçoit par les sens ; le fétus qui est l'idée de la matrice, est semblable à celui qui le produit ; et c'est par cette raison que le fils ressemble au père, etc. (Cette explication parait si étrange, qu'elle semble n'être propre qu'à humilier ceux qui veulent pénétrer les secrets de la nature). Ensuite cet auteur, au lieu de représenter l'animal croissant par l'intussusception d'une nouvelle matière, comme il devrait arriver, s'il était formé dans l'œuf de la femelle, parait être persuadé que c'est un individu qui se forme par la juxta position de nouvelles parties ; et après avoir vu, comme il a été dit, se former le sac qui doit contenir l'embryon, il pense que ce sac, au lieu d'être la membrane d'un œuf qui se dilaterait, se fait sous ses yeux comme une toîle dont il observe les progrès. Il ne parle point de la formation du sac intérieur ; mais il a Ve l'animal qui y nage se former de la manière suivante. Ce n'est d'abord qu'un point, mais un point qui a la vie, punctum saliens, et autour duquel toutes les autres parties venant s'arranger, achevent bientôt la formation de l'animal.

Tel est le précis du système de ce grand anatomiste, qu'il semble avoir formé d'après le plus grand appareil d'expériences ; d'où il ne résulte cependant presqu'autre chose, sinon qu'Aristote l'a guidé plus que l'observation : car à tout prendre, il a Ve dans l'œuf de la matrice tout ce que le philosophe a dit ; et il n'a pas Ve beaucoup au-delà. D'ailleurs la plupart des observations essentielles qu'il rapporte, ne sont qu'une confirmation de celles qui avaient été faites avant lui par Parisanus, Volcher-Coïter, Aquapendente. Il est bon ensuite de remarquer, pour juger sainement de la valeur des autres expériences de l'anatomiste anglais, qu'il y a grande apparence qu'il ne s'est pas servi du microscope qui n'était pas perfectionné de son temps ; et qu'ainsi il ne peut qu'avoir mal vu, puisque la plupart de ses observations sont si peu conformes à la vérité. Il ne faut pour s'en assurer, que répéter les expériences sur les œufs, ou seulement lire avec attention celles de Malpighi (Malpighii pullus in ovo), qui ont été faites environ trente-cinq ou quarante-ans après celles de Harvey ; d'où il résulte que ce dernier n'a pas fait les siennes, à beaucoup près, avec autant de succès : car s'il avait Ve ce que Malpighi a vu, il n'aurait pas assuré, comme il l'a fait, que la cicatricule d'un œuf infécond et celle d'un œuf fécond, n'ont aucune différence ; tandis que Malpighi ayant examiné avec soin cette partie essentielle de l'œuf, l'a trouvée grande dans tous les œufs féconds, et petite dans les œufs inféconds. Harvey n'aurait pas dit que la semence du mâle ne produit aucune altération dans l'œuf, et qu'elle ne forme rien dans la cicatricule : il n'aurait pas dit qu'on ne voit rien avant la fin du troisième jour ; et que ce qui parait le premier est un point animé, dans lequel il croit que s'est changé le point blanc. Il aurait Ve que ce point blanc était une bulle qui contient l'ouvrage entier de la génération, et que toutes les parties du fétus y sont ébauchées, au moment que la poule a eu communication avec le coq : il aurait reconnu de même, que sans cette communication, elle ne contient qu'une mole qui ne peut devenir animée, que lorsqu'elle est pénétrée des parties vivifiantes de la semence du mâle. Il parait d'ailleurs que Harvey s'est trompé sur plusieurs autres choses essentielles. Il assure que cette liqueur prolifique n'entre pas dans la matrice de la femelle, et même qu'elle ne peut pas y entrer ; cependant Verheyen a trouvé une grande quantité de semence du mâle dans la matrice d'une vache, disséquée seize heures après l'accouplement. Verheyen sup. anat. tract. V. cap. IIIe Le célèbre Ruysch assure avoir disséqué la matrice d'une femme, (qui ayant été surprise en adultère, avait été assassinée sur le champ), et avait trouvé non-seulement dans la cavité de la matrice, mais aussi dans les deux trompes, une grande quantité de la liqueur séminale du mâle. Ruysch. thes. anat. tab. VI. On ne peut guère douter après le témoignage positif de ces grands anatomistes, que Harvey ne se soit trompé sur ce point important, à-moins que l'on ne dise que ce qu'ils ont pris pour de la liqueur du mâle, n'était en effet que de la prétendue semence de la femelle ; mais son existence n'est pas assez bien établie, comme il a été déjà dit (& il en sera encore fait mention), pour entrer en opposition avec des observations d'un si grand poids. Harvey qui a disséqué tant de femelles vivipares, assure encore qu'il n'a jamais aperçu d'altération dans leurs testicules après la fécondation : il les regarde même comme de petites glandes tout à fait inutiles à la génération ; tandis que ces testicules sont des parties fort considérables dans la plupart des femelles, et qu'il y arrive des changements et des altérations très-marquées, ainsi qu'on peut le voir aisément dans les vaches surtout. Ce qui a trompé Harvey, c'est que ce changement n'est pas à-beaucoup-près si marqué dans les biches et dans les daines. Conrad-Peyer qui a fait plusieurs observations sur les testicules des daines, croit avec quelque raison, que la petitesse des testicules dans les daines et dans les biches, est cause que Harvey n'y a pas remarqué de changement : Conrad-Peyer myrecolog. Enfin, si ce fameux observateur anglais eut été aussi exact dans ses recherches que ceux qui l'ont suivi, et particulièrement encore Malpighi, il se serait convaincu que dès le moment de la fécondation, par l'effet de la semence du mâle, l'animal parait formé tout entier ; que le mouvement y est encore imperceptible, et qu'il ne se découvre qu'au bout de quarante heures d'incubation. Il n'aurait pas assuré que le cœur est formé le premier ; que les autres parties viennent s'y joindre extérieurement, puisqu'il est évident par les observations de l'anatomiste italien, que les ébauches de toutes les parties sont toutes formées d'abord, mais que ces parties ne paraissent qu'à mesure qu'elles se développent.

Les observations de Malpighi ont donc ainsi contribué principalement à rectifier les idées d'Harvey sur les premiers faits de la génération par le moyen des œufs ; et à faire regarder, d'après la confirmation de ses expériences par celles de Graaf et de Valisnieri, les testicules des femelles comme de vrais ovaires, et les œufs comme contenant véritablement les rudiments du fétus, qui n'ont besoin, pour être vivifiés d'un mouvement qui leur soit propre, que de l'influence de la semence du mâle dardée dans le vagin, pompée par l'orifice de la matrice, et élevée dans les trompes (au-moins quant à sa partie la plus atténuée) par une sorte de suction semblable à celle des tubes capillaires des points lacrymaux supérieurs ; ou par l'effet d'un mouvement péristaltique que l'on prétend avoir observé dans ces conduits ; en sorte que cette liqueur prolifique pénètre et est portée jusqu'aux ovaires, sur lesquels elle est versée, pour y féconder un ou plusieurs des œufs qui sont le plus exposés à la contagion. Ce système aurait emporté le suffrage unanime de tous les Physiciens, si dans le temps même où on était le plus occupé à perfectionner cette manière d'expliquer la génération, pour l'espèce humaine surtout, et à la rendre incontestable, on n'eut pas mis au jour une autre opinion fondée sur une nouvelle découverte qui avait fait voir, par le moyen du microscope, des corpuscules singuliers paraissant animés dans la liqueur spermatique de la plupart des animaux ; corpuscules que l'on crut d'abord devoir regarder aussi comme de vrais animaux : et comme on n'en trouva pas d'abord dans les autres humeurs du corps, on ne put pas se refuser à l'idée que ces animalcules découverts dans la seule semence des mâles, étaient de vrais embryons, auxquels il était réservé de reproduire les différentes espèces d'animaux ; car malgré leur petitesse infinie et leur forme de poisson, le changement de grandeur et de figure coute peu à concevoir au physicien, et encore moins à exécuter à la nature : mille exemples de l'un et de l'autre sont sous nos yeux, d'animaux dont le dernier accroissement ne semble avoir aucune proportion avec leur état au temps de leur naissance, et dont les premières figures se perdent totalement dans les figures nouvelles qu'ils acquièrent. Qui pourrait reconnaître le même animal dans le ver dont se forme ensuite le papillon ? etc.

Cette découverte des animalcules dans la semence, qu'on doit à Leuwenhoeck principalement, et à Hartsoèker, fut confirmée ensuite par Valisnieri, Andry, Bourguet, et plusieurs autres observateurs. Ces animalcules sont, disaient-ils, de différente figure dans les différentes espèces d'animaux ; cependant ils ont tous cela de commun, qu'ils sont longs, menus, sans membres : ils sont en si grand nombre, que la semence parait en être composée en entier, et Leuwenhoeck prétend en avoir Ve plusieurs milliers dans une goutte plus petite qu'un grain de sable. Selon les observations d'Andry, ils ne se trouvent que dans l'âge propre à la génération, que dans la première jeunesse ; et dans la grande vieillesse ils n'existent point. Ils se remuent avec beaucoup de vitesse dans la semence des animaux sains ; ils sont languissants dans ceux qui sont incommodés, surtout dans la semence des vérolés : ils n'ont aucun mouvement dans la semence des impuissants. Ces vers dans l'homme ont la tête, c'est-à-dire l'une des deux extrémités par lesquelles se termine leur corps, plus grosse, par rapport à l'autre extrémité, qu'elle ne l'est dans les autres animaux ; ce qui s'accorde, dit le même Andry, avec la figure du fétus, dont la tête en effet est beaucoup plus grosse, à proportion du corps, que celle des adultes.

D'après ces différentes observations, la plupart de ceux qui les avaient faites crurent être bien fondés à renoncer au système des œufs, et à s'y opposer de toutes leurs forces. Ils disaient que les femelles ne fournissant rien de pareil aux animalcules de la semence des mâles, qui avaient été trouvés par Leuwenhoeck dans la matrice même et dans les trompes d'une chienne, peu de temps après avoir été couverte ; il était évident que la fécondité qu'on attribuait aux femelles de tous les animaux, appartenait au contraire aux mâles ; que n'y ayant que la semence de ceux-ci dans laquelle on puisse découvrir quelque chose de vivant, ce fait seul avançait plus l'explication de la génération, que tout ce qu'on avait imaginé auparavant, puisqu'en effet ce qu'il y a de plus difficîle à concevoir dans la génération, c'est la production de l'être qui a vie, l'origine de la vie elle-même ; que tout le reste est accessoire, et qu'ainsi on ne pouvait pas douter que ces petits animaux de la semence humaine ne fussent destinés à devenir des hommes, comme ceux de la semence des autres animaux à devenir des animaux parfaits dans chaque espèce. Et lorsqu'on opposait aux partisans de ce système, qu'il ne parait pas naturel d'imaginer que de plusieurs millions d'animalcules, dont chacun pouvait devenir un homme ou un autre animal parfait, il n'y eut qu'un seul de ces animalcules qui eut cet avantage ; lorsqu'on leur demandait pourquoi cette profusion inutîle de germes d'hommes, ils répondaient que c'était la magnificence et la profusion ordinaire de la nature ; que dans les plantes et dans les arbres on voyait bien que de plusieurs millions de graines qu'ils produisent naturellement, il n'y en a qu'un très-petit nombre employées à la reproduction de l'espèce ; et qu'ainsi on ne devait point être étonné de celui des animaux spermatiques, quelque prodigieux qu'il fût. Tout concourt donc, concluaient-ils, à favoriser le système qui leur attribue d'être les principaux agens de la génération, et à faire rejeter celui des œufs.

Cependant, disaient quelques-uns, si l'on veut absolument leur attribuer encore quelqu'usage pour l'œuvre de la fécondation, et qu'ils soient employés dans les femelles des vivipares comme dans celles des ovipares, ces œufs, dans les unes et dans les autres, peuvent être admis, comme un réservoir qui contient la matière nécessaire pour fournir à l'accroissement du ver spermatique : il y trouve une nourriture préparée à cet effet ; et lorsqu'il y est une fois entré, après avoir rencontré l'ouverture du pédicule de l'œuf, et qu'il s'y est logé, un autre ne peut plus y entrer, parce, disent-ils, que celui qui s'y est introduit, bouche absolument le passage, en remplissant la cavité ; ou bien parce qu'il y a une soupape à l'ouverture du pédicule, qui peut jouer lorsque l'œuf n'est pas absolument plein, mais qui ne peut plus s'ouvrir lorsque l'animalcule a achevé de remplir l'œuf. Cette soupape est d'ailleurs imaginée là fort à-propos, parce que s'il prend envie au nouvel hôte de sortir de l'œuf, elle s'y oppose ; il est obligé de rester et de se transformer. Le ver spermatique est alors le vrai fétus, la substance de l'œuf le nourrit, les membranes de cet œuf lui servent d'enveloppe ; et lorsque la nourriture contenue dans l'œuf commence à manquer, que l'œuf lui-même a grossi par l'humidité qu'il pompe dans la matrice, comme une graine dans la terre, il s'applique à la surface intérieure de ce viscère, s'y attache par des racines, et tire par leur moyen sa nourriture et celle du fétus, du sang de la mère, jusqu'à-ce qu'il ait pris assez d'accroissement et de force pour rompre enfin ses liens, et sortir de la prison par sa naissance.

Par ce système des vers spermatiques en général, ce n'est plus la première femme qui renfermait les races passées, présentes et futures ; mais c'est le premier homme qui en effet contenait toute sa postérité. Les germes préexistants ne sont plus des embryons sans vie, renfermés comme de petites statues dans des œufs contenus à l'infini les uns dans les autres ; ce sont de petits animaux, de petits homuncules, par exemple, réellement organisés et actuellement vivants, tous renfermés les uns dans les autres, auxquels il ne manque rien, et qui deviennent parfaits par un simple développement aidé d'une transformation semblable à celle que subissent les insectes avant d'arriver à leur état de perfection.

Cette transformation, qui ne fut d'abord proposée que comme une conjecture, que comme le résultat d'un raisonnement fait par analogie, parut ensuite être prouvée, démontrée par la prétendue découverte concernant les animalcules de la semence de l'homme, publiée dans les nouvelles de la république des Lettres (année 1669), sous le nom de Dalempatius, qui assurait qu'ayant observé cette liqueur prolifique, il y avait trouvé des animaux semblables aux têtards, qui doivent devenir des grenouilles ; que leur corps lui parut à-peu-près gros comme un grain de froment ; que leur queue était quatre ou cinq fois plus longue que le corps ; qu'ils se mouvaient avec une grande agitation, et frappaient avec la queue la liqueur dans laquelle ils nageaient. Mais, chose plus merveilleuse, il ajoutait qu'il avait Ve un de ces animaux se développer, ou plutôt quitter son enveloppe ; que ce n'était plus un animal tel qu'auparavant, mais un corps humain, dont il avait très-bien distingué les deux bras, les deux jambes, le tronc, et la tête, à laquelle l'enveloppe servait de capuchon. Il ne manquait à cette observation, pour les conséquences qu'on voulait en tirer, que la vérité du fait. L'auteur, qui était, sous le nom emprunté de Dalempacius, M. de Plantade, secretaire de l'académie de Montpellier, a souvent avoué que toute cette prétendue découverte est absolument supposée, et qu'il n'avait eu, en la produisant, d'autre dessein que de s'amuser aux dépens des admirateurs, trop crédules, de ces sortes d'observations ; en quoi il ne réussit que trop bien dans le temps où il voulut ainsi en imposer au monde savant, de sorte qu'il ne contribua même pas peu à faire adopter au grand Boerhaave le système des animalcules, avec toutes ses dépendances.

Les deux opinions sur la génération, qui viennent d'être rapportées ; c'est-à-dire celle des œufs, comme contenant les rudiments du fétus ; et celle des vers spermatiques, comme formant eux-mêmes ces rudiments, ont partagé presque tous les Physiciens depuis environ un siècle. La plupart de ceux qui ont écrit nouvellement sur ce sujet, ont embrassé l'un ou l'autre de ces sentiments ; mais le système qui attribue aux œufs presque tous les principes de la génération, a été le plus reçu, et est resté le dominant dans les écoles. Il est donc important de rapporter ici les principales raisons qui ont été employées pour soutenir, pour défendre ce système, et pour combattre celui des animalcules.

On a commencé par objecter contre la destination des animalcules, qu'il ne parait pas vraisemblable que l'Auteur de la nature ait voulu les employer en si grande quantité (en tant qu'une seule goutte de semence versée dans la matrice, en contient un nombre infini), pour les sacrifier tous, selon la supposition de quelques partisans des vers, au plus fort d'entr'eux, qui parvient à en faire un massacre général avant que de s'emparer seul de la matrice ou de l'œuf ; ou, selon que l'ont imaginé d'autres, pour faire périr presque tous ces animalcules dans l'une de ces deux cavités, en tant qu'elles ne sont propres à fournir asîle qu'à un ou deux animalcules tout-au-plus ; tandis que tout le reste se trouvant pour ainsi dire dans un climat qui lui est contraire, ne peut pas s'y conserver, et qu'il n'y a que les plus robustes qui résistent. On oppose ensuite le défaut de proportion entre le volume des animalcules, observé dans la semence des différents animaux, et les animaux même qui sont supposés devoir en être produits. En effet Leuwenhoeck avoue qu'il n'a point trouvé de différence entre les animalcules de la semence des plus petits insectes, et ceux de la semence des grands animaux ; d'où on peut, ce semble, assez raisonnablement inférer qu'ils ne sont point destinés à changer d'état, et qu'ils sont simplement habitants de la liqueur séminale, comme ils le sont dans bien d'autres humeurs animales, où il en a aussi été découvert, telles que la salive, à l'égard de laquelle Leuwenhoeck dit qu'il avait trouvé que sa bouche contenait plus de ces animalcules que la Hollande ne contient d'habitants. On prétend encore prouver que les animalcules ne sont point destinés à jouer le principal rôle dans la génération, de ce qu'il ne s'en trouve point dans la semence de plusieurs animaux, tels que les petits cochons d'Inde, et le coq surtout, cet animal si porté à travailler à la multiplication de son espèce, tandis qu'il se trouve de ces animalcules dans la prétendue semence de la femme, selon que le rapporte Valisnieri, d'après l'observation certaine d'un docteur italien de ses amis, nommé Buono, qui s'était permis des recherches à ce sujet.

On remarque enfin, contre les animalcules considérés comme propres à former le fétus dans tous les animaux, que quoiqu'ils aient été facilement observés dans la semence du mâle tirée de ses propres réservoirs, il n'est aucun observateur, selon le témoignage même de Valisnieri, qui ait jamais assuré les avoir retrouvés dans cette semence, lorsqu'elle a été injectée dans la matrice, où il devrait y en avoir au-moins quelqu'un qui parut plus sensiblement et avec plus de vigueur, à proportion qu'il serait plus disposé à changer de forme. Il ne conste pas davantage que l'on en ait découvert dans les trompes et dans les ovaires, où l'imagination seule d'Andry les a fait pénétrer, puisque les meilleurs microscopes ne les y ont pu faire apercevoir.

Pour achever de renverser l'opinion des animalcules prolifiques, on demande de quelle manière ils se reproduisent eux-mêmes ; ce qui ramène la difficulté commune à tous les systèmes, pour trouver en quoi consiste le premier principe vivifiant dans l'ordre physique de la fécondation ; principe qu'on ne peut attribuer aux animalcules, qu'en remontant de ceux qui contiennent d'autres animalcules dans leur semence, à ceux qui y sont contenus, et ainsi de ceux-ci à d'autres, par un progrès de diminution à l'infini qui parait absurde, d'autant plus qu'il ne décide rien.

Mais ne peut-on pas douter même si ces prétendus animalcules sont véritablement des êtres organisés, vivants ? M. Lieberkuhn, célèbre observateur microscopique de Berlin, prétend être fondé à le nier ; ainsi il ne resterait plus aucun fondement au système qui les fait regarder comme les propagateurs de la vie animale.

Enfin on a observé des animalcules, ou de petits êtres crus tels, dans l'infusion de plusieurs sortes de plantes : il ne s'ensuit pas cependant qu'ils soient des embryons de plantes, et qu'ils servent à la reproduction des végétaux.

C'est donc d'après ces différentes raisons, si propres à faire rejeter le système des animalcules dans l'œuvre de la génération, que la plupart des médecins et autres physiciens se sont plus fortement attachés au système des œufs fournis par les testicules des femelles, fécondés par la liqueur séminale des mâles, sans qu'elle opère autre chose que de mettre en jeu les rudiments du fétus, déjà délinéés dans l'œuf. Ils ont cru devoir préférer ce système, qui est fondé sur un grand nombre d'expériences, qu'il semble étonnant que l'on puisse se refuser aux apparences de certitude qu'il présente, s'il y a quelque chose de bien certain en fait d'observations physiques.

En effet, les partisans des œufs alleguent pour fondement de leur opinion, 1°. que l'on ne peut pas douter que les petites bulles qui composent ce que les anciens appellent les testicules des femelles vivipares, ne soient de vrais œufs, comme dans les femelles ovipares ; que ces œufs ne renferment les rudiments du fétus, puisqu'il a été trouvé des œufs encore attachés à leur ovaire, qui n'ayant pu s'en détacher après y avoir été fécondés, y avaient pris leur accroissement, au point que l'embryon y était aperçu sensiblement, ayant toutes ses parties bien formées : tel est le cas rapporté par M. Littre, mém. de l'acad. 1707. Valisnieri rapporte un exemple pareil, d'après un journal de Médecine de 1663. Selon plusieurs auteurs cités par M. de Haller dans ses notes sur les commentaires des institutions de Boerhaave, on a Ve des œufs adhérants à l'ovaire, qui contenaient des portions de fétus, telles que des os, des dents, des cartilages qui s'y étaient formés, c'est-à-dire qui y avaient pris accroissement par une suite de fécondation imparfaite.

2°. Que l'on a trouvé plusieurs fétus de différentes grandeurs, qui étaient attachés par leur placenta à quelque partie du bas-ventre, de la même manière qu'ils doivent être naturellement attachés aux parois de la matrice ; et qui n'avaient pu s'être égarés ainsi, qu'en tant que des œufs avaient été détachés de l'ovaire après la fécondation, sans avoir été reçus par les trompes de Fallope, pour être portés dans la matrice. Il y a une infinité d'exemples de conceptions suivies de grossesses, dans lesquelles les fétus étaient placés hors de la matrice, dans les enveloppes qui leur sont propres. On peut consulter à ce sujet, entr'autres ouvrages, l'histoire de l'académie de 1716 ; les éphémerides des curieux de la nature, Déc. II. année. Santorinus fait mention d'une femme qui ne laissa pas de concevoir, quoiqu'elle eut dans le ventre un enfant qu'elle portait depuis vingt-trois ans ; ce qui fit juger que cet enfant n'était pas dans la matrice, comme on s'en convainquit ensuite.

3°. Qu'il y a un grand nombre d'observations de conceptions qui se sont faites dans les trompes de Fallope, dans lesquelles les œufs fécondés ont pris leur accroissement, et les fétus ont grossi comme dans la matrice. Riolan, Duverney, Mauriceau, Dionis, Douglas, et bien d'autres auteurs, rapportent des exemples de grossesses tubales. Mais outre ce que des accidents, des écarts de la nature ont appris à cet égard, on ne doit pas omettre ce que l'art a confirmé sur ce sujet par la fameuse expérience faite et rapportée par Nuck (adenogr. curios.), qui ayant lié la trompe d'une chienne trois jours après la copulation, assure avoir trouvé le vingt-unième jour deux fétus entre l'ovaire et la ligature, tandis que la portion de la trompe entre la ligature et la matrice se trouvait absolument vide. L'accord de ce fait avec ceux qui viennent d'être allégués, qui ont un rapport très-direct à celui-ci, ne laissent aucun doute sur la vérité du résultat.

4°. Que l'érection des trompes, l'application du pavillon aux ovaires, le mouvement péristaltique de ces conduits, concourent à annoncer qu'ils sont destinés à recevoir les œufs détachés des ovaires et à les transporter dans la matrice. Toutes ces propriétés étant prouvées par les observations de plusieurs anatomistes célèbres, tels que Graaf, Malpighi, Valisnieri, Bohn, etc. semblent ne devoir laisser aucun doute sur les effets qui doivent s'ensuivre, sans lesquels on ne verrait point de quel usage peuvent être ces organes dans l'économie animale. Voyez OVAIRE, OEUF, TROMPE DE FALLOPE. (Anatomie)

5°. Que la qualité alkalescente halitueuse, qui est reconnue dans la partie subtîle de la semence du mâle (voyez SEMENCE), la rend très-propre à pénétrer la substance de l'œuf, à produire une sorte de dissolution dans les différentes humeurs du petit corps de l'embryon qu'il contient, qui, comme elles ne participaient auparavant que d'une manière fort éloignée aux effets du principe du mouvement commun à toutes les parties de l'individu femelle, ne pouvaient avoir que peu de fluidité, et se mouvoir qu'avec une extrême lenteur ; en sorte que, ayant acquis par l'influence de la liqueur séminale une plus grande disposition à circuler, qu'elles n'avaient, étant laissées à elles-mêmes, l'âme ou la puissance motrice, telle qu'elle puisse être, que le Créateur place en même temps dans cette petite machine, y met tous les organes en jeu, et commence une vie qui est propre à l'embryon, dont les effets tendent dès-lors à convertir en sa substance les sucs nourriciers renfermés dans l'œuf, à le faire croitre par ce moyen, et à en former un animal parfait.

6°. Que l'on ne peut pas douter que la semence ne puisse être portée jusqu'à l'ovaire, par le moyen de la matrice et des trompes en érection. Si l'on fait attention que cette liqueur n'est pas d'une gravité spécifique plus considérable que celle des parois de la matrice et des trompes ; qu'elle peut par conséquent contracter adhésion avec la surface intérieure de ces organes, et qu'elle peut être attirée de proche en proche jusqu'à l'extrémité des trompes par une suction semblable à celle des tubes capillaires ; qu'on peut aussi se représenter le transport de la semence dans les cavités de la matrice et des trompes, comme étant fait par un mécanisme semblable à celui de la déglutition dans l'oesophage, par une sorte de mouvement péristaltique que l'on a dit ci-devant avoir été observé dans les trompes, qui devient antipéristaltique, pour porter en sens opposé les œufs de l'ovaire dans la matrice, qui, quoiqu'ils soient d'un plus grand diamètre que celui des trompes, dilatent ces conduits, comme le bol alimentaire fait à l'égard de l'oesophage dans la déglutition.

7°. Que la comparaison se soutient à tous égards entre ce qui se passe pour la génération des animaux vivipares et des animaux ovipares ; que comme les œufs de ceux-là ont besoin de l'incubation, pour que la chaleur y prépare les sucs nourriciers de l'embryon qui y est contenu, et le dispose à prendre de l'accroissement, à se fortifier assez pour sortir de sa prison et devenir ensuite un animal parfait ; de même les œufs fécondés dans les vivipares sont retenus dans la matrice, pour y être gardés et exposés à une véritable incubation au même degré de chaleur pendant un temps plus ou moins long, pour les mêmes effets que le poulet, par exemple, éprouve dans l'œuf couvé.

8°. Que cette analogie, à l'égard de la génération entre les animaux ovipares et les vivipares, parait bien complete , surtout en raisonnant d'après les expériences nombreuses et rapportées par plusieurs auteurs (vid. comment. instit. medic. Boerhaav. §. 669. not. 20. Haller), qui prétendent que les femmes, et par conséquent les femelles de la plupart des autres animaux vivipares, ont non-seulement des œufs susceptibles d'être portés dans la matrice, après avoir été fécondés, mais encore de ceux qui peuvent y être portés, sans être fécondés : que ceux-ci ont la faculté de grossir assez, par la seule nourriture qui leur est fournie, de l'individu femelle dont ils font partie, pour se détacher de l'ovaire, être reçus dans les trompes, portés dans la matrice, et en sortir avec le sang menstruel, ou même avec la liqueur qui s'en répand dans les actes voluptueux, comme le coït, et les autres moyens propres à exciter l'orgasme vénérien ; dans lesquels œufs inféconds on n'observe cependant aucune trace de l'embryon contenu, parce qu'il est imperceptible tant qu'il ne jouit pas d'une vie qui lui soit propre, et qui puisse commencer à rendre sensible le développement de ses parties.

9°. Enfin que l'analogie conduit à adopter le sentiment des œufs à l'égard de la génération, non-seulement par rapport aux animaux ovipares, mais encore par rapport aux plantes, qui, selon l'observation des plus habiles botaniologistes, tels que MM. Linnaeus, de Sauvages, se reproduisent toutes par le moyen d'une trompe qui sert à porter dans l'amas de graines, que l'on peut regarder comme un ovaire, la poussière séminale pour les féconder ; en sorte que cette trompe étant liée, et cette poussière n'y pouvant pénétrer, elles restent infécondes.

Quelques auteurs ont prétendu qu'il n'est pas absolument nécessaire que la semence du mâle entre dans la matrice pour parvenir aux ovaires, et pour rendre par cette voie la femelle féconde ; parce que, selon quelques observations, des femelles bouclées, qui n'avaient par conséquent pu recevoir cette liqueur, ou d'autres, qui de fait ne l'avaient point reçue dans le vagin, mais seulement sur les bords de son orifice extérieur, n'avaient pas laissé que d'être imprégnées. Ils ont imaginé que pour résoudre cette difficulté, il suffit de supposer que la semence ainsi versée sur les bords du vagin, est reçue dans les vaisseaux absorbans qui la portent dans les veines ; d'où elle est bien-tôt mêlée dans toute la masse du sang, et portée par la circulation jusqu'aux ovaires ; en sorte que l'œuf disposé à être fécondé, n'est fait tel, qu'après que toute la masse des humeurs de la femelle a été, pour ainsi dire, fécondée elle-même.

C'est à ce mélange de la liqueur séminale du mâle dans le sang de la femelle, que M. Fizes, qui entr'autres a adopté ce sentiment (exercitatio de generat. homin. perioch. III.), attribue tous les désordres, dont sont fatiguées, tourmentées la plupart des femmes nouvellement enceintes. On peut en voir une raison plus vraisemblable dans l'article EQUILIBRE (Economie animale).

Mais, d'après cette idée de fécondation procurée par le moyen de la circulation ; il devrait s'ensuivre que cette œuvre admirable pourrait être opérée, par quelque voie que la semence soit introduite dans la masse du sang, et que les œufs des ovaires devraient être rendus féconds tous à-la-fais, ce qui est contre l'expérience.

Quoi qu'il en sait, de quelque manière que l'œuf soit fécondé ; soit que la semence du mâle portée immédiatement jusqu'à lui, par la voie de la matrice ou des trompes de Fallope, en pénètre la substance ; soit que délayée dans la masse des humeurs, elle n'y parvienne que par les routes de la circulation vers les ovaires : cette semence ou cet esprit séminal ayant la propriété d'exciter l'irritabilité des parties de l'embryon imperceptible, qui sont déjà toutes formées dans l'œuf, y met ainsi en jeu le principe du mouvement qui leur est particulier, et les dispose à se développer, à se rendre sensibles. L'œuf jusque-là fixement attaché à l'ovaire, s'étend en tous sens, sort de la cavité qui ne peut plus le contenir, rompt son pédicule, se détache par conséquent de l'ovaire : il est reçu dans le canal de la trompe, dont l'extrémité appelée le pavillon, embrasse alors l'ovaire pour recevoir cet œuf, qui delà est porté dans la matrice par le mécanisme dont il a été fait mention ci-devant. Alors semblable aux graines des plantes ou des arbres, lorsqu'elles sont reçues dans un terrain propre à les faire germer et végéter, l'œuf pousse des racines de la surface des membranes dont il est composé, qui, pénétrant dans les pores de la matrice jusqu'à s'anastomoser avec les vaisseaux de cet organe, en tirent les sucs nourriciers nécessaires pour son accroissement, et pour celui de l'embryon qu'il contient, et qui fait un tout avec lui ; en sorte qu'il se nourrit du sang de sa mère, comme les plantes des sucs de la terre, et qu'il commence à vivre par une véritable végétation. Voyez ci-après GROSSESSE.

Au reste, qu'une espèce de solidité, de dureté qui se trouve ordinairement dans l'enveloppe extérieure des œufs des oiseaux, n'empêche pas de comparer à ces œufs les sacs dans lesquels sont enfermés les embryons des vivipares ; les œufs de plusieurs animaux, des tortues, des serpens, des lésards, et des poissons, n'ont point d'enveloppe dure, et n'en ont qu'une mollasse et flexible ; ce ne sont pas moins des œufs, comme plusieurs de ceux que font bien des poules, qui sont sans coquille. Ainsi il est bien des animaux qui confirment cette analogie par rapport aux enveloppes respectives des embryons ; on peut même rapprocher encore davantage la génération des animaux vivipares de celle des ovipares, si l'on fait attention qu'il n'y a pas d'autre différence, qu'en ce que dans ceux-ci les œufs n'éclosent que quelque temps après être sortis du corps de la femelle ; au lieu que dans les vivipares les œufs éclosent immédiatement en sortant du corps de la mère : d'où il s'ensuit que l'incubation qui est nécessaire pour le développement des parties de l'embryon, tout formé dès la fécondation, se fait dans le corps à l'égard des vivipares et hors le corps des ovipares, et que par conséquent ces deux sortes de générations reviennent au même. Voyez OEUF, INCUBATION.

Quelque bien fondé que paraisse, par toutes ces raisons, le système des œufs, on n'a pas laissé de le trouver encore susceptible de bien des difficultés, tant générales que particulières : celles-ci regardent principalement l'existence réelle des œufs et leur forme, à l'égard desquels on propose des doutes, des questions, qui ne semblent pas aisées à résoudre. Ce n'est pas ici le lieu d'entrer dans ce détail. Voyez OVAIRE, OEUF. Quant aux difficultés du premier genre, une de celles que l'on ne doit pas omettre ici, d'autant plus que l'on la regarde comme étant des plus fortes ; c'est la ressemblance des enfants, tantôt au père, tantôt à la mère, et quelquefois à tous les deux ensemble. Si le fétus est préexistant dans l'œuf de la mère, comment se peut-il que l'enfant ressemble à son père ? Cette objection passe communément pour être insurmontable ; mais ne pourrait-on pas la faire cesser d'être telle, en répondant que la disposition des organes de l'embryon, avant et après la fécondation, dépend beaucoup de l'activité plus ou moins grande, avec laquelle s'exerce, s'entretient la vie de la mère, et de l'influence de cette activité, pour qu'il soit conformé de telle sorte ou de telle manière, analogue à celle dont cette même action de la vie (vis vitae) dans la mère a conformé ses propres organes, et que cette même disposition des parties de l'embryon ne peut que dépendre aussi plus ou moins de la force avec laquelle elles ont été mises en jeu par l'effet de l'esprit séminal du père, dont elles ont été imprégnées : d'où il s'ensuit que la ressemblance tient plus ou moins du père ou de la mère, selon que l'un ou l'autre a plus ou moins influé, par cela même qu'il fournit dans la génération et la formation ou le développement du fétus, sur le principe de vie et l'organisation de l'embryon, qui en reçoit à-proportion une forme plus ou moins approchante de celle du père ou de la mère ; ce qui peut rendre raison, non-seulement de ce qu'on observe par rapport à la ressemblance quant à la figure, mais encore par rapport à celle du caractère.

Une autre des difficultés générales que l'on propose, qui est plus embarassante que la précédente, c'est le progrès à l'infini par rapport aux embryons contenus dans les œufs ; de manière que la première femme devait renfermer tous les embryons des hommes qui ont été, qui sont et qui seront, et de ceux qui par la fécondation auraient pu, peuvent, et pourraient être. On ne peut pas se dissimuler que cette difficulté ne soit d'un très-grand poids, malgré l'idée de la divisibilité possible de la matière à l'infini ; parce que ce n'est qu'une idée, qui lorsqu'on essaye de la réduire en acte par le calcul, étonne l'imagination autant qu'elle paraissait d'abord la contenter. En effet, selon la supputation que l'on trouve dans l'histoire naturelle de M. de Buffon, tome III. chap. Ve l'homme serait plus grand par rapport à l'embryon contenu dans l'œuf de la sixième génération en remontant, que la sphère de l'univers ne l'est par rapport au plus petit atome de matière qu'il soit possible d'apercevoir au microscope. Que serait-ce, dit cet illustre auteur, si l'on poussait ce calcul seulement à la dixième génération ; calcul qui peut s'appliquer aux vers spermatiques, comme aux œufs ? Il faut encore convenir que l'expansibilité des matières odoriférantes, de la lumière même, ne fait pas évanouir ce que cette supputation présente de fort contre la vraisemblance du progrès à l'infini.

C'est pour éviter cet écueil, que quelques physiciens modernes ont cru devoir chercher dans les opinions des anciens des explications plus satisfaisantes du mystère de la génération, comme on a fait à l'égard de celles de la formation de l'univers, que l'on a pour la plupart renouvellées des Grecs, et surtout d'Epicure : c'est ainsi que le savant auteur de la Vénus physique a commencé par proposer de revenir au mélange des deux semences, fait de celle qui est attribuée à la femme, comme de celle de l'homme ; et pour rendre raison du résultat de ce mélange, il a recours à l'attraction : pourquoi, dit-il, si cette force existe dans la nature, n'aurait-elle pas lieu dans la formation des animaux ? Qu'il y ait dans chacune des semences des parties destinées à former le cœur, les entrailles, la tête, les bras, et les jambes ; et que ces parties aient chacune un plus grand rapport d'union avec celle qui pour la formation de l'animal, doit être sa voisine, qu'avec toute autre, le fétus se formera ; et fût-il encore mille fois plus organisé qu'il n'est, ajoute ce physicien, il se formerait ; ce qu'il assure comme une induction, par comparaison de ce qui se passe dans la formation de l'arbre de Diane, qui se fait par un pareil principe du rapport d'affinité ; d'après lequel il ne s'agit, dans le phénomène de cette végétation, que de rapprocher des parties métalliques absolument sans organisation, qui ne forment après tout dans cette réunion, rien de plus admirable que ce qui se passe à l'égard de la formation de la glace dans de petites lames d'eau, dans lesquelles la congelation commence toujours par former de petites ramifications de glace absolument semblables à des branches de fougère.

Mais dans l'un et l'autre cas, ce sont des particules de matière homogènes qui s'unissent les unes aux autres d'une manière assez uniforme dans la disposition et la substance de toutes ces ramifications ; au lieu que dans la formation des animaux, il n'y a point d'uniformité dans l'arrangement et dans la consistance des parties qui le composent. La force qui unit les molécules nécessaires pour les parois d'un conduit dans le corps animal, doit être de nature à éviter d'attirer de ces molécules dans l'espace qui doit former la cavité de ce vaisseau. Cette force doit attirer et unir entr'elles un plus grand nombre de molécules pour les parties d'une substance plus dense, comme les os, que pour les parenchymes. Voilà des modifications nécessaires dont on ne trouve point le principe dans l'attraction, qui forme l'arbre de Diane ou les ramifications de la glace : d'ailleurs les parties élémentaires du corps humain étant vraisemblablement les mêmes pour tous les organes qui le composent, et ne différant dans les différents agrégés qui en résultent, que par la différence de leur position différemment combinée ; il s'ensuit que la force qui distribue ces parties intégrantes, ne peut pas être soumise à une seule loi, telle que celle du rapport de l'affinité. Il y a des vaisseaux de différente espèce dans chaque partie du corps ; il y a des muscles, des tendons, des nerfs, des of dans les doigts ; il y a de toutes ces parties dans les orteils ; cependant chacun de ces organes est différemment combiné tant dans l'un que dans l'autre ; quoique les parties élémentaires d'un muscle du doigt puissent vraisemblablement entrer dans la composition d'un muscle du pied, et réciproquement. Ainsi le total des parties composées des mains, est un tout hétérogène, mais seulement par rapport à la différence des organes qui entrent dans la composition des mains : la différence n'étant donc que dans l'organisation, de ce qu'un principe particulier de mouvement peut seul donner une forme déterminée à un corps, mais sans organisation, il ne s'ensuit pas qu'il puisse être suffisant pour la formation d'un corps organisé : ainsi le système de la Vénus physique semble manquer essentiellement par son propre fondement, quelque spécieux qu'il paraisse d'abord, surtout pour rendre raison des ressemblances des enfants aux pères et mères, des conformations monstrueuses, et de la plupart des autres phénomènes relatifs à la génération, dont l'explication est si difficîle à donner.

Peu de temps après que ce dernier système a été mis au jour, il en a paru un autre d'une nature approchante, mais plus compliqué ; c'est celui du célèbre auteur de l'histoire naturelle générale et particulière. Il admet d'abord que les femelles, ainsi que le système précédent, ont une liqueur séminale prolifique, tout comme les mâles ; il admet encore, d'après un grand nombre d'expériences et d'observations microscopiques, que cette liqueur, dans chacun des deux sexes, contient des corpuscules en mouvement ; mais il prétend être fondé à assurer que ces petits corps ne sont pas de vrais animaux, mais seulement des parties des molécules qu'il appelle organiques, parce qu'elles ont la propriété exclusive de pouvoir entrer dans la composition des corps organisés ; il les regarde cependant comme vivantes, quoique prises séparément elles soient sans organisation. Selon cet auteur, tous les animaux mâles et femelles, tous ceux qui sont pourvus des deux sexes ou qui en sont privés ; tous les végétaux, de quelque espèce qu'ils soient ; tous les corps, en un mot, vivants et végétants, sont composés de parties organiques qu'il prétend que l'on peut démontrer aux yeux de tout le monde. Ces parties organiques sont en grande quantité dans les liqueurs séminales des animaux, dans les germes des amandes des fruits, dans les graines, enfin dans les parties les plus substantielles de l'animal ou du végétal.

C'est de la réunion des parties organiques renvoyées de toutes les parties du corps de l'animal ou du végétal, entant qu'elles composent le superflu de celles qui sont destinées à la nutrition et au développement de l'individu, que se fait la reproduction de ces êtres toujours semblables à celui dans lequel elle s'opère ; parce que la réunion de ces parties organiques ne se fait qu'au moyen du moule intérieur, c'est-à-dire dans l'ordre que produit la forme du corps de l'animal ou du végétal ; et c'est en quoi consiste l'essence de l'unité et de la continuité des espèces qui dès-lors d'elles-mêmes ne doivent jamais s'épuiser.

Pour un plus grand détail des idées de notre naturaliste sur ces parties organiques et le moule où elles s'arrangent, il faut recourir à son ouvrage même, et à l'art. ORGANIQUES (PARTIES), où on en trouvera l'exposition abrégée qui donnerait trop d'étendue à celui-ci.

Comme l'organisation de l'homme et des animaux est la plus parfaite et la plus composée, dit M. de Buffon, leur reproduction est aussi la plus difficîle et la moins abondante ; il prend pour exemple celle de l'homme. Il conçoit que le développement ou l'accroissement des différentes parties de son corps, se faisant par une force propre à faire pénétrer intimement dans le moule intérieur des organes, les molécules organiques analogues à chacune de ces parties ; force qui ne peut être autre que celle de l'attraction : toutes ces molécules organiques sont absorbées dans le premier âge, et entièrement employées au développement : par conséquent il n'y en a que peu ou point de superflues, tant que le développement n'est pas achevé : c'est pour cela que les enfants sont incapables d'engendrer ; mais lorsque le corps a pris la plus grande partie de son accroissement, il commence à n'avoir plus besoin d'une aussi grande quantité de molécules organiques pour se développer ultérieurement. Le superflu de ces mêmes molécules qui ne peut pas trouver à se faire un établissement local en pénétrant les parties du corps organisé, parce que celles-ci ont reçu tout ce qu'elles pouvaient recevoir, est donc renvoyé de chacune des parties du corps dans des réservoirs destinés à les recevoir ; ces réservoirs sont les vésicules séminales dans l'homme, et dans la femme les testicules, dont les corps glanduleux contiennent ainsi une vraie liqueur séminale qui distille continuellement sur la matrice et la pénetre, et qui y est même aussi portée par les trompes ensuite de leur érection, dans les circonstances propres à l'exciter. Les molécules organiques forment dans ces différents réservoirs la liqueur prolifique, qui dans l'un et l'autre sexe est, comme l'on voit, une espèce d'extrait de toutes les parties du corps ; en sorte que la liqueur séminale du mâle répandue dans le vagin, et celle de la femelle répandue dans la matrice, sont deux matières également actives, également chargées de molécules organiques propres à la génération : ces deux liqueurs ont entre elles une analogie parfaite ; puisqu'elles sont composées toutes les deux de parties non-seulement similaires par leur forme, mais encore absolument semblables dans leur mouvement et dans leur action : ainsi par le mélange des deux liqueurs séminales, cette activité des molécules organiques de chacune des liqueurs, est comme fixée par l'action contre-balancée de l'une et de l'autre ; de manière que chaque molécule organique venant à cesser de se mouvoir, reste à la place qui lui convient ; et cette place ne peut-être que celle de la partie qu'elle occupait auparavant dans le moule intérieur de l'animal, ou plutôt dont elle a été renvoyée avec les dispositions propres à entrer dans la composition de cette partie : ainsi toutes les molécules qui auront été renvoyées de la tête de l'animal, se disposeront et se fixeront dans un ordre semblable à celui dans lequel elles ont en effet été renvoyées ; et il en est de même de toutes les autres parties du corps : par conséquent cette nouvelle disposition des molécules organiques formera nécessairement par leur réunion un petit être organisé semblable en tout à l'animal dont elles sont l'extrait.

On doit observer, continue notre naturaliste, que ce mélange des molécules organiques des deux individus mâle et femelle, contient des parties semblables et des parties différentes. Les parties semblables sont les molécules qui ont été extraites de toutes les parties communes aux deux sexes ; les parties différentes ne sont que celles qui ont été extraites des parties par lesquelles les mâles diffèrent des femelles. Ainsi il y a dans ce mélange le double des molécules organiques pour former, par ex. la tête ou le cœur, ou telle autre partie commune dans les deux individus ; au lieu qu'il n'y a que ce qu'il faut pour former les parties du sexe. Or les parties semblables peuvent agir les unes sur les autres, sans se déranger, et se rassembler comme si elles avaient été extraites du même corps : mais les parties dissemblables ne peuvent agir les unes sur les autres ni se mêler intimement, parce qu'elles ne sont pas semblables. Dès-lors ces parties seules conserveront leur nature sans mélange, et se fixeront d'elles-mêmes les premières, sans avoir besoin d'être pénétrées par les autres ; et toutes celles qui sont communes aux deux individus se fixeront ensuite indifféremment et indistinctement, soit celles du mâle, soit celles de la femelle ; ce qui formera un être organisé, qui par les parties sexuelles ressemblera parfaitement à son père si c'est un mâle, et à sa mère si c'est une femelle ; mais qui, à l'égard des autres parties du corps, pourra ressembler à l'un ou à l'autre, ou à tous les deux, par le mélange plus ou moins dominant des molécules organiques qui proviennent de l'un ou de l'autre individu.

Il suit de tout ce qui vient d'être dit, que les mêmes molécules qui sont destinées à la nutrition et au développement du corps animal, servent aussi à la reproduction ; que l'une et l'autre s'opèrent par la même matière et par les mêmes lois : se nourrir, se développer, et se reproduire, sont donc les effets d'une seule et même cause. Le corps organisé se nourrit par les parties organiques des aliments qui lui sont analogues ; il se développe par la susception intime des molécules organiques qui lui conviennent ; et il se reproduit parce qu'il contient un superflu de ces mêmes parties organiques qui lui ressemblent, en ressemblant à celles qui forment les organes dont il est composé.

Tel est le précis du système de M. de Buffon, qui présente autant de difficultés dans toutes ses parties, qu'il fournit de preuves du génie et de la sagacité de son auteur. En effet, peut-on bien concevoir et conçoit-il bien lui-même ce que sont les molécules organiques sans organisation ; des parties vivantes, sans la condition essentielle qui peut seule rendre la matière susceptible des effets auxquels on a attaché l'idée de la vie ? Peut-on aisément se rendre raison pourquoi les molécules organiques superflues par rapport à la nutrition et au développement, et destinées à la reproduction, après avoir néanmoins pénétré comme les autres dans le moule intérieur, par la force attractive, n'y sont pas retenues par cette même force, à l'égard de laquelle on ne voit rien qui doive en suspendre l'effet ? pourquoi et comment elles acquièrent la liberté d'être portées dans les réservoirs ? Si tous les matériaux qui doivent servir à la construction d'un nouvel animal, se trouvent réunis dans les réservoirs de chacun des individus mâle et femelle ; pourquoi la formation d'un fétus ne se fait-elle pas dans le corps du mâle et dans celui de la femelle, indépendamment l'un de l'autre, comme cette formation se fait dans les animaux qui ont les deux sexes dans chaque individu, tels que les limaçons ? ce qui exclut le point d'appui fourni par les molécules organiques provenues des parties sexuelles ? Peut-on se contenter de la solution que donne l'auteur à cette difficulté, après avoir examiné bien des réponses qu'il ne trouve pas satisfaisantes ? suffit-il de dire avec lui, que c'est uniquement faute d'organes, de local propre à la formation, à l'accroissement du fétus, que le mâle ne produit rien par sa propre vertu ? Mais s'il s'est formé des fétus dans les petites bulles des testicules des femelles que l'on a prises pour des œufs, pourquoi ne s'en pourrait-il pas former dans les vésicules séminales des mâles, qui ont bien plus de capacité que ces bulles ? D'ailleurs, pour faire sentir en un mot l'insuffisance de cette solution ; pourquoi les femelles qui ont tous les organes nécessaires pour servir de local à l'œuvre de la reproduction, ne se suffisent-elles pas à elles-mêmes, au moins pour former d'autres individus de même sexe, sans le concours de la liqueur séminale des mâles ? M. de Buffon parait porté à croire que chaque liqueur séminale, soit du mâle soit de la femelle, peut seule produire quelque chose d'organisé : pourquoi ne peut-elle pas produire un animal parfait ? Mais en admettant même que les molécules organiques dissemblables fournies par les parties sexuelles, puissent former un centre de réunion pour les parties semblables ; pourquoi le mélange des liqueurs séminales des deux sexes ne produit-il pas toujours la formation d'un mâle et d'une femelle en même temps ; puisqu'il se trouve toujours dans ce mélange des matériaux suffisans au-moins pour la reproduction d'un individu de chacun des sexes ?

Mais si la formation du fétus se fait par la réunion des molécules organiques, dans le même ordre que celui des parties d'où elles ont été renvoyées, quelles seront les parties organiques destinées à former le placenta et la double membrane qui forme la double enveloppe du fétus ? Il n'y a ni dans le mâle ni dans la femelle aucun moule intérieur qui ait pu préparer les matériaux de ces organes accessoires ; il n'y en a aucun par conséquent qui ait renvoyé dans les réservoirs des matériaux propres à former ces organes particuliers et à déterminer l'ordre dans lequel ils doivent être formés : comment se forme donc le placenta et la double enveloppe du fétus ? c'est ce que notre auteur n'explique point et ce qui parait inexplicable dans ce système, contre lequel on peut d'ailleurs alléguer la difficulté commune à tous les systèmes qui admettent le mélange des deux liqueurs séminales dans la copulation, et par conséquent l'existence d'une vraie semence fournie par les femelles, à l'égard de laquelle on n'est pas même d'accord sur les organes qui sont supposés destinés à la préparer et à lui servir de réservoir. Voyez SEMENCE, TESTICULES. Mais sans s'arrêter à cette difficulté, et sans entrer dans la discussion à laquelle elle peut donner lieu, ne semble-t-il pas suffisant pour faire sentir le peu de fondement de l'idée d'une vraie semence dans les femmes, de demander pourquoi, si elles ont de la semence entièrement semblable à celle de l'homme, elle ne produit pas les mêmes effets, les mêmes changements dans le corps des filles, qu'elle produit dans celui des garçons à l'âge de puberté ? Voyez PUBERTE, EUNUQUE.

Il suit donc de tout ce qui vient d'être rapporté du système sur la génération, proposé dans la nouvelle histoire naturelle, qu'il ne sert qu'à prouver de plus en plus que le mystère sur ce sujet est impénétrable de sa nature ; puisque les lumières de l'auteur n'ont pu dissiper les ténèbres dans lesquelles la faculté reproductrice semble être enveloppée. Le peu de succès des tentatives que les plus grands hommes ont faites pour l'en tirer, n'a cependant pas rendu nos physiciens plus réservés à cet égard.

En effet, à la dernière opinion dont on vient de faire l'exposition, il n'a pas tardé d'en succéder une autre qui se trouve dans l'ouvrage intitulé Idée de l'homme physique et moral (Paris 1755.). Comme la théorie de l'économie animale a toujours éprouvé ses révolutions, ses changements, conséquemment à ceux qu'éprouve la Physique en général ; la philosophie de Newton ayant influé essentiellement sur la manière dont on a tâché d'expliquer la réproduction des individus organisés, et particulièrement de l'espèce humaine dans la Venus physique, et dans l'Histoire naturelle, par le principe des forces attractives et des affinités qu'on y a principalement mises en jeu : il convenait bien aussi que les découvertes faites au sujet de l'électricité, qui avaient déjà porté bien des écrivains à introduire cette nouvelle puissance dans la physique du corps humain, et même dans la partie médicale, fissent encore naître l'idée d'en faire une application particulière à l'œuvre de la génération. C'est ce que l'on voit dans l'ouvrage qui vient d'être cité ; l'auteur y propose donc ainsi son sentiment.

La propriété, dit-il, qu'ont les organes excrétoires de la liqueur séminale de devenir au moment de l'émission de cette liqueur le centre de presque tout mouvement et tout sentiment du corps, est un phénomène trop considérable, pour qu'il soit permis de restreindre une telle révolution au seul mécanisme de l'excrétion de la liqueur séminale. On ne saurait disconvenir, selon cet auteur, que le fluide éthérien ou électrique, ne doive être considéré dans chaque animal, comme une atmosphère active, qui embrasse également toutes les parties extérieures et intérieures du corps, depuis les plus simples jusqu'aux plus composées. Or on peut concevoir conséquemment que ce fluide doit par la révolution générale qui arrive au moment de l'émission, se réfléchir de toutes les parties du corps vers les organes de la génération, et s'imprimer dans la liqueur séminale, à-peu-près comme les rayons de lumière, qui étant réfléchis d'un objet, dont en quelque manière ils portent l'image, se peignent sur divers foyers, et notamment sur la rétine ; avec la différence par rapport au fluide éthérien, qu'étant réfléchi dans l'acte de la génération, il est déterminé avec beaucoup plus de force, et concentré en beaucoup plus grande quantité que la matière de la lumière ne l'est dans les faisceaux de rayons qui tombent sur la rétine, et que la liqueur séminale dans laquelle le fluide éthérien porte son impression, est autrement disposée par sa nature, par sa chaleur et sa fluidité, à recevoir et à conserver la force et l'étendue de l'impression de ce fluide, que ne l'est la rétine, qui n'est susceptible que de quelques ébranlements peu durables.

Or, poursuit notre auteur, que le fluide électrique puisse, suivant la sorte d'esquisse qu'il reçoit dans le corps du père et de la mère, tracer des linéaments et déterminer une organisation dans la liqueur séminale ; on en a presque la preuve dans la formation de ces toiles membraneuses, ou pour mieux dire, de cette espèce de tissu qui se fait dans le lait chaud, qu'on laisse refroidir. On ne peut chercher la cause de cette formation, que dans les propriétés du fluide électrique.

Ainsi dans ce système, la liqueur séminale du mâle parvenue dans la matrice avec l'esquisse qui y a été destinée, de la manière qui a été rapportée, reçoit encore des modifications ultérieures, soit par l'addition d'une nouvelle matière séminale fécondée, c'est-à-dire chargée aussi de son esquisse, soit par des mouvements particuliers de la matrice, dans laquelle la matière électrique accumulée pendant la copulation, doit probablement recevoir des déterminations particulières par l'action propre de cet organe, qui doivent s'accorder avec celles qui lui viennent des différents foyers qui constituent l'esquisse imprimée dans la liqueur séminale du mâle et de la femelle ; en sorte que dans la formation des empreintes que reçoit la liqueur séminale, il y a des endroits dans lesquels l'impression est plus forte ou plus marquée que dans d'autres ; parce qu'il est à présumer que les organes du corps qui sont les plus actifs, et par conséquent les plus chargés de matière électrique, sont aussi ceux qui envoyent à la liqueur séminale une plus grande quantité de rayons, dont la force supérieure fait de plus fortes impressions que les rayons qui partent des autres organes. Ainsi le cerveau et la moèlle épinière étant regardés comme les principales sources de l'action du corps, les impressions faites dans la liqueur séminale par leur irradiation, sont celles qui sont le mieux marquées : d'où il doit s'ensuivre que conformément aux observations de Malpighi et de Valisnieri, de semblables organes sont les premiers à se former dans cette liqueur par des espèces de coalitions, qui sont les éléments des parties solides, et qui sont comme des points fixes d'où la matière électrique se réfléchit et en entraîne des filaments, qui devenant à leur tour de nouveaux foyers, déterminent les réflexions différemment combinées pour qu'il en résulte la formation successive des différentes parties du corps, à mesure que le fluide électrique étend les traits de l'esquisse, selon les diverses attractions et répulsions des foyers, et selon le concours de l'action de la matrice.

Au reste, selon notre auteur, le plus ou le moins de force des traits imprimés dans l'une des deux semences, doit déterminer la production d'un mâle ou d'une femelle : les traits plus ou moins imprimés, selon le divers concours effectif du père et de la mère, décident les ressemblances ou les dissemblances des enfants à l'égard de leurs parents, soit dans la forme du corps, soit dans le caractère. Il trouve aussi dans son principe des raisons à donner des phénomènes de la génération les plus difficiles à expliquer.

Mais la seule exposition des fondements de ce système, tout ingénieux qu'il paraisse d'abord, suffit pour faire sentir combien l'homme est le jouet de son imagination, lorsqu'il n'a d'autre guide qu'elle dans les recherches de la vérité. En effet, la comparaison proposée entre les modifications ou l'action de la lumière qui peint les objets sur la rétine et les modifications ou l'action du fluide électrique réfléchi des différentes parties du corps sur la semence dans ses réservoirs, pour y imprimer l'esquisse de toutes ces parties ; cette comparaison qui parait avoir fourni seule le fondement de l'explication dont il s'agit sur la génération, n'aurait-elle pas dû au contraire faire sentir à l'auteur, avec un peu de réflexion, combien une idée aussi singulière est peu suffisante pour remplir cet objet ? car la lumière ne donne à aucune portion de matière la forme des choses sensibles qu'elle représente à l'âme : elle affecte seulement les organes par des impressions de différents degrés de force, qui portent à l'âme l'image de l'objet, non par la ressemblance qu'elles ont avec lui, mais sans laisser aucune trace, et par le seul effet des lois de l'union de l'âme avec le corps, conséquemment auquel effet il est attaché à tel degré d'impression de représenter telle chose, sans qu'il y ait aucun rapport absolu entre cette impression et l'idée qui en résulte. Ainsi les impressions de la lumière ne produisant aucune modification intrinseque dans les parties qui composent la rétine, si la matière électrique n'agit sur la semence que comme la lumière sur cet organe, il ne doit s'ensuivre aucun effet propre à donner à la matière séminale la disposition nécessaire pour qu'elle acquière l'organisation. La modification produite dans le lait, pour qu'il s'en forme des toiles, ne suppose qu'une adunation de parties huileuses homogènes, qui surnageant le reste du fluide, se rapprochent avec une certaine force de cohésion, à-mesure que le feu, ou même la seule chaleur de l'été, fait évaporer les parties aqueuses, hétérogènes, intermédiaires. La construction du corps animal est-elle aussi simple que cela ? Peut-on, de bonne foi, trouver quelque ressemblance dans la production de ces différents phénomènes ?

Mais en admettant l'irradiation de la matière électrique sur la semence, comment peut-on concevoir si celle du mâle en a reçu quelque modification dans ses réservoirs, qu'elle conserve cette modification, malgré les secousses violentes qu'elle a à éprouver dans l'éjaculation qui la divise en plusieurs parties, puisqu'elle est lancée à plusieurs reprises ? Quelle est la portion modifiée, chargée de l'empreinte ? sortira-t-elle entière ? peut-elle sortir telle ? si elle se partage, que résulte-t-il des deux portions ? s'il en reste une dans le réservoir, quelle confusion pour les nouvelles impressions électriques qui y seront ajoutées avant une nouvelle éjaculation ? Mais en supposant la semence du mâle déposée dans la matrice avec son empreinte entière, comment se conservera-t-elle cette empreinte dans le mélange des deux semences ? Si elles reçoivent encore de nouvelles impressions de l'irradiation électrique dans la matrice, à quoi serviront-elles ? qu'ajouteront-elles aux premières qui leur soit nécessaire ? Comment conçoit-on que la force plus ou moins grande avec laquelle elles sont produites, pouvant agir indistinctement sur tous les points de l'empreinte, puisse décider de la production particulière des organes de l'un ou de l'autre sexe ? La différence de cette organisation peut-elle dépendre du plus ou moins de force dans la puissance qui l'opère ?

Enfin, pour abréger et terminer d'une manière décisive les objections contre ce système singulier, il suffit de demander comment on peut se former l'idée de la formation de l'embryon, d'après des effets qui ne portent que sur la surface des matières à modifier pour cette formation, qui demande assurément, quelle que soit la puissance modifiante, des arrangements, des dispositions, des altérations intrinseques, pour qu'il en résulte une organisation ou un développement de parties déjà organisées.

Le jugement qu'on peut porter en général de ce système, c'est qu'il semble ajouter à l'obscurité de la matière qui en est l'objet, dans les ténèbres de laquelle se sont égarés de grands génies qui s'y sont plongés, pour tenter de les dissiper ; en sorte que l'auteur de l'idée de l'homme physique et moral, n'a fait que grossir le nombre de ceux qui ont éprouvé un pareil sort, comme feront vraisemblablement encore dans la suite bien d'autres, c'est-à-dire tous ceux qui entreront dans la même carrière.

En fait de recherches physiques, nous ne pouvons marcher et juger de ce qui nous environne, qu'en aveugles, quand nous sommes dénués des secours des sens, comme dans le cas où il est question de sonder la profondeur du mystère de la génération, dont la plupart des phénomènes ne sont que le résultat de différentes opérations, qui de leur nature se dérobent constamment à la lumière ; en sorte que de tous les faits qu'on a pu recueillir à cet égard d'après les expériences, les observations les plus nombreuses et faites avec le plus d'exactitude, il n'a pu résulter encore assez de connaissances pour qu'on puisse seulement déterminer en quoi consiste l'acte qu'on appelle la conception, et pour donner une définition précise de ce mot si ancien, dont il serait important pour l'histoire naturelle des animaux, et de l'homme surtout, de fixer le vrai sens : on a été borné jusqu'à présent à ne pouvoir en donner qu'une idée vague, et à dire avec Boerhaave, que c'est l'action par laquelle ce en quoi le mâle concourt à la reproduction des individus de son espèce, se joint à ce que la femelle fournit pour la même opération : de manière que la réunion de ces différents moyens se faisant dans le corps de la femelle, il en résulte la formation d'un ou de plusieurs des êtres organisés destinés à perpétuer le genre animal. Voilà toute l'idée qu'on a, et peut-être toute celle qu'il est possible d'avoir de la conception. Ce que la femelle éprouve de la part du mâle ; ce qu'il y a de passif dans les changements qui se font en elle dans l'acte principal efficace de la génération, est appelé la fécondation ; et ce qui s'opère de la part de la femelle dans cet acte, ou par une suite de cet acte, entant qu'elle retient ce que le mâle lui a communiqué d'effectif, est donc proprement la conception, , conceptio. Mais qu'est-ce que le mâle lui communique essentiellement ? en quoi contribuent-ils précisément l'un et l'autre à la génération ? ont-ils chacun quelque chose de prolifique à four nir ? quel est spécialement l'organe de la femelle où se fait la conception, la fécondation, &c ? Tous ces problèmes sont encore à résoudre, malgré tout ce qui a été écrit sur ce sujet, dont on n'a donné dans cet article, tout long qu'il est, qu'un très-petit abrégé, eu égard aux ouvrages immenses ou au-moins très-nombreux, qui ont été mis au jour sur cette matière ; ouvrages qui n'ont presque servi, et ne serviront encore que de monuments pour l'histoire des erreurs de l'esprit humain, et de preuves de l'obscurité dans laquelle le principe de la vie semble obstiné à rester enveloppé, pour se dérober aux regards des mortels, d'autant que sa connaissance ne leur serait d'aucune utilité. Voyez le recueil d'une bonne partie des systèmes sur la génération, et de ce qui y a rapport, dans la bibliothèque anatomique de Manget ; les œuvres fort détaillées de Schurigius, sur le même sujet ; la Physiologie de M. de Sénac, sur l'anatomie d'Heister ; les institutions médicales de Boerhaave, avec leur commentaire et les notes savantes de M. de Haller ; la Vénus physique ; l'Histoire naturelle, générale et particulière de M. de Buffon ; l'ouvrage intitulé Idée de l'homme physique et moral. C'est de la plupart de ces derniers ouvrages qu'a été extraite une bonne partie des matériaux de cet article. (d)

GENERATION, (maladies concernant la) Les lésions des fonctions qui servent à la génération dans l'espèce humaine, doivent être considérées par rapport à chacun des sexes.

Ainsi il peut y avoir, dans les hommes, excès ou défaut dans les dispositions et dans les conditions qui sont nécessaires pour la génération. Telles sont la séparation de la semence et sa préparation dans les testicules, l'érection du membre viril, l'éjaculation de la liqueur spermatique. Voyez TESTICULE, SEMENCE, VERGE, PRIAPISME, SATYRIASIS, IMPUISSANCE, FRIGIDITE.

A l'égard des femmes, les vices physiques dont elles sont susceptibles relativement à la génération, regardent principalement les dérèglements du flux menstruel, les défauts de conformation de la matrice et du vagin, le tempérament trop ou trop peu sensible. Voyez MENSTRUES, MATRICE, VAGIN, TEMPERAMENT, SALACITE, STERILITE, FLEURS-BLANCHES, FUREUR UTERINE, FAUX-GERME, MOLE, etc. (d)